(Miroir) ; c'est un miroir concave, dont la surface est fort polie, et par lequel les rayons du soleil sont réfléchis et ramassés en un seul point, ou plutôt en un espace fort petit : par ce moyen leur force est extrêmement augmentée, de sorte qu'ils brulent les corps sur lesquels ils tombent après cette réunion.
Verre ardent, est un verre convexe, appelé en latin lents caustica. Ce verre a la propriété de transmettre les rayons de lumière, et dans leur passage il les réfracte ou les incline vers son axe ; et ces rayons ainsi rompus et rapprochés de l'axe, se réunissent en un point ou à peu près en un point, et ont assez de force en cet état pour bruler les corps qui leur sont présentés. Ainsi il y a cette différence entre les miroirs et les verres ardents, que les premiers réunissent les rayons en les réfléchissant, et les autres en les brisant ou en les réfractant. Les rayons tombent sur la surface des miroirs ardents, et en sont renvoyés, au lieu qu'ils pénètrent la substance des verres ardents. Le point de réunion des rayons dans les miroirs et les verres ardents, s'appelle le foyer. On appelle cependant quelquefois du nom général de miroir ardent les miroirs et les verres ardents. Voyez LENTILLE et REFRACTION.
Les miroirs ardents dont on se sert sont concaves ; ils sont ordinairement de métal : ils réfléchissent les rayons de lumière, et par cette réflexion il les inclinent vers un point de leur axe. Voyez MIROIR, REFLEXION. Quelques auteurs croient que les verres convexes étaient inconnus aux anciens : mais on a cru qu'ils connaissaient les miroirs concaves. Les historiens nous disent que ce fut par le moyen d'un miroir concave qu'Archimède brula toute une flotte ; et quoique le fait ait été fort contesté, on en peut toujours tirer cette conclusion, que les anciens avaient connaissance de cette sorte de miroirs. On ne doute nullement que ces miroirs ne fussent concaves et métalliques, et on est persuadé qu'ils avaient leur foyer par réflexion. A l'égard des verres brulans, M. de la Hire fait mention d'une comédie d'Aristophane appelée les Nuées, dans laquelle Strepsiade fait part à Socrate d'un expédient qu'il a trouvé pour ne point payer ses dettes, qui est de se servir d'une pierre transparente et ronde, et d'exposer cette pierre au soleil, afin de fondre l'assignation, qui dans ces temps s'écrivait sur de la cire. M. de la Hire prétend que la pierre ou le verre dont il est parlé dans cet endroit, qui servait à allumer du feu et à fondre la cire, ne peut avoir été concave, parce qu'un foyer de réflexion venant de bas en-haut, n'aurait pas été propre, selon lui, pour l'effet dont on a parlé ici, car l'usage en aurait été trop incommode ; au lieu qu'avec un foyer de réfraction venant de haut enbas, on pouvait aisément bruler l'assignation. Voyez Hist. acad. 1708. Ce sentiment est confirmé par le scholiaste d'Aristophane. Pline fait mention de certains globes de verre et de crystal, qui, exposés au soleil, brulaient les habits, et même le dos de ceux sur qui tombaient les rayons. Et Lactance ajoute qu'un verre sphérique plein d'eau et exposé au soleil, allume du feu, même dans le plus grand hiver, ce qui parait prouver que les effets des verres convexes étaient connus des anciens.
Cependant il est difficîle de concevoir comment les anciens, qui avaient connaissance de ces sortes de verres ardents, ne se sont pas aperçus en même temps que ces verres grossissent les objets. Car tout le monde convient que ce ne fut que vers la fin du treizième siècle que les lunettes furent inventées. M. de la Hire remarque que les passages de Plaute qui semblent insinuer que les anciens avaient connaissance des lunettes, ne prouvent rien de semblable : et il donne la solution de ces passages, en prouvant que les verres ardents des anciens étant des sphères, ou solides, ou pleines d'eau, le foyer n'était pas plus loin qu'à un quart de leur diamètre. Si donc on suppose que leur diamètre était d'un demi-pié, qui est, selon M. de la Hire, la plus grande étendue qu'on puisse donner ; il aurait fallu que l'objet fût à un pouce et demi d'éloignement pour qu'il parut grossi ; car les objets qui seront plus éloignés ne paraitront pas plus grands, mais on les verra plus confusément à travers le verre, qu'avec les yeux. C'est pourquoi il n'est pas surprenant que la propriété qu'ont les verres convexes de grossir les objets ait échappé aux anciens, quoiqu'ils connussent peut-être la proprieté que ces mêmes verres avaient de bruler : il est bien plus extraordinaire qu'il y ait eu 300 ans d'intervalle entre l'invention des lunettes à lire et celle des télescopes. Voyez TELESCOPE.
