S. m. terme de Jurisprudence anglaise, composé, comme l'on voit, des deux mots français pur et lieu, est un morceau de terre contigu à une forêt royale à laquelle il avait été joint par ordonnance d'un roi, mais de laquelle un autre roi postérieur l'a démembré, pour en faire jouir ceux à qui il en a octroyé la possession franchement et librement, et sans être assujettis aux lois et ordonnances concernant les forêts. Voyez FORET.



On définit le purlieu un espace de terre joignant une forêt, déterminé par des bornes invariables qui servent simplement de monument de ce qu'il a été autrefois ; lequel autrefois a fait partie de la forêt voisine, mais en a été depuis séparé après un acte de bornage préalablement fait pour distinguer la nouvelle forêt d'avec l'ancienne. Voyez BORNAGE.

Voici comment s'introduisirent les purlieux : Henri II. roi d'Angleterre, à son avénement à la couronne, prit tant de goût pour les forêts, que non content de celles qu'il trouva toutes plantées, quoiqu'en assez grand nombre et assez vastes, il commença à en agrandir plusieurs, et y enclava les terres de ses sujets qui y étaient contiguès. Voyez ENFORESTER.

Richard I. son successeur, bien loin de rétablir les forêts de son domaine dans leurs anciennes limites, leur donna encore plus d'étendue ; et les choses restèrent dans ce dernier état jusqu'à l'an 17 du roi Jean, que, la lésion étant notoire et indisposant toute la nation, les nobles et les plus notables sujets le supplièrent de desenforester toutes les terres que ses prédécesseurs, que nous venons de nommer, et lui-même avaient enclavées dans leurs forêts ; et le roi, après beaucoup de sollicitations et d'instances, prit enfin sur lui de signer et de sceller les articles qu'on lui demandait touchant la liberté des terres, lesquels se trouvent la plupart dans l'ordonnance des forêts. Voyez FORET.

En conséquence on fit choix de plusieurs nobles, au nombre de vingt-cinq, pour veiller à ce que l'octroi desdites franchises accordées et confirmées par le roi, sortit son plein et entier effet.

Les choses étaient dans cet état lorsque le roi Jean mourut. Henri III. lui ayant succédé, on lui fit les mêmes instances qu'à son prédécesseur. Henri, pour terminer cette affaire, nomma des commissaires à l'effet de distraire les nouvelles forêts d'avec les anciennes ; il en fut dressé un état, et en conséquence beaucoup de bois et de terres furent desenforestées, avec faculté aux propriétaires de les convertir en terres labourables. Voyez DESENFORESTER.

Cette ordonnance rendue, on arpenta quelques-unes des terres nouvellement enforestées, et l'on dressa des procès-verbaux à l'effet de constater à perpétuité quelles terres étaient d'anciennes forêts, et quelles étaient des forêts neuves. Cependant il parait que la plupart des terres nouvellement enforestées subsistèrent en cet état pendant tout le règne d'Henri III.

Sous Edouard I. nouvelles supplications furent faites ; et le nouveau roi nomma trois évêques, trois comtes et trois barons, à l'effet de faire et continuer les visites et recherches nécessaires, et en faire ensuite leur rapport à la cour de chancellerie, pour être en conséquence les anciennes forêts distinguées et fixées par des bornes invariables, à l'effet de constater pour toujours leur ancienneté.

Le roi fit aussi séparer des anciennes forêts les bois et les terres nouvellement enforestées, et en fit rapporter à la chancellerie un état par tenans et aboutissants, à l'effet de constater aussi à perpétuité la qualité de ces dernières.

Voilà donc quelle a été l'origine des purlieux ; car tous les bois et les terres qui avaient été enforestés par Henri II. Richard I. et le roi Jean, et qui par un bornage furent ensuite distingués des anciennes forêts, commencèrent à s'appeler purlieux, c'est-à-dire lieux séparés des forêts anciennes par le bornage.

