LE FLEUVE : Sabbaticus fluvius, (Géographie ancienne) rivière que quelques auteurs mettent dans la Palestine, et dont d'autres écrivains nient l'existence ; le P. Calmet a traité au long ce sujet.
Josephe, l. VII. c. XIIIe parle ainsi de cette rivière. Ce prince, dit-il, (Titus) rencontra en son chemin une rivière qui mérite bien que nous en parlions ; elle passe entre les villes d'Arcé et de Raphanée, qui sont du royaume d'Agrippa, et elle a quelque chose de merveilleux, car après avoir coulé six jours en grande abondance, et d'un cours assez rapide, elle se seche tout d'un coup, et recommence le lendemain à couler durant six autres jours comme auparavant, et à se sécher le septième jour, sans jamais changer cet ordre, ce qui lui a fait donner le nom de Sabbatique, parce qu'il semble qu'elle fête le septième jour, comme les juifs fêtent celui du sabbat. Telle est la traduction de ce fameux passage de Josephe, par M. Arnaud d'Andilli, homme très-versé dans la langue grecque, et aidé dans ce travail par de très-habiles gens de sa famille.
D. Calmet, sur ce même passage, nous donne de cette rivière une idée bien différente. Selon lui, Josephe dit que Titus allant en Syrie, vit entre la ville d'Arcé, qui était du royaume d'Agrippa, et la ville de Raphanée en Syrie, le fleuve nommé Sabbatique, qui tombe du Liban dans la mer Méditerranée. Ce fleuve, ajoute-t-il, ne coule que le jour du sabbat, ou plutôt au bout de sept jours ; tout le reste du temps son lit demeure à sec ; mais le septième jour il coule avec abondance dans la mer. De-là vient que les habitants du pays lui ont donné le nom de fleuve Sabbatique.
Pline a voulu apparemment parler du même fleuve, lorsqu'il dit, l. XXXI. c. IIe qu'il y a un ruisseau dans la Judée, qui demeure à sec pendant tous les septiemes jours ; in Judaea rivus omnibus sabbathis siccatur, Voilà certainement Pline d'accord avec la traduction de M. d'Andilli ; cependant D. Calmet a raison, le texte grec de Josephe, porte que ce fleuve ne coule que le samedi ; et comme les savants ont Ve que Pline, et la notion que l'on doit avoir du repos du sabbat, conduisent naturellement à dire que ce fleuve coulait six jours, et cessait le septième jour ; ils ont tâché de concilier cette idée avec les paroles de Josephe, en les transposant, et lui ayant fait dire le contraire de ce qu'on y lisait ; et c'est sur ce changement que M. d'Andilli a travaillé. Il semble en effet, que la rivière Sabbatique ne marquerait pas bien le repos du sabbat, si elle ne coulait que ce jour là ; pour bien faire, observe D. Calmet, elle devait cesser de couler pour imiter le repos des Juifs.
Mais une autre remarque plus importante, c'est que Josephe est le seul et premier auteur du fleuve Sabbatique, qui vraisemblablement n'a jamais existé ; du moins on n'en connait point aujourd'hui, et aucun voyageur ni géographe n'en a jamais fait mention : car pour Pline, il est évident qu'il a tiré de Josephe ce qu'il en dit, et même selon les apparences, il n'en croyait rien. (D.J.)