S. m. (Physique) Le baromètre est un instrument qui sert à mesurer la pesanteur de l'atmosphère et ses variations, et qui marque les changements du temps. Voyez ATMOSPHERE et TEMS.

Ce mot est composé de , poids, et de , mesure. On confond ordinairement, quoique mal-à-propos, le baromètre avec le baroscope : celui-ci cependant ne fait, suivant la signification du mot, que marquer les altérations du poids de l'atmosphère : le baromètre non-seulement marque ces altérations, mais encore les mesure. Voyez BAROSCOPE.



Le baromètre et ses usages sont fondés sur l'expérience de Toricelli, ainsi nommée de Toricelli son inventeur. On prend un tuyau de verre rempli de mercure, dont un côté est fermé hermétiquement, et dont l'autre bout qui est ouvert est plongé dans une cuvette remplie de mercure : quand le poids de l'atmosphère diminue, la surface du mercure qui se trouve vers le bout inférieur, et sur laquelle l'air presse, se trouve moins comprimée : ainsi le mercure qui est dans le tuyau descend ; et au contraire si le poids de l'air augmente, le mercure monte ; car la colonne de mercure suspendue dans le tuyau est toujours égale en pesanteur au poids de l'atmosphère qui pese dessus, comme il est démontré à l'article TORICELLI.

Dans cette explication nous supposons que la pression de l'air vienne uniquement de son poids, qui comprime les parties supérieures sur les inférieures. Cependant il est certain que plusieurs causes concourent à altérer la pression de l'air : en général la cause immédiate de la pression d'un fluide élastique tel que l'air, c'est la vertu élastique de ce fluide, et non son poids. On ne doit donc attribuer la suspension du mercure dans le baromètre au poids de l'air, qu'autant que ce poids est la cause principale de la pression de l'air. En effet le mercure du baromètre se soutient aussi bien dans une chambre exactement fermée qu'en plein air ; parce que l'air de cette chambre, quoiqu'il ne porte pas le poids de l'atmosphère, est comprimé de la même manière que s'il le portait. Si l'air demeure de même poids, et que la compression de ses parties vienne à augmenter ou à diminuer par quelque cause accidentelle, alors le mercure descendra ou montera dans le baromètre, quoique le poids de l'air ne soit pas augmenté. Traité des fluides, Paris, 1744. p. 61.

Il y a différentes espèces de baromètres, dont nous allons détailler ici les principales.

Baromètre commun. La construction du baromètre commun est telle. On remplit de mercure un tuyau de verre, fermé hermétiquement par sa partie supérieure, ayant son diamètre d'environ 1/10 de pouce, et sa longueur au moins de 31 ; on remplit ce tuyau de manière qu'il ne reste point d'air mêlé avec le mercure, et qu'aucun autre corpuscule ne s'attache aux parois du tuyau. Pour y réussir, on peut se servir d'un entonnoir de verre terminé par un tuyau capillaire, et remplir le tube par le moyen de cet entonnoir.

On peut encore chasser les bulles d'air par deux autres méthodes : la plus ordinaire est de remplir de vif-argent tout le tube, à la réserve d'un pouce environ qu'on laisse plein d'air ; on bouche avec le doigt l'orifice du tuyau, on le renverse, et en faisant promener la bulle, on lui fait entraîner avec elle toutes les petites bulles imperceptibles, après quoi on acheve de remplir le tube. Mussch. ess. de Phys.

L'autre méthode consiste à faire chauffer un tube presque plein sur un brasier couvert de cendres ; on le tourne continuellement ; et la chaleur raréfiant les petites bulles d'air, les fait sortir par l'orifice.

Quand on a ainsi rempli le tuyau jusqu'au bord, on bouche exactement avec le doigt son orifice, en sorte qu'il ne puisse s'introduire d'air entre le doigt et le mercure ; ensuite on plonge le tuyau dans un vaisseau plein de mercure, de façon cependant que le tuyau ne touche pas le fond du vase : à la distance de 28 pouces de la surface du mercure, sont attachées 2 bandes divisées en 3 pouces, et ces pouces sont subdivisés en un certain nombre de plus petites parties ; enfin on applique le tuyau sur une planche de bois, pour empêcher qu'il ne se brise : on laisse découvert le vaisseau où le tuyau est plongé, ou si l'on veut on le couvre, afin qu'il n'y entre point de poussière, et le baromètre est achevé.

Au lieu de plonger le tuyau dans un vaisseau, on se contente souvent d'en recourber l'extrémité, de sorte que le tuyau a deux branches verticales, dont l'une est beaucoup plus petite que l'autre, et se termine par une espèce d'entonnoir fort large, qui se trouve rempli de mercure, sur la surface duquel l'atmosphère presse, et fait monter ou descendre le mercure du tuyau d'une manière d'autant plus sensible, que la variation du poids de l'atmosphère est plus grande. C'est le baromètre simple ou ordinaire. Voyez Pl. Pneumat. fig. 1.

On a essayé plusieurs fois s'il était possible de rendre les variations du baromètre plus sensibles, afin de pouvoir mesurer la pression de l'atmosphère avec plus de justesse ; ce qui a donné lieu à un grand nombre de baromètres de différentes structures, comme le baromètre à roue, le baromètre diagonal, le baromètre horizontal, etc.

Descartes, et ensuite Huygens, se sont servis d'un tube A B, (fig. 2.) fermé en A, et ayant une portion C D plus grosse que le reste : la moitié de la partie C D, de même que la partie supérieure du tube, est remplie d'eau ; et l'autre moitié de C D, de même que la partie inférieure du tube, est remplie de mercure. Il est vrai que dans cette sorte de baromètre la colonne suspendue étant plus grande, rendait la variation plus sensible : mais l'air renfermé dans l'eau s'évaporant par degrés, remplissait l'espace vide du haut du tube, et rendait par-là la machine défectueuse. Huygens imagina donc qu'il valait mieux placer dans le baromètre le mercure et l'eau, de la manière suivante : A D G (fig. 3. est un tuyau recourbé fermé hermétiquement en A, et ouvert en G ; les vaisseaux cylindriques B C et F E, sont égaux, et distants d'environ 29 pouces l'un de l'autre ; le diamètre du tuyau est d'environ une ligne ; celle de chaque vaisseau est de 15, et leur profondeur d'environ 10 : le tuyau est rempli de mercure, qui est suspendu entre le vaisseau F E et le vaisseau B C, l'espace qui reste jusqu'à A étant vide d'air et de mercure : enfin on verse de l'eau commune mêlée avec une sixième partie d'eau régale (pour que l'eau ne se gèlepas) dans le tuyau E F G, de manière qu'elle contrebalance en partie le mercure C D F. Or quand le mercure s'élève le long du tuyau A D, au-dessus du niveau du mercure qui est contenu en F E, ce mercure en s'élevant fait équilibre avec l'atmosphère ; si la pression de l'atmosphère augmente, la colonne de mercure s'augmentera, conséquemment l'eau descendra ; si l'atmosphère presse moins, la colonne de mercure descendra, et l'eau montera. Par-là ce baromètre indique beaucoup mieux les plus petites variations de l'air, que le baromètre commun : car au lieu de deux pouces, le fluide pourra varier beaucoup davantage ; ce qui vient tant de la grosseur des cylindres par rapport aux tuyaux, que de la pesanteur de l'eau, qui est moindre que celle du mercure, et dont les variations doivent être par conséquent plus sensibles ; car 14 pouces d'eau équivalent à un pouce de mercure. En élargissant les diamètres des cylindres, la variation sera encore plus sensible. Il y a pourtant encore cet inconvénient, que l'eau s'évaporera, et rendra les variations défectueuses ; quoiqu'on puisse en quelque façon prévenir l'évaporation en mettant une goutte d'huîle d'amandes douces sur la surface de l'eau.

Mais cette goutte d'huîle produit un autre inconvénient ; car elle s'attache aux parois du tuyau, et fait par conséquent que l'eau après l'avoir traversée, et quelquefois s'être débordée, rend le tuyau opaque.

Le plus grand défaut surtout est causé par le froid et le chaud, qui font que la liqueur du tuyau E F G est comme dans une boule, et un tuyau de thermomètre. En effet, cette liqueur se raréfie par la chaleur, et se condense par le froid ; d'où il arrive que la hauteur de l'eau varie par la chaleur seule, et fait par conséquent varier le mercure ; de sorte que les variations de cette espèce de baromètre sont presqu'autant l'effet de la chaleur que de la pression de l'air.

On a tâché depuis peu de rendre ces baromètres plus simples, en substituant de l'esprit-de-vin à l'eau, et des boules aux cylindres : mais l'esprit-de-vin est très-sujet à s'évaporer et à se dilater par la chaleur ; et d'ailleurs le changement des cylindres en forme de poires, empêche de faire des échelles justes. Au reste il est visible que la marche de ce baromètre est contraire à celle du baromètre ordinaire ; tandis que le mercure baisse dans ce dernier, l'eau et l'esprit-de-vin s'élèvent dans l'autre, et réciproquement. Mussch.

Ainsi les défauts auxquels ce baromètre peut être sujet, ont obligé quelques autres à avoir recours au baromètre horizontal ou rectangle A B C D (fig. 4.) Ce baromètre est formé de manière que la branche B C soit verticale, et la branche C D horizontale. Il est joint par l'extrémité de sa branche perpendiculaire à un vaisseau A B, et les variations sont marquées sur la branche horizontale C D : or l'intervalle ou l'espace de variation peut être aussi étendu que l'on veut ; car plus le tuyau B C D sera petit par rapport au vase A B, plus les variations du mercure dans le tuyau A B, feront varier le mercure qui est dans la partie C D ; et par conséquent les plus petites variations seront très-sensibles. Le diamètre du tuyau C D étant donné, il sera aisé de trouver le diamètre du vaisseau A B, tel que les parties de l'échelle horizontale dans le tuyau D C, correspondantes aux parties de l'échelle du vaisseau A B soient aussi grandes qu'on voudra, et aient entr'elles la même proportion que les parties de l'échelle dans le vaisseau A B, puisque le diamètre du vaisseau est à celui du tuyau en raison sous-doublée réciproque des parties de leurs échelles : de même les diamètres de C D et A B étant donnés, aussi bien que la hauteur du mercure dans le vaisseau, la hauteur du mercure dans le tuyau est trouvée par cette proportion ; comme le carré du diamètre du vaisseau est au carré du diamètre du tuyau, ainsi les parties de l'échelle du mercure dans le tuyau, sont aux parties correspondantes à l'échelle du mercure dans le vaisseau.

