S. f. (Mythologie) monstres fameux dans la fable, et que les Poètes représentent avec un visage de fille, des oreilles d'ours, un corps de vautour, des ailes aux côtés des pieds, et des mains armées de griffes longues et crochues. Virgile ne nomme que Celeno ; mais Hésiode en compte trois, Iris, Ocypeté et Aèllo. On disait qu'elles causaient la famine par-tout où elles passaient, enlevant les viandes jusque sur les tables, infectant tout par leur mauvaise odeur : c'est ainsi qu'elles persécutèrent Phinée, roi de Thrace, qui n'en fut délivré que par la valeur de Zethus et de Calaïs, deux des Argonautes, qui étant fils de Borée et ayant des ailes comme leur père, donnèrent la chasse à ces monstres jusqu'aux îles Strophades, où les harpies firent ensuite leur demeure ; c'est-là, selon Virgile, qu'elles vinrent fondre sur les tables des compagnons d'Enée. Les auteurs qui ont voulu ramener ces fictions à un sens historique, conjecturent que ce qu'on nomma harpies étaient des corsaires dont les incursions troublaient le commerce et la navigation des états voisins, et y causaient quelquefois la famine. D'autres prétendent que ces harpies n'étaient autre chose que des sauterelles qui ravageaient des contrées entières ; que le mot grec est dérivé de l'hébreu arbeh, locusta, sauterelle ; que Celeno, nom de la principale des harpies, signifie en syriaque sauterelle ; et qu'Acholoè, nom d'une autre d'où Hésiode a fait Aèllo, vient d'achal, manger, parce que les sauterelles dévorent toute la verdure ; qu'elles furent chassées par les fils de Borée, c'est-à-dire par les vents septentrionaux qui balaient en effet ces nuées de sauterelles ; et enfin que ces insectes causent la famine, la peste, et inquietent par-là les souverains mêmes jusque dans leurs palais ; caractères qui conviennent aux harpies qui desolaient le roi de Thrace. L'auteur de l'histoire du ciel, sans s'éloigner absolument de cette dernière opinion, y prête une nouvelle face. " Les trois lunes d'Avril, de Mai, et de Juin, dit-il, surtout les deux dernières, étant sujettes à des vents orageux qui renversaient quelquefois les plants d'oliviers, et à amener du fond de l'Afrique et des bords de la mer Rouge des sauterelles et des hannetons qui ravageaient et salissaient tout, les anciens Egyptiens donnèrent aux trois Isis qui annonçaient ces trois lunes, un visage féminin avec un corps et des serres d'oiseaux carnaciers ; les oiseaux étant la clé ordinaire de la signification des vents, et le nom de harpies qu'ils donnaient à ces vents signifiait les sauterelles, ou les insectes rongeurs que ces vents faisaient éclore ". Il n'a fallu aux Poètes que de l'imagination, pour transformer des sauterelles en monstres ; mais il faut bien de la sagacité pour réduire des monstres en sauterelles. (G)