S. m. en Droit, est l'adjection et la réunion d'une portion devenue vacante à celle qui est déjà possédée par quelqu'un. Voyez ACCESSION.

Dans le Droit civil un legs fait à deux personnes conjointes, tam re quam verbis, tombe tout entier par droit d'accroissement à celui des deux légataires qui survit au testateur, si l'un des deux est mort auparavant. L'alluvion est une autre espèce d'accroissement. Voyez ALLUVION. (H)



ACCROISSEMENT, en Physique, se dit de l'augmentation d'un corps organisé qui croit par de nouvelles parties qui s'y ajoutent.

L'accroissement est de deux sortes : l'un consiste dans une simple apposition extérieure de nouvelle matière ; c'est ce qu'on nomme autrement juxta-position, et c'est ainsi, selon plusieurs Physiciens, que croissent les pierres, les coquilles, etc. Voyez PIERRE et COQUILLE.

L'autre se fait par un fluide qui est reçu dans des vaisseaux, et qui y étant porté peu-à-peu, s'attache à leurs parois ; c'est ce qu'on appelle intus-susception ; et c'est ainsi, selon les mêmes auteurs, que croissent les animaux et les plantes. Voyez PLANTE, ANIMAL ; voyez aussi VEGETATION et NUTRITION. (O)

ACCROISSEMENT, action par laquelle les pertes du corps sont plus que compensées par la nutrition. Voyez NUTRITION.

Il y a quelque chose d'assez remarquable dans l'accroissement du corps humain : le foetus dans le sein de la mère croit toujours de plus en plus jusqu'au moment de la naissance ; l'enfant au contraire croit toujours de moins en moins jusqu'à l'âge de puberté, auquel il croit, pour ainsi dire, tout-à-coup, et arrive en fort peu de temps à la hauteur qu'il doit avoir pour toujours. Il ne s'agit pas ici du premier temps après la conception, ni de l'accroissement qui succede immédiatement à la formation du foetus ; on prend le foetus à un mois, lorsque toutes ses parties sont développées ; il a un pouce de hauteur alors ; à deux mois, deux pouces un quart ; à trois mois, trois pouces et demi ; à quatre mois, cinq pouces et plus ; à cinq mois, six pouces et demi ou sept pouces ; à six mois, huit pouces et demi ou neuf pouces ; à sept mois, onze pouces et plus ; à huit mois, quatorze pouces ; à neuf mois, dix-huit pouces. Toutes ces mesures varient beaucoup dans les différents sujets, et ce n'est qu'en prenant les termes moyens qu'on les a déterminées. Par exemple, il nait des enfants de vingt-deux pouces et de quatorze ; on a pris dix-huit pouces pour le terme moyen, il en est de même des autres mesures : mais quand il y aurait des variétés dans chaque mesure particulière, cela serait indifférent à ce que M. de Buffon, d'où ces observations sont tirées, en veut conclure. Le résultat sera toujours que le foetus croit de plus en plus en longueur tant qu'il est dans le sein de la mère : mais s'il a dix-huit pouces en naissant, il ne grandira pendant les douze mois suivants que de six ou sept pouces au plus ; c'est-à-dire, qu'à la fin de la première année il aura vingtquatre ou vingt-cinq pouces ; à deux ans, il n'en aura que vingt-huit ou vingt-neuf ; à trois ans, trente ou trente-deux au plus, et ensuite il ne grandira guère que d'un pouce et demi ou deux pouces par an jusqu'à l'âge de puberté : ainsi le foetus croit plus en un mois sur la fin de son séjour dans la matrice, que l'enfant ne croit en un an jusqu'à cet âge de puberté, où la nature semble faire un effort pour achever de développer et de perfectionner son ouvrage, en le portant, pour ainsi dire, tout-à-coup au dernier degré de son accroissement.