La construction de ce baromètre, de même que du baromètre d'Huygens, est établie sur un théorème d'Hydrostatique ; savoir, que les fluides qui ont la même base, pesent en raison de leur hauteur perpendiculaire, et non pas de la quantité de leur matière : ainsi la même pesanteur de l'atmosphère soutient le vif-argent dont le tuyau A C D et le vase A B sont remplis, comme elle aurait soutenu le mercure dans le seul tuyau A B C. Voyez HYDROSTATIQUE. Ce baromètre a aussi de grands défauts.

Car, en premier lieu, l'air s'introduit quelquefois entre les particules du mercure dans le tuyau C D, et les écarte par conséquent les unes des autres lorsque le tuyau est trop large. Pour remédier à cet inconvénient, on ne donne qu'une ligne de diamètre, ou même moins, à la partie C D, on a soin que ce petit tuyau soit neuf et bien net, et on se sert de mercure qui soit bien purgé, à l'aide du feu, de tout l'air qu'il contient : malgré tout cela, le mercure se salit avec le temps en-dedans par l'air qui y entre, ce qui produit fort souvent quelque séparation entre les parties du mercure, lorsqu'il se meut de D vers C, ou du moins il s'en forme de petits globules, lesquels s'arrêtent çà et là dans la partie antérieure du tuyau qui se trouve vide.

Il se présente encore un autre inconvénient bien plus considérable, qui vient du grand frottement du mercure contre le verre, et qui empêche ce baromètre d'être à beaucoup près aussi sensible que le baromètre ordinaire. En effet, d'habiles observateurs nous assurent avoir remarqué souvent que si le mercure hausse ou baisse d'une demi-ligne ou d'une ligne entière dans le baromètre ordinaire, il demeure encore à sa même place dans le tuyau C D : mais si la variation augmente dans le baromètre ordinaire, il se fait alors dans le tuyau C D un très-grand mouvement, en sorte que la marche de ce baromètre est beaucoup moins réglée que celle du baromètre ordinaire. Mussch.

Ces raisons font que plusieurs personnes préfèrent le baromètre diagonal, dans lequel l'espace de variation est beaucoup plus grand que dans le baromètre commun, et duquel ils croient les variations plus régulières que celles des autres. Le chevalier Morland a imaginé pour cet effet un tuyau incliné B E C (fig. 5.) car il est évident que le mercure s'élevant à la même hauteur dans un baromètre droit, et dans un baromètre recourbé, ses variations seront beaucoup plus sensibles dans le tuyau incliné B E C, que si ce tuyau était vertical, et d'autant plus sensibles, que le tuyau sera plus incliné, puisque le mercure pour s'élever, par exemple, d'une ligne en hauteur perpendiculaire, aura trois ou quatre lignes ou même davantage à parcourir dans la longueur du tuyau. Cette invention est pourtant sujette à plusieurs inconvénients ; car la surface du mercure dans le tuyau B E, n'est pas parallèle à l'horizon, mais elle est convexe et inclinée ; or cela posé, il est difficîle de savoir à quel point on doit fixer la hauteur du mercure. De plus le coude qui est en B, rend la surface du tuyau fort raboteuse en cet endroit-là, et les inégalités de la surface produisant une résistance à l'abaissement ou à l'élevation du mercure, les variations de ce baromètre ne sont pas aussi promptes qu'elles le devraient être. Ce dernier inconvénient est d'autant plus grand, que le tuyau B E C fait un plus grand coude en B ; ainsi la sensibilité, pour ainsi dire, des variations de ce baromètre, est alors compensée par leur lenteur. Mussch.

Baromètre à roue : c'est une invention du docteur Hook, qui rend les altérations de l'air plus sensibles ; il est composé d'un baromètre commun vertical, auquel on ajoute deux poids A et B (fig. 5.) pendus à une poulie, dont l'un est en liberté à l'air, et l'autre restant sur la surface du mercure dans le tuyau, s'élève et s'abaisse avec lui. Le poids A communique son mouvement à la poulie, et cette poulie a autour de son pivot une longue aiguille L K, qui montre sur un grand cercle gradué M N O P, les variations de la hauteur du mercure dans le baromètre. De plus, le tuyau du baromètre est surmonté d'un gros globe A B, et la petite boule B, qui est en liberté dans l'air, est à-peu-près égale en pesanteur à la boule A. Comme le globe A B a beaucoup de diamètre par rapport à celui du tuyau, un abaissement peu considérable du mercure dans ce globe, peut faire monter le mercure dans le tuyau F A, jusqu'à la hauteur de trois pouces. Supposons maintenant que toute la circonférence de la poulie F D soit de trois pouces, elle fera donc un tour lorsque le mercure montera ou s'abaissera de trois pouces, de sorte que l'aiguille L K fera alors un tour aussi ; et si le diamètre du cercle M N O P est d'un pied, le mercure ne pourra s'abaisser ou s'élever de trois pouces, que l'aiguille ne parcoure environ trois pieds. Ce baromètre montre assez bien les variations considérables de la hauteur du mercure : mais aussi-tôt que le mercure vient à baisser ou à monter dans le tuyau A F, et qu'il ne fait par conséquent que commencer à devenir un peu convexe ou un peu concave, la petite boule A n'a pas assez de mouvement pour faire tourner un peu la poulie S D, parce que cette poulie est sujette à quelque frottement sur son axe : ce qui empêche d'apercevoir les variations peu considérables de la hauteur du mercure : mais lorsque la poulie commence à se mouvoir, son mouvement est plus grand qu'il ne devrait être alors. Voilà sans-doute un inconvénient auquel on ne peut remédier qu'avec beaucoup de peine. Ce baromètre est encore sujet à d'autres inconvénients qu'on a eu soin de marquer dans les Transactions Philosoph. n°. 185. page 241. aussi n'en fait-on aucun usage. Mussch.

Baromètre conique. C'est une machine plutôt curieuse qu'utile. Elle consiste en un tuyau conique verticalement placé, dont l'extrémité supérieure, et qui est la plus petite, est fermée hermétiquement. Ce baromètre n'a point de vaisseau ou de bassin, sa figure conique y suppléant, pourvu que l'extrémité inférieure de ce tuyau ait un diamètre fort petit : car alors le mercure se soutient de lui-même dans ce tuyau, étant soutenu par les particules de l'air, comme par un piston solide ou un fond. Quand ce tuyau est rempli, si le mercure s'y soutient, son poids est équivalent au poids de l'atmosphère ; et si l'atmosphère varie, le mercure montera ou descendra. Ainsi quand le poids de l'atmosphère s'augmente, le mercure est chassé dans la partie du tuyau la plus étroite R ; par ce moyen la colonne est étendue, et son poids est augmenté. Au contraire quand l'atmosphère décroit, le mercure s'abaisse dans la partie la plus large du tuyau ; et par ce moyen sa colonne est plus courte et sa pression par conséquent est affoiblie.

Pour rendre ceci plus intelligible, supposons que ce baromètre soit représenté par le tuyau A B (fig. 6.) qui est conique, et que ce tuyau étant renversé, se trouve rempli de trente pouces de mercure depuis A jusqu'à C ; et comme la variation du mercure dans le baromètre est de trente à vingt-sept pouces, supposons que la même quantité de mercure A C dans la partie inférieure du tuyau D B, ait la hauteur D B de vingt sept pouces ; alors il est certain que lorsque le mercure se trouvera dans le baromètre ordinaire à la hauteur de trente pouces, le mercure dans le tuyau A B occupera l'espace A C ; et quand le mercure sera dans le baromètre à vingt-sept pouces, le mercure du tuyau occupera l'espace D B ; ainsi la variation du mercure dans le baromètre sera depuis A jusqu'à D, qui est un espace de près de trente pouces, pendant que cette variation ne sera que de trois pouces dans le baromètre ordinaire. Ce baromètre est de l'invention de M. Amontons. Mussch.

L'inconvénient de ce baromètre est que pour empêcher le mercure et l'air de changer de place, et de se mêler ensemble, il faut que le diamètre intérieur du tuyau soit très-petit ; et cette petitesse rend le frottement de la liqueur si sensible, qu'elle peut l'empêcher d'agir librement : ainsi cet instrument n'est guère bon que pour les marins, qui n'y regardent pas de si près, et qui s'en servent depuis trente-cinq ans. parce qu'il est fort commode. En effet, il suffit de le renverser lorsqu'on le veut garder, et quand on veut connaître le poids de l'air, il suffit de prendre le tuyau à la main, et de le tenir dans une situation verticale. Pour empêcher que le mercure n'en sorte par en-bas, comme il pourrait arriver dans les mouvements violents du vaisseau, on met au-dessous du tuyau, proche de B, un peu de coton à-travers lequel l'air passe librement ; et s'il arrive alors par quelque accident qu'il tombe un peu de mercure de la colonne A D, il suffit de retourner le tuyau ; et ce qui est tombé se rejoint d'abord à la colonne. Il y a encore un autre baromètre à l'usage des marins. Ce baromètre qui a été aussi inventé par le docteur Hook, pour pouvoir servir sur mer, où le roulis du vaisseau rendrait les autres impraticables, n'est autre chose qu'un thermomètre double, ou deux tubes à demi remplis d'esprit-de-vin, dont l'un est fermé hermétiquement par les deux bouts, et renferme une certaine quantité d'air ; et l'autre est fermé par un bout, et ouvert par l'autre. Or l'air, comme l'on sait, agit sur l'esprit-de-vin, et le fait monter par deux raisons ; par sa propre gravité, comme dans le tube de Torricelli ; et par sa chaleur, comme dans le thermomètre. Si donc les deux tubes sont divisés par degrés, en sorte qu'ils s'accordent l'un avec l'autre au temps où l'air y est renfermé, il s'ensuit que lorsqu'ils s'accorderont encore ensuite, la pression de l'atmosphère sera la même que dans le temps que l'air a été renfermé. Si dans le thermomètre qui est ouvert à l'air, la liqueur est plus haute, en considérant en même temps combien l'autre s'élève ou s'abaisse par l'opération de la chaleur ou du froid, on verra que l'air est plus pesant : au contraire, quand le thermomètre ouvert est plus bas en comparaison de l'autre, l'air est plus leger que dans le temps que l'instrument a été divisé par degrés. Mais il faut se ressouvenir que la condensation et la raréfaction de l'air, sur quoi toute cette machine est établie, ne dépendent pas seulement du poids de l'atmosphère, mais qu'elles sont aussi causées par l'action de la chaleur et du froid. C'est pourquoi cette machine ne peut pas être nommée un baromètre, mais plutôt un instrument qui indique les altérations de l'air. Voyez MANOMETRE.