Tout verre ou miroir concave rassemble les rayons qui sont tombés sur sa surface ; et après les avoir rapprochés, soit par réfraction, soit par réflexion, il les réunit dans un point ou foyer ; et par ce moyen, il devient verre ou miroir ardent ; ainsi le foyer étant l'endroit où les rayons sont le plus rassemblés, il s'ensuit que si le verre ou le miroir est un segment d'une grande sphère, sa largeur ne doit pas contenir un arc de plus de dix-huit degrés ; et si le verre ou le miroir est un segment d'une plus petite sphère, sa largeur ne doit pas être de plus de trente ; parce que le foyer contiendrait un espace trop grand, si le miroir était plus étendu : ce qui est vérifié par l'expérience.
La surface d'un miroir, qui est un segment d'une plus grande sphère, reçoit plus de rayons que la surface d'un plus petit : donc si la largeur de chacun contient un arc de dix-huit degrés, ou même plus ou moins, pourvu que le nombre de degrés soit égal, les effets du plus grand miroir seront plus grands que ceux du plus petit ; et comme le foyer est vers la quatrième partie du diamètre, les miroirs qui sont des segments de plus grandes sphères, brulent à une plus grande distance que ceux qui sont des segments d'une plus petite sphère : ainsi puisque l'action de bruler dépend de l'union des rayons, et que les rayons sont réunis, étant réfléchis par une surface concave sphérique quelle qu'elle puisse être, il n'est pas étonnant que même les miroirs de bois doré, ou ceux qui sont faits d'autres matières, puissent bruler. Zahn rapporte dans son livre intitulé Oculus artificialis, que l'an 1699 un certain Neumann fit à Vienne un miroir ardent de carton, et que ce miroir avait tant de force qu'il liquéfiait tous les métaux.
Les miroirs ardents d'Archimède et de Proclus sont célèbres parmi les anciens. Par leur moyen Archimède, dit-on, brula la flotte des Romains qui assiégeaient Syracuse, sous la conduite de Marcellus, selon le rapport de Zonare, de Galien, d'Eustathe, etc. et Proclus fit la même chose à la flotte de Vitalien qui assiégeait Bysance, selon le rapport du même Zonare. Cependant quelque attestés que soient ces faits, ils ne laissent pas d'être sujets à de fort grandes difficultés. Car la distance du foyer d'un miroir concave est au quart de son diamètre : or le père Kircher passant à Syracuse, et ayant examiné la distance à laquelle pouvaient être les vaisseaux des Romains, trouva que le foyer du miroir d'Archimède était au moins à 30 pas ; d'où il s'ensuit que le rayon du miroir devait être fort grand. De plus, le foyer de ce miroir devait avoir peu de largeur. Ainsi il parait difficile, selon plusieurs auteurs, que les miroirs d'Archimède et ceux de Proclus pussent avoir l'effet qu'on leur attribue.
