S. f. (Grammaire) dans un sens général, signifie défense ou conservation de quelque chose ; action par laquelle on observe ce qui se passe, afin de n'être point surpris ; soin, précaution, attention que l'on apporte pour empêcher que quelque chose n'arrive contre notre intention ou notre volonté.

GARDE ou GARDIEN, s. m. (Histoire ecclésiastique) nom qu'on trouve dans les auteurs ecclésiastiques appliqué à différentes personnes chargées de diverses fonctions.

1°. On appelait gardes ou gardiens des églises, custodes ecclesiarum, certaines personnes spécialement chargées du soin et des réparations des églises. Bingham croit que c'étaient les mêmes officiers, qu'on nommait communément portiers, ce qui parait revenir à ce que nous appelons marguilliers ou fabriciens. C'étaient des économes ou des administrateurs qui veillaient à la régie des biens temporels de l'Eglise. Le même auteur remarque dans un autre endroit que ces gardiens recevaient non-seulement les revenus des églises, mais encore en gardaient les trésors, les vases, l'argenterie ; qu'ils n'étaient pas tirés du clergé, mais d'entre les principaux du peuple, et quelquefois du corps des magistrats. On a une lettre de S. Augustin à l'église d'Hippone, intitulée clero, senioribus et universae plebi ; et M. Laubepine dans ses notes sur Optat, fait aussi mention de ces anciens ou gardiens des églises. Peut-être était-ce en Afrique la même charge que celle des défenseurs en Orient et en Europe. Voyez DEFENSEURS.



2°. On nommait gardes ou gardiens des saints lieux, custodes sanctorum locorum, ceux à qui l'on avait confié la garde des lieux sanctifiés par la présence du Sauveur, comme le lieu où il était né en Bethléem, le Calvaire, la montagne des Oliviers, le saint Sépulcre, etc. Cet emploi n'était pas toujours confié à des ecclésiastiques ; mais ceux qui l'exerçaient jouissaient des mêmes privilèges que les clercs, et étaient exemts de tributs, d'impositions, et des autres charges publiques, comme il parait par le code théodosien, lib. XVI. tit. XIe leg. 26. Ce sont aujourd'hui les Franciscains ou Cordeliers qui ont la garde du saint Sépulcre, sous le bon plaisir du grand-seigneur. Bingham, orig. eccles. tom. I. lib. II. cap. xjx. §. 19. et tom. II. lib. III. cap. XIIIe §. 2. (G)

GARDE, (LA-) Histoire anc. elle se faisait jour et nuit chez les Romains ; et les vingt-quatre heures se divisaient en huit gardes.

Premièrement, le consul était gardé par sa cohorte ordinaire ; puis chaque corps posait la garde autour de son logement : en outre on posait trois gardes, l'une au logis du questeur, et les deux autres au logis des deux lieutenans du consul.

Les tergiducteurs ou chefs de la queue conduisaient les gardes, lesquelles tiraient au sort à qui commencerait : les premiers à qui était échu de commencer, étaient menés au tribun en exercice, lequel distribuait l'ordre de la garde, et donnait outre cela à chaque garde une petite tablette avec une marque ; toutes les gardes ensuite se posaient de la même façon.

Les rondes se faisaient par la cavalerie, dont le chef en ordonnait quatre pour le jour et quatre pour la nuit. Les premiers allaient prendre l'ordre du tribun, qui leur donnait par écrit quelle garde ils devaient visiter.

Le changement et visite des gardes se faisait huit fois en vingt-quatre heures, au son de la trompette ; et c'était le premier centurion des Triaires qui avait charge de les faire marcher au besoin.

Quand la trompette les avertissait, les 4 mentionnés tiraient au sort, et celui à qui il échéait de commencer prenait avec lui des camarades pour l'accompagner. Si en faisant la ronde, il trouvait les gardes en bon état, il retirait seulement la marque que le tribun avait donnée, et la lui rapportait le matin : mais s'il trouvait la garde abandonnée, quelques sentinelles endormies, ou autre désordre, il en faisait son rapport au tribun, avec ses témoins ; et aussi-tôt on assemblait le conseil pour vérifier la faute, et châtier le coupable selon qu'il le méritait.

Les vélites faisaient la garde autour du retranchement, par le dehors, par le dedans, et aux portes.

L'on ne trouve point dans les auteurs le nombre des corps-de-garde des Romains ; la manière dont ils posaient leurs sentinelles autour du camp ; et combien on avait de journées franches de la garde. (D.J.)

GARDE PRETORIENNE, voyez Cohorte prétorienne au mot COHORTE.

GARDE, en terme de Guerre, est proprement un certain nombre de soldats d'infanterie et de cavalerie, destinés à mettre à couvert une armée ou une place des entreprises de l'ennemi. Il y a plusieurs espèces de gardes.

GARDE AVANCEE, est un corps de cavaliers ou de fantassins qui marchent à la tête d'une armée, pour avertir de l'approche de l'ennemi.

Quand une armée est en marche, les grandes gardes qui devaient être de service ce jour-là, servent de garde avancée à l'armée.

On donne le nom de garde avancée à un détachement de quinze ou vingt cavaliers, commandés par un lieutenant, postés au-delà de la grande garde du camp. Chambers.

Les officiers généraux de l'armée ont chacun une garde particulière pour leur faire honneur et veiller à leur sûreté dans les différents logements qu'ils occupent. La garde des maréchaux de France est de cinquante hommes avec un drapeau ; celle des lieutenans généraux, de trente ; des maréchaux de camp, de quinze ; et celle des brigadiers, de dix. Voyez le tome III. du code militaire de M. Briquet, pag. 7. et suiv. Voyez aussi GARDE D'HONNEUR.

GARDES DU CAMP, c'est dans l'infanterie une garde de quinze hommes ou environ par bataillon, qui se porte à-peu-près à soixante pas ou environ en-avant du centre de chaque bataillon de la première ligne, et à même distance en-arrière du centre des bataillons de la seconde.

Dans la cavalerie, il y a une garde à pied par régiment, laquelle se tient à la tête du camp.

Des grands-gardes ou gardes ordinaires qui forment l'enceinte du camp. Ces gardes sont d'infanterie et de cavalerie.

Les gardes d'infanterie se placent toujours dans quelque lieu défendu par une espèce de fortification, soit naturelle ou artificielle.

On regarde comme fortification naturelle une église, un cimetière, un jardin fermé de tous côtés, un endroit entouré de haies fortes et difficiles à percer, etc. et on regarde comme fortifications artificielles celles dans lesquelles il est besoin de quelque précaution pour les former, comme un abatis d'arbres dont on se fait une espèce d'enceinte, un fossé dont la terre sert de parapet, etc.

Tous les hommes qui composent ces gardes doivent être absolument dans leur poste, et n'en sortir qu'avec la permission du commandant. Les fusils doivent être placés de manière que tous les soldats puissent les prendre ensemble et commodément ; pour cet effet, on le place dans le lieu que chaque homme doit occuper en cas d'attaque.

Ces gardes ont des sentinelles devant elles ou sur le retranchement, ou de tous les côtés par où les ennemis peuvent pénétrer ; elles avertissent aussi-tôt qu'elles aperçoivent quelque chose dans la campagne : alors tout le monde prend les armes pour être en état de combattre en moins de temps qu'il ne faut à l'ennemi, depuis sa découverte par les sentinelles, pour arriver au poste occupé par la garde. Les gardes doivent faire ferme, et tenir dans l'endroit où elles sont placées, jusqu'à ce qu'elles soient secourues du camp. C'est pour favoriser cette défense, qu'on les place dans les villages et autres lieux fourrés, où il est aisé, avec quelque connaissance de la fortification, de se mettre en état de soutenir les attaques des partis qui veulent les enlever.

Des gardes de cavalerie. Comme les gardes de cavalerie peuvent se mouvoir avec plus de vitesse que celles de l'infanterie, elles sont ordinairement placées dans les plaines, ou dans d'autres endroits découverts ; elles ont des vedettes placées encore en-avant, qui découvrent au loin tous les objets de la campagne. On appelle vedettes dans le service à cheval ce que l'on nomme sentinelle dans le service à pied. Voyez VEDETTE.

Comme les vedettes sont placées d'autant plus avantageusement qu'elles découvrent plus de terrain devant elles, on les avance quelquefois à une assez grande distance de la troupe ; et on les place sur les lieux les plus avantageux pour cette découverte, comme les hauteurs à portée de la grande garde.

Pour la sûreté des vedettes, et pour que la garde soit informée promptement de ce qu'elles peuvent découvrir, on place à une petite distance de ces vedettes, c'est-à-dire entr'elles et la garde, un corps d'environ huit cavaliers ; on le nomme petit corps-de-garde ; il est commandé par un cornette ou autre officier alternativement. Ce corps doit être toujours à cheval, et très-attentif aux vedettes ; il doit par conséquent être à-portée de les voir ; et il doit aussi être Ve de la grande garde : mais il n'est pas nécessaire qu'il découvre lui-même le terrain, comme les vedettes ; il est seulement destiné à les soutenir et à veiller à ce qu'elles fassent leur devoir : aussi arrive-t-il quelquefois que les vedettes sont sur le sommet d'une hauteur, et que le petit corps-de-garde est derrière à une distance médiocre, et caché par la hauteur, pendant que la grande garde est encore dans un lieu plus bas, d'où elle découvre seulement le petit corps-de-garde.

On éloigne aussi les vedettes les unes des autres, pour qu'elles soient à-portée de découvrir un plus grand espace de terrain, sans qu'il soit besoin de trop avancer les troupes de la garde, et par-là de les exposer à être enlevées. Lorsque les vedettes sont dans des endroits dangereux, il les faut doubler, c'est-à-dire en mettre deux ensemble ou dans le même lieu.

S'il parait des ennemis, ou quelque corps de troupes que ce puisse être, les vedettes en avertissent ; et suivant que le commandant de la troupe le juge à-propos, ou suivant les ordres qu'il a, il fait rester les vedettes à leur poste, et il ordonne au corps-de-garde d'avancer pour les soutenir ; lui-même marche avec sa troupe pour joindre ce corps, et s'opposer ensemble aux ennemis ; ou bien le commandant fait replier ses vedettes sur les corps-de-garde ; celui-ci sur sa troupe ; et cette troupe sur quelqu'autre poste, ou enfin sur le camp, s'il le juge nécessaire.

Les commandants de ces gardes doivent prendre les mêmes précautions par rapport à leurs troupes, que les généraux d'armée par rapport à leur armée ; ce sont les mêmes principes appliqués à un grand objet ou à un petit ; c'est pourquoi ils doivent avoir pour premières règles de disposer les vedettes de manière qu'après qu'elles ont averti de ce qu'elles ont découvert, elles aient le temps de former leur troupe, et de se mettre en état de combattre avant l'arrivée de l'ennemi.

Le commandant d'une garde ordinaire, ou en général de troupes détachées, à la guerre, peut faire mettre pied à terre à un rang de sa troupe, pour reposer les hommes et faire manger les chevaux, suivant le temps qu'il juge nécessaire à une troupe ennemie pour qu'elle approche de lui, depuis le moment de sa découverte par les vedettes : mais il faut toujours que chaque cheval soit prêt à être bridé dans un instant, et que le cavalier soit à-portée pour monter dessus au premier ordre.

Il y a des circonstances où les commandants peuvent faire mettre pied à terre aux deux rangs que forme leur troupe ; mais ce n'est qu'après s'être bien assuré que l'ennemi sera découvert dans un assez grand éloignement, pour qu'il soit plus de temps à parcourir l'espace découvert par les vedettes, qu'il n'en faut pour faire monter toute la troupe à cheval : c'est pourquoi la manière de faire la guerre à l'ennemi qu'on combat, doit faire prendre à cet égard des mesures au commandant pour n'être point surpris. Ainsi si l'on a affaire à un ennemi qui manœuvre avec une grande vitesse comme les Turcs, les Tartares, etc. il faut, pour n'en être point surpris, prendre plus de précautions que contre les Allemands ou les Hollandais, quoique les troupes de ces deux nations soient supérieures à celles des Turcs.

Il suit des observations qu'on vient de voir, que moins une troupe ou ses vedettes découvrent de terrain, plus elle doit redoubler son attention, pour être en état d'être formée le plus promptement qu'il est possible ; et qu'au contraire, lorsqu'elle découvre un espace de terrain assez grand pour avoir le temps de se former avant que l'ennemi puisse le parcourir, le commandant peut profiter de cette position pour donner plus de repos aux hommes et aux chevaux.

Si les sentinelles de l'infanterie sont placées ordinairement dans les lieux moins favorables que les vedettes de la cavalerie, pour découvrir beaucoup de terrain ; il faut aussi moins de temps à des gens à pied pour prendre un fusil et se mettre en défense, qu'il n'en faut à des cavaliers qui sont pied à terre, pour brider leurs chevaux, monter dessus, et se former en ordre de bataille. Essai sur la castramétation. (Q)

GARDE DE FATIGUE, (Art militaire) c'est celle qui est commandée pour conduire les travailleurs, les fourrageurs ; mener les soldats au bois, à la paille, et autres choses semblables. Pour ces sortes de gardes, que les troupes font successivement, le tour n'en passe jamais : soit que l'officier commandé soit absent ou de service ailleurs, il doit toujours le reprendre après son retour au camp. Ordonnance du 17 Février 1753.

Les gardes de fatigue sont aussi appelées gardes de corvées. (Q)

GARDE DE PIQUET, (Art militaire) c'est celle qui est faite par les officiers et les soldats de piquet. Voyez PIQUET.

Celui dont le tour vient de marcher à un détachement armé, pendant qu'il est de piquet, le quittera et sera censé l'avoir fait, pourvu que le détachement passe les gardes ordinaires ; et à l'instant qu'il sera commandé, on le remplacera par celui de ses camarades qui le suivra dans le tour du piquet. Ordonn. du 17 Février 1753. (Q)

GARDE D'HONNEUR, (Art militaire) c'est à la guerre la garde accordée aux officiers généraux et à plusieurs autres officiers relativement à leur grade militaire. Celui dont le tour viendra de marcher à un détachement armé, pendant qu'il sera à une garde d'honneur, demeurera à cette garde. Ordonn. du 17 Février 1753. (Q)

GARDES-DU-CORPS, (Histoire moderne et Art militaire) c'est en France un corps de cavalerie destiné à la garde du Roi.

Les gardes-du-corps ont le premier rang dans la gendarmerie de France, par une ordonnance de Louis XIV. donnée en 1667. Ils sont divisés en quatre compagnies, dont une qui était autrefois écossaise, et qui en porte encore le nom, est toujours la première ; les trois autres prennent rang ensemble suivant l'ancienneté de leurs capitaines.

Chaque compagnie est divisée en six brigades ; ce qui forme, à quelques différences près, comme des compagnies dans un régiment. C'est le Roi qui choisit lui-même ses gardes. Ils sont habillés de bleu avec des galons d'argent, et une bandoulière, qui est la marque de garde-du-corps ou de garde-du-Roi.

Les capitaines des gardes-du-corps, ainsi que ceux des gendarmes, chevaux-legers de la garde, et mousquetaires, sont premiers mestres-de-camp de cavalerie, c'est-à-dire qu'ils ont rang avant les autres mestres-de-camp, et qu'ils les commandent indépendamment de leur ancienneté dans ce grade. Les lieutenans et les enseignes ont rang de mestres-de-camp, et les exempts ont rang de capitaines de cavalerie.

On appelle exempts dans les gardes-du-corps des officiers qui sont au-dessous des enseignes. Ce mot vient de ce qu'originairement ils étaient gardes-du-corps exempts de faire faction. Les simples gardes-du-corps, gendarmes, chevaux-legers de la garde, et mousquetaires, ont d'abord rang de lieutenant de cavalerie : lorsqu'ils ont quinze ans de service, ils obtiennent la commission de capitaine de cavalerie *.

Les lieutenans des gardes-du-corps n'ont pas coutume de monter au grade de capitaine de leurs compagnies ; mais ils parviennent à celui de maréchal-de-camp et de lieutenant général à leur rang, sans être obligés de quitter leurs emplois.

Les enseignes montent par ancienneté à la lieutenance.

Pour remplir les places d'enseigne, Louis XIV. prenait alternativement un exempt de la compagnie et un colonel de cavalerie.

Les places d'exempt sont données alternativement à un brigadier de la compagnie et à un capitaine de cavalerie : pour celles de brigadier et sous-brigadier, elles sont toujours données à de simples gardes-du-corps.

Les étendarts ne sont point portés par les enseignes, mais par d'anciens gardes, à qui on donne le nom de porte-étendarts, et qui ont une paye un peu plus forte que les autres. Il en est de même pour les étendarts de toutes les autres compagnies de la gendarmerie.

Comme il y a dans toutes les compagnies des gardes-du-corps six brigadiers et six étendarts, et que chaque compagnie ne forme que deux escadrons, il y a trois étendarts par escadron, et trois brigades.

Dans la compagnie écossaise, il y a vingt-quatre gardes qu'on nomme gardes de la manche ; lorsque Sa Majesté est à l'église, il y en a toujours deux à ses côtés qui ont des halebardes, et qui sont revêtus d'une cotte-d'armes à l'antique. (Q)

GARDES A PIE de la maison du roi. Sous ce titre sont compris les cent-suisses, les gardes-françaises, et les gardes-suisses.

Les cent-suisses sont une compagnie de cent-hommes divisée en six escouades, sous dix-huit officiers ; ils portaient autrefois la livrée ; mais ils ont depuis quelques années un habit bleu avec des galons d'or, et un ceinturon qu'ils portent par-dessus leur habit ; ils sont armés, outre leur épée, d'une pertuisane ou halebarde : dans les solennités, ils ont conservé l'habit antique, savoir le pourpoint à manches tailladées, la fraise, le chapeau de velours noir orné d'une plume blanche, les hauts-de chausses très-amples, et les souliers garnis de nœuds de ruban ; ils sont de la création de Louis XI. en 1481, approchent de très-près de la personne du roi, marchent à la portière de son carosse : ils doivent être suisses naturels, et jouissent en France de plusieurs privilèges.

GARDES-FRANÇOISES ; c'est un régiment d'infanterie créé par Charles IX. en 1563, composé de trente-trois compagnies divisées en six bataillons. Tout le corps est commandé par un colonel ; chaque compagnie par un capitaine, qui a sous lui un lieutenant, un sous-lieutenant, un enseigne, et quatre sergens, à l'exception de la colonelle, où l'on compte trois lieutenans, autant de sous-lieutenans, deux enseignes, six sergens : chaque bataillon a outre cela son commandant, son major, et ses aides-majors. Les gardes-françaises tiennent toujours la droite sur les gardes-suisses ; et leurs officiers portent le hausse-col

* Cette dernière distinction ne leur est accordée que depuis quelques années.

doré ; au lieu que ceux des gardes-suisses le portent d'argent. Ils ont aussi leur juge particulier, qu'on nomme le prevôt des bandes. Leur uniforme est bleu, parements rouges, avec des agréments blancs, leurs drapeaux bleus traversés d'une croix blanche et parsemés de fleurs-de-lis d'or. Plusieurs compagnies montent la garde chez le roi, et sont relevées par autant d'autres au bout de quatre jours. Ils gardent les bâtiments extérieurs du louvre, les cours et avant-cours, où ils se rangent en haie, lorsque le roi ou la reine doivent sortir ; ils restent dehors jusqu'à la rentrée du roi ou de la reine ; les tambours battent au champ pendant leur passage. Ils appellent pour les enfants de France, et ils rendent le même honneur à leur colonel. On les emploie aussi à différentes gardes dans Paris, où ils sont logés dans les fauxbourgs, et ont divers corps-de-garde ; et lorsque le roi n'est pas à Versailles, ils fournissent toujours un certain nombre d'hommes pour la garde de la reine et des enfants de France.

GARDES-SUISSES, régiment d'infanterie composé de douze compagnies en quatre bataillons. Leur uniforme est rouge avec des parements bleus et des agréments blancs. Ce corps a ses officiers de justice ; mais la compagnie colonelle a son juge particulier, qui ne dépend que du colonel-général. Les gardes-suisses montent la garde chez le roi, conjointement avec les gardes-françaises. Il faut remarquer ici que pour désigner les officiers de ces différents corps, on dit capitaine des gardes-du-corps, pour les commandants des quatre compagnies des gardes-du-corps ; capitaine aux gardes, pour les commandants de celles des gardes-françaises ; et pour les suisses, capitaine aux gardes-suisses.

Capitaine des gardes, exempt des gardes, brigadier des gardes, colonel des gardes, capitaine aux gardes ; Voyez CAPITAINE, EXEMPT, BRIGADIER, COLONEL, etc.

GARDE DU DEDANS, et GARDE DU DEHORS ; ce sont deux parties de la garde du roi, ainsi nommées l'une et l'autre du poste qu'elles occupent, et des lieux où elles servent. La garde du dedans est composée des gardes-du-corps, dont quelques-uns sont gardes de la manche, des cent-suisses, des gardes de la porte, et des gardes du grand-prevôt de l'hôtel. La garde du dehors est de gendarmes, chevaux-legers, mousquetaires, deux régiments des gardes, l'un français et l'autre suisse.

GARDES DE LA MANCHE ; ce sont vingt-quatre gentilshommes, gardes du corps, de la compagnie écossaise, qui servent toujours au côté du Roi. On y a joint le premier homme d'armes qui fait le vingt-cinquième. Ils ne servent que deux-à-deux, sinon dans les jours de cérémonie où ils sont six. Leur service est d'un mois. Ils ont sur le just-au-corps un corcelet ou hoqueton à fond blanc brodé d'or, avec la devise du Roi. Ils sont armés de l'épée qu'ils ont au côté, et d'une pertuisane dont le bois est semé de clous d'or, et le haut frangé : ils l'ont à la main droite. Ils se tiennent toujours debout, excepté à l'élévation. Aux funérailles des rais, ils sont debout aux côtés du lit. Ils déposent le corps dans le cercueil, et le cercueil au lieu qui lui est destiné.

GARDES DE LA PORTE ou DES PORTES, hommes d'armes qui veillent jour et nuit aux portes intérieures du palais où est le Roi. Il y en a cinquante. Ils sont armés de l'épée, de la carabine, avec la bandoulière chargée de deux clés en broderie, et just-au-corps bleu comme les gardes du corps, mais les galons et les ornements différents. Ils ont un chef et quatre lieutenans qui les commandent ; on appelle le chef capitaine des portes. Ils servent par quartier. Ils se placent aux portes du dedans du logis où est le Roi : le matin à six heures, ils relèvent les gardes du corps, et n'en sont relevés que le soir.

GARDES DE LA PREVOTE DE L'HOTEL, hommes d'armes qui sont exécuter la police où demeure le Roi. Ils sont commandés par le prevôt de l'hôtel, qui est aussi grand-prevôt de France, et par quatre lieutenans qui servent par quartier. Quand le Roi marche en carrosse à deux chevaux, ils précèdent les cent-suisses qui sont devant le carrosse. Ils arrêtent les malfaiteurs qui s'introduisent dans les lieux qu'habite le Roi. Ils portent le hoqueton incarnat-bleu-blanc, avec broderie, et la devise d'Henri IV. ou la massue, et ces mots, erit haec quoque cognita monstris.

GARDE ou QUART, (Marine) Voyez QUART.

GARDES-CORPS, (Marine) ce sont des nattes ou des tissus que l'on fait avec des cordages tressés, et qu'on met sur le haut des vaisseaux de guerre de chaque côté pour couvrir les soldats et les garantir des coups de mousquet de l'ennemi. Ces gardes-corps sont hauts de deux pieds et demi, et ont quatre à cinq pouces d'épaisseur ; ils sont soutenus par des épontilles et recouverts de pavais par-dessus. On les fait ordinairement de gros câbles nattés ; ils ne descendent pas jusque sur le pont, afin de laisser l'espace pour tirer le mousquet. (Z)

GARDES-COTES. Ces gardes sont composés des communes des villages les plus proches de la mer ; les habitants des villages destinés à la garde-côte ne tirent point à la milice.

Les gardes-côtes sont distribués par capitaineries. Le commandant de la province leur fait donner des armes et des munitions en temps de guerre ; le major de la capitainerie répond des armes, et les fait reporter dans les arsenaux à la paix.