Le foetus n'est dans son principe qu'une goutte de liqueur limpide, comme on le verra ailleurs ; un mois après toutes les parties qui dans la suite doivent devenir osseuses, ne sont encore que des cellules remplies d'une espèce de colle très-déliée. Le foetus passe promptement du néant, ou d'un état si petit que la vue la plus fine ne peut rien apercevoir, à un état d'accroissement si considérable au moyen de la nourriture qu'il reçoit du suc laiteux ; qu'il acquiert dans l'espace de neuf mois la pesanteur de douze livres environ, poids dont le rapport est certainement infini avec celui de son premier état. Au bout de ce terme, exposé à l'air, il croit plus lentement, et il devient dans l'espace de vingt ans environ douze fois plus pesant qu'il n'était, et trois ou quatre fois plus grand. Examinons la cause et la vitesse de cet accroissement dans les premiers temps, et pourquoi il n'est pas aussi considérable dans la suite. La facilité surprenante qu'a le foetus pour être étendu, se concevra si on fait attention à la nature visqueuse et muqueuse des parties qui le composent, au peu de terre qu'elles contiennent, à l'abondance de l'eau dont elles sont chargées, enfin au nombre infini de leurs vaisseaux, que les yeux et l'injection découvrent dans les os, dans les membranes, dans les cartilages, dans les tuniques des vaisseaux, dans la peau, dans les tendons, etc. Au lieu de ces vaisseaux, on n'observe dans l'adulte qu'un tissu cellulaire épais, ou un suc épanché : plus il y a de vaisseaux, plus l'accroissement est facile. En effet le cœur alors porte avec une vitesse beaucoup plus grande les liquides ; ceux qui sont épanchés dans le tissu cellulaire s'y meuvent lentement, et ils ont moins de force pour étendre les parties. Il doit cependant y avoir une autre cause ; savoir, la plus grande force et le plus grand mouvement du cœur qui soit dans le rapport des fluides et des premiers vaisseaux : ce point saillant déjà vivifié dans le temps que tous les autres viscères dans le foetus, et tous les autres solides, ne sont pas encore sensibles, la fréquence du pouls dans les jeunes animaux, et la nécessité, nous le font voir. Effectivement l'animal pourrait-il croitre, si le rapport du cœur du tendre foetus à ses autres parties, était le même que celui du cœur de l'adulte à toutes les siennes. La force inconnue, quelle qu'elle puisse être, qui met les parties des corps animés en mouvement, parait produire un plus grand effet dans le foetus que dans l'adulte, dans lequel tous les organes des sensations s'endurcissent, tandis qu'ils sont extrêmement tendres et sensibles dans le foetus. Telles sont l'oeil, l'oreille, la peau, le cerveau même. Ceci ne peut-il pas encore s'expliquer, en ce que le foetus a la tête plus grosse, par le rapport plus grand des nerfs des jeunes animaux au reste de leurs parties ?