Mais quoique les terres nouvellement enforestées fussent distraites des anciennes forêts par le bornage, et rendus purlieux, elles ne l'étaient pas à l'égard de toutes les personnes ; car en vertu de l'ordonnance des forêts, si le roi avait enforesté les bois ou les terres de quelques-uns de ses sujets au préjudice des propriétaires, ces terres devaient être desenforestées sans délai, c'est-à-dire seulement en ce qui concernait ceux à qui appartenaient les bois et les terres, lesquels pourraient comme propriétaires couper et abattre leurs bois selon leur bon plaisir, et sans en obtenir la permission du roi ; comme aussi convertir leurs prés et leurs pâturages en terres labourables, et en un mot en faire et disposer de la manière qu'ils jugeraient la plus avantageuse ; ils peuvent même chasser sur ces terres jusqu'à la forêt. Mais cette permission de chasser sur les purlieux était accordée au propriétaire seul, et exclusivement à tout autre ; et rien ne l'empêchait de laisser subsister son purlieu en bois : c'est même le parti que la plupart ont jugé le plus expédient, parce qu'au moyen de ce ils ont la jouissance de la forêt, qui autrement leur serait interdite. Si donc les bêtes s'échappent de la forêt du roi dans le purlieu, elles n'en appartiennent pas moins au roi exclusivement à tout autre, si ce n'est au propriétaire, à qui elles appartiennent aussi ratione soli, et qui peut lâcher ses chiens dessus, et les poursuivre jusqu'à la forêt, le tout sans fraude et sans surprise. Voyez CHASSE, SURPRISE, etc.

Outre cette première différence entre la forêt et le purlieu, il y en a encore une autre qui est que tous les bois et les terres qui sont enclavés dans la forêt en font partie, et sont sujets aux mêmes lais, aussi-bien pour le propriétaire même que pour toute autre personne : car qui que ce soit ne peut dans l'étendue de ce pourpris couper son bois ou améliorer sa terre en la changeant de nature, sans la permission du roi ou de son grand-maître des eaux et forêts. Personne ne peut même chasser sur sa propre terre ainsi enclavée, sans y être autorisé par le roi ou par son grand-maître des eaux et forêts.

Mais ceux dont les terres sont des purlieux, ne sont pas assujettis à ces servitudes ; cependant leurs bois et leurs terres, quoique purlieux, ne sont pas absolument francs de toute sujétion en ce qui concerne les bêtes égarées de la forêt, qui y ont établi leur repaire ; mais ils restent toujours, du-moins à cet égard, dans l'assujettissement où ils étaient lorsqu'ils faisaient partie de la forêt royale.

Le propriétaire du purlieu a titre et qualité pour chasser sur son purlieu, mais néanmoins avec quelques réserves.

Aux termes de l'ordonnance de Richard II. pour avoir droit de chasser sur son purlieu, il faut posséder en franc-fief dans le purlieu au-moins pour quarante chelins de revenu, de bois ou autres terres.

Aux termes de l'ordonnance de Jacques I. il faut avoir en fond patrimoniaux au-moins dix livres de revenu, ou des terres en franc-fief jusqu'à concurrence de 30 livres de rente, ou avoir en biens-fonds 290 livres de rente, ou être fils de chevalier, ou baron, ou d'un rang distingué, ou être fils et héritier présomptif d'un écuyer.

Mais par une ordonnance postérieure de Charles II. personne ne peut avoir des levriers dans un purlieu ou autre terre dans toute l'étendue de l'Angleterre ou de la province de Galles, s'il n'en a une permission expresse du roi, ou s'il n'est seigneur de fief, ou ne possede, soit de son chef, soit de celui de sa femme, 40 livres de revenu clair et liquide, toutes charges déduites, en terres seigneuriales ; ou, s'il n'a au-moins de revenu, en autres terres, soit de son chef, ou de celui de sa femme pour tout le temps de sa vie, ou de celle de l'un et l'autre, 80 livres, toutes charges déduites, ou la valeur de 400 livres en fonds de terres ou habitations. Voyez CHASSE et GIBIER.

Le droit de purlieu appartient donc exclusivement aux personnes que nous venons de désigner, et non à d'autres ; car le propriétaire d'un purlieu qui n'a pas quelqu'une des qualités que je viens de dire, peut bien, s'il trouve des bêtes de la forêt dans son purlieu, lâcher dessus de petits chiens domestiques, mais il ne lui est pas permis de les pourchasser avec des levriers ou autres chiens de chasse.