Les capitaineries et la nomination des officiers dépendent du ministre de la Marine ; les capitaines et les principaux officiers sont toujours choisis parmi les gens de condition de la province qui servent ou qui ont servi.

Par des arrangements particuliers faits sous les ordres de l'intendant de la province, ces troupes ont des gratifications en temps de guerre, et ont presque toutes des uniformes de serge ou de grosse toîle avec des parements de différentes couleurs ; elles ont aussi des drapeaux.

Les gardes-côtes sont très-utiles pour épargner le service aux troupes du Roi ; et lorsqu'une capitainerie est bien tenue, comme celles du Calaisis, de Verton, du Crotoy, et de Cayeux, qui ont fort bien servi pendant la dernière guerre, elles sont suffisantes pour la défense de la côte, dont elles connaissent les plages et les points où l'ennemi pourrait aborder pour faire un coup-de-main.

Cependant nous croyons que l'ordre établi dans le Boulonnais, est meilleur que celui des capitaineries gardes-côtes. Le Boulonnais en tout temps a cinq régiments d'infanterie et trois de cavalerie, dont les colonels et les officiers sont brevetés par le Roi. Ces troupes sont sous les ordres du ministre de la guerre. Chaque village ou hameau fournit un nombre de cavaliers et de soldats, proportionné aux fermes et aux habitants qui le composent.

En temps de guerre on choisit dans ce nombre trois ou quatre bataillons, qui sont armés, équipés et entretenus par le Roi, comme les autres régiments d'infanterie. Ces régiments ont leur inspecteur particulier ; ils servent en garnison à Boulogne et dans les places maritimes voisines, et prennent rang dans l'infanterie du jour de leur création.

On assemble à Bologne deux compagnies de cavalerie, armées, montées, équipées et payées comme le reste de la cavalerie. Ces compagnies servent à envoyer des détachements à la découverte le long de l'Estran ; et en cas d'alerte elles fournissent des ordonnances pour envoyer en différents bourgs et villages du Boulonnais, pour commander aux régiments de s'assembler et de marcher aux rendez-vous généraux, tant au-delà qu'en-deçà de la Lyane.

Cette opération est d'une exécution facîle et prompte ; et en douze heures l'officier général qui commande en Boulonnais, peut être sur d'avoir 7 à 8 mille hommes sous les armes. L'ordre établi en Boulonnais est très-bon, n'est point à charge au pays : l'esprit militaire s'y conserve. Cette province, la plus voisine de l'Angleterre, peut se garder par ses propres forces, sans que la culture des terres en souffre.

Pendant la dernière guerre les troupes enrégimentées étaient fort belles, ont bien servi, et étaient très-bien composées en officiers.

Nous avons plusieurs provinces maritimes où le même ordre serait très-utîle à établir.

En temps de guerre tous les postes des gardes-côtes ont un signal qui peut être aperçu des postes de droite et de gauche. Ces signaux s'exécutent pendant le jour avec des drapeaux et des flammes, telles que celles des galeres ; pendant la nuit avec des fanaux et des feux. Dans le Boulonnais, le Roi entretient en temps de guerre un guetteur sur la montagne du Grinéz et sur celle du Blanéz. Ces deux montagnes forment les pointes de la petite baie de Willan, que l'on croit être l'ancien port d'Ictium des Romains ; mais qui n'est plus aujourd'hui d'aucun usage, par la quantité de sables qui l'ont comblé, et qui ont même entièrement couvert tout le terrain où l'ancienne ville de Willan était bâtie.

Le guetteur du Grinéz se trouve dans le cap de France le plus proche de l'Angleterre : le trajet en droite ligne n'est que de cinq lieues et demie, à 2400 taises la lieue. Ce guetteur découvre avec sa lunette la moindre barque qui sort du port de Douvres : deux cavaliers d'ordonnance restent de garde au Grinéz, pour faire leur rapport à Boulogne.

Le guetteur du Blanéz découvre tout ce qui sort des Dunes, et double la pointe de Danjeneasse ; des ordonnances du Calaisis y restent de garde, et font leur rapport à Calais.

De la tour de Dunkerque le guetteur découvre tout ce qui sort de la Tamise ; toute cette partie des côtes de France voit à l'instant ce qui se passe sur les bords opposés, d'où l'on ne peut découvrir nos manœuvres, nos côtes étant plus basses, et la mer les couvrant ; ce qui se définit, en terme de marine, en disant que la mer mange la côte. Les capitaines des gardes-côtes doivent connaître tous les sondages de l'étendue de la côte qu'ils ont à garder, pour juger surement des endroits où il est possible de faire une descente.

Cette connaissance est très-facîle à prendre sur les côtes de la Méditerranée, où le flux le plus haut ne monte pas à un pied ; mais sur les côtes de l'Océan il faut évaluer toutes les différentes hauteurs des marées, qui varient selon les saisons et les temps des équinoxes, et deux fois tous les mois régulièrement, en suivant les quartiers de la lune ; ce qui fait deux changements considérables en vingt-huit jours. Les gens de mer nomment ces flux réglés, vive-eau et morte-eau. Tel petit port des côtes de l'Océan ne pourrait recevoir de morte-eau un bâtiment de 60 tonneaux, qui peut en recevoir un de 300 de vive-eau. Cette connaissance parait avoir été négligée ; cette évaluation est cependant très-importante à faire, soit lorsqu'on médite quelqu'embarquement, soit lorsqu'on peut craindre quelque descente.

D'espace en espace il y a des batteries et des redoutes sur le bord de la mer ; quelques-unes sont armées en bronze ; et les canons, leur service et leur garde appartiennent à l'artillerie et aux troupes de terre ; les autres sont armées en fer et appartiennent à la marine, et sont gardées et servies par des détachements de troupes de la marine ou des gardes-côtes. En temps de guerre les unes et les autres sont également sous les ordres de l'officier général commandant dans la province.

Ces batteries sont placées, le plus qu'il est possible, dans les endroits où la mer fait échoir, terme dont les Marins se servent pour indiquer un point de la côte où le fond est assez profond pour que la mer reste près de la côte à basse mer, même pendant le temps de morte-eau.

Il serait à désirer qu'on mit plus d'uniformité dans le service des gardes-côtes ; il est facîle aussi de perfectionner ce service, qui devient quelquefois très-important : il le sera toujours beaucoup en temps de guerre, de mettre ce service au point que les côtes puissent être défendues par leurs propres forces, et que les armées en campagne ne soient point obligées de détacher des brigades ou des régiments pour remplacer ce qui manque à la défense des côtes. Article de M. le comte de TRESSAN.

GARDE-COTES, (Marine) on donne ce nom à des vaisseaux de guerre ou des frégates que le Roi fait croiser le long de nos côtes pour la sûreté du Commerce, et protéger les marchands contre les corsaires qui pourraient troubler leur navigation.

GARDE-COTES, CAPITAINERIES GARDE-COTES ; c'est un nombre de villages voisins de la mer, qui sont sujets à la garde d'une certaine étendue de côtes réglées par des ordonnances du Roi, qui fixent l'étendue de chaque capitainerie, et les lieux qui y sont compris. Chaque capitainerie a son capitaine, un lieutenant, et un enseigne : en temps de guerre, ces compagnies sont obligées de faire le guet, et de marcher aux endroits où les ennemis voudraient tenter quelques descentes, ou faire quelques entreprises. Voyez ci-devant GARDES-COTES.

GARDE DE FEUX, (Marine) ce sont des caisses de bois qui servent à mettre les gargousses, après qu'on les a remplies de poudre pour la charge des canons, et à les garder dans le fond de cale.

GARDE-MAGASIN, (Marine) c'est un commis chargé de tenir état de tout ce qui entre et sort des magasins qui sont dans un port, soit pour la construction, armement ou desarmement des vaisseaux. L'ordonnance de Louis XIV. pour les armées navales et arsenaux de la marine, du 15 Avril 1689, règle les fonctions des gardes-magasins, et leur prescrit ce qu'ils doivent observer. (Z)

GARDES DE LA MARINE, ou GARDES-MARINE ; ce sont de jeunes gentilshommes choisis et entretenus par le Roi dans ses ports pour apprendre le service de la marine, et en faire des officiers.

Ils sont par compagnies, distribuées dans les ports de Brest, de Toulon, et de Rochefort.

Le Roi paye des maîtres pour les instruire de tout ce qu'il est nécessaire de savoir pour faire de bons officiers ; ils en ont pour les Mathématiques, le Dessein, l'Ecriture, la Fortification, la Construction, l'Hydrographie, la Danse, l'Escrime, etc.

On les embarque sur les vaisseaux du Roi, où ils servent comme soldats, et en font toutes les fonctions ; et pour entretenir et cultiver pendant qu'ils sont à la mer les connaissances qu'ils auront prises dans les ports, leur commandant de concert avec le capitaine du vaisseau, marque quatre heures destinées à leurs différents exercices. La première pour le Pilotage et l'Hydrographie, la seconde pour l'exercice du mousquet et les évolutions militaires, la troisième pour l'exercice du canon, la quatrième pour l'exercice de la manœuvre quand le temps le permettra, qui sera commandée par le capitaine en chef, ou le capitaine en second, et qui la fera commander aussi par les gardes chacun à son tour. Ce sont de ces compagnies que l'on tire tous les officiers de la marine.

GARDE-MENAGERIE, (Marine) c'est celui qui a soin des volailles et des bestiaux qu'on embarque pour la table du capitaine et les besoins de l'équipage. (Z)

GARDE, (Jurisprudence) signifie confirmation et administration ; ce terme s'applique aux personnes et aux choses.

Il y a pour les personnes plusieurs sortes de garde ; savoir la garde des enfants mineurs, que l'on distingue en garde noble et bourgeoise, garde royale et seigneuriale.

Il y a aussi la garde-gardienne pour la conservation des privilèges de certaines personnes.

On donne aussi en garde la justice et plusieurs autres choses ; c'est de-là que certains juges ne sont appelés que juges-gardes ou gardes simplement de telle prevôté.

Enfin, plusieurs autres officiers ont le titre de garde, comme garde des Sceaux, garde des rôles, garde marteau, etc. Nous allons expliquer ces différentes sortes de gardes, en commençant par la garde des personnes.

GARDE D'ENFANS MINEURS, appelée dans la basse latinité bailia, ballum, warda, et en latin plus correct custodia, est l'administration de leur personne pendant un certain temps, et le droit qui est accordé au gardien pour cette administration, de jouir des biens du mineur ou d'une partie d'iceux, sans en rendre compte, aux charges prescrites par la coutume.

Quelques-uns prétendent trouver l'origine de la garde jusque chez les Romains, et citent à ce sujet la loi 6 au code de bonis quae liberos, qui fait mention du droit d'usufruit accordé au père ou ayeul sur les biens du fils de famille étant en sa puissance. Cet usufruit est accordé comme une suite du droit de puissance paternelle, avec lequel la garde a en effet quelque rapport ; mais elle diffère en ce que la puissance paternelle n'est accordée qu'aux pères et ayeuls, au lieu que la garde est aussi accordée aux mères et ayeules, et même en quelques coutumes aux collatéraux. L'usufruit que donne la puissance paternelle ne finit que par l'émancipation du fils de famille, à la différence de la garde, qui finit à un certain âge, qui est toujours avant la majorité.

D'autres comparent la garde à l'administration que les mères avaient de leurs enfants étant en pupillarité, lorsque le père ou ayeul était décédé. Séneque en son livre de la consolation ad Martiam, dit : pupillus relictus est usque ad quatuordecimum annum sub matris custodia ; à quoi il rapporte aussi ce que dit Horace, liv. I. de ses épitres.

Ut piger annus

Pupillis, quos dura premit custodia matrum.

Pontanus sur la coutume de Blais, tit. IIe art. 4. tient que la garde est une espèce de tutele qui vient des mœurs et coutumes des Gaulois.

Mais il est plus vraisemblable que l'origine de la garde vient des fiefs ; qu'elle fut établie en faveur des vassaux mineurs qui n'étaient point en âge de faire le service de leurs fiefs. Le Roi ou autre seigneur dont le fief relevait, prenait sous sa garde et protection le vassal mineur ; et comme il avait soin de son éducation, et qu'il faisait desservir le fief par un autre, il jouissait pour cela des revenus du fief, jusqu'à-ce que le vassal fût en âge de faire la foi, sans être tenu d'en rendre aucun compte.

Lorsque le Roi avait la garde, on l'appelait garde royale ; lorsqu'elle appartenait au seigneur, elle était appelée garde seigneuriale.

Quelquefois le Roi ou le seigneur la cédaient aux père, mère, ou autres ascendants ou parents du mineur : et comme en ce temps on ne donnait les fiefs qu'aux nobles, qu'il n'y avait presque point de noble qui n'eut quelque fief, et que les roturiers auxquels on permit dans la suite d'en posséder, devenaient nobles par la possession de ces fiefs lorsqu'ils se soumettaient à en faire le service ; on appela garde noble, la garde de tous les mineurs nobles ou possédant fiefs, et à l'imitation de cette garde noble, on accorda dans la suite aux père et mère non nobles la garde bourgeoise de leurs enfants mineurs.

La première source de la garde se trouve donc dans le droit féodal des Saxons, où il est dit article XVIIIe §. 6. dominus etiam est tutor pueri in bonis quae de ipso tenet infrà annos pueriles, dum nulli contulit hoc emolumentum, et debet inde reditus accipere, donec puer ad annos perveniat suprà scriptos, infrà quos puer se negligère non valebit, si à domino non potuerit investiri.

Quelques-uns prétendent qu'il est parlé de la garde dans les capitulaires de Charlemagne ; mais il est constant que le droit de garde est moins ancien en France, et qu'il ne commença d'y être usité, que lorsque les fiefs devinrent héréditaires ; ce qui n'arriva, comme on sait, que vers le commencement de la troisième race, ou au plutôt vers la fin de la seconde.

En effet, tant que les fiefs ou bénéfices ne furent qu'à vie, il ne fallait point de gardien pour administrer ces sortes de biens, parce qu'on ne les donnait jamais qu'à des gens en état de porter les armes et d'administrer leurs biens.

Ce ne fut donc que quand les fiefs commencèrent à devenir héréditaires, que les seigneurs prévoyant que ces fiefs pourraient échoir à des mineurs qui ne seraient pas en état de faire le service militaire dû à cause des fiefs, se réservèrent en quelques lieux la jouissance de ces fiefs, lorsque ceux auxquels ils appartenaient, n'étaient pas en âge de remplir leurs devoirs de vassaux ; savoir lorsque les mâles n'avaient pas vingt ou vingt-un ans accomplis, parce qu'avant cet âge, ils n'étaient pas réputés capables de porter les armes, comme il est dit dans Fleta, liv. I. chap. XIe §. 3. et à l'égard des filles, elles tombaient en garde pour leurs fiefs jusqu'à-ce qu'elles eussent atteint l'âge de puberté, parce que jusque-là elles n'étaient point en état de prendre un mari pour servir le fief.

De-là vint la garde royale et seigneuriale ; la garde royale était dévolue au Roi pour les fiefs mouvants immédiatement de lui, qui appartenaient à des mineurs ; et le Roi dans ce cas jouissait non-seulement des fiefs mouvants de lui, mais aussi des arriere-fiefs ; au lieu que les autres seigneurs ne jouissaient que des fiefs qui étaient mouvants d'eux immédiatement, comme il est dit dans les articles 215. et 216. de la coutume de Normandie.

Dans quelques endroits les seigneurs, au lieu de se réserver cette jouissance, permirent aux parents les plus proches des mineurs du côté dont les fiefs leur étaient échus, de desservir ces fiefs ; ils choisissaient même quelquefois entre ces parents celui qui était le plus propre à s'acquitter de ce devoir, comme on voit dans la chronique de Cambrai et d'Arras, liv. XXXIII. ch. lxvj. où la garde est nommée custodia : hujus custodiae puerum cum bono ejus commisit, dit cette chronique ; et en français cette commission fut nommée bail ou garde ; et les parents qui en étaient chargés furent appelés bails ou baux, et baillistres, du latin bajulus, qui dans la moyenne et basse latinité signifiait gouverneur, administrateur.

Dans quelques coutumes on distinguait la garde du bail ; la garde proprement dite n'était accordée qu'aux ascendants, le bail aux collatéraux. D'autres ont refusé à ces derniers la garde ou le bail, comme on voit dans la coutume de Châteauneuf en Thimerais, art. 139. qui porte que dans cette baronie bail de mineurs n'aura plus lieu, mais qu'il sera pourvu de tuteurs et curateurs, sinon que les pères ou mères eussent pris la garde d'iceux mineurs.

Les anciennes ordonnances ont compris sous le terme de bail l'administration des ascendants aussi-bien que celle des collatéraux ; l'une et l'autre est nommée ballum dans une ordonnance de saint Louis du mois de Mai 1246. Cette même ordonnance distingue néanmoins la garde du bail ; la garde parait prise pour le soin de la personne, et le bail pour l'administration des biens. En effet cette même ordonnance veut que le collatéral héritier présomptif du fief du mineur en ait le bail, mais que la garde de la personne du mineur appartienne au collatéral qui est dans le degré suivant.

Les Anglais qui ont emprunté comme nous la garde du droit féodal, nous en fournissent des exemples fort anciens. Malcome II. roi d'Ecosse, qui monta sur le trône en 1004, traita avec ses sujets auxquels il donna les terres qu'ils possédaient, à la charge de les tenir de lui à foi et hommage, et tous les barons lui accordèrent le relief et la garde ; et omnes barones concesserunt sibi wardam et relevium de haerede cujuscumque baronis defuncti ad sustentationem domini regis. La charte des libertés d'Angleterre de l'an 1215, fait aussi mention de la garde.

En France l'acte le plus ancien que je connaisse où il soit parlé du bail ou garde des mineurs, c'est une charte de l'an 1227, rapportée par Duchesne dans ses preuves de l'histoire de la maison de Chatillon.

Matthieu Paris en parle aussi aux années 1231, 1245 et 1257, où l'on voit que le roi vendait ou donnait la garde des mineurs à qui bon lui semblait.

La plus ancienne ordonnance qui concerne le bail et la garde, est celle de saint Louis du mois de Mai 1246, qui a pour objet de régler le bail et le rachat dans les coutumes d'Anjou et du Maine.

Le chap. XVIIe des établissements faits par ce même prince en 1270, porte que la mère noble a le bail de son hoir mâle jusqu'à 21 ans, et celui de la fille jusqu'à 15, au cas qu'il n'y ait pas d'hoir mâle. Il parait résulter de-là que quand il y avait un enfant mâle, la fille ne tombait pas en garde ou en bail, l'ainé était apparemment saisi de toute la succession, et gagnait les fruits jusqu'à-ce que ses puinés l'eussent sommé de leur en faire partage.

Le chap. cxvij. de cette même ordonnance veut que la garde du fief soit donnée à celui qui en est héritier présomptif, et la garde de la personne à un autre parent, de crainte que l'héritier ne désirât plutôt la mort que la vie des enfants ; et l'on ne donnait jouissance de la terre du mineur à celui qui avait la garde de sa personne, qu'autant qu'il en fallait pour le nourrir.

A l'égard des roturiers, les père et mère étaient les seuls qui eussent le bail de leurs enfants ; et en cas qu'ils fussent tous deux décédés, l'héritier présomptif pouvait bien tenir les enfants ; mais ils avaient la liberté d'aller demeurer chez un autre parent ou même chez un étranger qui avait le soin de leurs personnes et de leurs biens.

Le roi Jean qui était bail et garde du duc de Bourgogne, étant prisonnier en Angleterre, son fils ainé, comme le représentant, fit les fonctions de bail, et en cette qualité donna des bénéfices dont la nomination appartenait au duc de Bourgogne.

Anciennement il n'y avait que les fruits des héritages féodaux qui tombassent en garde, ce qui s'observe encore dans les coutumes de Vermandais et de Melun.

La garde n'était point considérée comme un avantage ; mais insensiblement les gardiens étendirent leurs droits au préjudice des mineurs. Ces usages furent reçus diversement dans les coutumes.

Quelques-unes n'usent que du terme de garde pour designer cette administration, comme celle de Paris ; d'autres l'appellent simplement bail, comme celle du Maine ; d'autres disent garde ou bail indifféremment, telle que la coutume de Peronne.

D'autres distinguent la garde du bail. Celle d'Orléans dit que les ascendants sont gardiens, que les baillistres sont la mère ou ayeule remariée et les collatéraux ; celles de Melun et de Mantes défèrent le bail aux collatéraux ; celle de Rheims dit que bail d'enfant n'a lieu, et elle ne défère la garde qu'aux ascendants.

La coutume de Blais joint ensemble les termes de garde, gouvernement, et administration.

Quelques coutumes, comme celles de Mantes et d'Anjou, n'admettent la garde que pour les nobles, et non pour les roturiers ; d'autres, comme Paris, admettent l'une et l'autre.

En Normandie il y a garde royale et garde seigneuriale.

En Bretagne les enfants tombaient aussi en la garde du duc et des autres seigneurs ; mais ce droit fut changé en rachat par accord fait entre Jean duc de Bretagne, fils de Pierre Mauclerc, et les nobles du pays.

Quelques coutumes, comme celle de Châlons, n'admettent ni garde ni bail.

Enfin quelques-unes n'en parlent point, et ont pourvu en diverses autres manières à l'administration des mineurs et de leurs biens, et aux droits des père, mère, et autres ascendants.

Le droit commun et le plus général que l'on suit présentement par rapport à la garde qui a lieu pour les père, mère, et autres parents, est qu'on la considère comme un avantage accordé au gardien, parce qu'ordinairement il y trouve du bénéfice, et qu'il ne l'accepte que dans cette vue.

Elle participe de la tutele, en ce que le gardien est chargé de nourrir et entretenir les mineurs selon leur condition, et qu'il a l'administration de leurs biens qui tombent en garde : mais le pouvoir du tuteur est beaucoup plus étendu.

Les père et mère mineurs ont la garde de leurs enfants, aussi-bien que les majeurs : mais on donne un tuteur ou curateur au gardien, lorsqu'il est mineur.

Les dispositions entre-vifs ou testamentaires, par lesquelles les ascendants ordonneraient que leurs enfants ne tomberont pas en garde, ne seraient pas valables, parce qu'ils ne peuvent pas ôter ce droit au survivant, qui le tient de la coutume.

La garde n'est jamais ouverte qu'une fois à l'égard des mêmes enfants ; quand on ne l'a pas prise lorsqu'elle était ouverte, on ne peut plus y revenir ; et elle ne se réitère point, c'est-à-dire que les enfants ne tombent jamais deux fois en garde.

Si les ascendants ont laissé créer un tuteur à leurs enfants ou petits-enfants, ils ne peuvent plus en prendre la garde, quand même ce serait eux qui seraient tuteurs, à-moins qu'ils ne se soient réservé expressément la faculté de prendre la garde.

La garde doit être acceptée en personne, et non par procureur.

L'acceptation ne peut pas être faite au greffe, mais en jugement, c'est-à-dire l'audience tenante. L'usage est que le gardien se présente assisté d'un procureur, qui requiert lettre de ce que sa partie accepte la garde ; ce que le juge lui accorde.

Les juges de privilège ne peuvent pas déférer la garde ; c'est au juge ordinaire du domicîle du défunt à la déférer. Cette règle ne reçoit d'exception qu'à l'égard des princes et princesses du sang, auxquels la garde est déférée par le parlement ; et il est bon à ce propos de relever une fausse tradition qui a eu cours à ce sujet, savoir, que lorsque Gaston, frère de Louis XIII. voulut prendre la garde noble de ses filles ; pour le dispenser d'aller au châtelet, le roi rendit une déclaration, par laquelle il transféra le châtelet pour vingt-quatre heures au palais d'Orléans, dit Luxembourg, où demeurait Gaston ; que le châtelet y tint son audience, pendant laquelle Gaston vint en personne accepter la garde. Cependant il est certain qu'il y a arrêt du parlement du 2 Septembre 1627, qui montre que l'acceptation de la garde noble y fut véritablement faite par Gaston duc d'Orléans.