L'histoire d'Archimède deviendra encore plus difficîle à croire, si on s'en rapporte au récit pur et simple que nous en ont donné les anciens. Car, selon Diodore, ce grand géomètre brulait les vaisseaux des Romains à la distance de trois stades ; et selon d'autres, à la distance de 3000 pas. Le père Cavalieri, pour soutenir la vérité de cette histoire, dit, que si des rayons réunis par la surface d'un miroir concave sphérique, tombent sur la concavité d'un conoïde parabolique tronqué, dont le foyer soit le même que celui du miroir sphérique, ces rayons réfléchis parallèlement à l'axe de la parabole, formeront une espèce de foyer linéaire ou cylindrique M. Dufay ayant voulu tenter cette expérience, y trouva de grandes difficultés ; le petit miroir parabolique s'échauffe en un moment, et il est presque impossible de le placer où il doit être. D'ailleurs l'éclat de ces rayons réunis qui tombent sur le miroir parabolique, incommode extrêmement la vue.
M. Descartes a attaqué dans sa Dioptrique l'histoire d'Archimède : il y dit positivement, que si l'éloignement du foyer est à la largeur du verre ou du miroir, comme la distance de la terre au soleil est au diamètre du soleil (c'est-à-dire environ comme 100 est à 1), quand ce miroir serait travaillé par la main des anges, la chaleur n'en serait pas plus sensible que celle des rayons du soleil qui traverseraient un verre plan. Le père Niceron soutient la même opinion. Voici sa preuve. Il convient que les rayons qui partent d'une portion du disque du soleil égale au verre ou au miroir qu'on y expose, seront exactement réunis à son foyer, s'il est elleptique ou parabolique : mais les rayons qui partent de tous les autres points du disque du soleil ne peuvent être réunis dans le même point, et forment autour de ce point une image du disque du soleil, proportionnée à la longueur du foyer du verre. Lorsque ce foyer est très-court, c'est-à-dire fort près du verre, l'image du soleil est fort petite, presque tous les rayons passent si proche du foyer qu'ils semblent ne faire qu'un point lumineux : mais à mesure que le foyer s'éloignera, l'image s'agrandira par la dispersion de tous ses rayons qui ne partent pas du centre du soleil, que je suppose répondre directement au foyer du miroir ; et par conséquent cet amas de rayons, qui étant réunis dans un très-petit espace faisaient un effet considérable, n'en fera pas plus que les rayons directs du soleil, lorsque l'éloignement du foyer sera tel qu'ils seront aussi écartés les uns des autres, qu'ils l'étaient avant que de rencontrer le verre. Ainsi parle le père Niceron.
Cela peut être vrai, dit M. Dufay ; mais est-il sur que les rayons qui viennent d'une portion du disque du soleil égale à la surface du verre, étant réunis au foyer, ne suffisent pas pour bruler indépendamment des autres ? M. Dufay reçut sur un miroir plan d'un pied en carré l'image du soleil, et la dirigea de façon qu'elle allât tomber sur un miroir sphérique concave assez éloigné, qui réunissait à son foyer tous les rayons qu'il recevait parallèles ou presque parallèles ; et ces rayons devaient allumer quelque matière combustible ; le miroir sphérique a été porté à la distance de 600 pieds, et son foyer a encore été brulant. Cependant le miroir plan qui recevait le premier les rayons du soleil ; était assez petit pour ne recevoir de rayons parallèles que d'une petite partie de sa surface ou de son disque ; les inégalités inévitables de la surface du miroir faisaient perdre beaucoup de rayons ; ceux qui portaient l'image du soleil du miroir plan sur le miroir concave étaient si divergens, que cette image était peut-être dix fois plus grande et plus faible sur le concave que sur le plan ; et par conséquent ces rayons étaient fort éloignés du parallélisme ; enfin ils étaient affoiblis par deux réflexions consécutives. Il parait par-là que les rayons du soleil, tels qu'ils sont répandus dans l'air, conservent une grande force, malgré un grand nombre de circonstances désavantageuses ; et peut-être, ajoute M. Dufay, serait-il permis d'appeler du jugement que Descartes a porté contre l'histoire d'Archimède. Il est vrai qu'afin qu'un miroir fût capable