Cependant cet instrument est regardé comme étant fort bon pour faire connaître si le temps doit être mauvais, de même que les changements de vents, et l'approche du froid. Transact. Philos. n°. 429. pag. 133.

Le baromètre statique, dont se sont servis Boyle, Otto de Guericke, etc. est défectueux, tant par l'action du chaud, que parce qu'il est peu précis et peu commode : il consiste en une assez grande bouteille de verre, tenue en équilibre par un poids de cuivre, dans des bassins de balance fort legers : ces deux corps étant d'égale pesanteur, mais d'inégal volume, si le milieu ou fluide dans lequel ils pesent également est changé, le changement de leur poids s'en suivra ; de sorte que si l'air devient plus pesant, le corps le plus grand deviendra plus leger en apparence, parce qu'il perdra plus de son poids que le plus petit, qui est le plus dense : mais si le milieu est plus leger, alors le corps le plus grand l'emportera sur le plus petit.

PHENOMENES du baromètre. Ces phénomènes sont différents, et les auteurs ne sont pas plus d'accord sur leurs causes, que sur l'usage que l'on en peut faire pour prédire les changements de temps. Sur le haut de la montagne de Snouden en Angleterre, qui a 1240 taises de hauteur, le docteur Halley trouva le mercure de trois pouces huit dixiemes plus bas qu'au pied ; d'où il parait que le mercure baisse de 1/10 de pouce par trente taises. Derham a fait pareillement des expériences de la hauteur du mercure sur le haut et au pied de cette montagne, et croit qu'il faut 32 taises d'élévation perpendiculaire, pour que le mercure baisse de 1/10 d'un pouce : d'où cet auteur a cru qu'on pouvait tirer non-seulement la hauteur de l'atmosphère, mais aussi une méthode pour mesurer la hauteur des montagnes. Suivant cet auteur, si le mercure ici bas est à 30 pouces, à 1000 pieds de hauteur, il sera à 28 9/10 pouces ; à 2000 pieds, à 27 86/100 ; à 3000, 26 85/100 ; à 4000, 25 85/100 ; à 5000, 24 93/100 ; à un mille, 24 67/100 ; à deux mille, 20 29/100 ; à cinq mille, 11 28/100 ; à dix mille, 4 24/100 ; à quinze mille, 1 60/100 ; à vingt mille, 0 95/100 ; à trente mille, 8/1000 ; à quarante mille, 12/1000. Mais on suppose dans ce calcul que l'atmosphère est par-tout d'une densité à-peu-près égale, et que si on la divise en portions d'égale hauteur, le poids de ces portions est presque le même, ce qui est bien éloigné d'être vrai ; car l'atmosphère devient continuellement moins dense à mesure qu'on s'éloigne de la terre, et ainsi une même quantité d'air occupe toujours un volume de plus en plus grand. C'est pourquoi si on divise l'atmosphère en différentes couches toutes d'une hauteur égale, ces couches peseront d'autant moins qu'elles seront plus éloignées du centre de la terre. M. Mariotte, dans son Essai sur la nature de l'air, a donné un calcul de la hauteur de l'atmosphère, fondé sur les observations du baromètre faites au sommet des montagnes. Ce calcul est fondé sur ce principe, que l'air se condense en raison des poids dont il est chargé ; l'auteur trouve 15 lieues environ pour la hauteur de l'atmosphère ; qui est aussi à-peu-près la quantité que M. de la Hire trouve par la théorie des crépuscules. M. Mariotte ajoute aussi à son calcul un essai de méthode pour déterminer par les mêmes principes la hauteur des montagnes : mais on regarde aujourd'hui assez généralement toutes ces méthodes, comme plus curieuses que sures et utiles. Voyez ATMOSPHERE.

On a trouvé que la plus grande hauteur du baromètre à Londres, était à 30 pouces 3/8, et son plus grand abaissement à 28 pouces ; à l'observatoire de Paris, sa plus grande élevation est de 28 pouces 4/10, et sa moindre 26 4/10 sur la mesure du pied de Paris, qui est plus grand de 9/144 que celui de Londres : ces observations s'accordent à celles qui ont été faites par M. Wolf à Hall en Saxe. A Alger le mercure s'élève à 30 pouces 2/10 ou 3/10 par le vent de nord, quoique ce vent soit souvent accompagné de pluie et d'orage. Il est vrai qu'il y a une expérience dans laquelle la hauteur du mercure surpasse de beaucoup ces nombres ; le mercure étant parfaitement purifié et suspendu dans un tube à la manière de Torricelli, monte à la hauteur de 75 pieds, quoiqu'à la moindre secousse il baisse à la hauteur ordinaire. Ce phénomène n'a pas causé peu d'embarras lorsqu'il a été question d'en découvrir la cause. Voici l'explication que M. Musschenbroeck en donne dans ses essais de Physique. Lorsqu'on a purgé le mercure de l'air qu'il contient, il devient un corps beaucoup plus dense que lorsque l'air se trouvait placé entre ses parties : ce mercure peut aussi alors s'attacher fort étroitement à la surface du verre ; ce qui fait que ses particules y restent suspendues ; et comme ces particules s'attirent très-fortement, elles soutiennent des particules voisines, et le mercure demeure suspendu par ce moyen à une très-grande hauteur : mais si on secoue le tuyau, alors les particules du mercure qui étaient contiguës au verre en sont détachées, et tout retombe. On peut voir dans l'ouvrage cité l'explication plus détaillée de ce phénomène singulier, et la réfutation des toutes les autres hypothèses qu'on a imaginées pour en rendre raison.

M. Boyle remarque que les phénomènes du baromètre sont si variables, qu'il est extrêmement difficîle de donner des règles générales de son élevation ou de son abaissement. Il semble cependant que ce soit une règle assez générale, que quand les vents soufflent de bas en haut, le mercure est plus bas : mais cela n'est pas toujours vrai. L'illustre M. Halley nous a donné les observations suivantes. Dans un temps calme, quand il doit pleuvoir, le mercure est communément bas, et il s'élève quand le temps doit être serein. Quand il doit faire de grands vents accompagnés de pluie, le mercure descend plus ou moins bas, selon le vent qui souffle. Toutes choses égales, la grande élevation du mercure arrive quand les vents soufflent de l'est ou du nord-est. Après que le vent a soufflé violemment, le mercure, qui, pendant le temps que le vent soufflait était fort bas, s'élève avec rapidité. Dans un temps calme, pendant lequel il gele, le mercure se tient haut. Dans les lieux les plus exposés au nord, le mercure souffre plus de variation que dans les lieux exposés au midi : à Naples il varie rarement de plus d'un pouce ; au lieu qu'à Upminster il varie de 2 5/10 pouces, et à Petersbourg de 3 31/100. Transact. Philos. n °. 434. p. 401. Entre et proche les tropiques, le mercure ne varie que peu ou point du tout.

Le docteur Beal remarque que, toutes choses égales, le mercure est plus haut dans l'hiver que dans l'été, et ordinairement le matin qu'à midi ; qu'il l'est encore dans un temps serein un peu plus que devant ou après, ou que quand il pleut ; et qu'il descend ordinairement plus bas après la pluie qu'auparavant : s'il arrive qu'il s'élève après qu'il a plu, c'est ordinairement un indice de beau temps. Il arrive cependant des changements considérables dans l'air, sans que le baromètre varie sensiblement.

Par rapport à l'usage des baromètres, un habîle physicien remarque que par son secours nous recouvrons la connaissance qui est dans les animaux, et que nous avons perdue, parce que nos corps ne sont point exposés à l'air comme les leurs : et parce que nous nous livrons à l'intempérance, et que nous corrompons la sensibilité de nos organes. Par rapport aux prédictions des baromètres, M. Halley déjà cité trouve que l'élévation du mercure présage le beau temps après la tempête, et que le vent soufflera de l'est ou du nord-est ; que son abaissement marque que ce seront les vents de sud ou d'ouest qui régneront avec la pluie, ou présage des vents de tempêtes, ou tous les deux ; que dans l'orage, si le mercure vient à s'élever c'est une marque que la tempête passera bien-tôt.

M. Patrick remarque qu'en été l'abaissement du mercure annonce le tonnerre ; et que quand l'orage arrive immédiatement après la chute du mercure, il est rarement de longue durée : la même chose s'observe du beau temps, s'il arrive immédiatement après l'élévation du mercure. Enfin Derham comparant avec ses observations celles que Scheuczer a faites à Zurich, sur les baromètres, remarque que dans le cours de l'année le mercure varie plus à Zurich, quelquefois d'un et même de deux pouces ; et il conclud de-là que la situation de Zurich est de près de 1/24 d'un mille d'Angleterre plus haute que celle d'Upminster. Il trouve d'ailleurs un accord remarquable entre les observations faites à Zurich et les siennes ; un des baromètres suivant à peu près les mêmes variations que l'autre : cependant cet accord n'est pas si parfait que celui des baromètres des endroits plus proches, comme ceux de Londres, de Paris, etc.