Dans les coutumes qui ne fixent point le temps pour accepter la garde, elle peut toujours être demandée tant qu'il n'y a pas de tuteur nommé.

L'acceptation de la garde faite rebus integris, a un effet rétroactif au jour de l'ouverture de la garde.

Celui qui a une fois accepté la garde ne peut plus s'en démettre que du consentement de ses mineurs ; mais il peut s'en démettre malgré ses créanciers.

Le gardien même mineur n'est point relevé de son acceptation, sous prétexte de minorité, lésion, ou autrement.

Dans les coutumes où le gardien, soit noble ou roturier, gagne les meubles, il n'en fait point d'inventaire : mais il doit toujours faire inventorier les titres et papiers, pour en constater la quantité et la valeur, afin que l'on ne puisse pas lui en demander davantage : cet inventaire doit être fait avec le tuteur ou subrogé-tuteur des enfants.

Si le gardien est en communauté de biens avec ses enfants, il faut que l'inventaire soit fait et clos dans le temps et la forme prescrits par la coutume ; autrement la communauté continuerait, et le bénéfice de la garde y serait confondu jusqu'à-ce qu'il y ait un inventaire clos.

Le gardien doit aussi, pour sa sûreté, faire un procès-verbal de l'état des immeubles, pour les rendre au même état de grosses réparations.

La tutele n'appartient pas de plein droit au gardien ; ainsi il ne peut, sans être tuteur, recevoir le remboursement volontaire ou forcé des rentes dû.s à ses mineurs ; il ne peut aliéner leurs immeubles, et on ne peut en faire le decret sur lui ; il ne peut déduire en jugement aucunes actions réelles de ses mineurs, soit en demandant ou en défendant, ni même y déduire d'autres actions personnelles que celles qui concernent la jouissance qu'il a droit d'avoir comme gardien.

Lors donc qu'il s'agit de quelque acte que le gardien ne peut pas faire, on crée un tuteur ou curateur au mineur.

Si le mineur n'a pas d'autres biens que ceux compris dans la garde, le gardien doit avancer au tuteur l'argent nécessaire pour exercer les droits du mineur, quand ce serait pour procéder contre le gardien lui-même, sauf à celui-ci à répéter ces avances après la fin de la garde, s'il y a lieu.

Quant à l'émolument de la garde, c'est un statut réel qui se règle par chaque coutume pour les biens qui y sont situés.

Les coutumes ne sont pas uniformes sur ce point ; les unes donnent au gardien les meubles en propriété ; d'autres ne les donnent qu'au gardien noble ; d'autres n'en donnent que l'administration.

La coutume de Paris et plusieurs autres donnent au gardien l'administration des meubles, et le gain de tous les fruits des immeubles pendant la garde ; à la charge de payer les dettes et arrérages des rentes que doivent les mineurs ; les nourrir, alimenter et entretenir selon leur état et qualité ; payer et acquitter les charges annuelles que doivent les héritages, et entretenir lesdits héritages de toutes réparations viageres.

D'autres coutumes ne donnent la jouissance que des héritages nobles. Voyez les commentateurs sur les titres des coutumes où il est parlé de la garde noble et bourgeoise, et le traité qu'en a fait de Renusson. (A)

GARDE BOURGEOISE, est celle qui est déférée par la coutume au père ou mère bourgeois et non nobles.

Quelques auteurs ont écrit que ce privilège fut accordé aux bourgeois de Paris par Charles V. par des lettres-patentes du 9 Aout 1371 : mais en examinant avec attention ces lettres, on voit que l'usage de la garde bourgeoise était plus ancien, et que Charles V. ne fit que le confirmer. On voit en effet dans ces lettres, que les bourgeois de Paris représentèrent au roi, que dans les temps passés, tant de son règne que de celui de ses predécesseurs, ils avaient joui des droits de garde et baux de leurs enfants et cousins, consanguineorum ; ce qui suppose qu'alors la garde avait lieu à Paris au profit des collatéraux ; Charles V. les confirma dans tous leurs privilèges, sans les spécifier.

Ce droit de garde bourgeoise n'a lieu dans la coutume de Paris, qu'en faveur des bourgeois de la ville et fauxbourgs de Paris, et non pour les bourgeois des autres villes ; mais il a été étendu dans d'autres coutumes aux bourgeois de certaines villes.

Les ayeux et ayeules ne peuvent prétendre la garde bourgeoise.

Pour régler la capacité de celui qui prétend la garde bourgeoise, on ne considère pas le domicîle du gardien, mais la coutume du lieu où le défunt qui a donné ouverture à la garde, avait son dernier domicîle ; et cette garde n'a son effet que sur les biens situés dans la coutume qui accorde la garde, et ne comprend pas ceux qui seraient dans d'autres coutumes, quand même elles accorderaient aussi la garde bourgeoise, parce qu'elle n'est donnée qu'à ceux qui sont domiciliés dans la coutume ; et que le défunt ne pouvait pas être domicilié à-la-fais dans plusieurs coutumes. Voyez les arrêtés de M. de Lamoignon, tit. j. art. 29.

La garde bourgeoise ne dure que jusqu'à quatorze ans pour les mâles, et douze ans pour les filles, excepté dans la coutume de Rheims, où elle dure jusqu'à vingt-cinq ans, tant pour les mâles que pour les femelles.

Du reste le pouvoir et les droits du gardien bourgeois sont les mêmes que ceux du gardien noble. Voyez ci-après GARDE NOBLE. (A)

GARDE COUTUMIERE, est la garde soit royale ou seigneuriale, noble ou bourgeoise, des enfants mineurs, qui est déférée à certaines personnes par les coutumes, à la différence de la garde royale ou sauve-garde accordée à certaines personnes par des lettres-patentes. (A)

GARDE NOBLE, est celle qui appartient au père, mère, ou autres ascendants nobles.

Par rapport à l'origine de cette garde, voyez ce qui a été dit ci-devant sur la garde des enfants mineurs en général.

L'émolument de cette garde est réglé diversement. Quelques coutumes donnent au gardien les meubles en propriété ; d'autres ne lui en donnent que l'administration.

Dans quelques coutumes, le gardien ne gagne que les fruits des fiefs du mineur ; dans d'autres, il a les revenus de tous leurs biens, même roturiers ; d'autres les chargent de rendre compte de tous les fruits.

L'âge auquel finit la garde noble est le même que celui de la majorité féodale, lequel est réglé diversement par les coutumes. Voyez ci-devant GARDE BOURGEOISE, et ci-après GARDE ROYALE ET SEIGNEURIALE.

GARDE ROYALE, en Normandie, est celle qui appartient au roi sur les enfants mineurs à cause des fiefs nobles qu'ils possèdent, mouvants immédiatement du roi, soit à cause de sa couronne ou à cause de son domaine.

Cette espèce particulière de garde, qui est propre à la province de Normandie, parait avoir eu la même origine que la garde seigneuriale, et conséquemment la même origine que la garde noble, c'est-à-dire de suppléer au service militaire que les vassaux mineurs n'étaient pas en état de faire.

Nous croyons par la même raison que l'usage de la garde royale est aussi ancien que celui de la garde seigneuriale ou garde noble dans les autres coutumes.

Mais il y a aussi lieu de croire que cette garde fut d'abord ducale avant d'être royale ; les fiefs ayant commencé à devenir héréditaires vers la fin de la seconde race et au commencement de la troisième, c'est-à-dire dans le dixième siècle. Rollo qui fut premier duc de Normandie en 910, ou quelqu'un de ses successeurs ducs, établit sans-doute la garde seigneuriale ou ducale, à l'imitation des autres seigneurs. Ceux-ci la remirent ensuite aux parents, moyennant un droit de rachat ; au lieu que les ducs de Normandie continuèrent de jouir par eux-mêmes du droit de garde : aussi Terrien, qui a travaillé sur l'ancienne coutume, ne parle-t-il pas de la garde royale, mais seulement de la garde d'orphelins, qu'il divise en deux espèces, savoir celle qui appartient au duc de Normandie, et celle qui appartient aux autres seigneurs de la même province.

Cette garde ducale devint royale, soit lorsque Guillaume II. dit le Bâtard et le Conquérant, septième duc de Normandie, eut conquis le royaume d'Angleterre, ce qui arriva l'an 1066 ; ou bien lorsque la Normandie fut réunie à la couronne de France par Philippe-Auguste.

Mais Terrien s'est trompé, en supposant que la garde avait été introduite en Angleterre depuis que les ducs de Normandie en ont été rois : car les barons d'Ecosse accordèrent le relief et la garde à Malcome II. qui monta sur le trône d'Ecosse en 1004.

Il n'y a en Normandie que deux sortes de garde, savoir la garde royale et la garde seigneuriale ; la garde bourgeoise n'y a pas lieu.

Le privilège de la garde royale est que le roi fait les fruits siens, non-seulement de ce qui échet pour raison des fiefs nobles tenus immédiatement de lui, et pour raison desquels on tombe en garde : mais il a aussi la garde, et fait les fruits siens de tous les autres fiefs, rotures, rentes, et revenus, tenus d'autres seigneurs que lui, médiatement ou immédiatement ; au lieu que la garde seigneuriale ne s'étend que sur les fiefs nobles ou qui relèvent immédiatement des seigneurs particuliers, et non sur les autres fiefs nobles ou autres héritages relevants et mouvants d'autres seigneurs que d'eux. La raison de cette différence est que la majesté royale serait blessée de souffrir un partage avec d'autres seigneurs qui sont les sujets du roi.

Si les arriere-vassaux du roi viennent à tomber en garde noble, pour raison des fiefs nobles qui relèvent immédiatement des mineurs tombés en la garde noble royale, le roi fait pareillement siens les fruits et revenus de ces arriere-fiefs, tant que dure la garde noble royale des vassaux immédiats, et que les arriere-vassaux sont mineurs : de sorte que si la minorité de ceux-ci durait encore après la garde noble royale finie, ils tomberaient en la garde du seigneur immédiat pour le restant de leur minorité, et ne seraient plus dans la garde royale.

La garde royale ne s'étend point sur des fiefs et biens situés dans une autre coutume que celle de Normandie, à-moins qu'elle n'eut quelque disposition semblable.

Les apanagistes ni les engagistes du domaine n'ont point la garde royale ; c'est un droit de la couronne qui est inaliénable.

Le roi ne tire aucun bénéfice de la garde noble royale ; il en gratifie ordinairement les mineurs, ou leurs père ou mère, ou quelqu'un de leurs parents ou amis : mais le droit de patronage qui appartient aux mineurs étant en la garde du roi, n'est point compris dans le don ou remise que le roi fait de la garde.

S'il n'y a qu'un seul bénéfice, le roi y présente à l'exclusion de la douairière qui jouit du fief ; mais s'il y en a plusieurs, la douairière présente au bénéfice dont le patronage est attaché au fief dont elle jouit.

La garde royale ou seigneuriale ne commence que du jour qu'elle est demandée en justice, si ce n'est par rapport à la présentation aux bénéfices.

Elle finit à l'âge de vingt-un ans accomplis, pour les mâles ; au lieu que la garde seigneuriale finit à vingt ans, tant pour les mâles que pour les filles.

La garde royale finit à l'âge de vingt ans accomplis pour les filles, et même plus tôt si elles sont mariées du consentement de leur seigneur et des parents et amis : c'est la même chose, à cet égard, pour la garde seigneuriale.

Les charges de la garde royale sont les mêmes que celles de la garde seigneuriale et de la garde noble en général.

Ceux auxquels le roi a fait don ou remise de la garde royale, sont en outre obligés d'en rendre compte aux mineurs lorsque la garde est finie, excepté lorsque le donataire est étranger à la famille.

Le donataire de la garde qui est parent du mineur, est seulement exempt des intérêts pupillaires ; il ne peut demander que ses voyages et séjours, et non des vacations.

Le don ou remise de la garde fait à la mère, quoiqu'elle ne soit pas tutrice, ou au tuteur depuis son élection, est réputé fait au mineur, au profit duquel ils sont obligés de tenir compte des intérêts pupillaires ; ce qui a lieu pareillement quand lors de l'élection le tuteur ne s'est point réservé à jouir de la garde qui lui était acquise avant sa tutele. Art. 36. du règlement de 1666.

En concurrence de plusieurs donataires de la garde royale, celui qui est parent est préféré à l'étranger ; et entre parents, c'est le plus proche. Voyez ci-après GARDE SEIGNEURIALE ; et les commentateurs de la coutume de Normandie, sur les articles 214. et suiv. (A)

GARDE SEIGNEURIALE, en Normandie, est la garde noble des enfants mineurs, qui appartient aux seigneurs particuliers de fiefs, à cause des fiefs qui relèvent immédiatement d'eux. L'origine de ce droit est la même que celle de la garde royale et de la garde noble en général.

Cette garde ne s'étend point sur les autres fiefs et biens des mineurs ; quand même ces biens seraient aussi situés en Normandie.

Le seigneur qui a la garde fait les fruits siens, sans être obligé d'en rendre compte, ni de payer aucun reliquat.

Le devoir du seigneur est de veiller sur la personne et sur les intérêts du mineur ; de ne rien faire à son préjudice ; enfin d'en user comme un bon père de famille : autrement, si le seigneur abusait de la garde, on pourrait l'en faire décheoir.

Il est libre au seigneur, quoiqu'il ait accepté la garde, d'y renoncer dans la suite, s'il reconnait qu'elle lui soit plus onéreuse que profitable.

Le seigneur n'est obligé à la nourriture, et n'entretient des mineurs sur les biens compris en la garde, qu'au cas qu'ils n'aient point d'ailleurs de revenu suffisant.

On donne un tuteur au mineur pour les biens qui n'entrent pas dans la garde.

Mais si le tuteur et les parents du mineur abandonnent au seigneur la jouissance de tous les biens des mineurs, alors il est obligé d'entretenir le mineur selon son état et eu égard à la valeur des biens, de contribuer au mariage des filles, de conserver le fief en son intégrité, et d'acquitter les arrérages des rentes foncières hypothécaires et charges réelles.

S'il y a plusieurs seigneurs ayant la garde noble à cause de divers fiefs appartenans au mineur, chacun contribue aux charges de la garde pour sa quote-part ; et si les seigneurs y manquaient, les tuteurs ou parents pourraient les y contraindre par justice.

Le seigneur qui a la garde doit entretenir les biens comme un bon père de famille.

Si pendant que le mineur est en la garde de son seigneur, ceux qui tiennent quelque fief noble de ce mineur tombent aussi en garde, elle appartient au mineur, et non à son seigneur ; à la différence de la garde royale, qui s'étend sur les arriere-fiefs.

La garde seigneuriale sinit à l'âge de vingt ans accomplis, tant pour les mâles que pour les filles ; et pour la faire cesser, il suffit de faire signifier au seigneur le passé-âgé, c'est-à-dire que le mineur est devenu majeur.

Elle peut finir plus tôt à l'égard des filles par leur mariage, pourvu qu'il soit fait du consentement du seigneur gardien et des parents et amis.

Si la fille qui est sortie de garde épouse un mineur, elle retombe en garde.

La femme mariée ne retombe point en garde encore que son mari meure avant qu'elle ait l'âge de 20 ans.

Celui qui sort de garde ne doit point de relief à son seigneur.

La fille ainée mariée, qui n'a pas encore vingt ans accomplis, ne tire point ses sœurs puinées hors de garde jusqu'à-ce qu'elles soient mariées ou parvenues à l'âge de vingt ans ; sauf à la fille ainée à demander partage au tuteur de ses sœurs. Voyez les commentateurs de la coutume de Normandie, sur les art. 214. et suiv. jusque et compris l'art. 234 ; et ci-devant GARDE ROYALE. (A)

GARDE, (DROIT DE-) droit qui se levait anciennement par les seigneurs, et que les titres appellent garda ou gardagium ; il est souvent nommé conjointement avec le droit de guet. Les vassaux et autres hommes du seigneur étaient obligés de faire le guet et de monter la garde au château pour la défense de leur seigneur. Ce service personnel fut ensuite converti en une redevance annuelle en argent ou en grains. Il y en a des titres de l'an 1213, 1237, et 1302, dans l'histoire de Bretagne, tome I. pp. 334, 372, et 452 : il y en a aussi des exemples dans l'histoire de Dauphiné par M. de Valbonnais.

La plupart des seigneurs s'arrogèrent ces droits, sous prétexte de la protection qu'ils accordaient à leurs vassaux et sujets dans les temps des guerres privées et des incursions que plusieurs barbares firent dans le royaume : dans ces cas malheureux, les habitants de la campagne se retiraient avec leurs femmes, leurs enfants, et leurs meilleurs effets, dans les châteaux de leurs seigneurs, lesquels leur vendirent cette garde, protection ou avouerie, le plus cher qu'ils purent ; ils les assujettirent à payer un droit de garde en blé, vin, ou argent, et les obligèrent de plus à faire le guet.

On voit dans le chap. liij. des établissements de S. Louis, que dans certains lieux les sujets étaient obligés à la garde avec leurs femmes ; en d'autres, ils n'étaient pas obligés de mener leurs femmes avec eux ; et quand ils n'en avaient pas, ils devaient mener avec eux leurs sergens, c'est-à-dire leurs serviteurs ou leur ménage. La garde ou le guet obligeaient l'homme à passer les nuits dans le chateau du seigneur, lorsqu'il y avait nécessité ; et l'homme avait le jour à lui. Ces droits de guet et de garde furent dans la suite réglés par nos rois ? Louis XI. les regla à cinq sols par an. Voyez ci-après GUET ; et le gloss. de M. de Laurière, aux mots lige-étage et guet et garde. (A)

GARDE, (DENIER DE-) est une modique redevance de quelques deniers, qui se paye au seigneur pour les années qu'une terre labourable se repose ; et la rente, champart, terrage, agrier, ne se paye que pour les autres années où la terre porte des fruits. Il est parlé de ce droit dans plusieurs anciens baux passés sous le scel de la baillie de Mehun-sur-Yèvre, qui ont été faits à la charge de rente foncière et de garde. On voit dans le procès-verbal de la coutume du grand Perche, que ce droit est prétendu par le baron de Loigny : il en est aussi fait mention en la quest. IXe des décisions de Grenoble. (A)

GARDE DES EGLISES, est la protection spéciale que le roi ou quelqu'autre seigneur accorde à certaines églises ; nos rois ont toujours pris les églises sous leur protection.

S. Louis confirma en 1268 toutes les libertés, franchises, immunités, prérogatives, droits et privilèges accordés, tant par lui que par ses prédécesseurs, aux églises, monastères, lieux de piété, et aux religieux et personnes ecclésiastiques.

Philippe-le-Bel, par son ordonnance du 23 Mars 1308, déclara que son intention était que toutes les églises, monastères, prélats, et autres personnes ecclésiastiques, fussent sous sa protection.

Le même prince déclara que cette garde n'empêchait pas la juridiction des prélats : lorsque cette garde emportait une attribution de toutes les causes d'une église à un certain juge, elle était limitée aux églises qui étaient d'ancienneté en possession de ce droit ; et Philippe-le-Bel déclara même que dans la garde des églises et monastères, les membres qui en dépendent n'y étaient pas compris.

Il était défendu aux gardiens des églises, ou aux commissaires députés de par le roi et par les sénéchaux, de mettre des panonceaux ou autres marques de garde royale sur les biens des églises, à-moins qu'elles n'en fussent en possession paisible, ou à-peu-près telle. Lorsqu'il y avait quelque contestation sur cette possession, le gardien ou le commissaire faisait ajourner les parties devant le juge ordinaire ; et cependant il leur faisait défense de rien faire au préjudice l'un de l'autre : il ne poursuivait personne pro fractione gardiae, c'est-à-dire, pour contravention à la garde, à-moins que cette garde ne fût notoire, telle qu'est celle des cathédrales et de quelques monastères qui sont depuis très-longtemps sous la garde du roi, ou que cette garde n'eut été publiée dans les assises, ou signifiée à la partie.

Philippe VI. dit de Valais, promit par rapport à certaines sénéchaussées qui étaient par-delà la Loire, qu'il n'accorderait plus de garde dans les terres des comtes et barons, ni dans celles de leurs sujets, sans connaissance de cause, les nobles appelés, excepté aux églises et monastères, qui de toute ancienneté sont sous la garde royale, et aux veuves, pupilles, et aux clercs vivant cléricalement, tant qu'ils seraient dans cet état ; que si dans ces sénéchaussées, les sujets des hauts-justiciers ou autres violaient une garde, les juges royaux connaitraient de ce délit, mais qu'ils ne pourraient condamner le délinquant qu'à la troisième partie de son bien ; que la poursuite qu'ils feraient contre lui, n'empêcherait pas le juge ordinaire du haut-justicier de procéder contre le délinquant, comme à lui appartiendrait ; mais que si le crime était capital, il ne pourrait rendre sa sentence que les juges royaux n'eussent rendu la leur au sujet de la sauve-garde.

On voit aussi dans les lettres du même prince de 1349, qu'il y avait des personnes qui étaient immédiatement en la garde du roi, d'autres qui n'y étaient que par la voie de l'appel.

Le roi Jean déclara en 1351, que les Juges royaux pourraient tenir leurs assises sur les terres des seigneurs, quand le roi y avait droit de garde. Ce même prince donnant à Jean son fils les duchés de Berry et d'Auvergne, retint la garde et les régales des églises cathédrales et des églises de fondation royale.

Le temporel de l'abbaye de Lagny fut saisi en 1364, à la requête du receveur de Meaux, pour payer la somme de 800 livres dû. par cette abbaye pour les arrérages de la garde dû. au roi.

Par des lettres du mois de Juillet 1365, Charles V. déclara que toutes les Eglises de fondation royale sont de droit sous la sauve-garde royale.

Quand Charles VI. donna le duché de Touraine à Jean son second fils, il se réserva la garde de l'église cathédrale de Tours, et de celles qui sont de fondation royale, ou en pariage, ou qui sont tellement privilégiées, qu'elles ne peuvent être séparées du domaine de la couronne. Il fit la même réserve lorsqu'il lui donna le duché de Berri et le comté de Poitou : il en usa aussi de même lorsqu'il donna le comté d'Evreux au duc d'Orleans son frère. Voyez CONSERVATEURS ROYAUX et APOSTOLIQUES. (A)

GARDE ENFREINTE, est lorsqu'un tiers fait quelque acte contraire au droit de garde, ou sauve-garde accordé par le roi à quelqu'un. (A)

GARDE-FAITE, est défini par l'article 531 de la coutume de Bourbonnais, quand celui qui est commis à la garde du bétail est trouvé gardant le bétail en l'héritage auquel le dommage est fait, ou que le gardien est près du bétail, de manière qu'il le puisse voir, et ne fait néanmoins diligence de le mettre dehors, ou lorsqu'il mène et conduit le bétail dans l'héritage, ou qu'il l'a déclos et débouché afin que son bétail y puisse entrer, et qu'ensuite par ce moyen le bétail y soit entré.

Quand le bétail qui a fait le dommage n'était pas gardé, le maître du bétail peut l'abandonner pour le délit ; mais quand le bétail était à garde-faite, le maître doit payer le dommage. Voyez Despommiers sur l'article 531 de la coutume de Bourbonnais. Voyez aussi l'article 309 de celle de Melun, celle d'Amiens, article 206 et suivant. (A)

GARDE-GARDIENNE, ce sont des lettres accordées par le roi à des abbayes, chapitres, prieurés, et autres églises, universités, colléges, et autres communautés, par lesquelles le roi déclare qu'il prend en sa garde spéciale ceux auxquels il les accorde, et pour cet effet leur assigne des juges particuliers, pardevant lesquels toutes leurs causes sont commises ; le juge auquel cette juridiction est attribuée, s'appelle juge conservateur de leurs privilèges. Ceux qui ont droit de garde gardienne peuvent, en vertu de ces lettres, attirer leur partie adverse qui n'a point de privilège plus éminent, hors de la juridiction naturelle, soit en demandant ou défendant, pourvu que les lettres de garde-gardienne aient été vérifiées au parlement où le juge conservateur ressortit.

On entend quelquefois par le terme de garde-gardienne, le privilège résultant des lettres d'attribution.