de bruler à une grande distance, il faudrait, s'il était parabolique, que la parabole fût d'une grandeur énorme et impraticable, puisque le paramètre de cette parabole devrait être quadruple de cette distance ; et si le miroir était sphérique, son rayon devrait être double de cette distance ; et de plus, son foyer aurait beaucoup d'étendue. Mais l'expérience de M. Dufay prouve qu'on peut porter avec un miroir plan à une assez grande distance l'image du soleil, dont les rayons seront peu affoiblis ; et si plusieurs miroirs plans étaient posés ou tournés de façon qu'ils portassent cette image vers un même point, il se pourrait faire en ce point une espèce de foyer artificiel qui aurait de la force. Ce fut ainsi, au rapport de Tzetzes, poète Grec, mais fort postérieur à Archimède, que ce célèbre Mathématicien brula les vaisseaux des Romains. Ce poète fait une description fort détaillée de la manière dont Archimède s'y prit pour cela. Il dit que ce grand Géomètre disposa les uns auprès des autres plusieurs miroirs plans, dont il forma une espèce de miroir polygone à plusieurs faces ; et que par le moyen des charnières qui unissaient ces miroirs, il pouvait leur faire faire tels angles qu'il voulait ; qu'il les disposa donc de manière qu'ils renvoyassent tous vers un même lieu l'image du soleil, et que ce fut ainsi qu'il brula les vaisseaux des Romains. Tzetzes vivait dans le douzième siècle ; et il pourrait se faire que Proclus qui vivait dans le cinquième, eut employé une méthode semblable pour détruire la flotte de Vitalien. M. de Buffon, de l'académie royale des Sciences de Paris, vient d'exécuter ce que Tzetzes n'avait fait que raconter ; ou plutôt, comme il n'en avait aucune connaissance, il l'a exécuté d'une manière différente. Il a formé un grand miroir composé de plusieurs miroirs plans d'environ un demi-pié en carré ; chacun de ces miroirs est garni par derrière de trois vis, par le moyen desquelles on peut en moins d'un quart-d'heure les disposer tous de manière qu'ils renvoyent vers un seul endroit l'image du soleil. M. de Buffon par le moyen de ce miroir composé, a déjà brulé à 200 pieds de distance ; et par cette belle expérience, a donné un nouveau degré de vraisemblance à l'histoire d'Archimède, dont la plupart des Mathématiciens doutaient depuis le jugement de Descartes. M. de Buffon pourra, selon toutes les apparences, bruler encore plus loin avec des glaces plus polies ; et nous savons qu'il travaille à perfectionner de plus en plus une invention si curieuse, si utîle même, et à laquelle les Physiciens ne sauraient trop s'intéresser. Voyez les Mémoires de l'Acad. 1747.
Les plus célèbres miroirs ardents parmi les modernes, sont ceux de Septala, de Villette, de Tschirnhausen. Le miroir ardent de Manfredus Septala chanoine de Milan, était un miroir parabolique qui, selon Schot, mettait le feu à des morceaux de bois, à distance de 15 ou 16 pas. Le miroir ardent de Tschirnhausen égale au moins le miroir de Septala pour la grandeur et pour l'effet. Voici ce qu'on trouve sur ce sujet dans les Acta eruditorum de Leipsic.
Ce miroir allume du bois vert en un moment, en sorte qu'on ne peut éteindre le feu en soufflant violemment dessus.
2°. Il fait bouillir l'eau, en sorte qu'on peut très-promptement y faire cuire des œufs ; et si on laisse cette eau un peu de temps au foyer, elle s'évapore.
3°. Il fait fondre en un moment un mélange d'étain et de plomb de trois pouces d'épais : ces métaux commencent à fondre goutte à goutte, ensuite ils coulent continuement, et en deux ou trois minutes la masse est entièrement percée. Il fait aussi rougir promptement des morceaux de fer ou d'acier, et peu après il s'y forme des trous par la force du feu. Une lame de ces métaux fut percée de trois trous en six minutes. Le cuivre, l'argent, etc. se liquéfient aussi quand on les approche du foyer.
4°. Il fait aussi rougir comme le fer les matières qui ne peuvent fondre, comme la pierre, la brique, etc.
5°. Il blanchit l'ardoise en un moment, et ensuite il la rend comme un verre noir assez beau ; et si on tire avec une tenaille une partie de l'ardoise lorsqu'elle est blanchie, elle se change en filets de verre.