Causes des phénomènes du baromètre. Les hypothèses par lesquelles on a voulu expliquer les phénomènes du baromètre sont presque infinies. Il est vrai que le poids de l'atmosphère est généralement regardé comme la cause principale des mouvements du baromètre, et les altérations de l'air comme la cause accidentelle ; cependant cette opinion n'est pas suivie universellement. Un savant auteur, par exemple, regarde les changements du baromètre, comme étant causés par le froid et par la chaleur. Il dit avoir souvent remarqué que dans les orages, etc. quand le mercure est bas, il se divise et pousse en en haut des particules, qu'il appelle des espèces de pellicules ou d'écorchures ; et il soutient que toutes les fois que le mercure descend, il est plus ou moins dégagé de ces pellicules : que dans ce mouvement les parties du mercure sont resserrées ensemble, et que c'est par cette raison qu'il descend ; que de plus il s'échappe alors de petites particules d'air, qui étaient renfermées dans le mercure, et qui s'élevant dans la partie supérieure du tuyau, force le mercure à descendre, les colonnes en étant raccourcies par la sortie de ces particules, et par leur position dans la partie supérieure du tuyau : c'est pourquoi, ajoute-t-il, le mercure s'élève dans le temps très-froid à la même hauteur que dans le temps très-chaud, entre les deux tropiques, parce qu'il est dans son état naturel ; et il baisse dans les degrés intermédiaires de chaud et de froid, parce qu'il est resserré, et que ses parties sont comme refoulées et comprimées ensemble. Mais ce sentiment ne rend pas de raison fort vraisemblable des phénomènes.

Les variations de l'atmosphère doivent être regardées comme la cause de celles du baromètre : mais il n'est pas aisé de déterminer d'où viennent ces variations dans l'atmosphère, puisqu'il est difficîle de trouver un seul principe dans la nature auquel on puisse rapporter des variations si grandes et si irrégulières. Il est probable que les vents qui soufflent de tel ou tel endroit les occasionnent, de même que les vapeurs et les exhalaisons de la terre : les changements d'air dans les régions voisines, et même le flux et reflux que la lune occasionne dans l'air, peuvent y contribuer également.

Cette dernière cause doit certainement entrer parmi celles qui produisent les variations du baromètre : mais son effet ne doit pas être fort considérable à cet égard, quoique l'action de la lune élève à une hauteur très-grande les eaux de l'Océan. Voici la raison de cette différence : supposons que l'eau s'élève en pleine mer à la hauteur de 60 pieds par l'action de la lune : qu'on mette à la place de l'Océan l'atmosphère ou tel autre fluide qu'on voudra, il est certain qu'il devra s'élever à peu près à la même hauteur ; car l'atmosphère ayant moins de parties que l'Océan, il y aura, à la vérité, une moindre masse à mouvoir, mais aussi la force qui agite cette masse en attirant chacune de ces parties, sera aussi plus petite en même raison. L'air s'élevera donc à la hauteur de 60 pieds en montant, et descendra au-dessous de sa hauteur naturelle de l'espace de 60 pieds, c'est-à-dire qu'il variera en hauteur de 120 pieds en tout. Or le mercure étant 11000 fois plus pesant que l'air, une variation de 120 pieds dans une colonne d'air, ne doit faire varier le mercure que d'environ deux lignes. C'est à-peu-près la quantité dont on trouve qu'il doit hausser sous l'équateur, dans la supposition que le vent d'est y fasse 8 pieds par seconde. Or comme il y a une infinité d'autres causes qui font varier le baromètre, il n'est pas surprenant que l'on n'ait pas distingué la petite variation que l'action du soleil et de la lune y peuvent produire en élevant ou en abaissant les colonnes de l'atmosphère. Cependant il serait à souhaiter que les observateurs s'y rendissent attentifs dans la suite. Rech. sur les vents. Paris 1746.

Le savant Halley croit que les vents et les exhalaisons suffisent pour produire les variations du baromètre ; et d'après cette opinion il en a donné une explication probable : nous allons donner la substance de son discours sur ce sujet. 1°. Ce sont, dit-il, les vents qui altèrent le poids de l'air dans un pays particulier, et cela, soit en apportant ensemble et en accumulant une grande quantité d'air, et en chargeant ainsi l'atmosphère dans un endroit plus que dans l'autre, ce qui arrive lorsque deux vents soufflent en même temps de deux points opposés ; soit en enlevant une partie de l'air, et en déchargeant par-là l'atmosphère d'une partie de son poids, et lui donnant le moyen de s'étendre davantage ; soit enfin en diminuant et soutenant, pour ainsi dire, une partie de la pression perpendiculaire de l'atmosphère, ce qui arrive toutes les fois qu'un seul vent souffle avec violence vers un seul côté, puisqu'on a expérimenté qu'un souffle de vent violent, même artificiel, rend l'atmosphère plus légère, et conséquemment fait baisser le mercure dans le tube qui se trouve proche de l'endroit où se fait ce souffle, et même dans un tube qui en est à une certaine distance. Voyez Transactions Philosophiques, n°. 292.

2°. Les parties nitreuses et froides, et même l'air condensé dans les pays du Nord, et chassé dans un autre endroit, chargent l'atmosphère et augmentent sa pression.

3°. Les exhalaisons seches et pesantes de la terre augmentent le poids de l'atmosphère et sa force élastique, de même que nous voyons la pesanteur spécifique des menstrues être augmentée par la dissolution des sels et des métaux.

4°. L'air etant rendu plus pesant et plus fort par les causes que nous venons de rapporter, devient plus capable de supporter des vapeurs, qui étant mêlées intimement avec lui et y surnageant, rendent le temps beau et serein ; au contraire l'air étant rendu plus leger par les causes opposées à celles que nous venons de dire, devient hors d'état de soutenir les vapeurs dont il est chargé, lesquelles venant à se précipiter en-bas, se ramassent en nuages, qui par la suite se réunissent en gouttes de pluie. Cela étant ainsi, il parait assez évident que les mêmes causes qui augmentent le poids de l'air, et le rendent plus propre à soutenir le mercure dans le baromètre, occasionnent pareillement le beau temps et le chaud ; et que la même chose qui rend l'air plus leger et moins capable de soutenir le mercure, produit les nuages et la pluie : ainsi, 1°. quand l'air est très-leger et que le mercure du baromètre est le plus bas, les nuées sont basses et vont fort vite ; et quand après la pluie les nuages se dissipent et que l'air devenant calme et serein s'est purgé de ses vapeurs, il parait extrêmement net, et on y peut voir des objets à une distance considérable.

2°. Quand l'air est plus grossier et que le mercure est haut dans le tube, le temps est calme, quoiqu'il soit en même temps quelquefois un peu couvert, parce que les vapeurs sont dispersées également : s'il parait alors quelques nuages, ces nuages sont hauts et se meuvent lentement ; et quand l'air est très-grossier et très-lourd, la terre est ordinairement environnée de petits nuages épais, qui paraissent y être formés par les exhalaisons les plus grossières, que l'air inférieur est encore capable de soutenir : ce que ne peuvent plus faire les parties supérieures de l'air, qui sont trop legeres pour cela.

3°. Ainsi, ce qui est cause qu'en Angleterre, par exemple, le mercure est au plus haut degré dans le temps le plus froid quand le vent est nord ou nord-est, c'est qu'alors il y a deux vents qui soufflent en même temps, et de deux points à peu près opposés ; car il y a un vent de sud-est constant, qui souffle dans l'Océan atlantique à la latitude qui répond à l'Angleterre ; à quoi on peut ajouter que le vent de nord y amène l'air froid et condensé des régions du nord.

4°. Dans les régions du nord la variation du mercure est plus sensible que dans celles du midi, les vents étant plus fréquents, plus violents, plus variables et plus opposés l'un à l'autre dans les pays septentrionaux que dans les méridionaux.

Enfin, il s'ensuit de-là qu'entre les tropiques la variation du mercure est très-peu sensible, parce que les vents y sont très-modérés, et qu'ils soufflent ordinairement dans le même sens.

Cette hypothèse, quoiqu'elle paraisse propre à expliquer plusieurs mouvements du baromètre, n'est pas cependant à l'abri de toute critique : car 1°. si le vent est le seul agent qui produise ces altérations, il ne se fera pas d'altération sensible si le vent ne l'est pas, et il n'y aura jamais de vent sensible sans variation du mercure, ce qui est contraire à l'expérience.

2°. Si le vent est le seul agent, les altérations de la hauteur du mercure doivent être en différents sens dans les différents lieux de la terre, selon que le vent y souffle ou n'y souffle pas ; ainsi, ce qu'un tube perdra à Londres, sera regagné sur un autre à Paris, ou à Zurich, etc. mais selon plusieurs Physiciens, on remarque le contraire : car dans toutes les observations faites jusqu'à présent, les baromètres de différents lieux, disent-ils, s'élèvent et baissent en même temps, des sorte qu'il faut qu'il y ait une égale altération dans le poids absolu de l'atmosphère, qui occasionne ces variations. Ce fait est-il bien vrai ?

