S. f. (Logique) on peut se former diverses notions du mot raison. 1°. On peut entendre simplement et sans restriction cette faculté naturelle dont Dieu a pourvu les hommes, pour connaître la vérité, quelque lumière qu'elle suive, et à quelque ordre de matières qu'elle s'applique.
2°. On peut entendre par raison cette même faculté considérée, non absolument, mais uniquement en tant qu'elle se conduit dans ses recherches par certaines notions, que nous apportons en naissant, et qui sont communes à tous les hommes du monde. D'autres n'admettent point ces notions, entendent par la lumière naturelle, l'évidence des objets qui frappent l'esprit, et qui lui enlèvent son consentement.
3°. On entend quelquefois par la raison, cette lumière naturelle même, par laquelle la faculté que nous désignons par ce même nom, se conduit. C'est ainsi qu'on l'entend ordinairement, lorsqu'on parle d'une preuve, ou d'une objection prise de la raison, qu'on veut distinguer par-là des preuves et des objections prises de l'autorité divine ou humaine. Au contraire, on entend cette faculté que nous appelons raison, lorsqu'on dit que cette raison se trompe, ou qu'elle est sujette à se tromper, qu'elle est aveugle, qu'elle est dépravée ; car il est visible que cela convient fort bien à la faculté, et nullement à la lumière naturelle.
4°. Par raison on peut aussi entendre l'enchainement des vérités auxquelles l'esprit humain peut atteindre naturellement, sans être aidé des lumières de la foi. Les vérités de la raison sont de deux sortes ; les unes sont ce qu'on appelle les vérités éternelles, qui sont absolument nécessaires ; en sorte que l'opposé implique contradiction ; et telles sont les vérités dont la nécessité est logique, métaphysique ou géométrique, qu'on ne saurait renverser sans être mené à des absurdités. Il y en a d'autres qu'on peut appeler positives, parce qu'elles sont les lois qu'il a plu à Dieu de donner à la nature, ou parce qu'elles en dépendent. Nous les apprenons ou par l'expérience, c'est-à-dire à posteriori, ou par la raison, et à priori, c'est-à-dire par des considérations tirées de la convenance, qui les ont fait choisir. Cette convenance a aussi ses règles et ses raisons ; mais c'est le choix libre de Dieu, et non pas une nécessité géométrique qui fait préférer le convenable. Ainsi on peut dire que la nécessité physique est fondée sur la nécessité morale, c'est-à-dire sur le choix du sage, digne de sa sagesse, et que l'une aussi bien que l'autre doit être distinguée de la nécessité géométrique. Cette nécessité physique est ce qui fait l'ordre de la nature, et consiste dans les règles du mouvement et dans quelques autres lois générales, que Dieu a établies en créant cet univers. Les lois de la nature sont toujours sujettes à la dispensation du législateur, qui peut, quand il lui plait, les arrêter et les suspendre ; au lieu que les vérités éternelles, comme celles de la Géométrie, ne sont assujetties à aucune loi arbitraire. Or c'est à ces dernières vérités que la foi ne saurait jamais être contraire. La vérité ne peut jamais être attaquée par une objection invincible ; car si c'est une démonstration fondée sur des principes ou sur des faits incontestables, formée par un enchainement de vérités éternelles, la conclusion est certaine et indispensable ; et ce qui y est opposé doit être nécessairement faux, autrement deux contradictoires pourraient être vraies en même temps. Que si l'objection n'est point démonstrative, elle ne peut former qu'un argument vraisemblable, qui n'a point de force contre la foi, puisqu'on convient que les mystères de la religion sont contraires aux apparences. Voyez l'article MYSTERES, où l'on prouve contre Bayle la conformité de la foi avec la raison prise pour cet enchainement de vérités éternelles, qui sont absolument nécessaires. Il faut maintenant marquer les bornes précises qui se trouvent entre la foi et la raison.
