CHEF
- Détails
- Écrit par : Denis Diderot (*)
CHEF D'ACCUSATION, c'est un des objets de la plainte. On compte autant de chefs d'accusation que la plainte contient d'objets ou de délits différents imputés à l'accusé.
CHEF d'un arrêt, sentence ou autre jugement, est une des parties du dispositif du jugement qui ordonne quelque chose que l'on peut considérer séparément du reste du dispositif. On dit ordinairement tot capita tot judicia, c'est-à-dire que chaque chef est considéré en particulier comme si c'était un jugement séparé des autres chefs ; de sorte que l'on peut exécuter un ou plusieurs chefs d'un jugement, et appeler des autres du même jugement, pourvu qu'en exécutant le jugement en certains chefs, on se soit réservé d'en appeler aux chefs qui font préjudice.
CHEF-CENS, est le premier et principal cens imposé par le seigneur direct et censier de l'héritage, lors de la première concession qu'il en a faite, et qui se paye en signe et reconnaissance de la directe seigneurie. On l'appelle chef-sens, quasi capitales census, pour les distinguer du sur-cens et des rentes seigneuriales qui ont été imposées en sus du cens, soit lors de la même concession, ou dans une nouvelle concession, lorsque l'héritage est rentré dans la main du seigneur.
Le chef-cens emporte lods et ventes ; au lieu que le sur-cens, ni les rentes seigneuriales, n'emportent point lods et ventes, lorsqu'il est dû un chef-cens, la directe seigneurie de l'héritage étant en ce cas attachée particulièrement au chef-cens.
La coutume de Paris, art. 357. en parlant du premier cens l'appelle chef-cens, et dit que pour tel cens il n'est besoin de s'opposer au decret ; et la raison est, que comme il n'y a point de terre sans seigneur, on n'est point présumé ignorer que l'héritage doit être chargé du cens ordinaire, qui est le chef-cens.
Dans tous les anciens titres et praticiens, le cens ordinaire n'est pas nommé autrement que chef-cens, capitalis census. Voyez in donat. belgic. lib. I. cap. XVIIIe Il est dit dans un titre de l'évêché de Paris de l'an 1306, chart. 2. fol. 99. et 100. sub retentione omnis capitalis census. La charte d'Enguerrand de Coucy, sur la paix de la Fere, et de l'an 1027, dit de fundo terrae et capitali. Dans plusieurs chartulaires, on trouve chevage pour chef-cens. Et à la fin des coutumes de Montdidier, Roye, et Peronne, on trouve aussi quevage, qui signifie la même chose, ce qui vient de quief ou kief, qui en idiome picard signifie seigneur censier. Voyez Brodeau, sur le tit. IIe de la coutume de Paris, n. 15.
CHEF DE CONTESTATION, se dit de ce qui fait un des objets de contestation.
CHEF, crime de lése-majesté au premier chef, est celui qui attaque la Majesté divine ; du second chef, c'est le crime de celui qui attente quelque chose contre la vie du Roi ; et au troisième chef, c'est lorsqu'on attente quelque chose contre l'état, comme une conspiration ; tel est aussi le crime de fausse monnaie. On distingue ces crimes par premier, second, et troisième chef, parce que les peines en sont réglées par différents chefs des règlements. L'ordonnance de 1670, tit. j. art. 11. a consacré ce terme, en disant que le crime de lése-majesté en tous ses chefs est un cas royal. Voyez la confér. de Guénais, dans ses notes sur le titre du crime de lése-majesté.
CHEF DE DEMANDE, signifie un des objets d'une demande déjà formée en justice, ou que l'on se propose de former. Chaque chef de demande fait ordinairement un article séparé dans les conclusions de l'explait ou de la requête ; cependant quelquefois les conclusions englobent à la fois plusieurs objets. Les affaires qu'on appelle de petits commissaires, sont celles où il y a trois chefs de demande ; et les affaires de grands commissaires, celles où il y a au moins six chefs de demande au fond.