Enfin en omettant toute autre objection, la chute du mercure avant la pluie, et son élévation après la pluie, semblent être inexplicables dans cette hypothèse ; car en supposant deux vents contraires qui chassent les colonnes d'air qui sont au-dessus de Londres, tout ce qu'ils pourront faire, sera de couper une certaine partie de l'air qui est au-dessus de Londres : en conséquence il pourra arriver que le mercure baisse, mais il n'y a pas de raison apparente pour que la pluie s'ensuive. Il est vrai que les vapeurs pourront s'abaisser, mais seulement jusqu'à ce qu'elles viennent dans un air de la même pesanteur spécifique qu'elles ; et arrivées-là, elles y resteront sans descendre plus bas. Leibnitz a tâché de suppléer au défaut de cette hypothèse, et d'en donner une nouvelle. Il prétend donc qu'un corps plongé dans un fluide, ne pese avec ce fluide que pendant qu'il en est soutenu ; de sorte que quand il cesse de l'être, c'est-à-dire qu'il tombe, son poids cesse de faire partie de celui du fluide, qui par ce moyen devient plus léger. Ainsi, ajoute-t-il, les vapeurs aqueuses, pendant qu'elles sont soutenues dans l'air, augmentent son poids : mais quand elles tombent, elles cessent de peser avec lui, et le poids de l'air, est diminué ; le mercure baisse donc, et la pluie tombe. Mais le principe de Leibnitz est faux, comme il parait par les expériences du docteur Desaguliers. D'ailleurs, en supposant que les vapeurs par leur condensation sont forcées de descendre, et cessent de peser avec l'atmosphère, elles baisseront jusqu'à ce qu'elles arrivent à la partie de l'atmosphère, qui est de la même pesanteur spécifique qu'elles, &, ainsi que nous l'avons déjà dit au sujet de M. Halley, y resteront suspendues comme auparavant. Si le mercure baisse, ce sera seulement durant le temps de cet abaissement des vapeurs ; car les vapeurs étant une fois fixées et en repos, la première pesanteur renaitra, pour ainsi dire, ou si elle ne revient pas, au moins la pluie ne suivra pas la chute du mercure.

Quelques auteurs, pour expliquer ces mêmes variations, ont imaginé l'hypothèse suivante. Que l'on suppose un nombre de vésicules d'eau flottantes sur une partie de l'atmosphère, et sur une partie déterminée de la surface du globe terrestre ; par exemple, sur A B, fig. 21 ; si les vésicules supérieures sont condensées par le froid des régions supérieures, leur gravité spécifique s'augmentera et elles descendront ; la couche horizontale 1, par exemple, descendra à 2, 2 à 3, etc. là se rencontrant avec d'autres vésicules qui ne sont pas encore précipitées, elles s'amoncellent et se changent en vésicules plus grandes, comme il doit s'ensuivre des lois de l'attraction.

Si nous choisissons le vent pour agent, supposons qu'il souffle horizontalement ou obliquement : dans le premier cas les vésicules 8 seront chassées contre 9, celles-ci contre 10, etc. dans le second cas la vésicule 7 sera chassée contre 4, 8 contre 3, etc. par ce moyen les particules s'augmenteront et formeront de nouvelles et de plus grandes vésicules qu'auparavant ; de sorte que leur nombre, qui auparavant était, si l'on veut un million, sera alors réduit, par exemple, à 100000.

Mais la même réunion par laquelle leur nombre est diminué, augmente en quelque manière leur pesanteur spécifique ; c'est-à-dire qu'il y a plus de matière sous d'égales surfaces : ce qui est aisément prouvé par les principes géométriques ; car dans l'augmentation de la masse des corps homogènes, celle de la surface n'est pas aussi grande que celle de la solidité : celle de la première est comme le carré du diamètre ; et celle de l'autre, comme son cube.

Or lorsque la même quantité de matière se trouve sous une moindre surface, elle doit perdre moins de son poids par la résistance du milieu : car il est évident qu'un corps qui se meut dans un fluide, perd une partie de sa pesanteur par le frottement de ses parties contre celle du fluide. Or ce frottement est évidemment en raison de la surface ; c'est pourquoi la surface devenant moindre à proportion de la masse, la résistance l'est aussi : conséquemment les vésicules, dont la pesanteur, avant la jonction, était égale à la résistance du milieu, trouvant cette résistance diminuée, descendront avec une vitesse proportionnelle à la diminution réelle de leur surface.

Quand elles descendent et qu'elles arrivent aux parties plus grossières de l'atmosphère, par exemple, aux points 4, 5, etc. leur masse et leur surface sont augmentées par de nouvelles réunions ; et ainsi par de nouvelles et constantes augmentations, elles deviennent de plus en plus capables de surmonter la résistance du milieu, et de continuer leur chute à-travers toutes les couches de l'air jusqu'à ce qu'elles atteignent la terre ; leur masse étant alors excessivement grossie, forme des gouttes de pluie.

Maintenant dans la descente des vapeurs, il faut considérer comment le baromètre est affecté par cette descente. Avant qu'aucune des vésicules commence à baisser, soit par l'action du froid, ou par celle du vent, elles nagent toutes dans la partie de l'atmosphère A B D C, et pesent toutes vers le centre E. Or chacune d'elles demeurant respectivement dans une partie du milieu, qui est d'une pesanteur spécifique égale, perdra une partie de son poids égale à celle d'une partie du milieu qui aurait le même volume ; c'est-à-dire, que chacune d'elle perdra toute sa pesanteur : mais alors cette pesanteur qu'elles auront perdue, sera communiquée au milieu qui pressera sur la surface de la terre A B, avec son propre poids joint à celui de ces vésicules. Supposez alors que cette pression conjointe agisse sur le mercure élevé dans le baromètre à trente pouces : par la réunion des vésicules, faite comme nous avons dit ci-dessus, leur surface, et conséquemment leur frottement sont diminués : c'est pourquoi elles communiqueront moins de leur pesanteur à l'air, c'est-à-dire une partie moindre que tout leur poids ; et conséquemment elles descendront avec une vitesse proportionnelle à ce qui leur reste de pesanteur, ainsi que l'on vient de le dire. Or comme les vésicules ne peuvent agir sur la surface de la terre A B que par la médiation de l'air, leur action sur la terre sera diminuée en même proportion que leur action sur le milieu ; d'où il est évident que la surface de la terre A B sera alors moins pressée qu'auparavant : et plus les vésicules garderont de leur poids qu'elles n'auront point communiqué au milieu, plus elles accélereront leur propre descente ; c'est-à-dire, que la vitesse de l'abaissement des vésicules ira toujours en augmentant : en effet, quand les vésicules descendent, la masse augmente continuellement, et au contraire la résistance du milieu et la pression sur la terre diminuent, et le mercure baissera par conséquent pendant tout le temps de leur chute. De-là il est aisé de concevoir que les vésicules qui ont une fois commencé à tomber, continuent ; que le mercure commence à tomber en même temps, et qu'il continue et cesse en même temps qu'elles.

On peut faire une objection contre ce système ; savoir que les vésicules étant mises en mouvement, et heurtant contre les particules du milieu, rencontrent une résistance considérable dans la force d'inertie du milieu, par laquelle leur descente doit être retardée, et la pression de l'atmosphère rétablie. On peut ajouter que la pression additionnelle sera plus grande à proportion de la vitesse de la chute des vésicules, une impulsion forte étant requise pour surmonter la force d'inertie des particules contiguès du milieu.

Mais les partisans de l'opinion que nous rapportons, croient pouvoir renverser cette objection par la raison et l'expérience : car, disent-ils, outre que la force d'inertie de l'air peut être très-foible à cause de son peu de densité, nous voyons que dans l'eau, qui est un milieu fort dense et non élastique, un morceau de plomb, en descendant à-travers le fluide, pese considérablement moins que quand il y est soutenu en repos. Cependant ce fait est nié par M. Musschenbroeck. Essays de Physique, §. 234.

Nous avons cru devoir rapporter assez au long cette explication qui, quoiqu'ingénieuse, n'a pas, à beaucoup près, toute la précision qu'on pourrait désirer. Mais dans une matière si difficile, il ne nous reste presque autre chose à faire, que d'exposer ce que les philosophes ont pensé. Voyez une dissertation curieuse, de M. de Mairan, sur ce sujet, Bordeaux, 1715. Voyez aussi Musschenbroeck. Cet auteur regarde avec raison les prédictions du baromètre, comme peu sures.

Voici, selon M. Musschenbroeck, la meilleure manière de faire un baromètre ordinaire ou commun ; ces sortes de baromètres étant les meilleurs de tous, à ce qu'il prétend. Premièrement on doit prendre du mercure bien pur, et être bien assure qu'il ne soit pas falsifié ; il faut le passer par un cuir bien net, et le verser dans un poèlon neuf et verni, que l'on couvre d'un couvercle qui s'y ajuste bien. On doit mettre ce poèlon couvert sur un feu de charbon bien pur, et faire bouillir le mercure : il devient alors volatil, mais on le retient à l'aide du couvercle qui est posé dessus. En faisant ainsi bouillir le mercure, on le purifie de l'eau et de l'air qui se tenaient entre ses parties. On doit avoir des tuyaux de verre, nouvellement faits, dont on se sert pour les baromètres ; et afin qu'ils ne soient ni sales en-dedans, ni remplis d'air, il faut avoir soin de les faire sceller hermétiquement de chaque côté dans la Verrerie, avant que de les transporter. Lorsqu'on voudra les remplir, on peut les ouvrir par un bout avec une lime, et les tenir pendant ce temps-là près d'un feu oblong, pour les rendre également chauds, et même fort chauds, afin que l'humidité et l'air qui tient aux parais, se détache et se dissipe. Si on néglige de prendre cette précaution, l'air s'y attache avec tant de force, qu'il ne peut être chassé par le mercure qu'on verse dans le tuyau, mais il reste suspendu en plusieurs endroits. Pour réussir encore mieux à purger ce tuyau d'air, on ne fera pas mal d'attacher à un fil d'archal un morceau de chamois ou de cuir, et d'en former comme un piston de pompe, que l'on fera passer dans le tuyau de haut en bas et de bas en haut, à diverses reprises, pour détacher l'air qui y tient. Par ce moyen, le mercure qui est tout bouillant, pourra alors dissiper l'air, en le faisant sortir du tuyau chaud. On forme ensuite d'un tuyau large de baromètre un petit entonnoir de verre, et en l'allongeant on le réduit en un tuyau capillaire, lequel doit être un peu plus long que le tuyau qu'on doit remplir. Il faut d'abord bien nettoyer la partie supérieure de ce petit entonnoir, et la rendre bien seche et bien chaude en l'exposant devant le feu : on l'introduit ensuite dans le tuyau du baromètre, en sorte qu'il penetre jusqu'au fond, et on verse alors le mercure tout bouillant dans ce petit entonnoir, qui doit être bien chaud, afin que la chaleur du mercure ne le fasse pas sauter en pièces. Dès qu'on verse le mercure, il se précipite en bas, remplit le tuyau, et s'élève ensuite lentement. On doit avoir soin de verser dans l'entonnoir sans aucune interruption, afin que le mercure continue toujours de tomber sans s'arrêter, et que l'air n'ait pas lieu de s'insinuer entre ses parties. Lorsque le tuyau se trouve plein, on retire doucement le petit entonnoir. Voilà de quelle manière on peut remplir le tuyau aussi juste qu'il est possible ; et il parait alors dans toute sa longueur de couleur brune, et sans la moindre petite bulle d'air. Si l'on n'a point de tuyaux scellés, il faut avant que de remplir celui dont on se sert, le bien nettoyer en dedans, en le lavant avec de l'esprit-de-vin bien rectifié, et en attachant au bas d'un fil de laiton une petite courroie en manière de piston de pompe, que l'on pousse souvent dans le tuyau pour en détacher l'air, qui sans cela ne manquerait pas d'y rester suspendu. Après avoir ainsi nettoyé ce tuyau, on doit le faire sécher devant le feu, et le chauffer.