1°. Nulle proposition ne peut être reçue pour révélation divine, si elle est contradictoirement opposée à ce qui nous est connu, ou par une intuition immédiate, telles que sont les propositions évidentes par elles-mêmes, ou par des déductions évidentes de la raison, comme dans les démonstrations ; parce que l'évidence qui nous fait adopter de telles révélations ne pouvant surpasser la certitude de nos connaissances, tant intuitives que démonstratives, si tant est qu'elle puisse l'égaler, il serait ridicule de lui donner la préférence ; et parce que ce serait renverser les principes et les fondements de toute connaissance et de tout assentiment : de sorte qu'il ne resterait plus aucune marque caractéristique de la vérité et de la fausseté, nulles mesures du croyable et de l'incroyable, si des propositions douteuses de voient prendre la place devant des propositions évidentes par elles-mêmes. Il est donc inutîle de presser comme articles de foi des propositions contraires à la perception claire que nous avons de la convenance ou de la disconvenance de nos idées. Par conséquent, dans toutes les choses dont nous avons une idée nette et distincte, la raison est le vrai juge compétent ; et quoique la révélation en s'accordant avec elle puisse confirmer ces décisions, elle ne saurait pourtant dans de tels cas invalider ses decrets ; et par-tout où nous avons une décision claire et évidente de la raison, nous ne pouvons être obligés d'y renoncer pour embrasser l'opinion contraire, sous prétexte que c'est une matière de foi. La raison de cela, c'est que nous sommes hommes avant que d'être chrétiens.
2°. Comme Dieu, en nous accordant la lumière de la raison, ne s'est pas ôté la liberté de nous donner, lorsqu'il le juge à propos, le secours de la révélation sur des matières où nos facultés naturelles ne sauraient atteindre ; dans ce cas, lorsqu'il a plu à Dieu de nous fournir ce secours extraordinaire, la révélation doit l'emporter sur toutes les résistances de notre raison ; ces résistances n'étant ici fondées que sur des conjectures probables ; parce que l'esprit n'étant pas certain de la vérité de ce qu'il ne connait pas évidemment, mais se laissant seulement entraîner à la probabilité, il est obligé de donner son assentiment à un témoignage qu'il sait venir de celui qui ne peut tromper ni être trompé. Lorsque les principes de la raison ne nous font pas voir évidemment qu'une proposition est vraie ou fausse, dans ce cas la révélation manifeste a lieu de déterminer l'esprit, comme étant un autre principe de vérité : et ainsi la proposition appuyée de la révélation devient matière de foi, et au-dessus de la raison. La raison ne pouvant s'élever au-dessus de la probabilité, la foi a déterminé l'esprit où la raison est venue à manquer.
Jusques-là s'étend l'empire de la foi ; et cela sans faire aucune violence à la raison, qui n'est point blessée ou troublée, mais assistée et perfectionnée par de nouvelles lumières émanées de la source éternelle de toute connaissance. Tout ce qui est du ressort de la révélation doit prévaloir sur nos opinions, sur nos préjugés et sur nos intérêts, et est en droit d'exiger de l'esprit un parfait assentiment. Mais une telle soumission de notre raison à la foi ne renverse pas pour cela les limites de la connaissance humaine, et n'ébranle pas les fondements de la raison ; elle nous laisse la liberté d'employer nos facultés à l'usage pour lequel elles nous ont été données.
Si l'on n'a pas soin de distinguer les différentes juridictions de la foi et de la raison par le moyen de ces bornes, la raison n'aura point de lieu en matière de religion ; et l'on n'aura aucun droit de se moquer des opinions et des cérémonies extravagantes qu'on remarque dans la plupart des religions du monde. Qui ne voit que c'est là ouvrir un vaste champ au fanatisme le plus outré, aux superstitions les plus insensées ! Avec un pareil principe, il n'y a rien de si absurde qu'on ne croie. Par-là il arrive que la religion, qui est l'honneur de l'humanité, et la prérogative la plus excellente de notre nature sur les bêtes, est souvent la chose du monde en quoi les hommes paraissent les plus déraisonnables.
RAISON, (os de) en Anatomie, est l'os du devant de la tête, autrement appelé coronal. Voyez CORONAL.
RAISON, en terme d'Arithmétique et de Géométrie, est le résultat de la comparaison que l'on fait entre deux grandeurs homogènes, soit en déterminant l'excès de l'une sur l'autre, ou combien de fois l'une contient l'autre, ou y est contenue. Voyez RAPPORT.
Les choses homogènes ainsi comparées, s'appellent les termes de la raison ou du rapport ; la chose que l'on compare se nomme l'antécédent, et celle à laquelle on la compare, le conséquent. Voyez TERME.
On confond souvent le mot de raison avec celui de proportion, quoiqu'ils soient tout à fait différents l'un de l'autre. En effet, la proportion est une identité ou similitude de deux raisons. Voyez PROPORTION.