CHEF DE L'EDIT, premier et second chef de l'édit ou de l'édit des présidiaux : on entend par-là les deux dispositions de l'édit du mois de Janvier 1551, portant création des présidiaux. Le premier chef de cet édit est que les présidiaux peuvent juger définitivement par jugement dernier et sans appel, jusqu'à la somme de 250 liv. pour une fois payer, et jusqu'à dix liv. de rente ou revenu annuel, et aux dépens à quelque somme qu'ils puissent monter. Le deuxième chef de l'édit est qu'ils peuvent juger par provision en baillant caution, jusqu'à 500 livres en principal, et jusqu'à 20 livres de rente ou revenu annuel, et aux dépens à quelque somme qu'ils puissent monter, et en ce dernier cas l'appel peut être interjeté en la cour ; desorte néanmoins qu'il n'a aucun effet suspensif, mais seulement dévolutif. On appelle une sentence au premier ou au second chef de l'édit, celle qui est dans le cas du premier ou second chef de l'édit. Voyez EDIT DES PRESIDIAUX, et l'article PRESIDIAUX.
On se sert aussi des termes de premier et second chef, pour exprimer les deux dispositions de l'édit des secondes nôces. Voyez EDIT DES SECONDES NOCES, et l'article SECONDES NOCES.
CHEF, (greffier en) voyez GREFFIER EN CHEF.
CHEF D'HOMMAGE, en Poitou, est la même chose que principal manoir ou chef-lieu, c'est-à-dire le lieu où les vassaux sont tenus d'aller porter la foi. Voyez la cout. de Poitou, art. 130 et 142. et Boucheul, ibid. Gloss. de Laurière, au mot chef.
CHEF D'HOSTIES ou HOSTISES, que l'on a dit aussi par corruption ostizes et ostiches, ne signifie pas un seigneur chef d'hôtel ou chef de sa maison, comme on le suppose dans le dictionnaire de Trévoux au mot chef ; il signifie seigneur censier ou foncier, du mot chef qui signifie seigneur, et d'hostises qui signifie habitation, tenement, terre tenue en censive. On en trouve plusieurs exemples dans les anciens titres et dans les anciens auteurs. Beaumanoir, chap. IIIe des contremants art. 26. dit que ostiches sont terres tenues en censive ; c'est aussi de-là qu'a été nommé le droit d'ostize ou hostize, dont il est parlé en l'art. 40. de la coutume de Blais : et c'est ainsi qu'on le trouve expliqué dans le traité du franc-aleu de Galland ch. VIe de l'origine des trois seigneuriaux, p. 86. et 87. et dans le gloss. de M. de Laurière, aux mots hostes et ostizes. Pontanus, art. 40. de la coutume de Blais, verbo ostiziae, p. 219. dit que c'est le devoir annuel d'une poule dû. par l'hôte ou le sujet au seigneur, pour son fouage et tenement ; car anciennement on comptait quelquefois le nombre de feux par hostes ou chefs de famille, hospites, et du terme hoste on a fait hostize. Dans le petit cartulaire de l'évêché de Paris, qui était ci-devant en la bibliothèque de MM. Dupuy, et est présentement en celle du Roi ; on trouve fol. 51, un titre de Odo évêque de Paris, de l'an 1199, qui porte : Terram nostram de Marnâ, in quâ nemus olim fuisse dignoscitur, ad hostisias dedimus et ad censum, tali modo quod qualibet hostisia habebit octo arpennos terrae cultibilis, et unum arpennum ad herbergagium faciendum ; de illo autem arpenno in quo erit herbergagium, reddetur annuatim nobis, vel episcopo parisiensi qui pro tempore fuerit, in nativitate beatae Mariae, unus sextarius avenae ; in festo sancti Remigii, sex denarii parisienses censuales ; et de singulis verò arpennis, in praedicto festo sancti Remigii, sex denarii censuales. Dans un autre titre du même Odo de l'an 1203, fol. 60. il est dit : Pro hostisiâ quae fuit Guillelmi de Moudon, etc. Voyez Brodeau sur Paris, tit. des censives, n. 8.
