ABSOLUTION
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- Écrit par : Edme-François Mallet (G)
ABSOLUTION, terme de Droit, est un jugement par lequel un accusé est déclaré innocent, et comme tel préservé de la peine que les lois infligent pour le crime ou délit dont il était accusé.
Chez les Romains la manière ordinaire de prononcer le jugement était telle : la cause étant plaidée de part et d'autre, l'huissier criait : dixerunt, comme s'il eut dit, les parties ont dit ce qu'elles avaient à dire : alors on donnait à chacun des juges trois petites boules, dont l'une était marquée de la lettre A, pour l'absolution ; une autre de la lettre C, pour la condamnation ; et la troisième, des lettres N L, non liquet, la chose n'est pas claire, pour requérir le délai de la sentence. Selon que le plus grand nombre des suffrages tombait sur l'une ou sur l'autre de ces marques, l'accusé était absous ou condamné, etc. s'il était absous, le préteur le renvoyait, en disant videtur non fecisse ; et s'il n'était pas absous, le préteur disait jure videtur fecisse.
S'il y avait autant de voix pour l'absoudre que pour le condamner, il était absous. On suppose que cette procédure est fondée sur la loi naturelle. Tel est le sentiment de Faber sur la 125e loi, de div. reg. jur. de Cicéron, pro Cluentio ; de Quintilien, declam. 264. de Strabon, lib. IX. &c.
Dans Athènes la chose se pratiquait autrement : les causes en matière criminelle, étaient portées devant le tribunal des héliastes, juges ainsi nommés d', le soleil ; parce qu'ils tenaient leurs assemblées dans un lieu découvert. Ils s'assemblaient sur la convocation des thesmothetes au nombre de mille, et quelquefois de quinze cens, et donnaient leur suffrage de la manière suivante. Il y avait une sorte de vaisseau sur lequel était un tissu d'osier, et par-dessus deux urnes, l'une de cuivre et l'autre de bois : au couvercle de ces urnes était une fente garnie d'un carré long, qui large par le haut, se retrécissait par le bas, comme nous le voyons à quelques troncs anciens dans les églises : l'une de bois nommée , était celle où les juges jetaient les suffrages de la condamnation de l'accusé ; celle de cuivre, nommée , recevait les suffrages portés pour l'absolution. Avant le jugement on distribuait à chacun de ces magistrats deux pièces de cuivre, l'une pleine et l'autre percée : la première pour absoudre, l'autre pour condamner ; et l'on décidait à la pluralité des pièces qui se trouvaient dans l'une ou l'autre des urnes.
ABSOLUTION, dans le Droit Canon, est un acte juridique par lequel le prêtre, comme juge, et en vertu du pouvoir qui lui est donné par Jesus-Christ, remet les péchés à ceux qui après la confession paraissent avoir les dispositions requises.
Les Catholiques Romains regardent l'absolution comme une partie du sacrement de Pénitence : le concîle de Trente, sess. XIV. cap. IIIe et celui de Florence dans le decret ad Armenos, fait consister la principale partie essentielle ou la forme de ce sacrement, dans ces paroles de l'absolution : je vous absous de vos péchés ; ego te absolvo à peccatis tuis.
La formule d'absolution est absolue dans l'Eglise Romaine, et déprécatoire dans l'Eglise Grecque, et cette dernière forme a été en usage dans l'Eglise d'Occident jusqu'au XIIIe siècle. Arcudius prétend à la vérité que chez les Grecs elle est absolue, et qu'elle consiste dans ces paroles, mea mediocritas habet te venia donatum : mais les exemples qu'il produit, ou ne sont pas des formules d'absolution, ou sont seulement des formules d'absolution de l'excommunication, et non pas de l'absolution sacramentale.
Les Protestants prétendent qu'elle est déclaratoire et qu'elle n'influe en rien dans la rémission des péchés : d'où ils concluent que le prêtre en donnant l'absolution, ne fait autre chose que déclarer au pénitent que Dieu lui a remis les péchés, et non pas les lui remettre lui-même en vertu du pouvoir qu'il a reçu de Jesus-Christ. Mais cette doctrine est contraire à celle de Jesus-Christ, qui dit en S. Jean, ch. xx. vers. 23. Ceux dont vous aurez remis les péchés, leurs péchés leur seront remis. Aussi le Concîle de Trente, sess. XIV. can. IVe l'a t-il condamnée comme hérétique.
Absolution signifie assez souvent une sentence qui délie et relève une personne de l'excommunication qu'elle avait encourue. Voyez EXCOMMUNICATION.
L'absolution dans ce sens est également en usage dans l'Eglise Catholique et chez les Protestants. Dans l'Eglise réformée d'Ecosse, si l'excommunié fait paraitre des signes réels d'un pieux repentir, et si en se présentant au presbytère (c'est-à-dire à l'assemblée des anciens) on lui accorde un billet d'assurance pour son absolution, il est alors présenté à l'assemblée pour confesser son péché. Il manifeste son repentir autant de fois que le presbytère le juge convenable ; et quand l'assemblée est satisfaite de sa pénitence, le ministre adresse sa prière à Jesus-Christ, le conjurant d'agréer cet homme, de pardonner sa désobéissance, etc. lui qui a institué la loi de l'excommunication (c'est-à-dire de lier et délier les péchés des hommes sur la terre) avec promesse de ratifier les sentences qui sont justes. Cela fait, il prononce son absolution, par laquelle sa première sentence est abolie, et le pécheur reçu de nouveau à la communion. (G)
ABSOLUTION, en Droit Canonique, se prend encore dans un sens différent, et signifie la levée des censures. L'absolution accordée à l'effet de relever quelqu'un de l'excommunication est de deux sortes, l'une absolue et sans réserve, l'autre restreinte et sous réserve : celle-ci est encore de deux sortes ; l'une qu'on appelle ad effectum, ou simplement absolution des censures, l'autre appelée ad cautelam.
La première, c'est-à-dire l'absolution ad effectum, est de style dans les signatures de la cour de Rome dont elle fait la clôture, et a l'effet de rendre l'impétrant capable de jouir de la concession apostolique, l'excommunication tenant toujours quant à ses autres effets.
L'absolution ad cautelam est une espèce d'absolution provisoire qu'accorde à l'appelant d'une sentence d'excommunication, le juge devant qui l'appel est porté, à l'effet de le rendre capable d'ester en jugement pour poursuivre son appel ; ce qu'il ne pouvait pas faire étant sous l'anathème de l'excommunication qui l'a séparé de l'Eglise : elle ne s'accorde à l'appelant qu'après qu'il a promis avec serment qu'il exécutera le jugement qui interviendra sur l'appel.
L'absolution à saevis, en terme de Chancellerie Romaine, est la levée d'une irrégularité ou suspense encourue par un ecclésiastique, pour avoir assisté à un jugement, ou une exécution de mort ou de mutilation. (H)
On donne encore le nom d'absolution à une prière qu'on fait à la fin de chaque nocturne et des heures canoniales : on le donne aussi aux prières pour les morts. (G)