Par exemple, si la quantité A est triple de la quantité B, le rapport de A à B, c'est-à-dire de 3 à 1, est appelé la raison de A à B. Si deux autres quantités C et D ont la même raison l'une à l'autre que A et B ont entr'elles, c'est-à-dire que l'une soit le triple de l'autre, cette similitude de raisons constitue une proportion, et les quatre quantités A : B : : C : D sont en proportion ou proportionnelles.
La raison peut donc exister entre deux termes, mais il en faut un plus grand nombre pour former une proportion. Il y a deux manières de comparer les grandeurs entr'elles : on trouve par la première de combien elles diffèrent entr'elles, c'est-à-dire de combien d'unités l'antécédent est plus grand ou plus petit que le conséquent.
Cette différence est appelée raison arithmétique, ou exposant du rapport arithmétique de deux nombres.
Ainsi, en comparant 5 et 7, on trouve que leur raison arithmétique est 2.
On trouve, en employant la seconde manière de comparer, combien de fois l'antécédent contient ou est contenu dans le conséquent, c'est-à-dire quelle partie de la plus grande est égale à la plus petite.
Cette raison s'appelle pour l'ordinaire raison géométrique, ou simplement raison.
Wolf distingue la raison, eu égard à la quantité en général, en rationnelle et irrationnelle.
Raison rationnelle est celle de nombre à nombre, par exemple, comme 3 à 4. Voyez NOMBRE.
Raison irrationnelle est celle qu'on ne peut exprimer par aucun nombre rationnel.
Supposons, pour éclaircir la chose par un exemple, deux quantités A et B, dont A soit la plus petite ; si l'on retranche A de B autant de fois qu'elle le peut être, par exemple, cinq fais, il ne restera rien, ou bien il restera quelque chose. Dans le premier cas, A sera à B comme 1 à 5, c'est-à-dire, sera contenu cinq fois dans B ou A = 1/5 B ; cette raison sera donc rationnelle.
Dans le dernier cas, ou il restera quelques parties qui étant retranchées un certain nombre de fois de A, par exemple, trois fais, et pareillement de B, par exemple, sept fais, ne laissera aucun reste ; ou bien il ne restera aucune partie de cette espèce. Dans le premier cas A est à B comme 3 à 7, ou A = 3/7 B, et la raison sera rationnelle. Dans le dernier cas, la raison de A à B ne peut être exprimée par des nombres rationnels, ni d'aucune autre manière, excepté par des lignes ou par une série infinie. Voyez SERIE.
L'exposant d'une raison géométrique est le quotient qui nait de la division de l'antécédent par le conséquent ; l'exposant de la raison de 3 à 2 est 1/2 ; celui de la raison de 2 à 3 est 2/3 : car lorsque le moindre terme est l'antécédent, la raison, ou plutôt l'exposant est une fraction impropre ; d'où il suit que la fraction 3/4 = 3 : 4. Si l'unité tient lieu de conséquent, l'antécédent lui-même sera l'exposant de la raison : par exemple, la raison de 4 à 1 est 4. Voyez EXPOSANT.
Lorsque l'on compare deux quantités sans l'intervention d'une troisième, ou l'une est égale à l'autre, ou inégale ; ce qui constitue une raison d'égalité ou d'inégalité.
Lorsque les termes de la raison sont inégaux, ou l'on compare le plus petit au plus grand, ou celui-ci au moindre, c'est-à-dire ou le moindre au plus grand, comme une partie à son tout, ou le plus grand au plus petit, comme le tout à sa partie. La raison détermine donc combien de fois le plus petit est contenu dans le plus grand, ou combien celui-ci contient le plus petit, c'est-à-dire à quelle partie du grand le petit est égal.
La raison que le plus grand terme a au plus petit, par exemple, 6 à 3, est appelée raison de plus grande inégalité ; et celle que le plus petit terme a au plus grand, par exemple, 3 à 6, est appelée raison de moindre inégalité.
Cette raison correspond à toutes sortes de quantités en général, soit discrettes ou continues, commensurables ou incommensurables ; mais la quantité discrette ou continue admet une autre espèce de raison.
Lorsque le moindre terme d'une raison est une partie aliquote du plus grand, la raison de plus grande inégalité s'appelle multiple, multiplex, et la raison de moindre inégalité, sous-multiple. Voyez MULTIPLE.