6°. Il change les tuiles en verre jaune, et les écailles en verre d'un jaune noirâtre.
7°. Il fond en verre blanc une pierre ponce, tirée d'un volcan.
8°. Il vitrifie en 8 minutes un morceau de creuset.
9°. Il change promptement des os en un verre opaque, et de la terre en verre noir.
Ce miroir avait près de trois aunes de Leipsic de large ; son foyer était à deux aunes de distance de lui : il était de cuivre, et sa substance n'avait pas plus d'épaisseur que deux fois le dos d'un canif.
Un ouvrier de Dresde, appelé Gaertner, a fait, à l'imitation du miroir de Tschirnhausen, de grands miroirs ardents de bois, qui, au grand étonnement de tout le monde, produisaient les mêmes effets.
Villette, ouvrier Français, de Lyon, a fait un grand miroir que Tavernier emporta et présenta au roi de Perse ; il en fit un second pour le roi de Danemarc ; un troisième, que le roi de France donna à l'Académie royale des Sciences ; et un quatrième, qui a été exposé publiquement en Angleterre. Les effets de ce dernier, selon le rapport des docteurs Harris et Desaguliers, sont de fondre une pièce de six sous d'argent en sept minutes ; de fondre l'étain en trois minutes, le fer en seize, l'ardoise en trois ; de calciner une écaille fossîle en sept. Ce miroir a vitrifié un morceau de la colonne alexandrine de Pompée en parties noires, dans l'espace de 50 minutes, et en parties blanches dans l'espace de 54 : il fond le cuivre en 8 minutes ; il calcine les os en 4, et les vitrifie en 33 ; il fond et change une émeraude en une substance semblable à celle d'une turquaise : il vitrifie des corps extrêmement durs, si on les tient assez longtemps au foyer ; entr'autres l'asbeste, sorte de pierre qui résiste à l'action du feu terrestre : mais quand ces corps sont une fois vitrifiés, le miroir n'a plus d'effet sur eux. Ce miroir a 47 pouces de large, et il fait portion d'une sphère de 76 pouces de rayon ; de sorte que son foyer est à environ 38 pouces du sommet. Sa substance est une composition d'étain, de cuivre, et de vif-argent. Wolf. Catopt.
Voici les effets du miroir ardent de l'Académie, rapportés dans le Journal des Savants de 1679, au mois de Décemb. pag. 322. Le bois vert y prend feu dans l'instant ; une pièce de 15 sous est trouée en 24 secondes, et un petit morceau de laiton en 6/10 de seconde ; un morceau de carreau d'une chambre s'y vitrifie en 45 secondes ; l'acier est troué en 9/10 de seconde ; la pierre à fusil s'y vitrifie en une minute ; et un morceau de ciment en 52 secondes.
Ce miroir a environ 36 pouces de largeur ; son foyer occupe un espace rond, dont le diamètre est à-peu-près égal à celui d'un demi-louis, et il est éloigné du centre d'environ un pied et demi. Ibid.
Toute lentille convexe ou plane-convexe, rassemble par réfraction en un point les rayons du soleil dispersés sur sa convexité, et par conséquent ces sortes de lentilles sont des verres ardents. Le verre le plus considérable de cette sorte, était celui de M. Tschirnhausen : la largeur de la lentille était de 3 à 4 pieds ; le foyer était éloigné de 12 pieds, et il avait un pouce et demi de diamètre : de plus, afin de rendre le foyer plus vif, on rassemblait les rayons une seconde fois par une seconde lentille parallèle à la première, qui était placée dans l'endroit où le diamètre du cone des rayons formés par la première lentille était égal à la largeur de la seconde ; de sorte qu'elle les recevait tous : le foyer qui était d'un pouce et demi, était resserré par ce moyen dans l'espace de 8 lignes ; et par conséquent sa force était augmentée dans la même proportion.
Parmi plusieurs de ses effets qui sont rapportés dans les Acta eruditorum de Leipsic, se trouvent ceux-ci.