L'usage des gardes-gardiennes est fort ancien, surtout pour les églises cathédrales, et autres de fondation royale, que nos rois ont toujours prise sous leur protection ; ce que l'on appelait alors simplement garde ou sauve-garde, ou bien garde royale. Dans la suite on se servit du terme de garde-gardienne, soit parce que cette garde était administrée par un gardien ou juge conservateur, ou bien pour distinguer cette espèce particulière de garde, de la garde royale des enfants mineurs qui a lieu en Normandie.

Les privilèges de garde-gardienne furent confirmés par l'article 9 de l'édit de Cremieu, qui veut que les baillifs et sénéchaux aient la connaissance des causes et matières des églises de fondation royale, auxquelles ont été et seront octroyées des lettres en forme de garde-gardienne, et non autrement.

Cet article a été confirmé par l'article 3 d'un édit du mois de Juin 1559, qui restreint cependant les privilèges des gardes-gardiennes, en ce qu'il ordonne qu'il n'y aura que ceux qui sont du corps commun de l'église à laquelle elles ont été accordées, qui en jouiront, et qu'elles ne s'étendront pas aux bénéfices étant de sa collation.

L'ordonnance de 1669, titre 4 des committimus et gardes-gardiennes, ordonne article 18, que les églises, chapitres, abbayes, prieurés, corps et communautés qui prétendent droit de committimus, soient tenus d'en rapporter les titres pour être examinés, et l'extrait envoyé aux chancelleries près les parlements, et que jusqu'à ce il ne leur soit expédié aucunes lettres.

L'article 18 permet aux principaux des colléges, docteurs, régens, et autres du corps des universités qui tiennent des pensionnaires, de faire assigner de tous les endroits du royaume, pardevant le juge de leur domicile, les redevables des pensions et autres choses par eux fournies à leurs écoliers, sans que leurs causes en puissent être évoquées ni renvoyées devant d'autres juges, en vertu de committimus ou autre privilège.

L'article suivant porte, que les recteurs, régens et lecteurs des universités exerçant actuellement, ont leurs causes commises en première instance devant les juges conservateurs des privilèges des universités, auxquels l'attribution en a été faite par les titres de leur établissement ; et qu'à cet effet il sera dressé par chacun an un rôle par le recteur de chaque université, pour être porté aux juges conservateurs de leurs privilèges.

Les écoliers étudiants dans une université, ont un autre privilège qu'on appelle privilège de scolarité. Voyez SCHOLARITE. COMMITTIMUS, CONSERVATEUR, CONSERVATION. (A)

GARDE-LIGE, est le service qu'un vassal lige doit à son seigneur ; on entend aussi quelquefois par ce terme le vassal même qui fait ce service, et qui est obligé de garder le corps de son seigneur avec armes suffisantes. (A)

GARDE ou PROTECTION, dans le temps des incursions des Barbares et des guerres privées, les habitants de la campagne, et même ceux des villes, se mettaient sous la garde et protection de quelque seigneur puissant qui avait droit de château et forteresse, pour les mettre en sûreté, et les défendre des violences auxquelles ils étaient exposés ; et comme il se faisait à ce sujet un contrat entre le seigneur et ses sujets, et que ceux-ci s'engageaient par reconnaissance à certains droits et devoirs envers le seigneur, cette garde devenait aussi par rapport au seigneur un droit qu'il avait sur ses sujets. C'est pourquoi dans des lettres du roi Jean, du mois d'Aout 1354, portant confirmation des privilèges des habitants de Jonville-sur-Sône ; il est dit que ces habitants ne pourront, sans le consentement de leur seigneur, se mettre sous la garde et protection d'un autre, si ce n'est contre les violences de gens qui ne seraient pas soumis à leurs seigneurs ; mais que dans ce cas ils seront tenus d'exprimer dans les lettres de garde qu'ils obtiendront de ces seigneurs étrangers, le nom des gens contre les violences desquels ils demandent protection. Et dans des lettres de Charles V. du mois d'Aout 1366, il est dit que la garde de quelques lieux appartenant à l'abbaye de Molesme, ne pourra être mise hors la main des comtes de Champagne ; et l'on voit que ce droit de garde emportait une juridiction sur les personnes qui étaient en la garde du seigneur. (A)

GARDE ROYALE DES EGLISES. Voyez ci-devant GARDES DES EGLISES.

GARDE SEIGNEURIALE ou PROTECTION. Voyez ci-devant GARDE ou PROTECTION.

GARDE DES ABLEES, ou GRAINS PENDANS PAR LES RACINES. Charles V. par des lettres du 19 Juin 1369, permit aux mayeurs et échevins d'Abbeville d'en établir, avec pouvoir à ce garde de saisir les charrais et bestiaux qui causeraient du dommage dans les terres, et de condamner en l'amende ceux qui les conduiraient. Voyez MESSIER. (A)

GARDE-BOIS. Voyez ci-après GARDE DES EAUX ET FORETS.

GARDE DES DECRETS et IMMATRICULES, et ita est, du Châtelet. Cet officier a trois fonctions ; comme garde des decrets, il doit garder les decrets du châtelet 24 heures en sa possession depuis qu'ils sont signés, recevoir les oppositions s'il en survient, sinon donner son certificat sur lesdits decrets, et les remettre au scelleur pour les sceller. Comme garde des immatricules, il doit faire immatriculer et signer sur son registre les notaires et huissiers qui sont immatriculés au Châtelet, et qui en cette qualité ont le droit d'instrumenter par tout le royaume : enfin comme ita est, il a le droit d'expédier les grosses que les notaires qui ont reçu les minutes n'ont pu expédier, soit par mort ou par vente ; il signe au milieu, en mettant au-dessus de sa signature ita est, qui veut dire collationné à la minute, que le successeur à l'office et pratique lui représente ; ce successeur signe à droite, et le notaire en second à gauche. (A)

GARDE DES DROITS ROYAUX de souveraineté de ressort et des exemptions dans la ville de Limoges ; cette qualité était donnée à des sergens que le sénéchal de Limoges commettait pour être les conservateurs des privilèges de ceux qui étaient en la sauve-garde du roi. Voyez les lettres de Charles V. du 22 Janvier 1371, pour le chapitre de Limoges. (A)

GARDES DES FERMES. Voyez ci-devant FERMES GENERALES.

GARDES ou MAITRES DES FOIRES, ou DES PRIVILEGES DES FOIRES, étaient ceux qui avaient l'inspection sur la police des foires, et la manutention de leurs privilèges. L'ordonnance de Philippe-le-Bel ; du 23 Mars 1302, porte que les gardes des foires de Champagne seront choisis par délibération du grand-conseil ; c'étaient les mêmes officiers qui ont depuis été appelés juges conservateurs des privilèges des foires. (A)

GARDES DES GABELLES. Voyez ci-devant GABELLES.

GARDE D'UN GREFFE. Voyez ci-devant GARDE DE JUSTICE.

GARDES ou GREFFIER DES PRISONS : cette qualité est donnée au greffier des prisons du châtelet dans une ancienne ordonnance. Voyez le recueil des ordonnances de la troisième race, tom. III. à la table. (A)

GARDE ou JUGE-GARDE DES MONNOIES, est un juge qui veille sur tout le travail de la monnaie. Voyez au mot MONNOIE, où il en sera parlé plus amplement. (A)

GARDE DE JUSTICE, est le nom que l'on donne à certains juges, qui sont considérés comme n'ayant la justice qu'en dépôt et en garde. Par exemple, le prevôt de Paris n'est, selon quelques-uns, que garde de ladite prevôté, parce que c'est le roi qui en est le premier juge et prevôt : c'est pourquoi il y a un dais au-dessus du siège du prevôt de Paris. M. le procureur-général est garde de la prevôté de Paris, le siège vacant ; ce qui signifie qu'il n'a cette prevôté qu'en dépôt, et non en titre d'office. Voyez PREVOT DE PARIS.

On disait aussi donner en garde une prevôté ou autre justice, les sceaux ou un greffe. Anciennement on les donnait à ferme ; mais cet abus fut reformé, et on les donna en garde, c'est-à-dire seulement par commission révocable ad nutum, jusqu'au temps de Charles VIII. lequel, en 1493, ordonna qu'il serait pourvu aux prevôtés en titre d'office de personnes capables, par élection des praticiens du siège ; et depuis ce temps les prevôts ne s'intitulèrent plus simplement garde de la prevôté, mais prevôts simplement. Voyez Loiseau des offices, lib. III. ch. j. n. 75. et suiv.

GARDES-MANEURS, sont des gardiens que l'on établit à une saisie de meubles. On appelle aussi quelquefois de ce nom des sergens ou archers, que l'on met en garnison chez un débiteur jusqu'à-ce qu'il ait satisfait ou donné caution. Voyez GARNISON et MANGEURS. (A)

GARDES DES MARCHANDS ET DE CERTAINS ARTS ET METIERS, sont des personnes choisies entre les maîtres dudit état, pour avoir la manutention des statuts et privilèges de leur corps. Chaque corps de marchands et artisans a ses jurés et préposés, qui exercent à-peu-près les mêmes fonctions que les gardes : mais il n'est pas permis à ces jurés de prendre le titre de corps ; cela n'appartient qu'aux préposés des six corps des marchands, et à quelques autres corps de marchands, qui ont ce privilège par leurs statuts.

Il est parlé des gardes et jurés dans des ordonnances fort anciennes ; ils sont nommés en latin magistri et custodes, dans des lettres de Philippe-de Valais de 1329 ; et dans d'autres lettres de Philippe VI. du mois de Mars 1355, pour les Parmentiers de Carcassonne, ils sont nommés supra positi.

Les gardes font des visites annuelles chez tous les marchands et maîtres de leur état, pour voir si les statuts sont observés. Ils en font aussi en cas de contravention, chez ceux qui, sans qualité, s'ingèrent de ce qui appartient à l'état, sur lequel ces gardes sont établis pour dresser les procès-verbaux de contravention. Ils se font assister d'un huissier, et même quelquefois d'un commissaire, lorsqu'il s'agit de faire ouverture des portes. Voyez JURES et MAITRES. (A)

GARDE-MARTEAU, est un officier établi dans chaque maitrise particulière des eaux et forêts, pour garder le marteau avec lequel on marque le bois que l'on doit couper dans les forêts du roi. Quand on fait des ventes, il assiste aux audiences en la chambre du conseil, et au jugement des affaires, où il a voix délibérative avec les autres officiers ; et en leur absence il administre la justice. Il doit vaquer en personne au martelage, et ne peut confier son marteau à autrui, sinon en cas d'empêchement légitime. Il assiste aux visites des grands-maîtres, à celles des maîtres particuliers, et autres officiers. Il en fait aussi de particulières. Voyez l'ordonnance des eaux et forêts, tit. VIIe (A)

GARDE-NOTE, est un des titres que prennent les notaires ; ce qui vient de ce qu'anciennement ils ne gardaient qu'une simple note des conventions en abrégé. Voyez NOTAIRES. (A)

GARDES DES PORTS ET PASSAGES, sont des personnes établies pour empêcher que l'on ne fasse entrer ou sortir quelque chose contre les ordonnances. Ils sont nommés dans quelques ordonnances, gardes des passages et détroits. Les baillifs et sénéchaux avaient anciennement le droit d'établir de ces gardes sur les ports et passages des frontières du royaume, aux lieux accoutumés, pour empêcher que l'on ne fit sortir de l'or et de l'argent hors du royaume, ou que l'on n'y fit entrer de la monnaie fausse ou contrefaite. Ces gardes avaient la cinquième partie des confiscations. Ils avaient au-dessus d'eux un maître ou garde général des ports et passages, qui fut supprimé en 1360. (A)

GARDES DES ROLES DES OFFICES DE FRANCE, (Jurisprudence) sont des officiers de la grande-chancellerie, dépositaires des rôles arrêtés au conseil des taxes de tous les offices, tant par résignation, vacation, que nouvelle création ou autrement.

Les rôles étaient anciennement gardés par le chancelier ou par le garde des sceaux, lorsqu'il y en avait un.

En 1560, le chancelier de l'Hôpital commit Gilbert Combant son premier secrétaire, à la garde de ces rôles et registres des offices de France.

Cette fonction fut ainsi exercée par des personnes commises par le chancelier ou par le garde des sceaux, jusqu'à l'édit du mois de Mars 1631, par lequel Louis XIII. les mit en titre d'office.

Par cet édit il créa en titre d'office formé, quatre offices de conseillers du roi, gardes des rôles des offices de France, pour être exercés par les pourvus chacun par quartier, comme sont les grands-audienciers. Il attribua à ces offices, privativement à tous autres, la fonction qui se faisait auparavant par commission, de présenter aux chanceliers et gardes des sceaux, toutes les lettres et provisions d'offices qui s'expédient et se scellent en la chancellerie de France, sur les quittances des trésoriers des parties casuelles, hérédité, et sur toutes sortes de nominations de quelque nature qu'elles soient.

Pour cet effet, les trésoriers des parties casuelles doivent remettre aux gardes des rôles durant leur quartier, les doubles des rôles arrêtés au conseil des offices, tant par résignation, vacation, que nouvelle création ou autrement.

Les secrétaires du roi doivent aussi leur remettre les provisions, qu'ils expédient en vertu de ces quittances, hérédité, et sur toute sorte de nominations, ensemble celles qui sont à réformer pour quelque cause et occasion que ce sait.

L'édit de création leur attribuait des gages, tant sur l'émolument du sceau que sur le marc-d'or, et en outre les six cent livres qui se payaient au trésor royal, pour l'entretien de la charrette commune, destinée à transporter à la suite du conseil les coffres où se mettaient les rôles et provisions d'offices. Ces différents droits ne subsistent plus, au moyen des autres droits qui ont été attribués aux gardes des rôles par différents édits et déclarations postérieurs, dont on Ve parler dans un moment.

Leurs honneurs, prérogatives et privilèges, sont les mêmes que ceux des grands-audienciers et contrôleurs de la grande-chancellerie.

Leur place en la grande-chancellerie est à côté du chancelier ou garde des sceaux, où ils font le rapport des provisions après le grand-audiencier et le grand-rapporteur.

Après que M. le chancelier ou M. le garde des sceaux a ouvert la cassette qui renferme les sceaux, c'est le garde des rôles, qui est de service en la chancellerie, auquel appartient le droit de tirer les sceaux de la cassette, pour les mettre entre les mains du scelleur ; et le sceau fini, il est chargé de les retirer de lui pour les replacer dans la cassette.

Le roi en créant ces offices ne se réserva que la première finance qui en devait provenir, et accorda au chancelier et garde des sceaux la nomination de ces offices pour l'avenir, avec la finance qui en proviendrait, vacation advenant d'iceux par mort, résignation ou autrement. Ensuite le roi Louis XIV. par édit du mois d'Octobre 1645, statua qu'en confirmant le pouvoir accordé par le roi Louis XIII. son prédécesseur, aux chanceliers et gardes des sceaux de France, de nommer aux offices de gardes des rôles contrôleurs généraux de l'augmentation du sceau, comme il vient d'être dit, ils auraient aussi celui d'en accorder dorénavant et à toujours, le droit de survivance à ceux qui en seraient pourvus, sans être tenus par ceux-ci de payer aucune finance au roi, attendu la liberté accordée auxdits chanceliers et gardes des sceaux, de disposer desdits offices.

Par un autre édit du mois d'Avril suivant, le même prince ordonna que les gardes des rôles auraient la clé du coffre où se mettent les lettres scellées ; qu'ils tiendraient le registre et contrôle, qui avait été jusqu'alors tenu par commission, de la valeur des droits et émoluments, provenant de l'augmentation du sceau ; qu'ils feraient chaque mois l'état et rôle des gages et bourses, appartenant aux officiers assignés sur icelle : après le payement desquels il est dit que les gardes des rôles prendront chacun pendant le quartier de leur exercice, cinq cent livres par forme de bourse. C'est en conséquence de cet édit, que les gardes des rôles ont depuis aussi été qualifiés de contrôleurs généraux de l'augmentation du sceau.

Cet édit accorde aussi aux gardes des rôles l'entrée dans les conseils du roi, afin qu'ils puissent le servir avec plus de connaissance et utilité en leurs charges.

Ce sont les gardes des rôles qui reçoivent les oppositions que l'on forme au sceau ou au titre des offices ; toutes oppositions formées ailleurs seraient nulles. Il a même été défendu aux trésoriers des parties casuelles, commis au contrôle général des finances et autres, d'en recevoir aucunes, ni de s'y arrêter ; et il leur est enjoint de déclarer aux parties qu'elles aient, si bon leur semble, à se pourvoir au bureau des gardes des rôles.

Lorsqu'il se trouve quelque opposition au sceau ou au titre d'un office, le garde des rôles qui est de quartier, doit en faire mention sur le repli des provisions qu'il présente au sceau, soit pour les faire sceller à la charge des oppositions, quand ce sont des oppositions pour deniers, soit pour faire commettre un rapporteur, quand ce sont des oppositions au titre ; ces dernières empêchant formellement le sceau des provisions qui en sont chargées.

Ces officiers ont prétendu jouir seuls, à l'exclusion des grands-audienciers, du droit de registre de toutes les lettres d'offices, attributions de qualités, privilèges, taxations, gages et droits qui paient charte (on appelle charte, suivant le tarif du sceau de 1704 et 1706, une patente qui accorde un droit nouveau et à perpétuité). Il y eut à ce sujet une transaction passée entr'eux le 6 Janvier 1633, qui fut homologuée par lettres patentes du roi ; portant que les gardes des rôles auront le tiers du droit de registre de toutes les lettres de charte qui seraient scellées en la grande chancellerie de France, tant de lettres de rémission, abolition, naturalité, ennoblissement, amortissement, érection de duché, comté, marquisat, baronie, châtellenie, fiefs, justice, fourches patibulaires, foires, marchés, pont-levis, dispense de mariage, et autres de nature à être visés ; et les grands audienciers les deux autres tiers. Mais le règlement du 24 Avril 1672, fait en conséquence de l'édit du même mois, article 62. attribue aux gardes des rôles en quartier une bourse de préférence de quatre mille livres, et aux quatre gardes des rôles une bourse ordinaire de secrétaire du roi, chacun par quartier, conformément à l'article 69 du même règlement, pour tenir lieu du registrata dont ils jouissaient conjointement avec les grands-audienciers, suivant la transaction de 1633.

L'édit de création des offices de gardes des rôles leur avaient attribué les mêmes droits qu'aux grands-audienciers ; mais comme on n'avait pas exprimé nommément qu'ils seraient en conséquence secrétaires du roi, ils ne jouissaient point du droit de signature et expédition des lettres de chancellerie : c'est pourquoi Louis XIII. en interprétant l'édit de création des offices de gardes des rôles, par un autre édit du mois de Décembre 1639, déclara qu'ils jouiraient comme les grands-audienciers et contrôleurs, du titre, droits, fonctions, qualités et privilèges de ses conseillers et secrétaires, pour signer et expédier en la chancellerie de France et autres chancelleries, tant en exercice que hors d'icelui, toutes sortes de lettres, sans que le titre de secrétaire du roi put être desuni de leurs charges ; lequel édit de 1639 a été confirmé par autre edit du mois d'Octobre 1641, vérifié au parlement le 26 Juillet 1642, et en la cour des aides le 8 Janvier 1643.

Au mois de Septembre 1644, on créa en titre d'office quatre commis attachés aux quatre charges de gardes des rôles, pour soulager ces officiers et servir sous eux durant leur quartier. L'édit porte qu'ils recevront dans le bureau du garde des rôles, toutes les lettres d'offices et dépendantes d'iceux, qui leur seront apportées par les secrétaires du roi ou autres, pour être par eux vues et paraphées au dos, et vérifier les oppositions qui pourraient être sur icelles, tant au titre que pour deniers ; qu'elles seront après par eux portées aux gardes des rôles, pour les présenter au chancelier : que ces commis tiendront registre de toutes les oppositions qui seront faites sur les offices, tant au titre que pour deniers ; qu'ils parapheront les originaux des exploits qui seront faits par les huissiers ; et que si les originaux des oppositions ne sont paraphés par eux, ou par les gardes des rôles, les exploits seront nuls. L'édit ayant permis aux gardes des rôles de tenir ces charges de commis conjointement ou séparément avec la leur, avec pouvoir de les faire exercer par telles personnes que bon leur semblerait, à la charge de demeurer responsables de leurs exercices et fonctions, les gardes des rôles ont acquis en corps ces charges, et les font exercer par un commis amovible.

Le nombre des gardes des rôles et de leurs commis devait être augmenté de deux, suivant un édit de Décembre 1647, qui ordonnait une semblable augmentation pour tous les offices du conseil, de la chancellerie et des cours : mais il fut révoqué pour ce qui concernait la grande-chancellerie seulement, par un autre édit du mois de Mars suivant.

Au mois de Mai 1655, Louis XIV. donna un édit registré au sceau le 5, portant attribution aux grands-audienciers, contrôleurs généraux, gardes des rôles, et leurs commis, de la jouissance, par droit de bourse, des droits et augmentations établis sur les lettres de chancellerie par les édits de Mars et Avril 1648, nonobstant la suppression qui avait été faite des offices nouvellement créés pour la grande-chancellerie.

L'édit du mois de Mai 1697, leur attribue en outre à chacun une bourse d'honoraire ou d'expédition.

Il y eut encore une semblable création de deux gardes des rôles et de deux commis en titre, faite par édit du mois d'Octobre 1691 ; de manière que les gardes des rôles tant anciens que nouveaux, ne devaient plus servir que deux mois de l'année : mais par édit du mois de Novembre suivant, ces offices furent encore supprimés, et les droits en furent attribués aux anciens moyennant finance.

Les gardes des rôles ont été maintenus et confirmés dans leurs privilèges par plusieurs édits et déclarations, notamment par ceux des mois d'Avril 1631, Décembre 1639, Avril 1664, et Avril 1672, et tout récemment par l'édit du mois de Décembre 1743, au moyen du supplément de finance par eux payé en exécution de cet édit. (A)

GARDE-SACS, greffier garde-sacs, est celui qui est dépositaire des sacs et productions des parties dans les affaires appointées. Il y a de ces greffiers au conseil et au parlement.

L'établissement de ces sortes d'officiers remonte jusqu'au temps des Romains ; on les appelait custodes. Leur office principal était de tenir les boites ou sacs, dans lesquels on gardait les pièces des procès : c'était surtout pour les matières criminelles, pour empêcher la collusion entre l'accusateur et l'accusé. Voyez le mercure de France de Nov. 1753. p. 21. (A)

GARDES DE SALINES, voyez FERMES, GABELLES, SALINES et SEL.

GARDE DES SCEAUX DE FRANCE, (Histoire et Jur.) est un des grands officiers de la couronne, dont la principale fonction est d'avoir la garde du grand sceau du roi, du scel particulier dont on use pour la province de Dauphiné, et des contre-scels de ces deux sceaux ; il avait aussi autrefois la garde de quelques autres scels particuliers, tels que ceux de Bretagne et de Navarre, qui depuis la réunion de ces pays à la couronne, furent pendant quelque temps distingués de celui de France ; ces sceaux particuliers ne subsistent plus. Il avait aussi la garde des sceaux de l'ordre royal et militaire de S. Louis, établi en 1693 ; mais le roi ayant, par édit du mois d'Avril 1719, créé un grand-croix chancelier de cet ordre, lui a donné la garde des sceaux de ce même ordre.

C'est lui qui scelle toutes les lettres qui doivent être expédiées sous les sceaux dont il est dépositaire.

Il a aussi l'inspection sur les sceaux des chancelleries établies près des cours et des présidiaux.

L'anneau ou scel royal a toujours été regardé chez la plupart des nations, comme un attribut essentiel de la royauté, et la garde et apposition de ce scel ou anneau comme une fonction des plus importantes.

Les rois de Perse avaient leur anneau ou cachet dont ils scellaient les lettres qu'ils envoyaient aux gouverneurs de leurs provinces.

Alexandre le Grand se voyant près de mourir, commanda que l'on portât son anneau sigillaire à celui qu'il désignait pour son successeur.