Ne doit-il donc pas arriver que le cœur faisant effort contre des vaisseaux muqueux, il les étende aisément, de même que le tissu cellulaire qui les environne, et les fibres musculaires arrosées par des vaisseaux ? Or toutes ces parties cedent facilement, parce qu'elles renferment peu de terre, et qu'au contraire elles sont chargées de beaucoup de gluten qui s'unit et qui se prête aisément. L'ossification doit donc se faire lorsque le suc gelatineux renfermé entre deux vaisseaux parallèles, devient osseux à la suite du battement réitéré de ces vaisseaux. Les os s'accraissent lorsque les vaisseaux placés le long de leurs fibres viennent à être étendus par le cœur ; ces vaisseaux en effet entraînent alors avec eux les fibres osseuses, ils les allongent, et elles repoussent les cartilages qui limitent les os et toutes les autres parties qui, quoique cellulaires, sont cependant élastiques. Ces fibres s'étendent entre leurs épiphyses, de sorte qu'elles les rendent plus courtes, mais plus solides. Tel est le mécanisme par lequel les parties du corps s'allongent, et par lequel il se forme des intervalles entre les fibres osseuses, cellulaires et terreuses qui se sont allongées. Ces intervalles sont remplis par les liquides, qui sont plus visqueux et plus gelatineux dans les jeunes animaux que les adultes. Ces liquides contractent donc plus facilement des adhérences, et se moulent sur les petites cavités dans lesquelles ils entrent. La souplesse des os dans le foetus, la facilité avec laquelle ils se consolident, la plus grande abondance du suc glutineux et de l'humeur gelatineuse dans les membres des jeunes animaux, et le rapport des cartilages aux grands os, font voir que les os dans les jeunes sujets sont d'une nature plus visqueuse que dans les vieillards : mais plus l'animal approche de l'adolescence, et plus l'accroissement se fait lentement. La roideur des parties qui étaient souples et flexibles dans le foetus ; la plus grande partie des os qui auparavant n'étaient que des cartilages, en sont des preuves. En effet, plusieurs vaisseaux s'affaissant à la suite du battement des gros troncs qui leur sont voisins, ou dans les membranes desquels ils se distribuent, ces vaisseaux sont remplacés par des parties solides qui ont beaucoup plus de consistance. Effectivement le suc osseux s'écoule entre les fibres osseuses ; toutes les membranes et les tuniques des vaisseaux sont formées d'un tissu cellulaire plus épais : d'ailleurs une grande quantité d'eau s'évaporant de toutes les parties, les filets cellulaires se rapprochent, ils s'attirent avec plus de force, ils s'unissent plus étroitement, ils résistent davantage à leur séparation ; l'humeur glaireuse, qui est adhérente aux os et aux parties solides, se seche ; la compression des artères et des muscles dissipe le principe aqueux : les parties terreuses sont en conséquence dans un plus grand rapport avec les autres.

Toutes ces choses se passent ainsi jusqu'à ce que les forces du cœur ne soient plus suffisantes pour étendre les solides au-delà. Ceci a lieu lorsque les épiphyses cartilagineuses dans les os longs, se sont insensiblement diminuées au point qu'elles ne peuvent l'être davantage, et que devenues extrêmement minces et très-dures, elles se résistent à elles-mêmes, et au cœur en même temps. Or comme la même cause agit de même sur toutes les parties du corps, si on en excepte un petit nombre, tout le tissu cellulaire, toutes les membranes des artères, les fibres musculaires, les nerfs, doivent acquérir insensiblement la consistance qu'ils ont par la suite, et devenir tels que la force du cœur ne soit plus capable de les étendre.

Cependant le tissu cellulaire lâche et entrecoupé de plusieurs cavités, se prête dans différents endroits à la graisse qui s'y insinue, et quelquefois au sang : ce tissu se gonfle dans différentes parties ; ainsi quoiqu'on ne croisse plus, on ne laisse pas de grossir. Il parait que cela arrive, parce que l'accroissement n'ayant plus lieu, il se sépare du sang une plus petite quantité de sucs nourriciers, il reste plus de matière pour les secrétions ; la résistance que trouve le sang dans les plus petits vaisseaux, devient plus grande par leur endurcissement : les secrétions lentes doivent alors être plus abondantes, le rapport de la force du cœur étant moindre, puisque la roideur des parties augmente la résistance, et que d'ailleurs la force du cœur ne parait pas devenir plus grande. En effet, le cœur est un muscle qui tire principalement sa force de sa souplesse, de la grande quantité du suc nerveux qui s'y distribue, eu égard à la solidité de la partie rouge du sang, comme nous le dirons ailleurs. Or bien loin que la vieillesse augmente toutes ces choses, elle les diminue certainement : ainsi le corps humain n'a point d'état fixe, comme on le pourrait penser. Quelques vaisseaux sont continuellement détruits, et se changent en fibres d'autant plus solides, que la pression du poids des muscles et du cœur a plus de force dans différentes parties : c'est pour cela que les parties dont les ouvriers se servent plus fréquemment se roidissent ; le tissu cellulaire devient aussi continuellement plus épais, plus dur ; l'humeur glutineuse plus seche et plus terreuse ; les os des vieillards deviennent en conséquence roides ; les cartilages s'ossifient. Lorsque le gluten, dont toutes les parties tiennent leur souplesse, vient à être détruit, elles deviennent dures, le tissu cellulaire même du cerveau, du cœur, des artères, sont dans ce cas ; la pesanteur spécifique des différentes parties du corps devient plus grande et même celle du crystallin : enfin la force attractive des particules glutineuses des liqueurs du corps humain diminue par les aliments salés dont on a fait usage, par les boissons inflammables, par les excès de tout genre. Le sang dégénere donc en une masse friable, acre, et qui n'est point gelatineuse : c'est ce que font voir la lenteur des cicatrices des plaies et des fractures, la mauvaise odeur de l'haleine, de l'urine, la plus grande quantité des sels du sang, la diminution de sa partie aqueuse, et l'opacité des humeurs qui étaient autrefois transparentes.

C'est pourquoi les ligaments intervertébraux venant à se sécher, à se durcir, et à s'ossifier, ils rapprochent insensiblement en devant les vertèbres les unes des autres ; on devient plus petit et tout courbé. Les tendons deviennent très-transparents, très-durs et cartilagineux, lorsque le gluten qui était dans l'interstice de leurs fibres est presque détruit. Les fibres musculaires, les vaisseaux, et surtout les artères, deviennent plus dures, l'eau qui les rendait molles étant dissipée : elles s'ossifient même quelquefois. Le tissu cellulaire lâche se contracte, forme des membranes d'une tissure plus serrée : les vaisseaux excréteurs sont en conséquence comprimés de part et d'autre, et leurs petits orifices se ferment : la sécheresse des parties diminue donc les secrétions nécessaires du sang, les parties se roidissent, la température du sang devient plus seche et plus terreuse ; de manière qu'au lieu de l'humeur que le sang déposait auparavant dans toutes les parties du corps, il n'y porte plus qu'une vraie terre, comme on le sait par les endurcissements qui arrivent, par les croutes osseuses, répandues dans les artères, dans les membranes, dans la superficie de la plupart des os, surtout des vertèbres, et quelquefois dans les parties les plus molles, comme on l'a observé dans toutes les parties du corps.

C'est la voie naturelle qui conduit à la mort, et cela doit arriver lorsque le cœur devient plus compact ; que sa force n'augmente pas à proportion des résistances qu'il rencontre ; et que par conséquent il succombe sous la charge. Lorsque le poumon, qui est moins susceptible de dilatation, résiste au ventricule droit du cœur, de même que tout le système des artères capillaires, qui d'ailleurs font beaucoup de résistance au cœur, le mouvement du sang se ralentit insensiblement, il s'arrête, et le sang s'accumule surtout dans le ventricule droit, parce qu'il ne trouve plus de passage libre par le poumon, jusqu'à ce qu'enfin le cœur palpitant pendant quelque temps, le sang s'arrête, se coagule, et le mouvement du cœur cesse.

La nature a presque marqué le terme auquel tous les animaux doivent arriver : on n'en sait pas bien les raisons. L'homme qui vit longtemps vit naturellement deux fois plus que le bœuf et que le cheval, et il s'en est trouvé assez fréquemment qui ont vécu cent ans, et d'autres qui sont parvenus à 150. Les oiseaux vivent plus longtemps que les hommes ; les poissons vivent plus que les oiseaux, parce qu'au lieu d'os ils n'ont que des cartilages, et ils croissent continuellement.

La durée totale de la vie peut se mesurer en quelque façon par celle du temps de l'accroissement. Un arbre ou un animal qui prend en peu de temps son accroissement, périt beaucoup plutôt qu'un autre auquel il faut plus de temps pour croitre. Dans les animaux comme dans les végétaux, l'accroissement en hauteur est celui qui est achevé le premier. Un chêne cesse de grandir longtemps avant qu'il cesse de grossir. L'homme croit en hauteur jusqu'à seize ou dix-huit ans, et cependant le développement entier de toutes les parties de son corps en grosseur, n'est achevé qu'à trente ans. Les chiens prennent en moins d'un an leur accroissement en longueur ; et ce n'est que dans la seconde année qu'ils achevent de prendre leur grosseur. L'homme qui est trente ans à croitre, vit quatre-vingts-dix ans ou cent ans ; le chien qui ne croit que pendant deux ou trois ans, ne vit aussi que dix ou douze ans : il en est de même de la plupart des autres animaux. Les poissons qui ne cessent de croitre qu'au bout d'un très-grand nombre d'années, vivent des siècles, etc. comme nous l'avons déjà insinué. Cette longue durée de leur vie doit dépendre de la constitution particulière de leurs arêtes, qui ne prennent jamais autant de solidité que les os des animaux terrestres.

Les animaux qui ne produisent qu'un petit nombre de fétus, prennent la plus grande partie de leur accroissement, et même leur accroissement tout entier, avant que d'être en état d'engendrer ; au lieu que les animaux qui multiplient beaucoup, engendrent avant même que leur corps ait pris la moitié, ou même le quart de son accroissement. L'homme, le cheval, le bœuf, l'âne, le bouc, le bélier, ne sont capables d'engendrer que quand ils ont pris la plus grande partie de leur accroissement ; il en est de même des pigeons et des autres oiseaux qui ne produisent qu'un petit nombre d'œufs : mais ceux qui en produisent un grand nombre, comme les coqs, les poules, les poissons, etc. engendrent bien plutôt. Un coq est capable d'engendrer à l'âge de trois mois, et il n'a pas alors pris plus d'un tiers de son accroissement ; un poisson qui doit au bout de vingt ans peser trente livres, engendre dès la première ou la seconde année, et cependant il ne pese peut-être pas alors une demi-livre. Mais il y aurait des observations particulières à faire sur l'accroissement et la durée de la vie des poissons : on peut reconnaître à-peu-près leur âge en examinant avec une loupe ou un microscope les couches annuelles dont sont composées leurs écailles : mais on ignore jusqu'où il peut s'étendre. On voit des carpes chez M. le Comte de Maurepas, dans les fossés de son château de Pontchartrain, qui ont au moins cent cinquante ans bien avérés, et elles paraissent aussi agiles et aussi vives que des carpes ordinaires. Il ne faut pas dire avec Leuwenhoek, que les poissons sont immortels, ou du moins qu'ils ne peuvent mourir de vieillesse. Tout doit périr avec le temps ; tout ce qui a eu une origine, une naissance, un commencement, doit arriver à un but, à une mort, à une fin : mais il est vrai que les poissons vivant dans un élément uniforme, et qu'étant à l'abri des grandes vicissitudes, et de toutes les injures de l'air, ils doivent se conserver plus longtemps dans le même état que les autres animaux : et si ces vicissitudes de l'air sont, comme le prétend un grand Philosophe (le chancelier Bacon, voyez son Traité de la vie et de la mort), les principales causes de la destruction des êtres vivants, il est certain que les poissons étant de tous les animaux ceux qui y sont les moins exposés, ils doivent durer beaucoup plus longtemps que les autres. Mais ce qui doit contribuer encore plus à la longue durée de leur vie, c'est que leurs os sont d'une substance plus molle que ceux des autres animaux, et qu'ils ne se durcissent pas, et ne changent presque point du tout avec l'âge. Les arêtes des poissons s'allongent, grossissent, et prennent de l'accroissement sans prendre plus de solidité, du moins sensiblement ; au lieu que les os des autres animaux, aussi-bien que toutes les autres parties solides de leurs corps, prennent toujours plus de dureté et de solidité : et enfin lorsqu'elles sont absolument remplies et obstruées, le mouvement cesse, et la mort suit. Dans les arêtes au contraire, cette augmentation de solidité, cette replétion, cette obstruction qui est la cause de la mort naturelle, ne se trouve pas, ou du moins ne se fait que par degrés beaucoup plus lents et plus insensibles, et il faut peut-être beaucoup de temps pour que les poissons arrivent à la vieillesse.