1°. Il allume dans un instant du bois dur, même trempé dans l'eau.
2°. Il fait bouillir promptement de l'eau mise dans un petit vaisseau ; il fond toutes sortes de métaux ; il vitrifie la brique, la pierre-ponce, la fayence ; il fait fondre dans l'eau le soufre, la poix, etc. il vitrifie les cendres des végétaux, les bois, et les autres matières ; en un mot il fait fondre ou change en fumée, ou calcine tout ce qu'on présente à son foyer ; et il change les couleurs de tous les corps, à l'exception des métaux. On remarque que son effet est plus vif si on met la matière sur laquelle on veut l'essayer sur un gros charbon bien brulé. Ibid.
Quoique la force des rayons du soleil fasse de si grands effets dans le verre ardent, cependant les rayons de la pleine lune ramassés par le même verre ou par un miroir concave, ne donnent pas le moindre degré de chaleur.
Comme les effets du verre ardent dépendent entièrement de sa convexité, il n'est pas étonnant que même des lentilles faites avec de l'eau glacée produisent du feu, etc.
On peut aisément préparer une lentille de cette sorte, en mettant un morceau de glace dans une petite écuelle ou dans le segment creux d'une sphère, et en le faisant fondre sur le feu jusqu'à ce qu'il prenne de lui-même la forme d'un segment.
M. Mariotte fit bouillir pendant une demi-heure environ de l'eau nette, pour en faire sortir l'air, puis l'ayant fait glacer, et lui ayant fait prendre la forme convexe, il en fit un verre ardent qui alluma de la poudre fine.
Ceux qui ignorent la Dioptrique, ne doivent pas être moins surpris de voir le feu, et les autres effets qui sont produits par le moyen de la réfraction de la lumière dans une bouteille de verre remplie d'eau. Voyez LENTILLE.
Un phénomène assez singulier du miroir ardent de M. Tschirnhausen, et probablement de tous les miroirs ardents, c'est que ce miroir ardent a moins d'efficace dans les grandes chaleurs que dans les chaleurs ordinaires. Il n'avait presque aucune force dans le chaud extrême de 1705, et quelquefois à peine a-t-il huit jours pleinement favorables dans tout un été. Peut-être les exhalaisons qui s'élèvent abondamment de la terre dans les grandes chaleurs, et qui causent dans l'air et dans la lumière ce tremblement et ces espèces d'ondulations qu'on y remarque de temps en temps, interceptent une grande partie des rayons, et les empêchent de tomber sur le miroir, enveloppent les rayons qui traversent le miroir, vont se réunir dans le foyer, et leur ôtent leur extrême subtilité nécessaire pour pénétrer un corps dur. Cet excès d'affoiblissement surpasse l'excès de force qui peut venir des grandes chaleurs. Cette conjecture est confirmée par deux observations de M. Homberg. Dans des chaleurs même ordinaires, lorsque le temps a été serein plusieurs jours de suite, l'effet du miroir n'est pas si grand que quand le soleil se découvre immédiatement après une grande pluie. Pourquoi ? c'est que la pluie précipite les exhalaisons. Ainsi mettez entre le miroir et le foyer un réchaut plein de charbon allumé, sous les rayons qui vont du miroir au foyer, et vous verrez que l'efficace des rayons sera considérablement affoiblie. Où s'affoiblit-elle, sinon en traversant les exhalaisons qui s'élèvent du charbon ? Nous avons tiré cette dernière remarque de M. Formey.
Traberus a enseigné comment on faisait un miroir ardent avec des feuilles d'or ; savoir, en faisant tourner un miroir de bois concave, et enduisant également les côtés intérieurs avec de la poix, on couvre ensuite la surface concave du miroir avec des feuilles d'or taillées en carré de deux ou trois doigts de large. Il ajoute qu'on peut faire de très-grands miroirs avec 30, 40, ou un plus grand nombre de morceaux carrés de verre, qui seront joints et arrangés les uns auprès des autres dans une écuelle de bois. Les effets de ces miroirs, selon cet auteur, seront aussi grands que si la surface était parfaitement sphérique. Ibid. Voyez MIROIR.