BAROMETRE portatif, est un baromètre construit de manière qu'on puisse le transporter d'une place à une autre, sans le déranger.

Il n'y a pas longtemps que le baromètre portatif était une chose peu commune ; à présent on en fait de portatifs de toutes les sortes ; ils sont tellement construits, que le mercure peut venir tout à fait jusqu'à l'extrémité du tube, qui est fermée hermétiquement : cet artifice empêche le mercure de balloter et de se répandre, et ne l'expose point au danger de casser le tube. Pour cela on attache sur le bord de la cuvette où plonge le tuyau, un cuir le plus fin que l'on peut, par le moyen duquel le mercure est contenu dans la cuvette, et on construit le baromètre de manière que sa partie supérieure se termine par un long cou étroit ; par ce moyen l'effort du mercure contre cette partie devient beaucoup moins considérable, et la partie supérieure du baromètre est moins en danger de se briser. Mais un tel baromètre est peu sur.

Phosphore du baromètre. M. Picard découvrit le premier en 1676 que le mercure de son baromètre secoué dans l'obscurité donnait de la lumière : mais quand on voulut faire l'expérience sur d'autres, il s'en trouva fort peu qui eussent ce privilège.

M. Bernoulli ayant fait l'expérience sur son baromètre, trouva qu'étant secoué fortement dans l'obscurité, il donnait une faible lueur.

Comme l'on pouvait soupçonner que la lumière, ou du moins une grande lumière, n'était si rare dans les baromètres, que parce qu'il n'y avait pas un vide parfait dans le haut du tuyau, ou que le mercure n'était pas bien purgé d'air, il s'assura par expérience qu'avec ces deux conditions, des baromètres n'étaient encore que très-foiblement lumineux ; et par conséquent que ce n'était-là tout au plus que des conditions ; et qu'il fallait chercher ailleurs une véritable cause. De plus son baromètre n'était en expérience que depuis quatre semaines ; lorsqu'il rendit de la lumière ; et ainsi on ne peut pas dire que la raison pourquoi plusieurs n'en rendraient pas, est peut-être qu'il y avait trop peu de temps qu'ils étaient en expérience.

M. Bernoulli avait remarqué que quand on secouait le baromètre, et que par conséquent on faisait aller le mercure avec rapidité, tantôt au-dessus, tantôt au-dessous du point d'équilibre, la lumière ne se montrait que dans la descente du mercure, et qu'elle paraissait comme attachée à sa surface supérieure. De-là il conjectura que quand par cette descente il se forme dans un tuyau un plus grand vide que celui qui y était naturellement, il peut sortir du mercure pour remplir ce vide en partie, une matière très-fine, qui était auparavant renfermée et dispersée dans les interstices très-étroits de ce minéral. D'ailleurs il peut entrer dans ce même moment par les pores du verre plus grands apparemment que ceux du mercure, une autre matière moins déliée, quoique beaucoup plus déliée que l'air ; et la matière sortie du mercure et toute rassemblée au-dessus de sa surface supérieure, venant à choquer impétueusement celle qui est entrée par les pores du verre, y fait le même effet que le premier élement de Descartes sur le second, c'est-à-dire produit la lumière.

Mais pourquoi ce phénomène n'est-il pas commun à tous les baromètres ? Pour l'expliquer, M. Bernoulli imagina que le mouvement de la matière subtîle qui sort du mercure avec impétuosité, lorsqu'il descend, pouvait être détruit, affoibli, interrompu, par quelque matière hétérogène au mercure qui se serait amassée sur sa surface supérieure, et y aurait été poussée par ce minéral plus pesant qu'elle ; que cette espèce de pellicule ne manquait pas de se former sur le mercure, dès qu'il n'était pas extrêmement pur ; que même quelque pur qu'il fût de lui-même, il contractait en peu de temps par le seul attouchement de l'air, les saletés qui composent cette pellicule ; qu'afin qu'il les contractât en un instant, il ne fallait que le verser en l'air de haut en bas, comme l'on fait ordinairement dans la construction des baromètres ; que ce mouvement lui faisait ramasser dans l'air plus de saletés qu'il n'aurait fait durant plusieurs jours étant en repos ; qu'enfin cela supposé, une méthode sure pour avoir un baromètre lumineux, était de le faire d'un mercure bien pur, et qui surtout, quand on le ferait entrer dans son tuyau, ne traversât point l'air et ne s'y souillât point.

Le succès des expériences répondit à tout ce raisonnement de M. Bernoulli, qu'il avait fait sans aucune expérience préalable, excepté peut-être ce qui regardait la pellicule formée sur la surface du vif-argent.

En effet, si on expose du vif-argent dans quelque vase à l'air libre, on trouvera au bout de quelque temps sa superficie extérieure trouble et couverte d'une pellicule très-mince, laquelle étant ôtée par le moyen d'une plume nette, la surface redevient polie : mais si on le laisse encore exposé à l'air, une autre pellicule, d'abord semblable à une toîle d'araignée qui s'épaissit avec le temps, s'étendra par-dessus. Cette pellicule parait au microscope fort semblable à de l'argent battu en feuille : en effet ce n'est qu'un tissu très-fin d'une espèce de mousse ou de poil très-fin, qui séparée du vif-argent par l'agitation de l'air, est repoussée à la surface ; et se mêlant là avec les corps hétérogènes que l'air y amene, forme cette espèce de pellicule. Cette pellicule parait plus ou moins dans toutes les liqueurs exposées à l'air ; elle est fermée par les corpuscules qui s'exhalent et retombent ensuite dessus. Si on laisse tomber de la hauteur d'un pied seulement une goutte de vif-argent le plus net qu'il soit possible, dans un vase, où il y en ait aussi de si net, que la superficie soit polie comme celle d'un miroir, la goutte tombant sur cette surface polie, la ternira à l'endroit où elle tombera ; preuve que toute nette qu'elle était, elle avait été infectée de l'impureté de l'air : ainsi quand on fait tomber le vif-argent goutte-à-goutte dans le baromètre, ces gouttes tombant les unes sur les autres, font crever les petites pellicules, qui bientôt après remontent à la surface, et se mettent entre la surface convexe du mercure et la surface concave du verre. En effet, si le tuyau étant ainsi rempli, on le renverse pour en faire un baromètre en le fermant du bout du doigt, on verra que le mercure en descendant dans le tuyau, laissera en arrière des restes de cette pellicule attachés aux parois du verre.

En supposant que cette pellicule couvre exactement les pores de la surface du vif-argent, il sera aisé de concevoir qu'elle bouche le passage à la matière renfermée dans le mercure, de même que le vif-argent qui passe par les peaux de presque tous les animaux, n'y saurait passer quand on n'en ôte pas cette peau fine que les Médecins appellent épiderme ou cuticule.

Rien de si nuisible à l'apparition de cette lumière que l'humidité ; car si l'on fait entrer de l'eau dans le tuyau, bien disposé d'ailleurs, avec le vif-argent, ou même de l'esprit-de-vin rectifié (quoique l'esprit-de-vin soit par lui-même inflammable), ces matières se mettant dans le tuyau au haut du vif-argent, font l'effet de la petite pellicule, qui est d'empêcher la lumière. Il faut donc que le tuyau soit bien dégraissé et net en-dedans. Cela posé, voici deux manières pour empêcher que le mercure ne contracte d'impuretés en passant dans le tuyau.

Première manière. Pour cela il faut plonger un tuyau d'environ trois pieds de long dans un vase d'assez petite hauteur, plein de mercure, le faire tremper dans ce mercure assez profondément, et incliner ce tuyau à la surface du mercure contenu dans le vase, le plus obliquement que le puisse permettre la hauteur du vase (M. Bernoulli faisait faire au sien un angle de 18 degrés à-peu-près avec l'horizon) ; ensuite sucer fortement par le bout supérieur, de façon que le tuyau s'emplisse à la fin tout entier de vif-argent. Lorsqu'il en est ainsi rempli, il faut faire boucher avec le doigt par une autre personne, le bout du tuyau qui trempe dans le mercure, et fermer ensuite soi-même aussi avec son doigt le bout supérieur du tuyau (il faut sucer tout de suite, de peur qu'en reprenant haleine, on ne rende le dedans du tuyau humide). Il est évident qu'en ce cas le mercure n'a point été sali par l'air, si ce n'est peut-être la première goutte qui est montée, et qui a essuyé toutes ces saletés ; aussi faut-il laisser entrer un peu de mercure dans sa bouche ; auquel cas, cette première goutte étant ôtée, le mercure sera le plus net qu'il puisse être. Le tuyau étant ainsi fermé avec le doigt par les deux bouts, il faut le mettre tremper par son extrémité dans un autre vase plus étroit que le premier, et rempli de mercure à une hauteur plus grande que le vase dans lequel on avait fait d'abord tremper le tuyau. Si on porte le tuyau en cet état avec le vase dans l'obscurité, le moindre balancement y produira une lueur capable d'éclairer à un pied de distance, assez pour pouvoir lire un caractère d'une grosseur médiocre.