Aman, favori et ministre d'Assuerus, était dépositaire de l'anneau de ce prince ; mais ayant abusé de la faveur de son maître, et fini ses jours d'une manière ignominieuse, Assuerus donna à Mardochée le même anneau que portait auparavant Aman, pour marque de la confiance dont il honorait Mardochée, et du pouvoir qu'il lui donnait d'administrer toutes les affaires de son état.

Pharaon pratiqua la même chose, lorsqu'il établit Joseph viceroi de toute l'Egypte : tulit annulum de manu suâ, et dedit eum in manu ejus.

Enfin Balthazar dernier roi de Babylone, avait aussi confié la garde de son anneau à Daniel.

Les Romains ne connaissaient point anciennement l'usage des sceaux publics ; ainsi l'institution de la charge de garde des sceaux n'a point été empruntée d'eux : les édits des empereurs n'étaient point scellés ; ils étaient seulement souscrits par eux d'une encre de couleur de pourpre, appelée sacrum encautum, composée du sang du poisson murex, dont on faisait la pourpre ; nul autre que l'empereur ne pouvait user de cette encre sans commettre un crime de lesse-majesté, et sans encourir la confiscation de corps et de biens ; en sorte que cette encre particulière tenait en quelque sorte lieu de sceau.

Auguste avait à la vérité un sceau ou cachet, dont en son absence et pendant les guerres civiles, ses amis se servirent pour sceller en son nom des lettres et des édits ; mais ce qui fut pratiqué dans ce cas de nécessité ne formait pas un usage ordinaire, et les empereurs ne se servaient communément de leur cachet que pour clorre leurs lettres particulières, et non pour leurs édits et autres lettres qui devaient être publiques.

Justinien ordonna seulement par sa novelle 104, que tous les rescrits signés de l'empereur seraient aussi souscrits ou contre-signés par son questeur, auquel répond en France l'office de chancelier.

En France au contraire, dès le commencement de la monarchie, nos rois au lieu de souscrire ou sceller leurs lettres, les scellaient ou faisaient sceller de leur sceau, soit parce que les clercs et les religieux étaient alors presque les seuls qui eussent l'usage de l'écriture, ou plutôt parce que les rois ne voulant pas alors s'assujettir à signer eux-mêmes toutes les lettres expédiées en leur nom, chargèrent une personne de confiance de la garde de leur sceau, pour en apposer l'empreinte à ces lettres au lieu de leur signature.

Celui qui était dépositaire du sceau du roi, du temps de la première race, était appelé grand référendaire, parce qu'on lui faisait le rapport de toutes les lettres qui devaient être scellées ; et comme sa principale fonction était de garder le scel royal qu'il portait toujours sur lui, on le désignait aussi souvent sous le titre de garde ou porteur du scel royal : gerulus annuli regalis, custos regii sigilli.

Le premier qui soit designé comme chargé du scel royal est Amalsindon, lequel se trouve avoir scellé du sceau de Thierri premier roi de Metz, la charte portant dotation du monastère de Flavigny, au diocèse d'Autun ; sigillante, est-il dit, perillustri viro Amalsindone sigillo regio. Le titre de perillustris que l'on donne à cet officier, marque en quelle considération était dès-lors celui qui avait la garde du sceau.

Gregoire de Tours, liv. V. ch. IIIe fait mention de Siggo référendaire qui gardait l'anneau de Sigebert premier, roi d'Austrasie, qui annulum Sigeberti tenuerat ; et que Chilperic roi de Saissons, sollicita d'accepter auprès de lui le même emploi qu'il avait eu près de son frère.

Sous Clotaire II. Ansbert archevêque de Rouen fut chargé de cette fonction, ainsi qu'il est dit en sa vie, écrite par Angrade ou Aigrade religieux bénédictin, qui fait mention que ce prélat était conditor regalium privilegiorum, et gerulus annuli regalis quo eadem signabantur privilegia.

Surius en la vie de S. Ouen, qui fut grand référendaire de Dagobert premier, et ensuite de Clovis II. son fils, dit qu'il gardait le scel ou anneau du roi pour sceller toutes les lettres et édits qu'il rédigeait par écrit : ad obsignanda scripta vel edicta regia quae ab ipso conscribebantur, sigillum vel annulum regis custodiebat. Aimoin, liv. IV. ch. xlj. et le moine Sigebert en sa chronique de l'année 637, font aussi mention que S. Ouen avait la garde de l'anneau ou scel royal dont il scellait toutes les lettres du roi qui devaient être publiques.

On lit en la vie de S. Bonit évêque de Clermont en Auvergne, qu'étant aimé très-particulièrement de Sigebert III. roi d'Austrasie, il fut pourvu de l'office de référendaire, en recevant de la main du roi son anneau, annulo ex manu regis accepto.

Du temps de Clotaire III. la même fonction était remplie par un nommé Robert : quidam illustris Robertus nomine, generosa ex stirpe proditus, gerulus fuerat annuli regii Clotarii ; c'est ainsi que s'explique Aigrard qui a écrit la vie de Ste Angradisine sa fille.

Il parait par ces différents exemples, que tous ceux qui remplissaient la fonction de référendaire sous la première race de nos rais, étaient tous en même temps chargés du scel ou anneau royal.

Il en fut de même sous la seconde race, des chanceliers qui succédèrent aux grands-référendaires ; quoiqu'on n'ait point trouvé qu'aucun d'eux prit le titre de garde du scel royal, il est néanmoins certain qu'ils étaient tous chargés de ce scel.

Sous la troisième race de nos rais, la garde des sceaux du roi a aussi le plus souvent été jointe à l'office de chancelier, tellement que la promotion de plusieurs chanceliers des premiers siècles de cette race, n'est désignée qu'en disant qu'on leur remit le sceau ou les sceaux, quoiqu'ils fussent tout-à-la-fais chanceliers et gardes des sceaux.

On voit aussi dans les historiens de ce temps, qu'en parlant de plusieurs chanceliers qui se démirent volontairement de leurs fonctions, soit à cause de leur grand âge ou indisposition, ou qui furent destitués pour quelque disgrace, il est dit simplement qu'ils remirent les sceaux ; ce qui dans cette occasion ne signifie pas simplement qu'ils quittaient la fonction de garde des sceaux, mais qu'ils se démettaient totalement de l'office de chancelier que l'on désignait par la garde du sceau, comme en étant la principale fonction. Aussi voit-on que les successeurs de ceux qui avaient ainsi remis les sceaux, prenaient le titre de chanceliers, même du vivant de leur prédécesseur ; comme le remarque M. Ribier conseiller d'état, dans un mémoire qui est inséré dans Joli, des off. tom. I. aux addit.

On ne parlera donc ici ni de ceux auxquels on donna les sceaux avec l'office de chancelier, ni de ceux qui les quittèrent en cessant totalement d'être chanceliers ; mais seulement de ceux qui sans être pourvus de l'office de chancelier, ont tenu les sceaux, soit avec le titre de garde des sceaux, ou autre titre équipollent.

Depuis la troisième race, il y a eu plus de quarante gardes des sceaux ; les uns pendant que l'office de chancelier était vacant, les autres dans le temps même que cet office était rempli, lorsque nos rois ont jugé à propos pour des raisons particulières, de séparer la garde de leur sceau de la fonction de chancelier ; on comprend dans cette seconde classe plusieurs chanceliers qui ont tenu les sceaux séparément, avant de parvenir à la dignité de chancelier.

On fera aussi mention des vices-chanceliers, attendu qu'ils ont fait la fonction de garde des sceaux.

Les rois de la première et de la seconde race n'avaient qu'un seul sceau ou anneau, dont le chancelier ou le garde du scel royal était dépositaire. Pour le conserver avec plus de soin, et afin que personne ne put s'en servir furtivement, il le portait toujours pendu à son cou : cet usage avait passé de France en Angleterre. En effet, Roger vice-chancelier de Richard I. roi d'Angleterre, ayant péri sur mer par une tempête, on reconnut son corps parce qu'il avait le scel du roi suspendu à son cou.

Depuis que l'on se servit en France de sceaux plus grands, et que le nombre en fut augmenté, il ne fut pas possible au chancelier ou garde des sceaux de les porter à son cou ; il n'en a plus porté que les clés qu'il a toujours sur lui dans une bourse.

Anciennement le coffre des sceaux était couvert de velours azuré, semé de fleurs-de-lis d'or ; et dans les cérémonies ce coffre était porté sur une hacquenée qu'un valet-de-pié conduisait par la main : autour de cette hacquenée chevauchaient les hérauts et poursuivants du roi, et autres seigneurs qui étaient présents ; d'autres disent que c'étaient des archers, d'autres les appellent des chevaliers vêtus de livrée : cela se trouve ainsi rapporté par Alain Chartier, sous l'an 1449 et 1451, et par Monstrelet au troisième volume, en parlant des entrées faites par le roi Charles VII. à Rouen et à Bordeaux.

On trouve ailleurs que quand le chancelier allait en voyage, c'était le chauffe-cire qui portait le scel royal sur son dos, ainsi qu'il est dit dans un hommage rendu par Philippe archiduc d'Autriche, au roi Louis XII. le 5 Juillet 1499, pour les comtés de Flandre, Artais et Charolais.

Présentement le roi donne pour renfermer les sceaux un grand coffre couvert de vermeil, lequel est distribué en trois cases, contenant chacune une petite cassette fermante à clef.

La première qui est couverte de vermeil renferme le grand sceau de France et son contre-scel.

La seconde qui est couverte de velours rouge, parsemée de fleurs-de-lys et de dauphins de vermeil, contient le sceau particulier dont on use pour la province de Dauphiné, et son contre-scel.

La troisième cassette contenait le sceau et le contre-sceau de l'ordre de S. Louis, établi en 1693 ; mais présentement cette cassette est vide, les sceaux de cet ordre ayant été donnés en 1719 au chancelier garde des sceaux créé pour cet ordre, par édit du mois d'Avril de la même année.

Comme il n'y a plus que les deux premières cassettes qui servent, le garde des sceaux pour les transporter plus facilement, a fait faire un petit coffre de bois dans lequel ces deux cassettes sont renfermées ; et lorsqu'il marche par la ville ou qu'il Ve en voyage, il fait toujours porter avec lui ce coffre dans son carrosse.

Ce fut vers le commencement de la troisième race que le nombre des sceaux du roi fut multiplié, que le roi garda lui-même depuis ce temps son petit scel ou anneau, qu'on appelait le petit signet du roi, dont il scellait lui-même toutes les lettres particulières qui devaient être closes ; et au lieu de ce scel ou anneau, on donna au chancelier ou au garde des sceaux d'autres sceaux plus grands, pour sceller les lettres qui devaient être publiques, et que par cette raison l'on envoyait ouvertes, ce que l'on a depuis appelé lettres-patentes.

Le premier exemple que j'aye trouvé de ces grands sceaux, est dans une charte du temps de Louis-le-Gros, datée de l'an 1106, pour l'église de S. Eloy de Paris ; elle est scellée de deux grands sceaux appliqués sur le parchemin de la lettre : dans l'un le roi est assis sur son trône, dans l'autre il est à cheval, et à l'entour sont écrits ces mots, Philippus gratiâ Dei Francorum rex ; ce qui prouve que ces sceaux étaient en usage dans le temps de Philippe I.

Depuis que l'on se servit ainsi de plusieurs sceaux, il était naturel que celui qui en était dépositaire fût appelé garde des sceaux ; cependant on continua encore longtemps à l'appeler simplement garde du scel royal, comme si le scel du roi était unique ; ce qui ferait croire que le second sceau dont on a parlé, représentant le roi à cheval, n'était autre chose que le revers du premier sceau : mais on n'était point encore dans l'usage d'appliquer ce second sceau par forme de contre-scel, c'est-à-dire, derrière le premier.

Le scel fabriqué du temps de Philippe I. étant beaucoup plus grand que le sceau ou anneau dont on s'était servi jusqu'alors, fut nommé le grand scel, et celui qui en était chargé était quelquefois appelé le porteur du grand scel du roi.

Cette distinction du grand scel fut sans-doute établie, tant à cause du cachet ou sceau privé du roi, qu'à cause du contre-scel ou scel secret, qui fut établi sous Louis VII. et qui était porté par le grand chambellan.

La chancellerie était vacante en 1128, suivant une charte de Louis-le-Gros pour S. Martin-des-Champs, à la fin de laquelle il est dit cancellario nullo ; ce qui peut d'abord faire penser qu'il y avait alors quelqu'un commis pour tenir le grand scel du roi, mais il n'en est point fait mention ; et il est plutôt à croire que pendant cette vacance le roi tenait lui-même son sceau, comme plusieurs de nos rois l'ont pratiqué en pareille occasion. On trouve plusieurs chartes du douzième siècle, que les rois faisaient sceller en leur présence, et à la fin desquelles il y a ces mots, data per manum regiam vacante cancellariâ ; ce qui fait de plus en plus sentir la dignité attachée à la fonction de garde des sceaux, puisque nos rois ne dédaignent point de tenir eux-mêmes le sceau en certaines occasions.

La chancellerie était dite vacante lorsqu'il n'y avait ni chancelier ni garde des sceaux.

Hugues de Chamfleuri fut nommé chancelier de France en 1151, mais sa disgrace le fit destituer de cet office ; de sorte que la chancellerie vaqua durant les années 1172, 1173, 1174, 1175, 1176 et 1177. Il parait néanmoins que Hugues fut rétabli dans ses fonctions en 1175, qui est l'année de sa mort.

La chancellerie vaqua encore en 1179, comme il parait par un titre du cartulaire de S. Victor.

Elle vaqua pareillement durant tout le règne de Philippe-Auguste, si l'on en excepte les années 1180 et 1185, où il est parlé de Hugues de Puiseaux en qualité de chancelier, l'année 1201, où Gui d'Athies vice-chancelier pendant la vacance de la chancellerie, fit la fonction de garde des sceaux, et les années 1203, 1204, 1205 et 1207, où frère Guerin, chevalier de l'ordre de S. Jean de Jérusalem, fit la même fonction de garde des sceaux, vacante cancellariâ ; il fut depuis élevé à la dignité de chancelier dont il releva beaucoup l'éclat.

Il parait par une charte de l'année 1226, qui est la première du règne de S. Louis, que frère Guerin faisait encore les fonctions de chancelier : mais depuis il n'y en eut point pendant tout le règne de S. Louis ; il se contenta de commettre successivement différentes personnes à la garde du sceau.

Suivant une cédule de la chambre des comptes au mémorial A, qui est sans date ; et une autre cédule au mémorial E, fol. 132. Philippe d'Antogni portait le grand scel du roi S. Louis : il prenait pour soi, ses chevaux et valets à cheval, sept sous parisis par jour pour l'avoine et pour toute autre chose, excepté son clerc, et son valet qui le servait en la chambre, qui mangeaient à la cour ; et leurs gages étaient doubles aux quatre fêtes annuelles.

La dernière des deux cédules dont on vient de parler, fait aussi mention de Philippe de Nogaret qui portait le grand scel du roi.

Nicolas, doyen et archidiacre de Chartres, chapelain et conseiller du roi S. Louis, fut choisi en 1249 pour porter le sceau du roi dans le voyage de la Terre-Sainte ; il mourut en Egypte après la prise de Damiette, en 1250.

Gilles, archevêque de Tyr en Phénicie, aussi conseiller du roi S. Louis, avait la garde du sceau de ce prince en 1253, comme on l'apprend de l'histoire de Joinville, et de la vie de S. Louis écrite par Guillaume de Nangis.

Raoul de Piris, doyen de S. Martin de Tours, fut fait garde des sceaux au retour de la Terre-Sainte, et évêque d'Evreux en 1256 ; il fut cardinal et légat, et mourut l'an 1270 : il se trouve un titre pour l'abbaye de S. Remi de Rheims, scellé par lui, où on lit ces mots : et has litteras dominus episcopus ebroïcensis, tunc decanus turonensis, sigillavit.

Plusieurs titres de S. Denis et du prieuré de S. Sauveur-lez-Bray sur Seine, font mention que la chancellerie vaqua en 1255 et 1258.

Mais dans cette même année 1258, Raoul de Gros-Parmy, trésorier de l'église de S. Frambaud de Senlis, fut fait garde du sceau du roi. Tessereau, en son histoire de la chancellerie, cite à ce sujet le registre olim de la chambre des comptes de ladite année, où on lit, dit-il : Radulphus Gros-Permius, thesaurarius sancti Framboldi sylvanectensis, qui deferebat sigillum domini regis ; et le fait rapporté par Tessereau est véritable : mais il faut qu'il y ait erreur dans la citation qu'il fait du registre olim de la chambre des comptes, n'y ayant jamais eu dans cette chambre de registre ainsi appelé : ce registre est au parlement, et contient en effet mot pour mot les termes rapportés par Tessereau.

La chronique de S. Martial de Limoges fait mention de Simon de Brion ou de Brie, trésorier de S. Martin de Tours, qui fut garde des sceaux du roi depuis 1260 jusqu'en l'année suivante, qu'il fut créé cardinal, et envoyé légat en France : il fut élu pape le 22 Février 1281, sous le nom de Martin IV. et mourut le 22 Mars 1285.

La chancellerie vaqua en 1261 et 1262, comme il est dit dans quelques titres de ce temps ; et l'on ne voit point à qui la garde du sceau fut confiée jusqu'en 1270, que le roi S. Louis, avant de s'embarquer à Aigues-mortes le premier Juillet, laissa le gouvernement de son royaume à Matthieu de Vendome, abbé de S. Denis, et à Simon de Neesle, et leur donna un sceau particulier dont ils scellaient les lettres en son absence ; ce sceau n'avait qu'une couronne simple sans écusson, et ces mots à l'entour : S. Ludovici, dei gratiâ Francorum regis, in partibus transmarinis agentis ; le contre-scel avait un écusson sans couronne, semé de fleurs-de-lis.

La chancellerie vaqua sous le règne de Philippe III. dit le Hardi, pendant les années 1273 et 1274, comme le prouve la charte de confirmation des privilèges de la ville de Bourges, du mois de Mars 1274.

Du temps de Philippe-le-Bel, Etienne de Suicy, appelé l'archidiacre de Flandres, qui fut chancelier de France en 1302, après Pierre Flotte, avait été garde du scel royal au mois de Janvier 1290, comme il parait par une ordonnance du roi donnée à Vincennes, datée desdits mois et an, au sujet de l'état de sa maison, où il y a un article concernant les gages ou appointements de l'archidiacre de Flandres, qui porte, est-il dit, le scel à 6 sous par jour, outre la bouche à cour pour lui et les siens ; et quand il serait à Paris, à 20 sous par jour pour toutes choses, en mangeant chez lui. Il fallait que le prix des denrées fût moindre alors qu'il n'était du temps de S. Louis, sous lequel Philippe d'Antogny avait 7 s. parisis par jour, outre le droit de bouche à cour ; au lieu que celui-ci n'avait que six sous : on voit aussi par-là que le droit de bouche à cour pour le garde des sceaux et pour tous les siens, n'était évalué qu'à quatorze sous par jour, puisqu'on ne lui donnait que cela de plus lorsqu'il était à Paris et mangeait chez lui. Ce même Etienne de Suicy fut archidiacre de Bruges en l'église de Tournay, chancelier de France en 1302, et cardinal en 1305 ; il mourut en 1311.

Pierre Flotte, qui fut nommé chancelier en 1302, prenait indifféremment la qualité de chancelier ou de garde des sceaux, comme il parait par un titre pour l'archevêque de Bordeaux du mercredi avant Pâques de l'an 1302, où on lui donne la qualité de garde des sceaux.

Après sa mort arrivée dans la même année, Guillaume de Nogaret, seigneur de Calvisson, fut fait pour la première fois garde des sceaux, ainsi qu'on l'apprend d'une ordonnance de l'an 1303, portant qu'il y aura au parlement treize clercs et treize lais ; que les treize clercs seront Me Guillaume de Nogareth, qui porte le grand scel ; et Philippe le Bel, dans le parlement qu'il établit à Paris en 1302, lui donna rang immédiatement après un évêque et un prince du sang, et avant tous autres juges.

Dans une autre ordonnance de 1304, le roi dit : " Or est notre entente, que cil qui portera notre grand scel ordonne de bailler ou envoyer aux enquêtes de langue d'oc et de la langue française des notaires, tant comme il verra à faire pour les besognes dépêcher ".

Pierre de Belleperche, qui fut nommé chancelier en 1306, parait être le premier qui ait joint au titre de chancelier celui de garde du sceau royal.

Les sceaux furent rendus à Guillaume de Nogaret en 1307, comme il parait par un registre du trésor ; traditum fuit sigillum domino Guillelmo de Nogareto. Il n'avait pour son plat à la suite du roi, que " dix soudées de pain, trois septiers de vin, l'un pris devers le roi, et les deux autres du commun, et quatre pièces de chair, et quatre pièces de poulaille ; et au jour de poisson à l'avenant ; et ne prenait que six provendes d'avoine, couste, feurres, busches, chandelles, et point de forge ".

Gilles Aicelin de Montagu, archevêque de Narbonne, fut garde des sceaux depuis le 27 Févr. 1309 jusqu'au mois d'Avril 1313, suivant le registre 45e du trésor, où il est qualifié, habens sigillum.

Il eut pour successeur en cette fonction Pierre de Latilly, archidiacre de l'église de Châlons-sur-Marne : le registre 49 du trésor porte : tradidit dominus rex.... magnum sigillum suum magistro Petro de Latilliaco.

L'état de la maison du roi arrêté le 2 Décembre 1306 par Philippe-le-Long, règle les droits du chancelier, à l'instar de ce qui avait été accordé à Guillaume de Nogaret, garde des sceaux ; en sorte que les droits du garde des sceaux furent assimilés à ceux du chancelier.

Il semblait même que le chancelier ne tirât ses plus grands privilèges que de la garde du sceau : en effet, les habitants de la ville de Laon ayant prétendu recuser le chancelier Pierre de Chapes, comme leur étant suspect, il fut décidé dans le conseil tenu en présence du roi le lundi avant l'ascension de l'année 1318, que le chancelier ne devait être tenu pour suspect ; d'autant que par le moyen de l'office du sceau, il était personne publique et tenu à une spéciale fidélité au roi.

Il y avait deux gardes des sceaux au mois de Juillet 1320, suivant un mémorial de la chambre des comptes, coté H, portant que le 9 dudit mois Pierre le Mire, chauffe-cire, avait prêté serment pour cet office " entre les mains des deux préposés à la garde du sceau ".

Au mois de Février suivant, Philippe-le-Long fit un règlement sur le port et état du grand scel et sur la recette des émoluments d'icelui. Suivant ce règlement, tous les émoluments, tant du grand sceau que des chancelleries particulières de Champagne, de Navarre, et des Juifs, devaient à l'avenir appartenir au roi.

Jean de Marigni, chantre de l'église de N. D. de Paris, évêque de Beauvais en 1312, tint les sceaux après Matthieu Ferrand, chancelier, depuis le dernier Avril 1329 jusqu'au 6 Juillet de la même année, qu'il les rendit ; il les eut encore depuis le 7 Septembre jusqu'à la S. Martin 1329, qu'il en fut déchargé, et les remit ès mains de Guillaume de Sainte-Maure, doyen de Tours.

Après la mort de Guillaume de Sainte-Maure, chancelier, arrivée en 1334, Pierre Rogier, abbé de Fécamp, reçut les sceaux, et en fut déchargé lorsqu'il eut l'archevêché de Sens : il ne se trouve cependant aucun acte qui marque qu'il ait été chancelier ni garde des sceaux ; il fut depuis archevêque de Rouen, cardinal, et pape sous le nom de Clément VI.

Foulques Bardoul, conseiller au parlement de Paris, fut garde de la chancellerie pendant la prison du roi Jean, après la destitution du chancelier Pierre de la Forêt ; il y avait déjà été employé sous Philippe de Valais, pendant un voyage du chancelier Cocquerel, et l'était au mois de Mars 1356, comme il se voit par le journal du trésor du 24 Mars de cette année, et par une lettre du 15 Juin 1357 : ce qui cessa lorsque le régent donna les sceaux à Jean de Dormants. On ne voit pas au surplus qu'il eut le titre de garde des sceaux.