CHEF-LIEU, est le principal lieu d'une seigneurie où les vassaux sont obligés d'aller rendre la foi et hommage, et de porter leur aveu et dénombrement, et où les censitaires sont obligés d'aller porter les cens et passer déclaration. Le chef-lieu est ordinairement le château et principal manoir de la seigneurie : mais dans des endroits où il n'y a point de château, c'est quelquefois une ferme qui est le chef-lieu ; quelquefois c'est seulement une vieille tour ruinée : dans quelques seigneuries où il n'y a aucun château ni manoir, le chef-lieu est seulement une pièce de terre choisie à cet effet, sur laquelle les vassaux sont obligés de se transporter pour faire la foi et hommage. Le chef-lieu appartient à l'ainé par préciput, comme tenant lieu du château et principal manoir. Voyez AINESSE, PRECIPUT, PRINCIPAL MANOIR. Voyez l'auteur des notes sur Artais pp. 86. 353. 362. Dans la coutume du comté de Hainaut, la ville de Mons qui en est la capitale est appelée le chef-lieu. A Valenciennes, et dans quelques autres coutumes des Pays-bas, ce terme de chef-lieu se prend pour la banlieue. Voyez Doutreman, en son hist. de Valencien. part. II. ch. IVe p. 279. et 280. Enfin il signifie encore la principale maison d'un ordre régulier ou hospitalier, ou autre ordre composé de plusieurs maisons : par exemple, la commanderie magistrale de Boigny près Orléans, est le chef -lieu de l'ordre royal, militaire et hospitalier de S. Lazare.
CHEF-METS ou CHEF-MOIS, (Jurisprudence) en quelques coutumes, est le principal manoir de la succession, comme en Normandie. Voyez aussi la coutume de Surene, art. IIIe Voyez le mot MEX. (A)
CHEF du nom et armes, dans les familles nobles, est l'ainé ou descendant de l'ainé, qui a droit de porter les armes pleines, et de conserver les titres d'honneur qui concernent sa maison.
CHEF-D'ORDRE, est la principale maison d'un ordre régulier ou hospitalier, celle dont toutes les autres maisons du même ordre dépendent, et où se tient le chapitre général de l'ordre. Les abbayes chefs-d'ordre sont toutes régulières, telles que Clugny, Prémontré, Citeaux, etc. L'art. 3. de l'ordonnance de Blais veut qu'à l'égard des abbayes et monastères qui sont chefs-d'ordre, comme Cluny, Citeaux, Prémontré, Grammont, le Val-des-Ecoliers, S. Antoine de Viennais, la Trinité dite des Mathurins, le Val-des-Choux, et ceux auxquels le droit et privilège d'élection a été conservé, et semblablement ès abbayes de Pontigny, la Ferté, Clairvaux, et Morimont, qu'on appelle les quatre premières filles de Citeaux ; il y soit pourvu par élection des religieux profès desdits monastères, suivant la forme des saints decrets et constitutions canoniques. Voyez ci-devant au mot CHEF-LIEU, vers la fin.
CHEF-SEIGNEUR, (Jurisprudence) ce terme a différentes significations, selon les coutumes ; dans quelques-unes il signifie le seigneur suzerain ; dans d'autres il signifie tout seigneur féodal, soit suzerain ou simple seigneur censier ou foncier. Par l'art. 166. de la coutume de Normandie, le chef-seigneur est celui seulement qui possède par foi et par hommage, et qui à cause dudit fief tombe en garde ; et comme tout fief noble est tenu par foi et hommage, et tombe en garde, il s'ensuit que quiconque possède un fief noble est chef-seigneur, à l'exception des gens d'église, parce qu'ils ne tombent point en garde à cause de leurs fiefs nobles. Il suit aussi de cet article que tout chef-seigneur ne relève pas immédiatement du Roi, parce que cet article ne demande pas que le possesseur de fief tombe en garde royale, mais seulement en garde ; ce qui peut convenir à la garde seigneuriale comme à la garde royale. Voyez les coutumes de Ponthieu, art. 110. Anjou, 201. et suiv. Maine, 216. et suiv. Norman. anc. ch. XIVe xxxvj. Et liv. I. de l'établissem. pour les prevôtés de Paris et d'Orléans. Le grand coutum. liv. II. ch. xxvj. et liv. IV. ch. Ve Galland, du franc-aleu, p. 78. Gloss. de Laurière, au mot chef-seigneur.