IIe manière. Il faut mettre perpendiculairement un tuyau fermé par un bout dans un vase plein de mercure où il trempe par le bout ouvert, le poser avec ce vase dans la même situation, sous un récipient fait exprès pour cela, ensuite en retirer l'air qui sortira du tuyau par le vase en faisant des bulles sur la surface du mercure qui y est contenu : lorsqu'on en aura retiré le plus qu'il sera possible, il faudra le laisser rentrer ; il n'en pourra monter dans le tuyau à cause du mercure où il trempe par son bout ouvert. Cet air donc pesant sur la surface du mercure contenu dans le vase, fera monter le mercure dans le tuyau à la hauteur de 25 à 26 pouces, parce qu'on ne peut jamais tirer tout l'air du récipient, et que l'air qui dans ce cas reste dans le tuyau se condense, et augmente de force à mesure que le mercure y monte. Cet air étant très-purifié à cause de sa dilatation, le vif-argent en y passant demeurera net, et l'expérience de la lumière réussira aussi bien que dans la première manière, quoiqu'il y ait de l'air au haut du tuyau.

Quelqu'ingénieuse et vraisemblable que paraisse cette explication, néanmoins l'académie des Sciences à qui M. Bernoulli la communiqua (voyez année 1701 et suiv.) remarqua pour lors que quelques baromètres donnaient de la lumière sans avoir été faits avec les précautions de M. Bernoulli, et que quelques-uns faits avec les précautions rapportées ci-dessus n'en donnaient point. C'en fut assez pour qu'elle suspendit son jugement.

Il faut, suivant le système de M. Bernoulli, 1° que le mercure soit extrêmement pur ; 2°, que le baromètre soit construit de manière que le mercure en y tombant ne traverse point l'air ; 3° que le vide du haut du tuyau soit aussi parfait qu'il peut être ; car il faut que le choc des deux matières subtiles dont parle M. Bernoulli, ne soit point affoibli par l'air, qui étant fort grossier en comparaison de ces deux matières, ferait l'effet d'un sac de laine qui reçoit un coup de canon. La différence d'effet des expériences de Groningue et de Paris sur des baromètres qui paraissaient avoir les mêmes conditions, aussi bien que le mercure qui y était enfermé, fit juger que le mercure de M. Bernoulli et celui des baromètres lumineux de Paris, devaient avoir quelque chose de particulier, et ressembler par quelqu'accident à du mercure que l'on aurait rendu lumineux, en y mêlant, comme on fait quelquefois du phosphore liquide. M. Bernoulli, fondé sur le succès de ses expériences, conjecture qu'il y a eu quelque faute dans celles de l'Académie. La méthode, par exemple de remplir, le tuyau avec une bourse de cuir qu'on dit être équivalente à la sienne, a pourtant cela de différent, que c'est ici le mercure qui doit pousser l'air devant lui, lequel en faisant quelque petite résistance, peut laisser attachée aux côtés du verre quelques restes ou bulles d'air, qui suffiront pour engendrer la pellicule ; au lieu que dans la méthode de M. Bernoulli, pour remplir le tuyau, l'air extérieur pousse le vif-argent en-haut, et le vif argent ne fait que suivre le mouvement de l'air intérieur ; qui par sa raréfaction sort sans peine du tuyau ; peut-être aussi le tuyau de l'Académie n'était-il pas bien net. Les amples tuyaux sont suivant l'expérience les meilleurs, parce qu'outre que le mercure dans un tuyau plus large, se meut plus librement que dans un tuyau étroit, ou le frottement du mercure contre le verre diminue la vitesse de la descente ; la pellicule, s'il s'en forme, doit être aussi plus épaisse dans un tuyau étroit que dans un autre, parce que ne pouvant s'étendre en large, elle s'épaissit en hauteur. Or le tuyau de l'Académie n'était pas assez large, selon M. Bernoulli, n'ayant qu'une ligne et demie de diamètre.

Il est difficîle de remplir le tuyau de mercure avec la bouche, sans y mêler un peu d'haleine ou de salive ; plusieurs n'y ont pu réussir. M. Bernoulli dit qu'il le faisait aisément, pouvant d'ailleurs tirer avec la bouche, d'un petit recipient, 7/8 de l'air qu'il contient, sans se trop efforcer. Il vaut mieux faire ces expériences de nuit que de jour ; car quand on entre tout d'un coup dans l'obscurité, les yeux encore frappés de l'éclat d'une grande lumière, ne peuvent apercevoir la faible lueur du baromètre, qui parait assez pendant la nuit obscure.

Quant aux baromètres qu'on dit n'avoir pas été faits avec les mêmes précautions, et cependant donner de la lumière, peut-être qu'en y jetant le vif-argent on a tenu le tuyau fort obliquement à l'horizon, pour laisser couler doucement les gouttes de mercure comme dans un canal ; ce qui empêche l'air de l'infecter tant ; quoiqu'en ce cas il arrive souvent qu'il ne rend pas autant de lumière que des baromètres faits par la suction, ou dans la machine du vide ; peut-être le mercure n'était-il pas bien purifié de toute matière dont l'attouchement de l'air put former une pellicule.

Cette lumière parait dans toute sorte de vif-argent préparé à la manière de M. Bernoulli ; cela ne vient donc point de quelque chose de particulier dans le sien, qui enfermé dans le tuyau sans les conditions proposées, ne rend que peu ou point de lumière.

Une des principales raisons qui fait que la pellicule du mercure empêche la lumière, c'est peut-être qu'on secoue trop uniformément le mercure, se contentant de le balancer ; auquel cas cette pellicule, s'il y en a, ne sort point de la superficie du mercure, et y demeure toujours attachée. Comme il est difficîle d'éviter cette pellicule des baromètres remplis même à la manière de M. Bernoulli, il semble que si on pouvait la crever, ce qui se ferait en remuant le mercure en tous sens, comme on fait l'eau d'une bouteille qu'on rinse, il pourrait paraitre de la lumière. En effet, si on tire l'air d'une petite phiole pleine de mercure, en la mettant sous la machine pneumatique, par le moyen d'un robinet cimenté à son cou, et qu'on agite en tout sens le mercure qui y est contenu, on voit une lumière bien plus vive que celle du baromètre, et cela arrive avec toute sorte de mercure, excepté lorsque l'air n'est pas assez exactement tiré de la phiole ; ou qu'on y en laisse entrer un peu ; alors la lumière est plus faible, et diminue de plus en plus, nonobstant l'agitation réitérée de la phiole, même jusqu'à disparaitre entièrement : après quoi il faut tirer l'air de nouveau de la phiole, si on veut qu'elle paraisse. On voit au jour le mercure de cette phiole dont la lumière est affoiblie, couvert d'une pellicule épaisse, et semblable à de la pâte mêlée de poussière, d'où il parait qu'un peu d'air agité salit fort le mercure, et le couvre d'une peau assez épaisse pour empêcher absolument la lumière : car s'il n'y a point d'air, l'agitation ne fait que rendre le mercure plus pur ; qui par-là se délivre de tout ce qu'il pourrait contenir d'étranger, qu'il rejette à la surface du verre, qu'on voit aussi un peu trouble : ainsi le mercure est rendu de plus en plus lumineux.

Si le robinet de la phiole est d'airain, le vif-argent le corrompt : il faut donc, pour l'éviter, mettre un bouchon de liège qui bouche exactement la phiole, et de la cire par-dessus, puis percer la cire et le bouchon de liège pour faire sortir l'air de la phiole sous la machine pneumatique : ensuite laissant le récipient dessus sans rendre l'air, faire fondre avec un verre ardent la cire d'autour du trou, qui se répandant alors sur le trou, le fermera. Voilà donc un nouveau phosphore perpétuel, et qui outre cela a l'avantage de pouvoir se transporter dans une phiole bien bouchée ; pourvu que, 1°. cette phiole ait été bien nette ; 2°. qu'on n'ait pas beaucoup remué le mercure avant d'en tirer l'air, 3°. qu'on tire le plus d'air qu'il soit possible.

M. Homberg a donné une autre raison de la lumière des baromètres. Souvent pour nettoyer le mercure on se sert de la chaux vive préférablement à de la limaille de fer, alors le mercure qui s'élevant dans la distillation s'est criblé au-travers de cette matière, peut en avoir emporté des parties capables par leur extrême délicatesse de se loger dans ses interstices ; et comme la chaux vive retient toujours quelques particules ignées, il est possible que ces particules agitées dans un lieu vide d'air, où elles nagent librement et sans être étouffées par aucune autre matière, produisent un éclat de lumière. En effet plusieurs baromètres faits de mercure ainsi nettoyé étaient lumineux ; mais M. Homberg appuyait davantage sur le peu de nécessité des conditions de M. Bernouilli.

1°. Un mercure bien net ne contracte jamais d'impuretés à l'air : l'expérience le prouve. Il y a donc lieu de croire que celui de M. Bernouilli n'était pas bien net.

2°. Dans les baromètres lumineux anciens, le mercure était entré en traversant l'air.