Et celui même qui a droit de chasse dans son purlieu, ne peut l'exercer qu'avec quelques restrictions et réserves : car,

1°. Il faut que le gibier se soit levé sur sa terre ; et quoique, ratione soli, il ait un droit exclusif à l'égard de toute autre personne que le roi sur le gibier qui se lève sur sa terre, ce droit se réduit à pouvoir lâcher ses chiens dessus, et le tuer tant qu'il est sur sa terre, mais non lorsqu'il est une fois sauvé dans la forêt. Dès que la bête a mis le pied dans la forêt, elle rentre dans la propriété de la forêt ou du propriétaire, quel qu'il sait, à qui elle appartient.

Mais quand le propriétaire de terres comprises dans un purlieu a fait lever une bête dans l'étendue de son fief, il la peut poursuivre sur toutes les terres voisines comprises dans le purlieu, pourvu qu'il n'entre pas dans la forêt.

2°. Si celui qui possède des terres dans un purlieu commence sa chasse sur la terre d'un voisin, que ses chiens atteignent la bête avant qu'elle soit rentrée dans la forêt, mais qu'elle les y entraîne et qu'ils l'y tuent, leur maître n'est pas en droit pour cela d'entrer dans la forêt et d'y prendre la bête que ses chiens ont tuée, parce que sa chasse était contre les régles dès le commencement, et que par conséquent il ne peut prétendre aucune propriété sur la bête ratione soli.

3°. Celui qui a droit de purlieu, ne peut y mener ou y envoyer chasser d'autres personnes que ses domestiques.

4°. Les ordonnances des forêts lui défendent de chasser sur ses propres terres plus de trois jours la semaine, desquels le dimanche est excepté.

5°. Personne ne doit poursuivre un cerf, quoiqu'il le rencontre dans son purlieu, dans les quarante jours après que le roi a fait une chasse générale dans la forêt voisine ; parce qu'en ce cas le gibier n'est pas venu de lui-même dans le purlieu, mais qu'il y a été poussé par les chasseurs, effrayé par leurs clameurs et par le son du cor, et ne s'y est retiré que comme en un lieu de réfuge.

6°. Personne ne pourra chasser plus près de la forêt qu'à sept milles de distance, même dans son purlieu, dans les quarante jours après que le roi aura déclaré qu'il a dessein de faire une chasse générale dans la forêt.

Ainsi les purlieux étant à cet égard demeurés en partie sujets aux ordonnances des forêts, il a fallu établir des officiers pour veiller à la conservation du gibier qui pourrait s'échapper de la forêt dans les purlieux ; faute de quoi les règlements faits pour les purlieux seraient demeurés sans exécution, et les forêts auraient été bien-tôt détruites par les propriétaires des purlieux.

C'est pourquoi on établit des maîtres de venaison qui, sans être proprement forestiers, ne laissaient pas d'avoir quelque office dans la forêt ; car les forestiers ont inspection tout-à-la-fais sur les arbres et la venaison de la forêt, au lieu que le maître de venaison n'en a point sur les arbres, mais seulement sur le gibier qui passe de la forêt dans le purlieu. Son office est de le faire rentrer dans la forêt. Voyez MAITRE DE VENAISON.

Cet officier reçoit ses provisions du roi, ou du grand-maître des eaux et forêts, et a d'appointements 20, 30 ou 40 livres, ou plus, lesquelles lui sont payées à la cour de l'échiquier, sans compter un droit qu'il a sur chaque cerf ou daim de la forêt.

Son emploi consiste à faire rentrer les bêtes dans la forêt, tout autant de fois qu'elles en sont sorties ; de dresser procès-verbaux des délits commis en matière de chasse, soit dans les purlieux, soit dans la forêt même, et d'en faire leur rapport à la plus prochaine grurie ou cour forestière.

Les maîtres de venaison ne sont établis que pour les terres qui ayant été enforestées autrefois, et désenforestées depuis, sont ainsi devenues des purlieux. C'est pourquoi, comme il y a des forêts en Angleterre qui n'ont jamais été agrandies aux dépens des terres voisines, et autour desquelles par conséquent il ne s'est pas formé de purlieux, les maîtres de venaison n'y ont que faire.