S. f. (Lutherie) sorte de petit clavecin. Il y en a de forme parallélogramme ; et d'autres, qu'on appelle à l'italienne, ont à-peu-près la figure du clavecin : il y en a qui sonnent l'octave, d'autres la quarte ou la quinte au-dessus du clavecin ; du reste c'est la même facture et la même mécanique. Voyez CLAVECIN, et la fig. 6. Pl. XVI. de la Lutherie. Les épinettes n'ont qu'une seule corde sur chaque touche, et qu'un seul rang de sautereaux.
EPINETTE (Fête de l'), Histoire de Flandres, la plus célèbre des fêtes des Pays-Bas, dont la mémoire est presque effacée, quoique cette fête fût encore dans toute sa splendeur au milieu du XVe siècle. On a une liste des rois de cette fête pendant 200 ans, c'est-à-dire depuis 1283 jusqu'à 1483. Le P. Jean Buzelin l'a donnée dans sa Gallo-Flandria.
Les peuples de Flandres et des Pays-Bas ont toujours aimé les jeux et les spectacles ; ce goût s'y conserve même encore dans ce qu'ils appellent triomphes, dans leurs processions et dans leurs autres cérémonies publiques : c'est une suite de l'oisiveté et du manque de commerce.
Dans les XIIIe et XIVe siècles, chaque ville de ces pays-là avait des fêtes, des combats, des tournois ; Bruges avait sa fête du Forestier, Valenciennes celle du prince de Plaisance, Cambray celle du roi des Ribauds, Bouchain celle du prévôt des Etourdis : dans beaucoup de lieux on célébrait celle de Behourt. A ces différentes fêtes accouraient non-seulement les villes voisines, mais plusieurs grands seigneurs des pays éloignés : Lille en particulier attirait, par la magnificence de la fête de l'épinette et par les divertissements qui s'y donnaient, un concours extraordinaire de monde.
La fête de l'épinette avait son roi, que l'on élisait tous les ans le jour du mardi-gras : on élisait en même temps deux jouteurs pour l'accompagner. Les jours précédents et le reste de la semaine se passaient en festins et en bals.
Le dimanche des brandons, ou premier dimanche de carême, le roi se rendait en grande pompe au lieu destiné pour le combat ; les combattants y joutaient à la lance : le prix du victorieux était un épervier d'or. Les quatre jours suivants, le roi, avec ses deux jouteurs et le chevalier victorieux, étaient obligés de se trouver au lieu du combat, pour rompre des lances contre tous ceux qui se présentaient. Jean duc de Bourgogne honora cette fête de sa présence en 1416 ; le duc Philippe le Bon s'y trouva avec le roi Louis XI. en 1464.
L'excessive dépense à laquelle cette qualité de roi engageait, la ruine de plusieurs familles qu'elle avait occasionnée, le refus que firent quelques habitants de Lille d'accepter cet honneur prétendu, et l'obligation où la ville s'était trouvée de faire elle-même ces dépenses ; enfin l'indécence que quelques personnes trouvaient à voir toutes ces réjouissances, ces divertissements et ces bals, dans les deux premières semaines de carême, obligèrent Charles duc de Bourgogne à suspendre cette fête depuis 1470 jusqu'en 1475. Elle se rétablit en partie, mais aux dépens des fonds publics, jusqu'en 1516 : Charles V. en interrompit l'exercice pendant presque tout le cours de son règne, par lettres données en 1528 et en 1538. Enfin Philippe II. la supprima entièrement en 1556 : il ne s'en est conservé pour mémoire que le nom de l'épinette, que l'on donne à un des bas-officiers du magistrat ou de la maison de ville de Lille, qui représente en quelque façon le hérault par qui les rois de l'épinette avaient droit de se faire précéder.
Plusieurs historiens ont parlé de cette fête, entr'autres l'auteur d'une petite histoire de Lille, imprimée en 1730. On ignore son instituteur, de même que l'origine de son nom, qui vient peut-être de ce que l'on donnait au roi de l'épinette une petite épine pour marque de sa dignité, et qu'il allait tous les ans en pompe honorer la sainte épine, que les Dominicains de Lille prétendent posséder dans leur église. Il mangeait chez ces pères avec ses chevaliers le dimanche des Rameaux, et y assistait à tous les offices de la semaine-sainte. Histoire de l'Acad. des belles-Lettres.
C'est de cette manière qu'on associait alors la dévotion aux spectacles profanes, aux festins, aux joutes, aux tournois, aux combats particuliers. Il y avait aussi dans les mêmes siècles d'autres fêtes plaisantes, telle qu'était celle de Bourgogne, nommée la compagnie des fous. Voyez MERE-FOLLE. Enfin on célébrait même encore de la façon la plus scandaleuse dans les églises de la partie septentrionale et méridionale de l'Europe, en Flandres, en France et en Espagne, la fameuse fête des fous, si connue par son indécence et son extravagance. Voyez FETE DES FOUS. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT.