sub. mas. ou ASTROMETRE, (Astronomie) instrument inventé en 1747 par le savant M. Bouguer, de l'Académie royale des Sciences, pour mesurer avec beaucoup plus d'exactitude qu'on ne l'a fait jusqu'à présent les diamètres des astres, particulièrement ceux du soleil et de la lune. Voyez MICROMETRE. Quiconque entend les principes de l'Astronomie, sait de quelle importance il est pour sa perfection de connaître d'une manière précise les diamètres des astres ; cependant jusqu'à présent on n'avait trouvé aucun moyen de les mesurer avec justesse ; jusques-là, comme le remarqua M. Bouguer, dans le mémoire qu'il lut à l'Académie en 1748, qu'on est si éloigné de connaître leur figure exacte, qu'il se pourrait faire que ces deux planètes différassent plus de la forme sphérique, que n'en diffère la terre ; sans cependant qu'on s'en fût encore aperçu. L'instrument de M. Bouguer supplée à ce qui manquait en cette partie à l'Astronomie. On pourra par son moyen observer les diamètres du soleil et de la lune, avec infiniment plus de justesse, qu'avec ceux qu'on emploie ordinairement à cet usage. De sorte que les Astronomes aidés de cet instrument, seront en état à l'avenir de mesurer avec la plus grande exactitude les diamètres de ces astres, et par conséquent de déterminer précisément leur rapport. Il est composé de deux objectifs d'un très-long foyer placés à côté l'un de l'autre, et combinés avec un seul oculaire ; il faut que le tuyau de la lunette ait une forme conique, et que ce soit son extrémité supérieure qui soit la plus grosse à cause de la largeur des deux objectifs qu'elle reçoit. Quant à l'extrémité inférieure, elle doit être munie comme à l'ordinaire de son oculaire et de son micromètre. Telle est la construction du nouvel instrument, construction fort simple, et qui dans l'usage répondra parfaitement à cette simplicité.
Lorsqu'on dirigera l'héliomètre vers le soleil, il fera le même effet qu'un verre à facettes ; il se formera à son foyer deux images à cause des deux verres. Chacune de ces images serait entière si la lunette était assez grosse par en-bas ; mais il n'y aura réellement que deux espèces de segments ou comme deux croissants adossés ; ce ne seront que deux portions d'images, et on doit remarquer que les deux parties qui seront voisines, et qui peut-être même se toucheront, représenteront les deux bords opposés de l'astre par la propriété qu'ont les deux objectifs de renverser les apparences. Ainsi au lieu de ne voir qu'un des bords du disque, comme cela arrive, lorsqu'on se sert d'une lunette de quarante ou cinquante pieds, parce que le reste de l'image ne trouve pas place dans le champ, on aura présente sous les yeux, et si l'on veut précisément dans le même endroit du réticule, les deux extrémités du même diamètre, malgré l'extrême intervalle qui les sépare, ou la grande augmentation apparente du disque. Les deux images au lieu de se toucher, pourront se trouver eloignées l'une de l'autre, ou au contraire passer un peu l'une sur l'autre : il n'y aura toujours qu'à mesurer avec le micromètre l'intervalle entre les deux bords ; et lorsque dans un autre temps, le diamètre de l'astre plus ou moins éloigné de la terre, se trouvera plus grand ou plus petit, lorsque les deux images en augmentant ou en diminuant, se seront approchées l'une de l'autre, ou qu'elles se seront un peu écartées, il n'y aura qu'à en mesurer de nouveau la distance, et on aura de cette sorte l'augmentation ou la diminution qu'aura souffert le diamètre, et par conséquent ses différences. M. Bouguer est le maître par la construction de son instrument d'écarter ou d'approcher l'un de l'autre les deux objectifs, et par-là de séparer ou de faire prendre un peu l'un sur l'autre les deux disques ou les deux croissants adossés. On n'expliquera point la manière dont M. Bouguer produit cet effet, ce sera une chose facîle pour quiconque entend ces matieres-là ; la partie qui leur devient commune dans le second cas ne peut pas manquer de se bien distinguer, puisque l'intensité de sa lumière est deux fois plus forte que celle du reste. On peut en se servant de cet instrument mesurer tous les diamètres avec la même facilité, puisqu'en tournant l'héliomètre, on voit toujours du même coup d'oeil les deux bords opposés du disque à côté l'un de l'autre. Il n'est pas inutîle de dire ici que cet avantage a procuré à M. Bouguer l'observation d'un fait très-singulier, auquel il n'y a pas lieu de croire qu'il s'attendit. Il a pendant le mois d'Octobre 1747, trouvé constamment sur le midi le diamètre vertical du soleil un peu plus grand que l'horizontal, quoique le premier de ces diamètres fût diminué un peu, comme il l'est toujours par les réfractions astronomiques.
Quoique M. Bouguer eut vérifié ce fait un grand nombre de fais, et que le soleil lui eut toujours paru allongé dans le sens de son axe, et cela malgré l'effet contraire des réfractions, il ne l'a pas cru encore assez constaté ; et l'observant de nouveau avec plus d'attention, il a découvert un nouveau phénomène qui n'est pas moins digne de remarque, et qui vraisemblablement serait resté inconnu sans le secours de son instrument. Il s'est assuré que les deux bords de l'astre, le supérieur et l'inférieur, ne sont pas également si bien terminés, que le reste du disque ; d'où il résulte que l'image doit être un peu plus étendue dans le sens vertical ; ce qui vient de la décomposition que souffre la lumière en traversant obliquement notre atmosphère, ou la masse d'air qui nous environne. On entend bien qu'il n'est pas question ici de ce qu'on appelle ordinairement réfraction astronomique ; il est question de la décomposition de la lumière, en tant qu'elle est formée de rayons différemment réfrangibles, comme le violet, le bleu, le verd, etc. Les rayons bleus et violets qui partent du haut du disque, en même temps que les rayons des autres couleurs, sont sujets à un peu plus de réfraction que ces derniers, ils se courbent un peu davantage ; ils nous paraissent donc venir d'un peu plus haut, en portant un peu plus loin l'illusion ordinaire des réfractions. C'est tout le contraire si on jette la vue sur le bord inférieur ; nous devons le voir principalement par des rayons rouges qui souffrent un peu moins de courbure dans leur trajet. Ces rayons se courbant moins, frapperont donc nos yeux comme s'ils partaient d'un point plus bas, et doivent donc faire paraitre un peu en dessous la partie inférieure du disque qu'ils étendent pendant que les rayons bleus et violets contribuent à étendre ce même disque par sa partie supérieure. C'est ainsi que M. Bouguer explique l'extension du diamètre vertical à laquelle on n'avait nullement pensé, et dont on doit regarder la remarque comme un des premiers fruits de ses observations. On ne donnera pas de description particulière de cet instrument ; il est si simple qu'on s'en formera une idée fort juste, en jetant seulement les yeux sur la figure. (T)