CHEF DE SENS, se dit d'une ville principale qui est en droit de donner avis aux autres villes et lieux d'un ordre inférieur qui lui sont soumises : par exemple, la ville de Valenciennes est chef de sens de son territoire. Voyez les art. 145. et 146. de cette coutume.
CHEF d'une sentence, voyez ci-devant CHEF d'un arrêt, sentence, etc. (A)
CHEF D'ESCADRE, (Marine) c'est un officier général de la Marine qui commande une escadre ou une division dans une armée navale : son rang répond à celui de maréchal de camp sur terre, avec lequel il roule lorsqu'ils se trouvent ensemble. La marque distinctive du chef d'escadre à la mer, est la cornette qui lui sert de pavillon. Voyez CORNETTE.
Le chef d'escadre, en l'absence du lieutenant général de la Marine, fait les mêmes fonctions, soit à la mer soit dans les ports. Voyez à l'article LIEUTENANT GENERAL.
Les chefs d'escadre ont séance et voix délibérative dans le conseil de guerre, chacun suivant leur ancienneté.
Autrefois en France on divisait la marine du roi en six escadres, sous les titres de Poitou, de Normandie, de Picardie, de Provence, de Guienne, et de Languedoc ; mais cette division n'a plus lieu, et le nombre des chefs d'escadre n'est pas limité : actuellement il y en a quatorze en France. (Z)
CHEF D'ACADEMIE, (Manège) est un écuyer qui tient une académie, où il enseigne à monter à cheval. Voyez ACADEMIE. (V)
* CHEF, s. m. (Blason) se dit de la partie supérieure de l'écu, mais plus ordinairement d'une de ses parties honorables, celle qui se place au haut, et qui doit avoir le tiers de sa hauteur : elle peut être ou échiquetée, ou emmanchée, ou dentée, ou herminée, ou losangée, etc. Voyez ces mots.
Le chef est abaissé, quand la couleur du champ le détache du bord supérieur de l'écu, le surmonte et le retrécit ; surmonté, quand il est détaché par une autre couleur que celle du champ ; bandé, quand il a une bande ; chevronné, quand il a un chevron ; palé, quand il a un pal, etc. (Voyez BANDE, CHEVRON, PAL, &c.) ; cousu, quand il est de couleur ; retrait, quand il a perdu une partie de sa hauteur ; soutenu, quand il n'y a que les deux tiers de sa hauteur au-dessus de l'écu, et que le tiers inférieur est d'un autre émail. Voyez le Diction. de Trév.
* CHEF, couper en chef, expression usitée dans les carrières d'ardoise. Voyez l'article ARDOISE.
* CHEF, (Boulangerie) se dit du morceau de levain plus ou moins gros, selon le besoin qu'on prévait, pris sur celui de la dernière fournée, pour servir à la fournée suivante. Voyez PAIN.
* CHEF, (Coffret.) ce terme est, chez ces ouvriers, synonyme à brin ou à bout : ainsi quand il leur est ordonné de coudre les ourlets et trépointe des malles et autres semblables ouvrages à deux chefs de ficelle neuve et paissée, cela signifie à deux bouts ou à deux brins de ficelle, etc. Ainsi le chef n'est ni la ficelle simple, ni la double ficelle ; c'est un brin ou un bout de la ficelle double.
* CHEF, (Manufact. en soie, en laine, et en toile) c'est la première partie ourdie, celle qui s'enveloppe immédiatement sur l'ensuple de devant, et qui servira de manteau à la pièce entière quand elle sera finie. Le chef des pièces en toîle est plus gros que le reste ; celui des ouvrages en laine et en soie ne doit être ni plus mauvais ni meilleur, à moins que l'espèce d'étoffe qu'on travaille ne demande qu'on trame plus gros, afin d'avoir en commençant plus de corps, et de résister mieux à la première fatigue de l'ourdissage. Les pièces de toile, de laine, et de soie, s'entament par la queue, et le chef est toujours le dernier morceau que l'on vend. La raison en est simple ; c'est que c'est au chef que sont placées les marques, qui indiquant le fabriquant, la qualité de la marchandise, celle de la teinture, la visite des gardes et inspecteurs, l'aulnage, etc. ne doivent jamais disparaitre.