On sait la propriété qu'a la parabole de réfléchir à son foyer tous les rayons qui tombent sur sa concavité, parallélement à son axe ; d'où il s'ensuit que si d'un solide parabolique creux on retranche la portion qui contient le foyer, les rayons du soleil tombant sur ce solide parabolique, parallélement à l'axe, se réuniront à son foyer : ce qui donne un moyen facîle d'avoir un miroir brulant dont le foyer soit derrière lui à une distance donnée. Voyez PARABOLE.
De plus, comme tous les rayons qui partent du foyer d'une parabole, se réfléchissent parallélement à l'axe, et que ce parallélisme s'étend à l'infini, il s'ensuit que si on plaçait une seconde parabole à une distance infinie de la première, de manière seulement que leur axe fût le même, les rayons réfléchis par la première parallélement à l'axe, iraient, après avoir frappé la seconde, s'assembler tous à son foyer ; de sorte qu'étant partis d'un point, ils se réuniraient dans un autre point infiniment éloigné.
Donc si le foyer de la première parabole était occupé par un corps bien chaud, comme par un charbon enflammé, toute sa chaleur se ferait sentir au foyer de la seconde parabole, quoiqu'infiniment distant. Voilà le pur géométrique ; mais il est certain que le physique doit en rabattre beaucoup, et même infiniment, et que des rayons ne s'étendraient pas à l'infini dans l'air, ni même dans aucun milieu, sans perdre absolument leur force et leur chaleur. On n'aura donc un effet sensible qu'en plaçant les paraboles à quelque distance ; et M. Dufay a trouvé que l'expérience réussissait en plaçant ainsi deux miroirs paraboliques à 18 pieds de distance.
Il substitua aux miroirs paraboliques deux miroirs sphériques, l'un de 20 pouces de diamètre, l'autre de 17, et trouva qu'ils brulaient éloignés l'un de l'autre de 50 pieds, c'est-à-dire trois fois plus que les paraboliques.
On peut conjecturer que cette grande supériorité des miroirs sphériques sur les paraboliques, vient d'un endroit qui parait désavantageux pour les sphériques. Ces derniers n'ont pas, comme les paraboliques, un foyer exact qui ne soit qu'un point ; mais aussi le charbon qu'on met au foyer, n'est pas un point. Si ce foyer est celui du miroir parabolique, tous les rayons qui ne sons pas partis du seul point du charbon placé au foyer, ne se réfléchissent point parallélement à l'axe, ne tombent point sous cette direction sur l'autre miroir, et par conséquent n'étant pas bien réunis à son foyer, ils brulent peu ; ou, ce qui revient au même, les deux miroirs ont besoin pour bruler d'être peu éloignés. Mais si le foyer où est le charbon, est celui d'un miroir sphérique, l'espace qu'occupe le charbon peut être en grande partie le même que le foyer du miroir : or tout ce qui part de ce foyer se réfléchit exactement parallèle.
Les miroirs paraboliques ayant fait un certain effet à une distance de 18 pieds, M. Dufay a trouvé que si on interposait ensuite une glace plane des deux côtés, il fallait les rapprocher de dix pieds ; ce qui marque une grande perte ou un grand affoiblissement de rayons causé par la glace : son épaisseur augmente très-peu cet effet ; et par conséquent il vient beaucoup plus de rayons réflechis à la rencontre de la glace, que de leur affoiblissement par le passage à-travers son épaisseur.
De la paille allumée entre les deux miroirs, en diminue considérablement l'action ; ce qui revient à l'observation de M. Homberg sur le grand miroir ardent du Palais Royal, qui agissait beaucoup moins pendant de grandes chaleurs, que quand l'air venait d'être rafraichi par la pluie. Une partie des rayons réunis par le miroir ardent, étaient peut-être absorbés ou détournés de leur direction par les soufres répandus dans l'air pendant les grandes chaleurs ; et les soufres allumés qui font la flamme de la paille, produisaient apparemment, dans le cas dont il s'agit, un effet semblable.