La mort est donc d'une nécessité indispensable suivant les lois des corps qui nous sont connues, quoique la différente proportion de la force du cœur aux parties solides, la coction des aliments, le caractère du sang, la chaleur de l'air extérieur, puissent plus ou moins en éloigner le terme. En conséquence de ces lais, les vaisseaux les plus petits devaient être comprimés par les plus gros, le gluten devait s'épaissir insensiblement, les parties aqueuses s'évaporer, et par conséquent les filets du tissu cellulaire s'approcher de plus en plus. Au reste, un régime de vie tranquille, qui n'est point troublé par les passions de l'âme et par les mouvements violents du corps ; une nourriture tirée des végétaux ; la tempérance, et la fraicheur extérieure, peuvent empêcher les solides de devenir sitôt roides, suspendre la secheresse et l'acreté du sang.

Est-il croyable qu'il naisse ou renaisse de nouvelles parties dans le corps humain ? La manière dont les polypes, et presque toute la famille des testacées se reproduisent ; la régénération des vers, des chenilles, des serres des écrevisses ; tous les différents changements qui arrivent à l'estomac, la reproduction des queues des lésards, et des os qui occupent la place de ceux que l'on a perdus, prouvent-ils qu'il se fait une pareille régénération dans toutes les parties des corps animés ? doit-on lui attribuer la réparation naturelle des cheveux (qui sont des parties organiques) des ongles, des plumes, la production des nouvelles chairs dans les plaies, celle de la peau, la réduction du scrotum, le cal des os ? La question est difficîle à décider. Ceci a néanmoins lieu dans les insectes, dont la structure est simple et gélatineuse, et dont les humeurs lentes ne s'écoulent point, mais restent adhérentes aux autres parties du corps. Les membranes dans lesquelles se forment les hydatides dans l'homme, la génération des chairs dans les blessures, le cal qui fortifie non-seulement les os fracturés, mais qui encore tient lieu des os entiers, se forment d'une liqueur gélatineuse rendue compacte par la pulsation des artères voisines prolongées : on n'a cependant jamais observé que de grandes parties organiques se soient régénérées. La force du cœur dans l'homme, et la tendance que les humeurs qui y séjournent ont à la pourriture, la structure composée du corps, qui est fort différente de celle des insectes, s'opposent à de pareilles régénérations.