3°. M. Homberg ayant vuidé par la seconde méthode de M. Bernouilli, un tuyau qui ne trempait presque point dans le mercure, l'air en sortait en soulevant par son ressort le tuyau, et se glissant entre son bout et la surface du mercure. L'air étant raréfié jusqu'à un certain point, de façon cependant qu'on pouvait encore en tirer assez, ne sortait plus, parce qu'il n'avait plus la force de soulever le tuyau. Le vide du baromètre de M. Bernouilli n'était donc pas aussi parfait qu'il pouvait l'être.

Mais M. Bernouilli, outre les réponses précédentes, ajoute qu'il parait que M. Homberg a trop enfoncé le tuyau dans le mercure pour en tirer l'air ; celui de M. Bernouilli était presqu'à fleur de mercure, qui en effet y est monté à 26 pouces ; ce qui est presque la hauteur ordinaire ; outre que ce peu d'air restant dans le tuyau a notablement affoibli la lumière, comme M. Bernouilli l'a remarqué depuis ; ainsi moins il y a d'air, plus la lumière est grande et durable.

Quand le mercure de M. Bernouilli ne serait pas bien pur, l'air serait toujours la cause, sinon naturelle, du moins efficiente du défaut de lumière, puisque ce même mercure en produit étant enfermé sans air dans le vide. Mais M. Bernouilli a trouvé un secret de le rendre net en le lavant bien avec de l'eau : on met sur le mercure cette eau, environ la hauteur de deux pouces ; on agite fortement le mercure qui se mêle avec l'eau, puis on le laisse reposer ; et il rejette à la surface l'eau sale et noirâtre : on réitère la lotion jusqu'à ce que l'eau ne paraisse plus ou presque point noirâtre, et alors le mercure est net. L'esprit-de-vin le lave plus vite et mieux que l'eau ; il s'est même trouvé un mercure fort épais, dans lequel il y avait apparemment quelque matière huileuse et sulphureuse mêlée avec ses parties ; ce mercure n'est devenu assez net pour rendre de la lumière qu'à force de lotions d'esprit-de-vin. Le mercure devient si pur par ce lavement même d'eau seule, qu'il rend quelquefois de la lumière, même dans une phiole pleine d'air : mais cette lumière est faible.

Ce mercure ainsi bien purifié, laisse sortir de ses pores assez de matière subtîle pour vaincre la résistance de l'air.

Il faut bien sécher le mercure ainsi lavé, en le faisant passer par un linge net ; car la moindre humidité nuirait à l'expérience.

Quelquefois le mercure même après l'agitation conserve en ses pores une matière gluante cachée, qui en les fermant ou les rendant roides, empêche la matière subtîle de sortir, et par conséquent la lumière de paraitre. La roideur des pores peut faire cet effet ; car il faut que les pores se retrécissent souvent pour laisser passer cette matière ; or s'ils ne sont pas flexibles ils ne pourront se retrécir. Cela étant, il parait que le mercure qu'on dit être devenu lumineux par la distillation à-travers la chaux vive, avait cette roideur de pores causée par quelque matière gluante qu'il a laissée dans la chaux, en s'y filtrant et s'y purifiant par-là ; et c'est à cette seule purification que M. Bernouilli en attribue la lumière, et non pas aux particules ignées de la chaux ; de plus ces corpuscules ignées ne lui paraissent guère vraisemblables.

Ces parcelles ignées deviendraient enfin inutiles par le fréquent usage, comme on voit arriver aux autres phosphores qui sont lumineux par le moyen de ces particules ignées ; ainsi ce phosphore perdrait enfin sa vertu.

2°. Ces parcelles ignées assez petites pour se loger dans les pores du mercure, s'échapperaient quand on secouerait la phiole, par les pores du verre bien plus larges que ceux du mercure.

3°. Cela posé, la lumière paraitrait également dans la descente et l'ascension du mercure.

Dans l'explication, au contraire, de M. Bernouilli, le mercure ne fait que prêter ses pores étroits à la matière subtîle ; dès que cette matière en est sortie par l'agitation, il en revient aussi-tôt d'autres par les pores du verre. Enfin M. Bernouilli gardait depuis un an un de ces phosphores, qui n'avait encore souffert aucune altération. Il croit même qu'une liqueur aussi pesante que le mercure, pourrait donner de la lumière : et cela posé, si on pouvait rendre l'or fluide, il serait, selon lui, le plus propre à en donner, étant le plus pesant de tous les corps ; le plomb fondu même en pourrait donner s'il était bien pur.

Quant au mercure qu'on rend lumineux en le mêlant avec du phosphore artificiel, M. Bernouilli attribue cette lumière au phosphore seul.

Toutes ces lumières artificielles sont extrêmement délicates. Il n'est pas sur qu'en maniant une phiole, la sueur de la main ne passe, quoiqu'en très-petite quantité, au-travers les jointures du bouchon, et ne nuise à la lumière. Il faut être dans ces expériences scrupuleux, défiant, et en quelque sorte superstitieux. Voici un exemple remarquable de la délicatesse de ces phosphores. M. Bernoulli avait une phiole qui luisait parfaitement et également depuis six semaines ; une miette du liège qui la bouchait s'était détachée et était tombée sur la surface du mercure où elle nageait. M. Bernoulli brula cette miette de liège au foyer d'un verre ardent ; et le peu de fumée qui en sortit, diminua considérablement et sans retour la vivacité du phosphore, où il n'était arrivé nul autre changement. Cette pureté dont la lumière a besoin, fut souillée. M. Bernoulli a offert à l'Académie de purifier le mercure dont elle se sert, et de le lui renvoyer lumineux. La confiance apparemment qu'on avait en sa parole, a empêché qu'on n'exécutât sa demande.

L'Académie en est restée là jusqu'en 1723, que M. Dufay donna son sentiment particulier, joint à l'histoire suivante des sentiments des savants sur cette matière, et à une manière simple et facîle de rendre les baromètres lumineux, qu'un Vitrier Allemand lui avait apprise. En 1706, M. Dutal, médecin, fit insérer dans les Nouvelles de la république des Lettres un mémoire, où il confirme la réussite des opérations de M. Bernoulli, et croit que l'Académie ne les a pas faites assez exactement. En 1708, M. Hauksbée, après avoir décrit un phosphore construit avec un globe vide d'air, qu'il faisait tourner rapidement sur son centre, et qui par ce moyen rendait beaucoup de lumière lorsqu'on en approchait la main, croit que la lumière du baromètre n'est causée que par les frictions du mercure contre les parois intérieurs du tube vide d'air grossier.

En 1710, M. Hartsoèker combattit les expériences de M. Bernoulli, niant tout, et n'apportant d'autre raison que la pureté du mercure, et la netteté du tuyau ; ce qui, suivant l'expérience, ne suffit pas.

En 1715, Jean Fréderic Weidler combattit aussi M. Bernoulli, disant que la pellicule que contracte le mercure en passant par l'air, ne nuit en rien à la lumière, qu'il croit ne venir d'autre chose que de la répercussion des rayons, qui quoique dans l'obscurité, conservent leur même tension et leur même effort.

En 1716, Michel Heusinger dit dans une dissertation publiée sur ce sujet, que quelques baromètres où l'on remarquait des bulles d'air étaient lumineux, quoique moins, à la vérité, que ceux qui n'avaient point d'air ; les bulles d'air même, à ce qu'il dit, donnent quelquefois de l'éclat. La pureté du mercure n'est pas encore nécessaire, puisque vingt-trois parties de mercure mêlées avec cinq de plomb, ont rendu de la lumière. Selon lui, les particules du mercure sont sphériques, et les interstices de ces petits globes contiennent beaucoup de matière subtile, qui s'en exprime lorsqu'on l'agite. Le mercure n'est lumineux que lorsqu'il descend, parce qu'alors il abandonne la matière subtîle contenue dans ses pores : mais en remontant il en absorbe une partie, et l'autre s'en Ve par les pores du verre.

En 1717, M. de Mairan attribua cette lumière au soufre du mercure qui est en mouvement, et dit, qu'elle serait beaucoup plus vive, s'il ne restait dans les baromètres, les plus exactement vides d'air, une matière différente de la matière subtîle et de l'air, qui arrête le mouvement de ce soufre et la lumière qui en resulte, ce qui arrive surtout lorsque le mercure monte ; au lieu que quand il descend, il y a une partie du tuyau la plus proche de la surface du mercure qui reste, au moins pour un moment, libre de cette matière qui ne peut pas suivre le mercure avec assez de rapidité, et qui par ce moyen donne lieu à son soufre de se développer. Disse. sur les Philosoph.

Il restait encore quelque incertitude sur la manière de rendre les baromètres lumineux. Les conditions absolument nécessaires sont :

1°. Que le tuyau soit bien sec ; on le nettoie aisément avec du coton attaché au bout d'un fil de fer, la moindre humidité gâterait tout : mais ce n'est, selon les observations de M. Dufay, qui a tourné de bien des sens ces expériences, que l'humidité qui serait au haut et dans le vide du tuyau, où la lumière doit paraitre ; hors de-là, le tuyau peut être humide sans inconvénient.

2°. Que le mercure soit bien net : il faut faire passer le mercure par un cornet de papier dont l'embouchure soit fort étroite, il y dépose suffisamment ses impuretés.

3°. que le mercure soit bien purgé d'air : versez d'abord dans le tuyau un tiers du mercure que vous devez employer, puis chauffez-le doucement et par degrés, en l'approchant petit-à-petit du feu ; en le remuant avec un fil de fer, vous aiderez la sortie des bulles d'air qui sont dans le mercure, et que la chaleur pousse dehors ; versez un second tiers auquel vous ferez de même, et enfin le troisième auquel vous ne ferez rien. La purification des deux premiers tiers suffit pour le tout.

M. Dufay ne s'est point aperçu qu'un différent degré de chaleur donné au mercure, produisit de différence sensible dans la lumière. Voyez, outre les ouvrages déjà cités, la thèse de M. Bernoulli, de Mercurio lucente in vacuo, soutenue à Bâle en 1719, et imprimée dans le recueil de ses œuvres. Genev. 1743. (O)