Jean de Dormants fut aussi d'abord commis seulement au fait de la chancellerie de France le 18 Mars 1357, par Charles, régent du royaume ; il exerçait la charge de chancelier au traité de Brétigni, le 9 Mai 1360. Le roi Jean lui donna les sceaux le 18 Septembre 1361, et l'institua chancelier de France après la mort du cardinal de la Forêt.

Le parlement ayant été transféré à Poitiers, et la grande chancellerie établie dans la même ville, Jean de Bailleul, président au parlement, tint pendant ce temps les sceaux.

Quelques manuscrits supposent qu'Adam Fumée, chevalier, seigneur des Roches, maître des requêtes, fut commis à la garde des sceaux de France depuis l'an 1479 jusqu'en 1483 ; à quoi il y a néanmoins peu d'apparence, Ve que pendant ce temps Pierre d'Oriole exerçait l'office de chancelier : mais il est du-moins certain qu'il fut commis à la garde des sceaux après la mort du chancelier Guillaume de Rochefort, arrivée le 12 Aout 1492. Dans quelques actes il est qualifié de garde des sceaux ; et comme il ne tenait cette charge que par commission, il conserva toujours celle de maître des requêtes, et exerça l'une et l'autre jusqu'à sa mort arrivée au mois de Novemb. 1494.

Robert Briçonnet, archevêque de Rheims, exerça la fonction de garde des sceaux après le décès d'Adam Fumée, et fut ensuite pourvu de l'office de chancelier de France au mois d'Aout 1495.

Etienne Poncher, évêque de Paris, fut pareillement commis à la garde des sceaux de France en 1512, et les tint jusqu'au 2 Janvier 1515.

François I. ayant dans la même année nommé Antoine Duprat pour chancelier, et ordonné qu'il passerait les monts avec lui, Messire Mondot de la Marthonie, premier président au parlement de Paris, fut chargé de la garde du petit sceau en l'absence du grand.

Ce même prince allant à Lyon en 1523, et laissant à Paris le chancelier Duprat, il commit M. Jean Brinon, premier président du parlement de Rouen, pour avoir près de S. M. la garde du petit scel, en l'absence du grand.

Le chancelier du Bourg étant mort en 1538, la garde des sceaux fut donnée en commission à Matthieu de Longuejoue, chevalier, seigneur d'Yverni, évêque de Saissons, en attendant que Guillaume Poyet eut ses provisions de chancelier ; il reçut les sceaux pour la seconde fois après la mort de François Erraut en 1544, et en fut déchargé l'année suivante.

Lorsque le chancelier Poyet fut emprisonné en 1542, François de Montholon, premier du nom, président au parlement, fut commis à la garde des sceaux de France par des lettres du 9 Aout de ladite année ; il prêta serment entre les mains du cardinal de Tournon, le 22 du même mois : le dauphin l'établit aussi garde des sceaux du duché de Bretagne, par des lettres du 7 Septembre de la même année ; ce qui est remarquable, en ce que l'office de chancelier de Bretagne avait été supprimé dès l'an 1494. Le premier Juin 1543, le roi lui fit remettre tous les papiers et enseignements concernant les principales affaires du royaume, qui avaient été trouvés dans les coffres du chancelier Poyet, afin qu'il prit une plus grande connaissance des affaires de S. M. il mourut le 15 dudit mois de Juin 1543.

François Erraut, seigneur de Chemants, maître des requêtes et président en la cour de parlement de Thurin, lui succéda en la charge de garde des sceaux, et conserva ses autres charges : le roi lui fit remettre les mêmes papiers et enseignements qu'avait eus son prédécesseur ; il fut destitué en 1544. Ce fut alors que Matthieu de Longuejoue reçut pour la seconde fois les sceaux, comme on l'a déjà dit.

Le chancelier Olivier étant tombé en paralysie, les sceaux furent mis entre les mains de Jean Bertrand ou Bertrandi, président au parlement de Toulouse ; lequel sans lettres de commission, les garda et scella jusqu'à ce que le chancelier crut être en état de reprendre ses fonctions : mais ayant perdu la vue, il fut déchargé des sceaux le 2 Janvier 1550.

Par un édit donné à Ambaise au mois d'Avril suivant, le roi érigea un état de garde des sceaux de France en titre d'office, sans désignation d'aucune personne, avec attribution des honneurs et autorités appartenans à un chancelier de France, même de présider au parlement et au grand-conseil ; pour être ledit office supprimé après la mort du chancelier Olivier, et subrogé à icelui.

Cet édit fut vérifié contre les conclusions du procureur-général, et publié en l'audience le 8 Mai 1551.

Bertrandi fut pourvu de cet office de garde des sceaux par lettres du 22 du même mois, vérifiées le 14 Aout suivant ; il fut archevêque de Sens, cardinal, et mourut à Venise, faisant la fonction d'ambassadeur, le 4 Décembre 1560.

Il jouit paisiblement de son office de garde des sceaux ; présida souvent au parlement de Paris, tant en la grand-chambre, qu'aux grandes cérémonies des lits de justice, et processions générales, comme il parait par les registres de ladite cour des 12 Novembre, 12, 15, 16, 17, et 18 Février, 28 Mars 1551, 13 Juin 1552, et autres.

Durant le voyage du roi en Allemagne, il demeura avec le conseil-privé établi à Châlons près de la reine régente, où il rendit pour elle en sa présence et en plein conseil les réponses nécessaires aux remontrances des députés du parlement. Il faisait les mêmes fonctions que si le roi y eut été, comme il se voit par les registres du parlement du 13 Juin 1552 ; il exerça l'office de garde des sceaux jusqu'à la mort d'Henri II. arrivée le 10 Juillet 1559.

Le roi François II. remit alors le chancelier Olivier dans l'exercice de son office : mais étant mort le 30 Mars 1560, et le cardinal Bertrandi ayant donné sa démission de l'office de garde des sceaux, le roi nomma pour chancelier Michel de l'Hôpital, auquel en 1568 il fit redemander les sceaux, attendu que le chancelier était indisposé et hors d'état de suivre le roi, qui se disposait à faire un grand voyage.

Les sceaux furent aussi-tôt donnés à Jean de Morvilliers, évêque d'Orléans, auquel François II. les avait déjà offerts dès 1560 ; il les garda sans commission jusque sur la fin de l'année 1570. Jamais personne n'avait gardé les sceaux si longtemps sans aucun titre. Il obtint étant évêque d'Orléans, le 13 Mai 1557, des lettres-patentes portant qu'il aurait séance et voix délibérative au parlement, tant aux jours de plaidoirie que de conseil, comme conseiller d'état, en conséquence de l'édit fait en faveur de tous les conseillers du conseil-privé, nonobstant les modifications qui y avaient été apportées pour l'exclusion des jours de conseil ; lesquelles lettres-patentes furent vérifiées au parlement le 13 Janvier suivant, à la charge de ne pouvoir présider en l'absence des présidents : en 1570, étant accablé d'infirmités, il obtint la permission de se démettre des sceaux.

Charles IX. les donna à René de Biragues, président, qui les garda quelques années sans avoir non plus aucunes provisions du roi ; et pendant ce temps, Jean de Morvilliers qui s'était démis des sceaux, retint toujours comme plus ancien conseiller d'état, le rang et la préséance sur le sieur de Biragues, et présida au conseil en l'absence du roi, comme il avait fait auparavant, quoique le sieur de Biragues eut les sceaux, et qu'il eut voulu tenir le rang de garde des sceaux au-dessus du premier président du parlement, à l'entrée du roi à Paris le 6 Mars suivant. Ledit sieur de Morvilliers continua d'avoir la principale direction des affaires, même après que le président de Biragues fut garde des sceaux en titre, et même depuis qu'il eut été nommé chancelier en 1573.

Le chancelier de Biragues ayant obtenu sa décharge des sceaux en 1573, Philippe Huraut, comte de Chiverny, commandeur de l'ordre du S. Esprit, fut fait garde des sceaux de France ; ses provisions furent expédiées en forme d'édit, portant création et provision en sa faveur de l'office de garde des sceaux, aux mêmes honneurs et préséances des autres gardes des sceaux de France, sous la réserve du titre de chancelier audit sieur de Biragues ; et à la charge que vacation avenant dudit état et titre de chancelier, il serait joint et réuni avec celui de garde des sceaux. Ces lettres qui sont du mois de Septembre, furent vérifiées au parlement le 9 Décembre de la même année. Le comte de Chiverny fut fait chancelier après la mort du cardinal de Biragues ; il quitta les sceaux en 1588 : mais il fut rappelé à la cour par Henri IV. qui lui rendit les sceaux en 1590, et il les tint jusqu'à sa mort arrivée en 1599.

François de Montholon II. du nom, avocat au parlement, fils de François de Montholon, qui avait été garde des sceaux de France sous le règne de François I. fut nommé pour remplir la même fonction par des lettres du 6 Septembre 1588, par lesquelles le roi le commit à l'exercice de la charge et état de son chancelier, sous le nom et titre toutefois de garde des sceaux, aux honneurs et prérogatives des précédents gardes des sceaux, et aux gages de 4000 écus par an ; et ce par commission seulement, et pour tant qu'il plairait audit seigneur roi : avant de procéder à la vérification de ces lettres, la cour députa vers le chancelier de Chiverny, pour lui en donner communication ; ces lettres furent présentées à l'audience par de Fontenay, avocat, le 29 Novembre suivant, et registrées oui et consentant le procureur-général du roi. Le garde des sceaux de Montholon harangua au lit de justice que le roi Henri III. tint à Tours le 23 Mars 1589, pour y rétablir son parlement, et interdire celui de Paris.

Henri IV. étant parvenu à la couronne par la mort d'Henri III. arrivée le premier Aout 1589, Montholon se démit volontairement des sceaux entre les mains de Charles de Bourbon, cardinal de Vendôme, qui se trouva alors chef du conseil du roi ; il revint ensuite au palais, où il continua la profession d'avocat, comme il faisait avant d'être garde des sceaux.

Le cardinal de Vendôme garda les sceaux jusqu'au mois de Décembre suivant, temps auquel le roi les lui fit redemander et retirer de ses mains par le sieur de Beaulieu Ruzé, conseiller d'état et secrétaire de ses commandements, qui porta les sceaux au roi à Mantes.

Le roi tint pendant quelque temps le sceau en personne, ou le fit tenir par son conseil, auquel présidait le maréchal de Biron. Quand le roi faisait sceller en sa présence, il mettait lui-même le visa sur les lettres, ou le faisait mettre par le sieur de Lomenie, conseiller d'état secrétaire des commandements de Navarre et du cabinet, qui avait la garde des clés du sceau.

Quand le roi avait d'autres affaires, il laissait à son conseil le soin de tenir le sceau, ou bien il faisait commencer à sceller en sa présence, et laissait continuer le sceau par son conseil. Quoique le maréchal de Biron y présidât, il ne mettait pourtant pas le visa sur les lettres ; c'était le sieur de Lomenie qui y demeurait pour cet effet ; et après que le sceau était levé, il retirait les sceaux, les remettait dans le coffre et en gardait les clés. L'adresse des lettres qui a coutume de se faire au chancelier, se faisait alors aux conseillers d'état de S. M. ayant la garde des sceaux près de sa personne, et les serments se faisaient entre les mains du plus ancien conseiller. Cet ordre fut gardé jusqu'au mois d'Aout 1590, que le roi rendit les sceaux au chancelier de Chiverny, qui les garda jusqu'à son décès.

Du temps du chancelier de Bellièvre, le Roi créa à sa prière, par des lettres en forme d'édit du mois de Décembre 1604, vérifiées au parlement le 14 Mars 1605, un office de garde des sceaux de France, en faveur de Nicolas Brulart, seigneur de Sillery, aux mêmes honneurs, prérogatives, autorités, et pouvoirs des autres gardes des sceaux de France, pour le tenir et exercer en cas d'absence, maladie, ou autre empêchement dudit chancelier, à condition que vacation advenant de l'office de chancelier, il demeurerait joint et uni avec celui de garde des sceaux, sans qu'il fût besoin de prendre de nouvelles lettres de provisions ni de confirmation.

Le sieur Brulart de Sillery prêta serment le 3 Janvier 1605 : on vit alors une chose qui n'avait point encore eu d'exemple ; c'est que le garde des sceaux fut quatre ou cinq mois sans avoir les sceaux, parce que le chancelier les retint jusqu'au voyage que le roi fit en sa province de Limosin. Cependant le garde des sceaux siégeait dans le conseil au-dessous du chancelier, quoiqu'il n'eut point les sceaux. Mais le roi étant arrivé à Tours, fit retirer les sceaux des mains du chancelier, pour les mettre en celles du garde des sceaux, lequel les garda toujours depuis, et en fit la fonction tant que le chancelier vécut, sans souffrir même qu'il reçut les serments des officiers, ni qu'il disposât des offices et autres droits dépendants de la charge de chancelier ; et le chancelier de Bellièvre étant mort en 1607, sa place fut donnée au garde des sceaux.

Pendant que la cour était à Blais au mois de Mai 1616, le chancelier de Sillery ayant pressenti que le sieur du Vair avait été mandé pour le faire garde des sceaux, il remit les sceaux au roi en présence de la reine sa mère, se contentant de supplier S. M. de lui laisser seulement ceux de Navarre, ce qui lui fut accordé. On voit par-là que l'on usait encore alors de sceaux particuliers pour le royaume de Navarre, ce qui ne se pratique plus. Les sceaux de France furent donnés à Guillaume du Vair, évêque de Lizieux, qui avait été premier président au parlement de Provence. Il avait reçu divers commandements du roi pour venir recevoir les sceaux, et s'en était longtemps excusé. Enfin étant venu, le roi lui en fit expédier des lettres en forme d'édit, signées, et visées de la propre main de S. M. et scellées en sa présence, données à Paris au mois de Mai 1616, portant réserve au chancelier de Sillery, sa vie durant, de ses droits, gages, états, pensions, avec création et don audit sieur du Vair d'un état de garde des sceaux de France, pour le tenir et exercer aux honneurs, pouvoirs, prééminences, gages, pensions, droits, dont les gardes des sceaux avaient joui, et qui lui seraient ordonnés et attribués, et de faire toutes fonctions avec pareille autorité que les chanceliers, même de présider en toutes cours de parlements et autres compagnies souveraines, et sur icelles, et sur toutes autres justices, avoir l'oeil et surintendance comme un chancelier, à condition que vacation advenant de l'office de chancelier, il demeurerait uni à celui de garde des sceaux, sans aucunes lettres de confirmation ni de provision ; il en fit le serment entre les mains du roi le 16 du....

Du Vair ayant fait présenter ses lettres au parlement de Paris, elles y furent vérifiées et registrées le 17 Juin 1616, sans approbation de la clause d'y présider, quoique pareille clause y eut été passée autrefois sans difficulté aux offices des gardes des sceaux Bertrandi et de Biragues. Il ne laissa pourtant pas nonobstant cette modification d'y prendre la place des chanceliers aux pieds du roi, au lit de justice tenu le 7 Septembre suivant, lors de l'arrêt de M. le Prince ; d'y recueillir les voix et opinions, et d'y prononcer comme président : mais en entrant dans la grand-chambre avant le roi, il ne se plaça point dans le banc des présidents, il alla tout droit s'asseoir dans la chaire des chanceliers.

Le 25 Novembre suivant, il remit les sceaux au roi ; il ne laissa pas de faire présenter ses lettres de provisions à la chambre des comptes de Paris, pour valider les payements qu'il avait reçus de ses gages. Elles y furent registrées sans approbation de la clause de présider en toutes cours. Les sceaux lui furent rendus le 25 Avril 1617 ; il les garda jusqu'au jour de son décès, arrivé le 3 Aout 1621.

Le même jour qu'il remit les sceaux, c'est-à-dire le 25 Novembre 1616, Claude Mangot, conseiller et secrétaire d'état, fut pourvu de l'office de garde des sceaux de France, comme vacant par la démission volontaire du sieur du Vair, pour le tenir et exercer aux mêmes honneurs, autorités, et droits, dont lui et les autres gardes des sceaux de France avaient joui. Ses provisions contenaient les mêmes clauses que celles de son prédécesseur, à l'exception toutefois du droit de présider au parlement ; et il fut dit que c'était sans diminution des droits, gages, états, et pensions, tant du garde des sceaux du Vair, que du chancelier de Sillery que S. M. voulait leur être continués leur vie durant. Il prêta serment le 26 Novembre, et quelque temps après fit présenter ses lettres au parlement, où elles furent vérifiées le 17 Décembre de la même année, après néanmoins qu'on eut député le doyen du parlement, rapporteur de ces lettres, et quelques autres conseillers, vers le sieur du Vair, pour apprendre de sa bouche la vérité de sa démission.

Le sieur Mangot garda les sceaux jusqu'au 24 Avril 1617 ; le maréchal d'Ancre ayant été tué ce jour-là, le sieur Mangot qui tenait le sceau chez lui, fut mandé au louvre, où il remit les sceaux au roi ; le lendemain le roi les renvoya au sieur du Vair par le sieur de Lomenie secrétaire d'état, avec de nouvelles lettres de déclaration et de jussion datées du 25 du même mois, par lesquelles S. M. déclarait que " son intention était que le sieur du Vair exerçât la charge de garde des sceaux, et en jouit pleinement et entièrement avec tous les honneurs, autorités, etc. à icelle appartenans, en vertu de ses premières lettres de provision, nonobstant toutes autres lettres contraires ; mandant S. M. aux gens de son parlement, chambre des comptes, etc. de faire lire, publier, et registrer, si fait n'avait été, lesdites lettres de déclaration et provision, et d'obéir audit sieur du Vair ès choses touchant ladite charge de garde des sceaux ". Et alors lesdites provisions furent purement et simplement registrées sans modification, pour en jouir suivant lesdites lettres de déclaration, qui furent lues et publiées le dernier Juillet suivant.

Le chancelier de Sillery ayant été rappelé par le roi dans le même mois d'Avril 1617, pour présider dans ses conseils, le garde des sceaux du Vair lui laissa par honneur la réception des serments des conseillers du grand-conseil, et retint la signature des arrêts, conjointement avec lui ; et comme les guerres civiles qui affligeaient alors la France, obligèrent le roi de faire plusieurs voyages dans les provinces les plus éloignées, le garde des sceaux suivait et présidait au conseil qui était à la suite de S. M. et le chancelier qui était demeuré à Paris, présidait au conseil des parties et des finances, sans toutefois avoir eu aucun pouvoir ni commission expresse pour cela, comme il s'était pratiqué autrefois. Les arrêts qui se rendaient dans les conseils tenus à Paris, étaient scellés du sceau de la chancellerie du palais, en l'absence du grand sceau qui était près de S. M. L'union de la couronne de Navarre ayant été faite à celle de France, la charge de chancelier de Navarre fut supprimée ; il est probable que ce fut aussi alors que l'on cessa d'user d'un sceau particulier pour la Navarre.

Au lit de justice tenu par le roi au parlement de Paris le 18 Février 1620, pour la publication de quelques édits, le garde des sceaux du Vair recueillit les opinions, comme il avait fait en 1616. Il fit aussi la même fonction au lit de justice tenu à Rouen le 11 Juillet 1620, et à celui tenu à Bordeaux le 8 Septembre de la même année.

Le garde des sceaux du Vair mourut le 3 Aout 1621, étant à la suite du roi au siège de Clairac. Le sieur Ribier, conseiller d'état, son neveu, s'étant trouvé près de lui, porta les sceaux à Sa Majesté, qui les donna à Charles d'Albert, duc de Luynes, pair et connétable de France, lequel était alors chef du conseil du roi. Il les garda jusqu'à son décès, arrivé le 14 Décembre suivant. Il scellait ordinairement en présence des conseillers d'état qui étaient près de Sa Majesté. L'adresse des lettres qu'on avait coutume de faire au chancelier ou au garde des sceaux, se faisait au connétable, quelquefois avec la qualité de tenant le sceau du roi, ou bien ayant la garde des sceaux du roi ; et d'autres fois sans l'y mettre. Il recevait les serments avec telle plénitude de fonction pour ce regard, qu'un officier qui se trouva à Paris, voulant y prêter serment entre les mains du chancelier de Sillery, fut obligé d'obtenir des lettres, non-seulement de simple relief d'adresse, mais de commission particulière pour recevoir ce serment ; et le danger des chemins pendant la guerre, servit de prétexte pour obtenir ces lettres, et pour dispenser l'impétrant d'aller prêter le serment entre les mains du connétable.

Après la mort du connétable, arrivée le 15 Décembre 1621, le roi tint le sceau en personne, et fit sceller diverses fois en présence de son conseil, jusqu'au 24 du même mois, qu'étant alors à Bordeaux, il donna les sceaux à Meric de Vic, Seigneur d'Ermenonville, conseiller d'état, et intendant de justice en Guienne. Les lettres de don ou provision de l'office de garde des sceaux, vacant par la mort de Guillaume du Vair, sont datées du 24 Décembre 1621. Elles contenaient presque les mêmes clauses que celles dudit du Vair, à l'exception seulement de la clause contenant droit de succéder en la charge de chancelier, vacation avenant, et de celle de présider et avoir la surintendance de la justice du royaume ; où on ajouta que ce serait seulement en l'absence du chancelier de Sillery, auquel S. M. réservait tous les honneurs et prééminences qui lui appartenaient, tout ainsi qu'il en avait joui depuis la promotion dudit du Vair.

Le sieur de Vic conserva les sceaux jusqu'à son décès, qui arriva le 2 Septembre 1622. Les sceaux furent portés au roi par l'abbé du Bec, fils du sieur de Vic. Le roi, en attendant qu'il eut choisi un autre garde des sceaux, commit verbalement les sieurs de Caumartin, de Preaux, de Léon, et d'Aligre, conseillers au conseil d'état ; et les sieurs Godard et Machault, maîtres des requêtes de son hôtel, qui se trouvaient alors à sa suite, pour, quand il faudrait sceller, se transporter au logis du roi, et vaquer à la tenue du sceau, ainsi qu'ils aviseraient pour raison. Lorsqu'ils y étaient arrivés, Galleteau, premier valet-de-chambre du roi, tirait le coffret des sceaux hors les coffres du roi, et le leur portait avec les clés : M. de Caumartin, comme le plus ancien, en faisait l'ouverture, et tenait la plume pour mettre le visa. Le sceau étant levé, on remettait les sceaux dans le coffret, et on le rendait audit Galleteau, avec les clés. Cet ordre s'observa jusqu'au 23 dudit mois. Les conseillers d'état et maîtres des requêtes qui tenaient le sceau, firent demander au roi une commission par des lettres-patentes, pour leur décharge ; mais ils ne purent l'obtenir.

Le 13 du même mois le chancelier de Sillery obtint des lettres-patentes qui furent publiées au sceau le 22, portant qu'il jouirait sa vie durant de tous les honneurs, droits, prérogatives, prééminences, fruits, profits, revenus et émoluments qui appartiennent à la charge de chancelier de France, tout ainsi qu'il faisait lorsqu'il avait la fonction et exercice des sceaux, sans y rien changer ou innover, et spécialement de la nomination, présentation aux offices, tant de la chancellerie de France, que des autres chancelleries établies près les cours et présidiaux ; réception de tous les serments des officiers pourvus par le roi ; foi et hommage, et autres serments que les chanceliers ont accoutumé de recevoir ; droits de bourse, et autres droits dont il jouissait pendant la fonction et exercice des sceaux, encore qu'il en fût pour lors déchargé ; et sans que celui ou ceux auxquels le roi commettrait dans la suite la garde des sceaux, puissent prétendre leur appartenir aucune chose desdits droits, pouvoirs et émoluments, que le roi déclare appartenir à la charge de chancelier de France, privativement à tous autres. L'adresse de ces lettres est : " A nos amés et féaux les conseillers d'état et maîtres des requêtes ordinaires de notre hôtel, et autres tenant les sceaux de la grande et petite chancellerie ".