* CHEF, (Economie rustique) terme synonyme à pièce ; ainsi on dit cent chefs de volaille, pour dire cent pièces de volaille. Il s'applique aussi aux bêtes à cornes et à laine, quand on fait le dénombrement de ce qu'on en a, ou de ce qu'on en vend ; cent chefs de bêtes à cornes, cent chefs de bêtes à laine. Le mot chef ne s'emploie cependant guère que quand la collection est un peu considérable, et l'on ne dira jamais deux chefs de bêtes à cornes.
CHEF, terme de rivière ; c'est ainsi qu'on appelle la partie du devant d'un bateau foncet.
* CHEF-D'OEUVRE, (Arts et Mét.) c'est un des ouvrages les plus difficiles de la profession, qu'on propose à exécuter à celui qui se présente à un corps de communauté pour en être reçu membre, après avoir subi les temps prescrits de compagnonage et d'apprentissage par les règlements de la communauté. Chaque corps de communauté a son chef-d'œuvre ; il se fait en présence des doyens, syndics, anciens, et autres officiers et dignitaires de la communauté ; il se présente à la communauté, qui l'examine ; il est déposé. Il y a des communautés où l'on donne le choix entre plusieurs chefs-d'œuvre à l'aspirant à la maitrise ; il y en a d'autres où l'on exige plusieurs chefs-d'œuvre. Voyez dans les règlements de ces communautés, ce qui se pratique à la réception des maîtres. Le chef-d'œuvre de l'Architecture est une pièce de trait, telle qu'une descente biaise par tête et en talud qui rachette un berceau. Celui des Charpentiers, est la courbe rampante d'un escalier. Celui des ouvriers en soie, soit pour être reçus compagnons, soit pour être reçus maîtres, est la restitution du métier dans l'état qui convient au travail, après que les maîtres et syndics y ont apporté tel dérangement qu'il leur a plu, comme de détacher des cordages, casser des fils de chaîne par courses interrompues. On ne voit guère quelle peut être l'utilité des chefs-d'œuvre. Si celui qui se présente à la maitrise sait très-bien son métier, il est inutîle de l'examiner ; s'il ne le sait pas, cela ne doit pas l'empêcher d'être reçu, il ne fera tort qu'à lui-même ; bien-tôt il sera connu pour mauvais ouvrier, et forcé de cesser un travail où ne réussissant pas, il est nécessaire qu'il se ruine. Pour être convaincu de la vérité de ces observations, il n'y a qu'à savoir un peu comment les choses se passent aux réceptions. Un homme ne se présente point à la maitrise qu'il n'ait passé par les préliminaires ; il est impossible qu'il n'ait appris quelque chose de son métier pendant les quatre à cinq ans que durent ces préliminaires. S'il est fils de maître, assez ordinairement il est dispensé de chef-d'œuvre ; s'il ne l'est pas, fût-il le plus habîle ouvrier d'une ville, il a bien de la peine à faire un chef-d'œuvre qui soit agréé de la communauté, quand il est odieux à cette communauté ; s'il est agréable au contraire, ou qu'il ait de l'argent, fût-il le plus ignorant de tous les ouvriers, il corrompra ceux qui doivent veiller sur lui tandis qu'il fait son chef-d'œuvre ; ou il exécutera un mauvais ouvrage qu'on recevra comme un chef-d'œuvre ; ou il en présentera un excellent qu'il n'aura pas fait. On voit que toutes ces manœuvres anéantissent absolument les avantages qu'on prétend retirer des chefs-d'œuvre et des communautés, et que les corps de communauté et de manufacture n'en subsistent pas moins.