Dans le premier cas particulièrement, si l'exposant est 2, la raison s'appelle double ; triple, si c'est 3, etc. Dans le second cas, si l'exposant est 1/2, la raison est appelée sous-double ; si c'est 1/3, sous-triple, etc. Par exemple, la raison de 6 à 2 est triple, à cause qu'elle contient 2 trois fois : celle au contraire de 2 à 6 est sous-triple, à cause que 2 est le tiers de 6.
Si le plus grand terme contient le plus petit une ou plusieurs fais, plus une ou plusieurs parties, la raison de plus grande ou de moindre inégalité reçoit encore différents noms. Nous allons les donner ici, quoique la plupart soient aujourd'hui peu en usage, mais ces noms pourront être utiles à ceux qui lisent les anciens auteurs.
Dans le premier cas, si l'exposant est 1 1/2, la raison est sesquialtère ; si 3 1/3, sesquitierce. Dans l'autre, si l'exposant est 2/3, la raison est appelée sous-sesquialtère ; si 3/4, sous-sesquitierce.
Par exemple, 3 est à 2 en raison sesquialtère, et 2 à 3 en raison sous-sesquialtère.
Lorsque le plus grand terme contient le plus petit une fais, et outre cela plus d'une de ses parties, la raison de plus grande inégalité s'appelle surpartiente, et celle de moindre inégalité sous-surpartiente.
Si l'exposant est 1 2/3, la raison s'appelle surbipartiente tierce ; si 1 3/4, surtripartiente quarte ; si 1 4/7, surquadripartiente septième, etc. Dans le dernier cas, si l'exposant est 3/5, la raison s'appelle sous-surbipartiente tierce ; si 4/7, sous-surbipartiente quarte ; si etc. Voyez EUCLIDE.
Par exemple, la raison de 5 à 3 est surbipartiente tierce ; celle de 3 à 5 sous-surbipartiente tierce.
Lorsque le plus grand terme contient le plus petit plusieurs fais, et plus d'une de ses parties, la raison de plus grande inégalité s'appelle multiple surparticulière ; et celle de moindre inégalité, sous-multiple, sous-surparticulière.
Particulièrement dans le premier cas, si l'exposant est 2 1/2, la raison est appelée double sesquialtère ; si 3 1/4 triple sesquiquarte, etc. Dans le dernier, la raison est appelée sous-double, sous sesquialtère, si l'exposant est 2/5, et sous-triple sous-sesquiquarte, s'il est 1/12, etc.
Par exemple, la raison de 16 à 5 est triple sesquiquinte ; celle de 4 à 9, sous-double sous-sesquiquarte.
Enfin, lorsque le plus grand terme contient le plus petit plusieurs fais, et de plus, plusieurs de ses parties aliquotes, la raison de plus grande inégalité est appelée multiple surpartiente ; celle de moindre inégalité, sous-multiple sous surpartiente.
Dans le premier cas, par exemple, si l'exposant est 2 2/3, la raison est appelée double surbipartiente tierce ; si 3 4/7, triple surbiquadripartiente septième, etc. Dans le dernier cas, si l'exposant est 3/8, on l'appelle sous double sous surquadripartiente tierce ; si 7/25, sous triple sous-surquadripartiente septième.
Par exemple, la raison de 25 à 7 est triple surquadripartiente septième ; celle de 3 à 8, sous-double sous-surbipartiente tierce.
Telles sont les diverses espèces de raisons rationnelles, dont le nom est absolument nécessaire à ceux qui lisent les anciens auteurs, quoiqu'elles se rencontrent rarement dans les auteurs modernes, qui les expriment par les exposans de la raison, par exemple, par 2 : 1 : si la raison est double ; par 3 : 2 si elle est sesquialtère.
Les raisons égales ou identiques sont celles dont les antécédents ont un rapport égal avec leurs conséquents, c'est-à-dire dont les antécédents divisés par les conséquents, donnent des exposans égaux. On peut concevoir par-là l'identité des raisons irrationnelles.
D'où il suit, 1°. que deux raisons étant égales, l'antécédent de l'une doit contenir autant de fois son conséquent que l'antécédent de l'autre contient le sien. Secondement, si A est à B comme C est à D, cela s'exprime ainsi : A : B : : C : D ; ou A : B = C : D. La première expression est celle dont on se sert pour l'ordinaire pour exprimer l'identité des raisons ; l'autre est celle de Wolf, qui a cet avantage sur la première, que le caractère du milieu = exprime l'égalité des raisons.