Le 23 Septembre 1622, le roi donna la garde des sceaux à Louis Lefebvre, sieur de Caumartin, président au grand-conseil. Les lettres de provision de cet office énoncent qu'il était vacant par le décès du garde des sceaux de Vic, et contiennent les mêmes clauses que celles du garde des sceaux du Vair, avec droit de présider en toutes les cours de parlement, grand-conseil, et autres cours souveraines ; avoir l'oeil et la surintendance, comme un chancelier, sur toutes les justices et juridictions du royaume ; et que vacation avenant de l'office de chancelier, il demeurerait joint et uni avec ledit état de garde des sceaux, pour en user par ledit sieur de Caumartin, en la même qualité, titre et dignité, et tout ainsi qu'avaient accoutumé de jouir les autres chanceliers de France, sans qu'il eut besoin de prendre de nouvelles lettres de provision ni de confirmation ; qu'il jouirait dès lors des gages, états et pensions attribués audit office de garde des sceaux, sans diminution toutefois des droits, gages, états et pensions du chancelier de Sillery, que Sa Majesté entendait lui être payés et continués sa vie durant : voulant aussi qu'il jouit des droits réservés par les lettres-patentes du 13 Septembre, dont on a parlé ci-devant, comme ledit chancelier en jouissait avant qu'il eut été déchargé des sceaux.

M. de Caumartin étant mort le 21 Janvier 1623, le même jour les sceaux furent apportés au roi par le président de Boissy, son fils ainé, accompagné de l'évêque d'Amiens, son second fils, et autres parents, le président de Boissy portant la parole. Le roi les fit mettre dans ses coffres par son premier valet-de-chambre, et le lendemain il les renvoya par le sieur de Lomenie, secrétaire d'état, au chancelier de Sillery, sans aucunes nouvelles lettres.

Le 2 Janvier 1624, le chancelier de Sillery ayant appris que le roi se disposait à faire un voyage dans lequel sa santé ne lui permettait pas d'accompagner Sa Majesté, il demanda d'être déchargé de la garde des sceaux, et les renvoya au roi par le sieur de Puisieux son fils, secrétaire d'état. Le roi les donna à son premier valet-de-chambre pour les mettre dans les coffres du roi, dont il avait les clés.

Le 6 du même mois, le roi ordonna au sieur de la Ville-aux-Clercs, secrétaire de ses commandements, d'expédier des provisions de garde des sceaux, le nom en blanc ; et le roi les ayant signées et visées de sa main, les fit remplir de la personne d'Etienne d'Aligre, qui avait été conseiller au grand-conseil, et était pour-lors conseiller d'état et finances, lequel prêta serment entre les mains du roi immédiatement après que ses provisions furent scellées. Ses provisions portaient que c'était pour tenir led. office, aux honneurs, droits, etc. dont les gardes des sceaux de France avaient ci-devant joui, ou qui lui seraient attribués par S. M. et généralement de toutes les fonctions qui dépendaient dudit office, avec pareille autorité et pouvoir que celui dont les chanceliers de France avaient accoutumé d'user et de jouir, même de présider en toutes les cours de parlement, grand-conseil et autres cours souveraines ; pour sur icelles, et toutes autres justices et juridictions du royaume, avoir l'oeil et surintendance, comme un chancelier pouvait et devait faire, à cause de sondit office et dignité : et encore qu'avenant vacation dudit office de chancelier, il demeurerait joint et uni avec ledit état de garde des sceaux, pour en jouir comme les chanceliers de France, sans qu'il eut besoin d'autres lettres de provision ni de confirmation ; sans diminution toutefois des droits, gages, états et pensions du chancelier de Sillery, que S. M. voulut lui être continués sa vie durant.

Le chancelier de Sillery s'était retiré en sa maison de Sillery, suivant l'ordre qu'il en avait reçu du roi le 4 Février 1624 ; il y mourut le premier Octobre suivant : le roi donna le 3 de nouvelles provisions de chancelier à M. d'Aligre, éteignant et supprimant l'office de garde des sceaux dont il était pourvu.

Le premier Juin 1626 le chancelier d'Aligre rendit les sceaux au roi, qui lui ordonna de se retirer en sa maison du Perche, où il demeura jusqu'à son décès. Les sceaux furent donnés le même jour à Michel de Marillac, conseiller d'état et surintendant des finances, lequel prêta serment entre les mains de S. M. Ses provisions portaient création et érection en sa faveur, d'un office de garde des sceaux de France, pour l'exercer aux mêmes honneurs et droits que les autres gardes des sceaux, avec pareille autorité et pouvoir que les chanceliers ; même de présider dans toutes les cours souveraines, pour sur icelles, et toutes autres juridictions, avoir l'oeil et surintendance comme un chancelier ; et que vacation avenant de l'office de chancelier, il fût joint et uni avec ledit état de garde des sceaux, sans qu'il eut besoin d'autres provisions ni confirmations ; sous la réserve néanmoins des gages, droits, états et pensions du sieur d'Aligre, sa vie durant.

Toutes les grandes qualités et les services du sieur de Marillac n'empêchèrent pas ses ennemis d'exciter le roi à lui ôter les sceaux, qu'il avait lui-même souvent voulu remettre. Le 12 Novembre 1630, le roi envoya le sieur de la Ville-aux-Clercs, secrétaire d'état, retirer les sceaux des mains du sieur de Marillac, lequel fut conduit à Caen, puis à Lisieux, et enfin à Châteaudun, où il mourut le 7 Aout 1632.

Deux jours après que les sceaux eurent été ôtés au sieur de Marillac, le roi les donna à Charles de l'Aubespine, marquis de Châteauneuf, commandeur et chancelier de l'ordre du Saint-Esprit, conseiller d'état et finances. Il prêta le serment accoutumé entre les mains du roi. Ses provisions contenaient les mêmes clauses que celles du sieur de Marillac. Etant venu au parlement pour y présider, et les présidents ne s'étant pas levés à son arrivée, le roi, par une lettre adressée au procureur général, déclara que sa volonté était que les présidents se levassent lorsque le garde des sceaux viendrait au parlement. Cet ordre ayant été réïtéré aux présidents de la bouche même du roi, et le garde des sceaux étant entré en la grand'chambre le 12 Aout 1632, avant l'arrivée du roi qui vint tenir son lit de justice, les présidents se levèrent ; mais le premier président lui dit que ce qu'ils en faisaient n'était que par le très-exprès commandement du roi ; que cela n'était pas dû à sa charge, et qu'il en serait fait registre.

Le 25 Février 1633, le sieur de la Vrillière, secrétaire des commandements, eut ordre du roi d'aller retirer les sceaux des mains de M. de Châteauneuf, lequel remit aussi-tôt le coffre où étaient les sceaux ; et M. de la Vrillière l'ayant remis au roi, retourna demander à M. de Châteauneuf la clé du coffre, qu'il avait pendue à son cou : il fut ensuite conduit à Angoulesme.

Pierre Seguier, président au parlement, reçut les sceaux de la main du roi le dernier du même mois. Ses provisions portaient érection et création en sa faveur d'un état et office de garde des sceaux, et toutes les autres clauses que celles des sieurs de Châteauneuf et de Marillac. Après la mort de M. le chancelier d'Aligre, arrivée en 1635, il fut choisi pour le remplacer, et prêta le serment accoutumé le 19 Décembre 1635. Il obtint aussi des lettres d'érection de la baronie de Villemor en duché. Lorsque Louis XIV. fut parvenu à la couronne, les sceaux furent refaits à l'effigie de S. M. par l'ordre du chancelier Seguier, lequel, après qu'ils furent achevés, fit rompre les vieux en plusieurs pièces, et les donna aux chauffes-cire, comme leur appartenans.

Le premier Mars 1650, le sieur de la Vrillière secrétaire d'état, eut ordre du roi d'aller retirer les sceaux des mains du chancelier Seguier ; le lendemain ils furent rendus au sieur de Châteauneuf, qui les avait quittés en 1633. Ils lui furent redemandés par le sieur de la Vrillière le 3 Avril 1651, et donnés le lendemain à Matthieu Molé, premier président au parlement de Paris, qui prêta serment le même jour. Celui-ci les garda jusqu'au 13 dud. mois, qu'ils furent remis au chancelier Seguier, auquel on les retira encore le 7 Septembre suivant ; et le 8 du même mois, le roi fit sceller en sa présence trois lettres ; celle de duc et pair pour le maréchal de Villeroi, son gouverneur ; les provisions de garde des sceaux pour le premier président Molé, et la commission de sur-intendant des finances pour le marquis de la Vieuville. Ensuite il envoya les sceaux à M. Molé, avec de nouvelles provisions, portant " que S. M. ayant par ses lettres patentes, en date du mois d'Avril 1651, pour les causes y contenues, fait don de la charge de garde des sceaux de France au sieur Molé chevalier, premier président en son parlement de Paris, et l'état de ses affaires l'ayant obligé après de les retirer, elle avait depuis ce temps attendu le moment pour les remettre entre ses mains, prenant assurance de sa conduite par tant d'actions passées qui avaient témoigné son courage et sa fidélité ; S. M. déclarait et voulait que ledit sieur Molé jouit de la charge de garde des sceaux de France, et qu'il l'exerçât avec tous les honneurs qui lui étaient dû., conformément à ses lettres patentes précédentes, sans qu'il fût tenu de prêter nouveau serment, attendu celui qu'il avait ci-devant fait entre ses mains ". Il conserva depuis les sceaux jusqu'à sa mort, arrivée le 3 Janvier 1656.

Le lendemain quatre, les sceaux furent rendus au chancelier Seguier, lequel les garda depuis sans aucune interruption jusqu'à son décès, arrivé le 28 Janvier 1672.

Le roi jugea alors à-propos de tenir lui-même le sceau, à l'exemple de ses prédécesseurs, jusqu'à ce qu'il eut fait choix d'une personne qui eut les qualités requises ; et en conséquence il fit un règlement daté du même jour 4 Février 1672, pour la manière dont le sceau serait tenu en sa présence. Il nomma les sieurs d'Aligre, de Seve, Poncet, Boucherat, Pussort et Vaisin, conseillers d'état ordinaires, pour avoir séance et voix délibérative dans ce conseil, avec six maîtres des requêtes, dont S. M. ferait choix au commencement de chaque quartier, et le conseiller du grand-conseil, grand-rapporteur en semestre. Il fut ordonné que les conseillers d'état seraient assis selon leur rang ; les maîtres des requêtes et le grand-rapporteur debout, autour de la chaise de S. M. Il y eut un certain nombre de secrétaires du roi, députés pour assister aux divers sceaux qui furent tenus par S. M. à Saint-Germain et à Versailles. Le premier sceau fut tenu à Saint-Germain le 6 Février 1672, en la chambre du château, où le conseil a coutume de se tenir.

Le roi voulant marcher en personne à la tête de ses armées, nomma le 3 Avril 1672 pour garde des sceaux, messire Etienne d'Aligre second du nom, alors doyen du conseil d'état, lequel fut depuis chancelier. Il était fils d'Etienne d'Aligre premier du nom, aussi chancelier et garde des sceaux de France. Ses provisions contiennent les mêmes clauses que les précédentes, c'est-à-dire création de l'office de garde des sceaux, avec les honneurs et droits dont les précédents garde des sceaux et chanceliers avaient joui, même le droit de présider dans les cours, et d'avoir la sur-intendance sur toute la justice du royaume. Il prêta serment le 24, et ses lettres furent registrées au parlement le 19 Septembre 1672, et à la chambre des comptes le 14 Juin 1673.

MM. Boucherat, de Pontchartrain, Vaisin et d'Aguesseau, qui furent successivement chanceliers après M. d'Aligre, eurent tous les sceaux en même temps qu'ils furent nommés chanceliers. Leurs provisions ne leur donnent néanmoins d'autre titre que celui de chanceliers.

Marc-René de Voyer de Paulmy marquis d'Argenson, conseiller d'état, lieutenant-général de police, chancelier garde des sceaux de l'ordre royal et militaire de S. Louis, fut créé garde des sceaux de France, par édit du mois de Janvier 1718. Il prêta serment entre les mains du roi le 28 du même mois. Il remit les sceaux entre les mains du roi le 7 Juin 1720, qui lui en conserva les honneurs. Les sceaux furent alors rendus à M. le chancelier d'Aguesseau.

Joseph-Jean-Baptiste Fleuriau d'Armenonville secrétaire d'état, fut créé garde des sceaux par lettres du 28 Février 1722. Il prêta serment entre les mains du roi le premier Mars suivant. Il représenta et fit les fonctions de chancelier au sacre du roi, le 25 Octobre 1722 ; se trouva au lit de justice pour la majorité de S. M. Ses provisions de garde des sceaux de France font mention que l'état et office de garde des sceaux était vacant par la mort de M. d'Argenson. Du reste elles sont conformes à celles de ses prédécesseurs, et furent registrées au parlement le 12 Février 1723. Il se trouva encore au lit de justice que le roi tint au parlement de Paris le 8 Juin 1725, pour l'enregistrement de différents édits et déclarations ; remit les sceaux le 15 Aout 1727, et mourut le 27 Novembre 1728.

Germain Louis Chauvelin président à mortier, fut nommé garde des sceaux de France le 17 Aout 1727. Ses provisions contiennent la clause, que vacation arrivant de l'office de chancelier, il demeurerait réuni à celui de garde des sceaux, sans nouvelles provisions et sans nouveau serment. Du reste elles sont conformes à celles de ses prédécesseurs, si ce n'est qu'elles ne détaillent point les droits que le roi lui attribue ; il est dit seulement que c'est pour en jouir aux honneurs, autorités, prééminences et droits, dont les pourvus dudit office ont ci-devant joui et usé. Il prêta serment le 18 du même mois. Le roi lui donna ensuite la charge de secrétaire d'état, avec le département des affaires étrangères, et le fit ministre d'état. Les sceaux lui furent redemandés le 20 Février 1737, lorsqu'il fut exilé à Gros-Bois ; il y eut alors un édit de suppression de la charge de garde des sceaux créée en sa faveur. Le 21 du même mois, ils furent rendus à M. d'Aguesseau chancelier, qui les garda jusqu'au 27 Novembre 1750, qu'il les remit à M. de Saint-Florentin secrétaire d'état.

M. de Lamoignon ayant été nommé chancelier de France le neuf Décembre suivant, M. de Machault d'Arnouville, ministre d'état, conseiller au conseil royal, contrôleur-général des finances, et commandeur des ordres du roi, fut nommé garde des sceaux. Ses provisions portent que c'est pour en jouir avec pareille autorité que les chanceliers ; elles furent scellées par le roi même, qui écrivit de sa main le visa en ces termes. " Visa, LOUIS, pour création de la charge de garde des sceaux de France, en faveur de J. B. de Machault ". Il prêta serment le dix, et donna sa démission le premier Février 1757 ".

La forme du serment des chanceliers et gardes des sceaux de France a changé plusieurs fais.

Celle qui se trouve dans les registres du parlement en l'année 1375, ne contient rien qui soit relatif singulièrement à la garde du sceau.

Mais le serment qui fut prêté par le chancelier du Prat, entre les mains du roi, le 7 Janvier 1514, est remarquable en ce qui concerne la fonction de garde des sceaux. " Quand on vous apportera, est-il dit, à sceller quelque lettre signée par le commandement du roi ; si elle n'est de justice et de raison, vous ne la scellerez point, encore que ledit seigneur le commandât par une ou deux fois : mais viendrez devers icelui seigneur, et lui remontrerez tous les points par lesquels ladite lettre n'est raisonnable ; et après que aura entendu lesdits points, s'il vous commande de la sceller, la scellerez, car lors le péché en sera sur ledit seigneur et non sur vous : exalterez à votre pouvoir les bons, savants, et vertueux personnages, les promouverez et ferez promouvoir aux états et offices de judicature, dont avertirez le roi quand les vacations d'iceux offices arriveront, etc. "

La forme particulière du serment pour la charge et commission de garde des sceaux, est telle :

" Vous jurez Dieu votre créateur, et sur la part que vous prétendez en paradis, que bien et loyaument vous servirez le roi à la garde des sceaux qu'il vous a commise et commet présentement par moi, ayant de lui suffisant pouvoir en cette partie ; que vous garderez et observerez, et ferez garder, observer et entretenir inviolablement les autorités et droits de justice, de sa couronne et de son domaine, sans faire ni souffrir faire aucuns abus, corruptions et malversations, ne autre chose que ce soit ou puisse être, directement ou indirectement, contraire, préjudiciable, ni dommageable à iceux ; que vous n'accorderez, expédierez, ne ferez sceller aucunes lettres inciviles et déraisonnables, ni qui soient contre les commandements et volontés dudit seigneur, ou qui puissent préjudicier à ses droits et autorités, privilèges, franchises et libertés de son royaume ; que vous tiendrez la main à l'observation de ses ordonnances, mandements, édits, et à la punition des transgresseurs et contrevenans à iceux ; que vous ne prendrez ni n'accepterez d'aucun roi, prince, potentat, seigneurie, communauté, ne autre personnage particulier, de quelque qualité et condition qu'il sait, aucuns états, pensions, dons, présents et bienfaits, si ce n'est des grés et consentement dudit seigneur ; et si aucuns vous en avaient jà été promis, vous les quitterez et renoncerez ; et généralement vous ferez, exécuterez, et accomplirez en cette charge et commission de garde des sceaux du roi, en ce qui la concerne et en dépend, tout ce qu'un bon, vrai et loyal chancelier de France, duquel vous tenez le lieu, peut et doit faire pour son devoir en la qualité de sa charge : et ainsi vous le promettez et jurez ".

Le garde des sceaux prête serment entre les mains du roi. Ses provisions lui donnent le titre de chevalier ; elles sont enregistrées au parlement, au grand-conseil, en la chambre des comptes, et en la cour des aides.

Son habillement est le même que celui du chancelier ; et aux Te Deum, il a un siège de la même forme que celui du chancelier, mais placé à sa gauche. Il porte toujours sur lui la clé du sceau.

Il a au-dessus de ses armes le mortier à double galon, semblable à celui du chancelier ; derrière ses armes le manteau et deux masses passées en sautoir, en signe de celles que les huissiers de la chancellerie portent devant lui dans les cérémonies.

Lorsqu'il Ve par la ville ou en voyage, il est toujours accompagné d'un lieutenant de la prevôté de l'hôtel, qu'on appelle le lieutenant du sceau ; et de deux hocquetons ou gardes de la prevôté de l'hôtel, qui ont des charges particulières attachées à la garde du sceau.

Il siège au conseil du roi immédiatement après le chancelier.

Sa fonction à l'égard de la grande-chancellerie, consiste à présider au sceau, lequel se tient chez lui pour les lettres de grande-chancellerie. Il est juge souverain de la forme et du fond de toutes les expéditions que l'on présente au sceau. C'est à lui que l'on fait le rapport de toutes les lettres ; et il dépend de lui de les accorder ou refuser : le scelleur n'appose le sceau sur aucune que de son ordre.

Il a droit de visa sur toutes les lettres qui sont sujettes, appelées lettres de charte, qui sont adressées à tous, présents et à venir.

Il a aussi inspection sur toutes les autres chancelleries établies près des cours, conseils et présidiaux. Il nomme à tous les offices de ces chancelleries ; ses nominations sont intitulées de son nom, signées par lui, contre-signées de son secrétaire, scellées de son sceau et contre-sceaux particuliers. Les principaux officiers lui doivent à leur réception un droit de robe et un droit de serment, pour le serment qu'ils prêtent entre ses mains, ou entre celles de la personne qu'il commet à cet effet sur les lieux. Enfin il a sur ces offices le droit de survivance et le droit de casualité ; au moyen de quoi ceux qui ont les offices sujets à ce droit, lui paient la paulette.

C'est lui qui reçoit le serment des gouverneurs particuliers de toutes les villes du royaume.

C'est lui qui accorde toutes les lettres de pardon, rémission, abolition, commutation de peine, érection en marquisat, comté, baronie, et autres grâces dépendantes du sceau.

Il a le droit de placer les indults sur les collateurs du royaume.

Ceux qui voudront en savoir davantage sur les honneurs, fonctions, droits et prérogatives attachés à la dignité de garde des sceaux, peuvent consulter l'histoire de la chancellerie par Tessereau ; Joly, des offices de France, tome I. liv. II. tit j. Fontanon, tome I. liv. I. tit. j. etc. (A)

GARDES DES SCEAUX DES APANAGES, ou GARDES DES SCEAUX DES FILS ET PETITS-FILS PUINES DE FRANCE, ET PREMIER PRINCE DU SANG POUR LEUR APANAGE, sont des officiers publics créés par le roi pour l'apanage, et pourvus par le prince apanagiste pour garder les sceaux et en faire sceller toutes les provisions, commissions, et autres lettres qui émanent du prince pour son apanage.

Cette fonction de gardes des sceaux est ordinairement jointe à celle de chancelier de l'apanage : néanmoins elle en a été quelquefois séparée, de même que la garde des sceaux de France l'a été plusieurs fois et l'est encore présentement de l'office de chancelier de France.

Les chanceliers et gardes des sceaux des fils et petits-fils de France, prennent tout-à-la-fais le titre de chancelier et garde des sceaux du prince et de son apanage. Il en est de même des chanceliers et gardes des sceaux d'un prince du sang qui est régent du royaume, lequel a droit d'avoir un sceau particulier comme les fils et petits-fils de France : mais les chanceliers et gardes des sceaux des autres princes du sang apanagistes non-régens du royaume, ne prennent point le titre de chancelier et garde des sceaux du prince ; ils sont seulement chanceliers et gardes des sceaux de l'apanage, parce qu'en ce cas le sceau est moins un droit attaché à la personne du prince, qu'un droit dont il jouit à cause de l'apanage.

On a déjà parlé dans le troisième volume de cet ouvrage, des chanceliers d'apanage en général ; c'est pourquoi l'on ne s'attachera ici principalement qu'à ce qui concerne singulièrement la fonction de garde des sceaux de l'apanage, soit lorsque les sceaux sont tenus par le chancelier, soit lorsque la garde en est confiée à quelque autre personne.

L'institution des chanceliers des princes de la maison de France est presque aussi ancienne que la monarchie : on les appelait au commencement custodes annuli ou sigilli ; ce qui fait voir que la garde du sceau du prince était leur principale fonction, et qu'ils ont porté le titre de garde des sceaux avant de porter celui de chancelier. On les appelait aussi référendaires, parce que c'étaient eux qui faisaient le rapport des lettres auxquelles on appliquait le sceau. L'apposition de ce sceau servait à donner l'authenticité à l'acte ; et cette formalité était d'autant plus importante, que pendant longtemps elle tint lieu de signature : c'est pourquoi les princes avaient leur sceau, comme le roi avait le sien.

Sous la première race et pendant une partie de la seconde, lorsque le royaume était partagé entre plusieurs enfants mâles du roi défunt, chacun tenait sa part en souveraineté, et avait son garde-scel ou référendaire, appelé depuis chancelier, et ensuite chancelier garde des sceaux.

Lorsque les puinés cessèrent de prendre leur part à titre de souveraineté, et qu'ils reçurent leur légitime en fiefs et seigneuries, ils avaient comme tous les grands vassaux de la couronne leur chancelier garde des sceaux, dont la fonction s'étendait dans toutes leurs seigneuries.

Enfin lorsque la coutume de donner des apanages aux puinés fut introduite, ce qui arriva, comme on sait, dès le temps de Philippe-Auguste, vers l'an 1206, les princes apanagistes continuèrent d'avoir leur chancelier garde des sceaux. Il est fait mention en plusieurs endroits de ces chanceliers gardes des sceaux des princes apanagistes, dès le milieu du XIVe siècle, entr'autres des chanceliers des comtes de Poitiers, de ceux des comtes d'Anjou et de la Marche, etc.

Le dauphin de France avait aussi son chancelier garde des sceaux pour le Dauphiné, comme les dauphins de Viennais en avaient auparavant. Charles V. étant dauphin de France et duc de Normandie, avait un chancelier particulier pour cette province, comme les anciens ducs de Normandie en avaient eu.