Le vent même violent ne diminue point sensiblement l'action des miroirs, soit que sa direction soit précisément contraire à celle des rayons qui vont d'un miroir à l'autre, soit qu'il la coupe à angles droits.
Un charbon ayant été placé au foyer d'un verre convexe des deux côtés, d'où les rayons qui l'ont traversé en s'y rompant, sortaient parallèles, M. Dufay a reçu ces rayons sur la surface d'un miroir concave qui les réunissait à son foyer : mais ces rayons n'ont pu bruler que quand le verre et le miroir n'ont été éloignés que de quatre pieds, tant les rayons se sont affoiblis en passant au-travers du verre. Et il faut bien remarquer que ces rayons sont ceux d'un charbon ; car ceux du soleil, ou ne s'affoiblissent pas ainsi, ou s'affoiblissent beaucoup moins : d'où M. Dufay conclut qu'il doit y avoir une grande différence entre le feu du soleil et nos feux ordinaires, dont les parties doivent être beaucoup plus massives, et plus sujettes à s'embarrasser dans des passages étroits.
Le P. Taquet a observé que si on place une chandelle au foyer d'un miroir parabolique, l'image de cette chandelle reçue loin du miroir, ne parait pas ronde, comme elle le serait en effet si tous les rayons réfléchis étaient parallèles à l'axe ; mais cette image a une figure semblable à celle de la chandelle, parce que la chandelle n'étant pas un point, les rayons qu'elle envoye ne se réfléchissent pas parallélement à l'axe du miroir parabolique.
On sait que la courbe nommée ellipse a cette propriété, que des rayons qui partiraient d'un de ses foyers, et qui tomberaient sur la concavité de cette courbe, se réuniraient tous à l'autre foyer. Cependant M. Dufay ayant mis un charbon au foyer d'un miroir elliptique travaillé avec tout le soin possible, et n'ayant pas eu égard à la grosseur de ce charbon, les rayons ne se sont jamais réunis en assez grand nombre à l'autre foyer, pour pouvoir bruler ; mais lorsqu'au lieu d'un charbon il y mettait une bougie allumée, les rayons se réunissaient exactement à l'autre foyer, et y causaient une chaleur sensible, mais n'avaient pas la force de bruler ; ce qui arrive de même avec les miroirs paraboliques, sans doute parce que les parties de la flamme sont trop déliées pour conserver longtemps leur mouvement dans l'air.
Si on met au foyer d'un miroir parabolique ou sphérique un charbon ardent, les rayons qui, après avoir rencontré le miroir, sont réfléchis parallélement à l'axe, ou à-peu-près, forment une espèce de cylindre, dans l'espace duquel on sent une chaleur à-peu-près égale à celle d'un poêle, et qui est sensible jusqu'à 20 ou 30 pieds ; de façon qu'avec quelques charbons on pourrait échauffer une serre pour des plantes, ou quelqu'autre endroit d'une largeur médiocre : on pourrait aussi donner aux contre-cœurs des cheminées une forme sphérique ou parabolique, ce qui les rendrait beaucoup plus propres à renvoyer la chaleur, que les plaques ordinaires. Voyez l'hist. et les mém. de l'acad. 1726. (O)
ARDENT se dit quelquefois d'un météore ignée qui ressemble à une lampe allumée. Voyez METEORE. Voyez aussi FEU-FOLET. (O)
ARDENT se dit aussi, en Médecine, et de l'habitude du corps dans certaines maladies, et de la maladie même.
Fièvre ardente, c'est une fièvre violente et brulante, que l'on appelle autrement causus. Voyez FIEVRE. (N)
ARDENT se dit, en Marine, d'un vaisseau qui se comporte à la mer de façon qu'il approche aisément au plus près du vent. (Z)
ARDENT, (Manège) poil ardent, est celui qui tire sur la couleur de feu. On dit, ce cheval est poil ardent. (V)
ARDENT, terme de Blason ; il se dit d'un charbon allumé.
Carbonnières en Auvergne, d'azur à quatre bandes d'argent, chargées de charbons de sable ardents de gueules. (V)