Nous avons déjà observé que deux raisons égales, par exemple B : C = D : E, forment une proportion ; si l'on a deux raisons inégales, par exemple A : B et C : D, nous appellerons A : B la plus grande, et nous écrirons A : B > C : D ; au contraire nous appellerons C : D la moindre, et nous écrirons C : D < A : B.
Les raisons composées sont celles qui sont faites par la multiplication de deux ou plusieurs raisons multipliées les unes par les autres, c'est-à-dire par le produit des antécédents et des conséquents. Par exemple, la raison de 6 à 72 est une raison composée de 2 à 6, et de 3 à 12, c'est-à-dire formée du produit des antécédents 2 et 3, et des conséquents 6 et 12.
Une raison composée de deux raisons égales, s'appelle doublée ; triplée, quand elle est composée de trois ; quadruplée, quand elle l'est de quatre ; et en général multipliée, quand elle est composée de plusieurs raisons semblables : par exemple, 48 : 3 est une raison doublée de 4 : 1 et 12 : 3. Voyez DOUBLEE, etc.
Propriétés des raisons. 1°. Les raisons égales à une troisième, sont égales entr'elles.
2°. Si A : B = C : D, alors en raison inverse B : A = D : C.
3°. Les parties semblables P et p ont même raison aux touts T et t ; et si les touts ont la même raison que leurs parties, les parties sont semblables.
4°. Si A : B = C : D, pour lors en raison alterne A : C = B : D. D'où il suit que si B = D : A = C, et A : B = C : D, et A : F = C : G, nous aurons B : F = D : G. Donc encore si A : B = C : D ; et F : A = G : C, nous aurons F : B = G : D.
5°. Les choses qui ont même raison à une troisième, sont égales entr'elles, et vice versâ.
6°. Si l'on multiplie des quantités égales A et B par les mêmes quantités, ou par des quantités égales, les produits D et E seront l'un à l'autre comme A et B.
7°. Si l'on divise telle quantité que l'on voudra, comme A et B par les mêmes quantités, ou par des quantités égales, les quotiens seront l'un à l'autre comme A et B.
8°. Si l'on divise les antécédents ou les conséquents des raisons égales A : B et C : D par la même quantité E ; dans le premier cas les quotiens F et G auront même raison aux conséquents B et D ; dans le second les antécédents A et B auront même raison aux quotiens H et K.
9°. Si l'on a plusieurs quantités en raison continue A, B, C, D, E, etc. la première A sera à la troisième C en raison doublée ; à la quatrième D en raison triplée ; à la cinquième E en raison quadruplée, etc. de la raison de la première A à la seconde B.
10°. Si l'on a une suite de quantités en même raison, A, B, C, D, E, F, etc. la raison de la première A à la dernière F, sera composée des raisons intermédiaires A : B, B : C, C : D, D : E, E : F, &c.
11°. Les raisons composées de raisons égales, sont égales. Ainsi les raisons 90 : 3 = 960 : 32, sont composées de 6 : 3 = 4 : 2, et 3 : 1 = 12 : 4, et 5 : 1 = 20 : 4. Pour les autres propriétés des raisons égales, voyez PROPORTIONS. Voyez aussi EXPOSANT. (E)
Moyenne et extrême raison, voyez EXTREME.
RAISON INVERSE, ou RENVERSEE, ou RECIPROQUE ; on dit que deux choses sont en raison inverse de deux autres, lorsque la première est à la seconde, comme la quatrième est à la troisième. Par exemple, quand on dit que la gravitation est en raison inverse du carré des distances, cela veut dire que la gravitation à la distance A, est à la gravitation à la distance B, comme le carré de la distance B est au carré de la distance A. Voyez GRAVITATION, et voyez aussi INVERSE, etc.