Il y a une autre espèce d'accroissement qui a paru merveilleux quand le hasard l'a découvert : on remarqua en Angleterre que nos corps étaient constamment plus grands le matin que le soir, et que cet accroissement montait à six et sept lignes : on examina ce nouveau phénomène, et on en donna l'explication dans les Transactions philosophiques. Un esprit qui n'aurait pu étendre ses vues que sur des objets déjà découverts, aurait vérifié grossièrement ce phénomène, l'aurait étalé aux yeux du public sous une autre forme, l'aurait paré de quelque explication physique mal ajustée, aurait promis de dévoiler de nouvelles merveilles : mais M. l'abbé Desfontaines s'est rendu maître de cette nouvelle découverte ; il a laissé si loin ceux qui l'avaient donnée au public, qu'ils n'ont osé publier leurs idées ; il est fâcheux que l'ouvrage où il a rassemblé ses observations n'ait pas été imprimé. Nous ne donnerons pas ici le détail de toutes les découvertes qu'il a faites sur cette matière : mais nous allons donner des principes dont on pourra les déduire. 1°. L'épine est une colonne composée de parties osseuses séparées par des cartilages épais, compressibles et élastiques ; les autres cartilages qui se trouvent à la tête des os, et dans les jointures, ne paraissent pas avoir la même élasticité. 2°. Tout le poids du tronc, c'est-à-dire, le poids de cent livres au moins, porte sur l'épine ; les cartilages qui sont entre les vertèbres sont donc comprimés quand le corps est debout : mais quand il est couché, ils ne portent plus le même poids ; ils doivent se dilater, et par conséquent éloigner les vertèbres ; ainsi le tronc doit devenir plus long, mais ce sera là précisément une force élastique qui augmentera le volume des cartilages. Les fluides sont poussés continuellement par le cœur, et ils trouvent moins de résistance dans les cartilages lorsqu'ils ne sont pas comprimés par le poids du tronc ; ils doivent donc y entrer en plus grande quantité et dilater les vaisseaux : mais ces vaisseaux ne peuvent se dilater sans augmenter le volume des cartilages, et sans écarter les vertèbres : d'abord les cartilages extrêmement comprimés se rétablissent avec plus de force ; ensuite cette force diminuera par degrés, comme dans les bâtons fléchis, qui se restituent ; il est donc évident que l'accroissement qui se fait quand on est couché demande un certain espace de temps, parce que les cartilages, toujours pressés, ne peuvent se rétablir dans un instant. De plus, supposons que l'accroissement soit de six lignes, chaque ligne d'augmentation ne se fait pas dans le même espace de temps ; les dernières lignes demanderont un temps beaucoup plus long, parce que les cartilages ont moins de force dans le dernier temps de la restitution ; de même qu'un ressort qui se débande, a moins de force sur la fin de sa détente. 3°. L'accroissement dans les cartilages, doit produire une augmentation dans le diamètre de la poitrine ; car les côtes en général sont plus éloignées sur l'épine que sur le sternum, ou dans leur marche. Suivant cette idée, prenons-en deux du même côté, regardons-les comme formant un angle dont une vertèbre et un cartilage sont la base. Il est certain que de deux triangles qui ont les côtés égaux et les bases inégales, celui qui a la base plus petite a plus de hauteur perpendiculaire : or la base de l'angle que forment ces deux côtés le soir, est plus petite que la base de l'angle qu'ils forment le matin ; il faut donc que le soir il y ait plus de distance de l'épine au sternum, ou bien il faut que les côtés se soient voutés, et par conséquent la poitrine aura plus de distance le soir que le matin. 4°. Après le repas les vaisseaux sont plus pleins, le cœur pousse le sang et les autres fluides avec plus de force, les vaisseaux agissent donc plus fortement sur les cartilages ; ils doivent donc porter dans leur intérieur plus de fluide, et par conséquent les dilater ; les vertèbres doivent donc s'éloigner, et par conséquent il y aura un accroissement après le repas, et il se fera en plus ou moins de temps, selon la force des vaisseaux, ou selon la situation du corps ; car si le corps est appuyé sur le dossier d'une chaise, le poids du tronc portera moins sur les cartilages, ils seront donc moins pressés ; l'action des vaisseaux qui arrivent dans les cartilages trouvera donc moins de résistance, elle pourra donc mieux les dilater : mais quand l'action des vaisseaux commencera à diminuer, le décroissement arrivera, parce que la pesanteur du corps l'emportera alors sur l'action des vaisseaux, laquelle ne sera plus aussi vigoureuse quand la digestion sera faite, et quand la transpiration, qui est très-abondante trois heures après le repas, aura diminué le volume, et par conséquent l'action des vaisseaux, et la chaleur qui porte partout la raréfaction. 5°. Il y a un accroissement et un décroissement auquel toutes ces causes n'ont pas la même part ; quand on est couché on devient plus long d'un demi-pouce, même davantage : mais cette augmentation disparait dès qu'on est levé. Deux faits expliqueront ce phénomène. 1°. L'épine est plus droite quand on est couché, que lorsque le corps est sur ses pieds. 2°. Le talon se gonfle, et ce gonflement disparait par le poids du corps ; au reste cet accroissement et ce décroissement sont plus considérables dans la jeunesse, que dans l'âge avancé. M. Senac, Essais de Physique. (L)

ACCROISSEMENT, se dit en Médecine, de l'augmentation d'une maladie. Le temps de l'accroissement est un temps fâcheux ; c'est celui où les accidents augmentent en nombre, en durée, et en violence ; si l'on saisit la maladie dès son commencement, on pourra prévenir la force de l'accroissement. Voyez MALADIE. (N)

ACCROISSEMENT, en Jardinage, se dit des plantes lorsqu'elles ont fait un grand progrès, et de belles pousses. Voyez VEGETATION. (K)