RAISON D'ETAT, (Droit politique) Quelques auteurs ont cru qu'il y avait des occasions dans lesquelles les souverains étaient autorisés à se départir des lois sévères de la probité, et qu'alors le bien de l'état qu'ils gouvernent, leur permettait des actions injustes à l'égard des autres états, et que l'avantage de leur peuple justifiait l'irrégularité de leurs actions. Ces injustices, autorisées par la raison d'état, sont d'envahir le territoire d'un voisin, dont les dispositions sont suspectes, de se rendre maître de sa personne, enfin de le priver des avantages dont il a droit de jouir, sans motif avoué, ou sans déclaration de guerre. Ceux qui maintiennent un sentiment si étrange, le fondent sur le principe que les souverains, devant chercher tout ce qui peut rendre heureux et tranquilles les peuples qui leur sont soumis, ils sont en droit d'employer tous les moyens qui tendent à un but si salutaire. Quelque spécieux que soit ce motif, il est très-important pour le bonheur du monde, de le renfermer dans de justes bornes ; il est certain qu'un souverain doit chercher tout ce qui tend au bien-être de la société qu'il gouverne ; mais il ne faut point que ce soit aux dépens des autres peuples. Les nations ont, ainsi que les particuliers, des droits réciproques ; sans cela tous les souverains, ayant les mêmes droits, et se prétendant animés par les mêmes motifs, seraient dans un état de défiance et de guerre continuelle. Concluons donc que les représentants des peuples ne peuvent, non plus que les individus de la société, s'exempter des lois de l'honneur et de la probité ; ce serait ouvrir la porte à un désordre universel, que d'établir une maxime qui détruirait les liens des nations, et qui exposerait les plus faibles aux oppressions des plus forts ; injustices qui ne peuvent être permises, sous quelque nom que l'on cherche à les déguiser.
Une autre question est de savoir, si la raison d'état autorise le souverain à faire souffrir quelque dommage à un particulier, lorsqu'il s'agit du bien de l'état : elle sera facîle à résoudre, si l'on fait attention qu'en formant la société, l'intention et la volonté de chaque individu a dû être de sacrifier ses propres intérêts à ceux de tous, sans cela la société ne pourrait point subsister. Il est certain que le tout est préférable à sa partie ; cependant dans ces occasions, toujours fâcheuses, le souverain se souviendra qu'il doit une justice à tous ses sujets, dont il est également le père ; il ne donnera point pour des raisons d'état, des motifs frivoles ou corrompus qui l'engageraient à satisfaire ses passions personnelles ou celles de ses favoris ; mais il gémira de la nécessité qui l'oblige de sacrifier quelques-uns des membres pour le salut réel de toute la société.
RAISON SUFFISANTE, Voyez l'article SUFFISANT.
RAISON, (Jurisprudence) signifie quelquefois un droit qui appartient à quelqu'un, comme quand on dit, noms, raisons et actions : quelquefois raison est pris pour justice ; comme quand on dit, demander raison, faire raison. Souvent raison est pris pour compte, c'est en ce sens que les marchands appellent livres de raison, ceux qui contiennent l'état de tout leur commerce, tant pour eux que pour leurs associés. Voyez ACTION, COMPTE, DROIT, JOURNAUX, LIVRES, MARCHAND, OBLIGATION. (A)
RAISON, (Commerce) se dit du compte qu'un officier inférieur est obligé de rendre à celui à qui il est subordonné. Ainsi l'on dit qu'un tel officier à été mandé pour rendre raison de sa conduite. Voyez VENIAT.
RAISON, en termes de teneurs de livres. On nomme livre de raison, un gros registre sur lequel on forme tous les comptes en débit et en crédit, dont on trouve les sujets, c'est-à-dire les articles sur le livre journal. On l'appelle livre de raison, parce qu'il sert à un marchand à se rendre raison à soi-même et à ses associés de l'état de son commerce. Voyez LIVRES.
Raison signifie aussi la part d'un associé dans le fonds d'une société. On dit ma raison est du quart, du sixième, d'un douzième, etc.
Raison, signifie encore dans le commerce, proportion, rapport. Le change d'Amsterdam est à raison de dix pour cent.
RAISON, en termes de commerce de mer, est la quantité de biscuit, de boisson et autres vivres que l'on règle pour la pitance journalière de chaque matelot sur les navires marchands. En quelques endroits on l'appelle ordinaire, et sur les vaisseaux de guerre ration.
RAISON, terme de société générale. On appelle la raison d'une société, les noms des associés rangés et énoncés de la manière que la société signera les lettres missives, billets et lettres-de-change. Ainsi l'on dit, la raison de la société sera Jacques Perrin, Guillaume et François Caron. Dictionnaire de comm.
RAISON, (Charpent. Art mécan.) Mettre les pièces de bois en leur raison, c'est quand on dispose les pièces qui doivent servir à un bâtiment, et qu'étant mises en chantier, on met chaque morceau et chaque pièce en sa place. (D.J.)