Présentement le dauphin n'ayant plus d'apanage, n'a point de chancelier ni de garde des sceaux ; il en est de même du fils ainé du dauphin et des autres princes du sang qui n'ont point d'apanage : les princesses n'ont point non plus d'apanage ni de chancelier et garde des sceaux, à l'exception de la reine qui a son chancelier garde des sceaux, comme on l'a dit en son lieu. Les grands vassaux de la couronne n'ont plus aussi de chancelier ni de garde des sceaux ; de sorte que les fils et petits-fils de France, les princes du sang apanagistes ou régens du royaume, sont les seuls qui aient comme le roi et la reine leur chancelier et garde des sceaux. Il y a néanmoins quelques églises, académies et autres corps qui ont leur chancelier particulier, mais ces chanceliers sont d'un ordre différent ; et il n'y a pas d'exemple que la garde des sceaux dont ils sont chargés ait jamais été séparée de leur office.

On ne voit point si dans les premiers temps de l'établissement des apanages, les princes apanagistes ont eu des gardes des sceaux autres que leurs chanceliers, c'était ordinairement le chancelier qui portait le scel du prince ; mais comme la garde des sceaux de France sur le modèle de laquelle se règle celle des apanages, a été depuis la troisième race plusieurs fois séparée de l'office de chancelier, il se peut faire aussi que dès l'institution des apanages, le prince ait quelquefois séparé la garde de son scel de l'office de chancelier : on en a trouvé des exemples assez anciens dans la maison d'Orleans. Le sieur Joachim Seiglière de Boisfranc, garde des sceaux de Monsieur, frère du roi Louis XIV. et Thimoleon Gilbert de Seiglière son fils qui était reçu en survivance, ayant eu ordre de s'abstenir de leurs charges, Monsieur tint lui-même son sceau depuis le mois de Septembre jusqu'au 29 Décembre 1687, qu'il donna des provisions de cet office à M. de Bechameil de Nointel ; et assez récemment dans la même maison, les sceaux furent donnés à M. Baille conseiller au grand-conseil, qui les a depuis remis à M. de Silhouette ; et par la démission de celui-ci, ils ont été remis à M. l'abbé de Breteuil, actuellement chancelier garde des sceaux : ainsi ce qui s'est pratiqué dans cette maison en ces occasions et autres semblables, a pu se pratiquer de même longtemps auparavant dans les différentes maisons des princes apanagistes.

Ce qui pourrait d'abord faire douter si l'office de garde des sceaux peut être séparé de celui de chancelier, est que le roi semble n'établir pour l'apanage qu'un seul office, qui anciennement n'était désigné que sous le titre de chancelier, et présentement sous celui de chancelier garde des sceaux ; et comme il n'appartient qu'au roi de créer des offices dans son royaume, le prince apanagiste ne peut pas multiplier ceux que le roi a établis pour l'apanage. Mais comme l'office de chancelier simplement ou de chancelier garde des sceaux, renferme toujours deux fonctions différentes, l'un de chancelier, l'autre de garde des sceaux, et que ces deux fonctions ont été considérées comme deux offices différents, réunis en la personne du chancelier, l'usage a introduit que le prince apanagiste peut, quand bon lui semble, faire exercer ces deux offices ou fonctions par deux personnes différentes.

Les chanceliers et gardes des sceaux des apanages sont des officiers publics créés par le roi ; car lorsqu'il établit par édit ou lettres patentes, un apanage pour quelqu'un des princes de sa maison, il donne ensuite d'autres lettres patentes par lesquelles il crée, érige et établit en titre d'office, les officiers nécessaires pour la direction de l'apanage, dont le premier est le chancelier garde des sceaux ; les autres officiers inférieurs sont un controleur de la chancellerie, deux secrétaires des finances, un audiencier-garde des rôles des offices, un chauffe-cire, et deux huissiers de la chancellerie.

Tous ces officiers sont attachés principalement au sceau, de sorte que quand la garde des sceaux est séparée de l'office de chancelier, c'est le garde des sceaux qui tient les sceaux du prince pour l'apanage, et qui fait sceller tout ce qui concerne l'apanage ; et dans ces cas les autres officiers inférieurs font leurs fonctions près du garde des sceaux.

La première création du chancelier garde des sceaux est ordinairement faite par le même édit qui établit l'apanage, ou par un édit donné dans le même temps : ces offices une fois créés doivent naturellement subsister aussi longtemps que l'apanage pour lequel ils ont été établis ; le décès du prince apanagiste par le moyen duquel sa maison se trouve éteinte, ne devrait pas régulièrement éteindre les offices de chancelier et de garde des sceaux, ni les autres offices créés pour l'apanage, de sorte que ces offices n'auraient pas besoin d'être créés de nouveau pour le prince qui succede à l'apanage ; il est néanmoins d'usage que quand l'apanage passe d'un prince à un autre par succession, sous prétexte que la maison du défunt est éteinte par son décès, le roi par des lettres patentes crée de nouveau un chancelier garde des sceaux, et autres officiers pour l'apanage qui passe à un autre prince : mais par les dernières lettres patentes du mois de Février 1752, portant création d'un chancelier garde des sceaux, et autres officiers pour l'apanage de Louis-Philippe d'Orléans, duc d'Orléans, premier prince du sang, cette création n'a été faite qu'en tant que besoin serait.

Quoique ces différentes créations d'officiers soient faites par le roi, on ne peut pas néanmoins les regarder comme des officiers royaux ; car le roi crée bien l'office, mais ce n'est pas lui qui y pourvait : il laisse au prince apanagiste la nomination, provision et institution du chancelier et garde des sceaux, et des autres officiers attachés au sceau. Chaque prince apanagiste a la liberté de les changer quand bon lui semble ; et s'il continue le même chancelier garde des sceaux, et autres officiers qu'avoir son prédécesseur, il ne laisse pas de leur donner de nouvelles provisions.

On trouve néanmoins que quand Louis XIII. forma un apanage pour Gaston son frère, il pourvut en 1617 M. de Verdun premier président du parlement, de l'office de chancelier de Gaston, qu'on appelait alors duc d'Anjou, et que le 11 Septembre 1625, il donna des provisions du même office à M. le Coigneux président de la chambre des comptes, mais c'était peut-être à cause de la minorité de ce prince ; et l'on voit même que le 25 Septembre 1625, Gaston donna à M. le Coigneux des provisions sur celles du roi, et qu'il continua depuis d'en donner seul. Lorsqu'il y eut des mutations par rapport à cet office, les premiers chanceliers de ce prince ne joignaient point le titre de garde des sceaux à celui de chancelier, quoiqu'ils eussent en effet les sceaux ; mais dans la suite ceux qui remplirent cette place, joignirent les deux titres de chancelier garde des sceaux, à l'imitation des chanceliers de France qui les prennent de même depuis quelque temps lorsqu'ils ont les sceaux : ainsi les sceaux de Gaston étant vacans par la démission de M. de Chavigny ministre d'état, M. de Chaissy par ses provisions du 27 Avril 1644, fut nommé chancelier garde des sceaux.

Il en a été de même pour l'apanage de Monsieur fils de France, établi par édit du mois de Mars 1661. M. de.... comte de Seran qui était son chancelier garde des sceaux, ayant donné sa démission en 1670, le 2 Janvier 1671, il en fut donné des provisions sous le même titre à M. du Housset ; la garde du sceau qui avait été séparée pendant quelque temps de l'office de chancelier, comme on l'a dit ci-devant, y fut réunie en faveur de Gaston J. B. Terrat, suivant ses provisions du 3 Février 1688.

M. Terrat fut aussi chancelier garde des sceaux de M. le duc d'Orléans régent du royaume, jusqu'à son décès arrivé le 19 Mars 1719.

M. le Pelletier de la Houssaye conseiller d'état lui succéda ; il mourut au mois de Septembre 1723. Mre Pierre-Marc de Voyer de Paulmy, comte d'Argenson, grand croix et chancelier de l'ordre royal et militaire de S. Louis, alors lieutenant général de police, succéda en cet emploi à M. de la Houssaye le 20 Septembre, suivant les provisions qui lui en furent données le 24 Septembre 1723.

Après la mort de ce prince arrivée le 2 Décembre 1723, M. d'Argenson fut choisi par Louis duc d'Orleans, premier prince du sang, pour remplir la même place, laquelle sur sa démission fut donnée en 1741 à Mre René-Louis de Voyer de Paulmy d'Argenson, conseiller d'état, son frère. Mre Julien-Louis Bidé de la Grandville conseiller d'état, lui succéda en 1745 ; et sur sa démission qu'il donna au mois de Mars 1748 entre les mains de Louis duc d'Orleans, ce prince n'étant pas pour lors dans le dessein de pourvoir à l'office de chancelier garde des sceaux vacant par ladite démission, donna le 14 du même mois la commission de garde des sceaux à Mre Nicolas Baille, conseiller-honoraire du roi en son grand-conseil. Le prince ayant dans la suite révoqué cette commission, tint lui-même son sceau depuis le 26 Juillet 1748, jusqu'au 6 Aout suivant, qu'il donna une semblable commission à Mre Etienne de Silhouette, maître des requêtes de l'hôtel du roi ; et le 5 Décembre suivant le prince tint encore lui-même son sceau, à l'effet de donner au même Mre Etienne de Silhouette des provisions de l'office de chancelier garde des sceaux de son apanage. Le 15 Mars 1752 Louis-Philippe duc d'Orleans lui donna de nouvelles provisions dudit office, comme il est d'usage d'en donner à tous les officiers de l'apanage, lorsque la maison du prince est renouvellée après le décès de son prédécesseur.

Louis XIV. ayant par des lettres patentes du mois de Juin 1710 établi un apanage pour Charles de France duc de Berry, créa aussi pour lui un office de chancelier garde des sceaux ; cet office subsista peu de temps, le duc de Berry étant décédé sans enfants le 4 Mai 1714.

Les sceaux des princes apanagistes dont la garde est confiée à leur chancelier ou au garde des sceaux, sont de deux sortes, savoir le grand sceau et le contre-scel ou petit sceau ; ils sont l'un et l'autre enfermés dans un coffret couvert de velours, dont le chancelier ou le garde des sceaux a toujours la clé sur lui.

Le grand sceau est ainsi appelé pour le distinguer tant du contre-scel ou petit sceau qui est beaucoup plus petit, que du sceau ou cachet particulier du prince.

Les princes apanagistes usent de cire rouge molle pour leur sceau et contre-sceau, de même que le roi en use pour le Dauphiné.

L'empreinte du grand sceau représente le prince à cheval, armé de pied en cap, et la légende contient ses noms et qualités ; par exemple sur le sceau de M. le duc d'Orleans, il y a Louis-Philippe d'Orléans, duc d'Orléans, de Valais, de Chartres, etc. Il y a aussi ordinairement une inscription sur la tranche du sceau ; par exemple sur celui de M. le duc d'Orleans, on lisait ces mots, vox muta Philippi.

Le contre-scel qui est beaucoup plus petit que le grand sceau est aux armes du prince ; on l'applique au revers du grand sceau ou séparément : il ne faut pas le confondre avec le sceau particulier ou cachet du prince, quoique l'empreinte et la grandeur soient à-peu-près de même. Le cachet ou sceau particulier qui est gardé par le secrétaire des commandements du prince, ne sert que pour les brevets et autres dépêches particulières qui concernent la maison du prince, ou ses terres et seigneuries autres que celles qui composent l'apanage ; il s'applique comme un cachet ordinaire sur le papier ou parchemin, avec un papier qui recouvre la cire ou pâte qui en reçoit l'empreinte, au lieu que le sceau et le contre-scel sont en cire rouge non couverte ; et ces sceaux s'appliquent de manière qu'ils sont pendants.

Le sceau se tient ordinairement un certain jour de chaque semaine chez le chancelier ou chez le garde des sceaux, lorsqu'il y en a un ; chez M. le duc d'Orleans c'est le mercredi.

L'audiencier-garde des rôles fait le rapport des lettres qui sont présentées au sceau.

Le controleur de la chancellerie assiste au sceau.

Le scelleur chauffe-cire applique le sceau lorsque le chancelier ou le garde des sceaux l'ordonne.

On scelle du sceau du prince toutes les provisions et commissions d'office de judicature et autres pour l'apanage, même pour les officiers qui ont le titre d'officiers royaux ; mais pour les cas royaux le prince n'a que la simple nomination des officiers, et sur ces lettres de nomination scellées du sceau de l'apanage, le roi donne à l'officier des provisions.

Quoique les chanceliers et gardes des sceaux des princes apanagistes ne soient établis principalement que pour l'apanage, néanmoins le prince n'a qu'un seul sceau et qu'un même dépositaire de son sceau : le chancelier ou garde des sceaux donne aussi par droit de suite toutes les provisions et commissions nécessaires dans les terres patrimoniales du prince apanagiste.

Il n'est pas d'usage chez les princes apanagistes de sceller sur des lacs de soie, mais seulement en queue de parchemin.

Ce qui est de plus essentiel à remarquer par rapport au sceau des apanages, c'est qu'il est proprement une portion du scel royal, ou du-moins il y est subrogé, et opère le même effet, soit pour l'authenticité et l'autorité, soit pour purger les privilèges et hypothèques qui peuvent être affectés sur des offices, soit royaux, municipaux ou autres de l'apanage : aussi l'audiencier-garde des rôles de la chancellerie de l'apanage est-il consideré comme un officier public dont les registres font foi, tant ceux qu'il tient pour les rôles des offices qui se taxent au conseil, que pour les provisions des offices ; et ceux qu'il tient pour les oppositions qui peuvent être formées entre ses mains, pour raison des offices de l'apanage, soit au sceau ou au titre : ces oppositions se forment au sceau de l'apanage de même qu'au sceau du roi, et elles ont le même effet qui est de conserver le droit de l'opposant. Les huissiers de la chancellerie de l'apanage semblent avoir le caractère nécessaire pour former ces sortes d'oppositions ; cependant pour prévenir toute difficulté sur la capacité de ces officiers, on est dans l'usage de former ces sortes d'oppositions par le ministère des huissiers des conseils du roi, de même que pour les autres oppositions aux offices qui ne sont point de l'apanage.

Les chanceliers gardes des sceaux de l'apanage étant les premiers officiers de l'apanage et de la maison du prince, jouissent en conséquence de tous les privilèges accordés par le roi aux officiers du prince qui sont sur l'état arrêté par le roi ; et en conformité duquel le prince fait son état qui est mis et reçu au greffe de la cour des aides. Ces privilèges sont les mêmes que ceux dont jouissent les officiers, domestiques et commensaux de la maison du roi, comme on peut voir par les lettres patentes du mois de Février 1752, concernant les offices de l'apanage du défunt prince Louis duc d'Orleans ; ceux qui étaient attachés au prince défunt jouissent des mêmes privilèges leur vie durant ; leurs veuves en jouissent pareillement tant qu'elles demeurent en viduité : c'est ce que porte la déclaration du roi du 20 Février 1752, registrée en la cour des aides le 21 Avril 1752, qui conserve aux officiers de feu M. le duc d'Orleans lesdits privilèges, franchises et exemptions, nonobstant qu'ils ne soient pas spécifiés ni déclarés par cette loi. (A)

GARDES DES SCEAUX DES CHANCELLERIES ETABLIES PRES LES COURS, sont les officiers qui sont chargés de la garde du petit sceau, dont on use dans ces chancelleries.

La garde du petit sceau aussi-bien que du grand, appartient naturellement au chancelier ou au garde des sceaux de France, lorsque la garde des sceaux est séparée de l'office de chancelier.

En l'absence du chancelier ou du garde des sceaux de France, s'il y en a un, la garde des petits sceaux des chancelleries établies près les cours souveraines, appartient aux maîtres des requêtes, lorsqu'ils se trouvent dans la ville où la chancellerie est établie.

A Paris, c'est toujours un maître des requêtes qui tient le sceau en la chancellerie du palais : c'est pourquoi il n'y a point de garde des sceaux. Mais comme ces magistrats ne résident point ordinairement dans les autres villes de province où il y a de semblables chancelleries, nos rois ont établi un officier dans chacune de ces chancelleries, pour garder les sceaux en l'absence des maîtres des requêtes ; et ce sont ces officiers auxquels le nom de gardes des sceaux de ces chancelleries est propre.

Il y a eu de ces officiers aussi-tôt que l'on a établi des chancelleries particulières dans les provinces.

Il y en avait un en la chancellerie de Toulouse dès 1490, suivant l'ordonnance de Charles VIII. du mois de Décembre de ladite année, où il est nommé garde-scel.

Les autres gardes des sceaux ont été établis à mesure que l'on a établi chaque chancellerie près des parlements, conseils supérieurs, cours des aides, etc.

Dans celles de Navarre, de Bretagne, de Dauphiné, et de Normandie, ils ont pris la place des chanceliers particuliers de ces chancelleries, qui ont été supprimés.

Ils furent tous supprimés par un édit du mois de Février 1561, portant que le sceau de ces chancelleries serait tenu par le plus ancien conseiller, chacun en son rang, par semaine ou par mois ; ils ont depuis été rétablis par différents édits. Dans les parlements semestres, tels que celui de Bretagne et celui de Metz, il a été créé un second garde-des-sceaux, pour servir l'un et l'autre par semestre ; ce qui a été étendu à toutes les chancelleries près des cours qui sont semestres, par un édit du mois de Juin 1715.

En quelques endroits ces offices furent unis à un office de conseiller de la cour près de laquelle est établie la chancellerie, ou ne peuvent être possédées que par un conseiller.

Par exemple, la déclaration du roi du 20 Janvier 1704, ordonna que l'office de garde-scel du conseil supérieur d'Alsace serait possédé par un conseiller de ce conseil.

L'édit du mois d'Octobre suivant supprima les titres et fonctions des gardes-scels des chancelleries, unis aux offices des conseillers des cours supérieures, et créa un office de garde-scel en chacune des chancelleries établies près desdites cours.

La déclaration du 31 Mars 1705 ordonna que les sceaux de ces chancelleries près les cours, seraient remis aux officiers nommés par M. le chancelier, jusqu'à ce que les officiers de gardes-scels créés par édit du mois d'Octobre 1704, fussent remplis.

Dans quelques villes où il y a deux chancelleries, une près le parlement et une autre près la cour des aides, comme à Rouen et à Bordeaux, il y a ordinairement un garde des sceaux en chaque chancellerie. Cependant l'édit du mois de Juin 1704 a attribué au garde-scel de la chancellerie près le parlement de Rouen, les fonctions de garde-scel de celle près la cour des aides de la même ville, et a desuni cet office de garde-scel de la chancellerie près ladite cour des aides, de l'office de conseiller en icelle.

Quand un maître des requêtes arrive dans une ville où il y a chancellerie, le garde des sceaux est tenu de lui porter les sceaux ; et l'audiencier, contrôleur, ou commis, la clé.

Le maître des requêtes ou le garde des sceaux qui tient le sceau, ne peut sceller que les lettres qui s'expédient ordinairement dans ces chancelleries ; ils ne peuvent sceller aucunes rémissions, si ce n'est pour homicides involontaires, et pour ceux qui sont commis dans une légitime défense de la vie, et quand l'impétrant aura couru risque de la perdre. Voyez CHANCELLERIES PRES LES COURS.

Le garde des sceaux est chargé de tenir la main au sceau et à la taxe des lettres, et de pourvoir aux contestations qui peuvent survenir pendant la tenue du sceau, ou à l'occasion d'icelui : il peut rendre en cette matière des ordonnances et jugements, sauf l'appel devant M. le chancelier ou devant M. le garde des sceaux de France, lorsqu'il y en a un.

L'édit du mois de Juin 1715 attribue aux gardes des sceaux des chancelleries près les cours, la noblesse au premier degré, droit de committimus, exemption de logement de gens de guerre, tutele, curatelle, guet et garde, et de droits seigneuriaux dans la mouvance du roi. (A)

GARDES DES SCEAUX DES CHANCELLERIES PRESIDIALES ou DES PRESIDIAUX, sont des officiers qui ont la garde du sceau dont on scelle toutes les expéditions des chancelleries présidiales et les jugements des présidiaux.

Henri II. ayant établi en 1551 des sièges présidiaux dans plusieurs villes du royaume, avait alors laissé aux greffiers des présidiaux la garde du scel, ordonnés pour sceller les expéditions de ces nouveaux tribunaux : mais comme ces greffiers n'avaient pas communément les connaissances nécessaires pour juger du mérite des requêtes civiles et autres lettres qui leur étaient présentées pour sceller, Henri II. par édit du mois de Décembre 1557, établit des conseillers gardes des sceaux près des présidiaux : il ordonna que quant aux lettres de chancellerie qui ne peuvent être concédées que par S. M. comme requêtes civiles, propositions d'erreur, restitutions en entier, relief d'appel, désertions, anticipations, acquiescements, et autres semblables, qui ont accoutumé être dépêchées ès chancelleries au nom du roi, seraient dépêchées par les gardes des sceaux des présidiaux, signées et expédiées par les secrétaires du roi, et en leur absence par le greffier d'appeaux de chaque siège présidial, ou par leur commis.

Il fut ordonné que ces expéditions seraient scellées de cire jaune, d'un scel qui serait fabriqué aux armes du roi à trois fleurs-de-lis, qui seraient de moindre grandeur que celles des autres chancelleries ; et qu'autour de ce scel serait écrit, le scel royal du siège présidial de la ville de, &c.

La garde de ce scel est attribuée à un conseiller et garde des sceaux créé par cet édit dans chaque présidial, avec les mêmes droits que les autres conseillers.

Il fut en même temps créé un clerc et commis à l'audience, pour sceller les expéditions et recevoir les émoluments provenans dudit scel.

Le roi déclare néanmoins que par l'attribution faite aux gardes des sceaux des présidiaux, il n'entend point empêcher ses sujets de se pourvoir pour les lettres dont ils auront besoin en la grande chancellerie ou en celles établies près les cours de parlement, comme ils faisaient auparavant.

Il déclare aussi que par cet édit il n'entend point préjudicier aux droits, prééminences, et autorités, tant des maîtres des requêtes que des secrétaires du roi, lesquels il veut demeurer dans le même ordre qu'ils ont tenu ci-devant avec les officiers des cours et sièges présidiaux.

Ces gardes des sceaux furent supprimés, ainsi que les clercs commis à l'audience, par un édit du mois de Février 1561, qui permit néanmoins à ceux qui étaient pourvus de ces offices, d'en jouir leur vie durant, à-moins qu'ils ne fussent plutôt remboursés. Le même édit ordonna qu'après la suppression de ces gardes des sceaux par mort ou remboursement, le sceau serait tenu par les lieutenant général, particulier, et conseillers présidiaux, chacun par mois et l'un après l'autre, à commencer par le lieutenant général ; que le lieutenant ou conseillers qui tiendront le sceau, auront la garde du coffre, et le fermier, la clé.

Les troubles survenus dans le royaume furent cause que cet édit fut mal observé ; de sorte que l'usage ne fut pas par-tout uniforme : mais Henri III. par édit du mois de Février 1575, rétablit les conseillers gardes des sceaux, dans les présidiaux près desquels il y a une chancellerie présidiale, conformément à l'édit de 1561.

Enfin par un édit du mois de Juin 1715, tous les offices de conseillers-gardes des sceaux ou de conseillers-gardes-scel, par quelques édits qu'ils eussent été créés, tant dans les chancelleries près les cours, que dans les chancelleries présidiales, furent supprimés ; et par le même édit, il fut créé dans chaque chancellerie présidiale, un nouvel office de conseiller du roi garde-scel, avec le privilège de noblesse au premier degré, en consideration de l'honneur qu'il a d'être dépositaire du sceau du roi, pour en jouir par les pourvus, leurs veuves et descendants, comme les officiers des chancelleries près les cours. L'édit les décharge de toute recherche pour la noblesse ; leur accorde droit de committimus, exemption de logement de gens de guerre, tutele, curatelle, guet et garde.

En conséquence de cet édit, les conseillers-gardes-scel des présidiaux font dans les chancelleries présidiales les mêmes fonctions que les gardes des sceaux des chancelleries établies près les cours, font dans ces chancelleries.

Par un arrêt du conseil du 22 Janvier 1697, ils ont été maintenus dans le droit de sceller tous les actes, sentences, et jugements rendus dans les cas présidiaux. A l'égard des sentences, jugements, et actes des bailliages et sénéchaussées auxquels les présidiaux sont joints, ils doivent être scellés par les conseillers gardes-scels des bailliages et sénéchaussées, suivant l'édit du mois de Novembre 1696. (A)

GARDE DES SCEAUX AUX CONTRATS, sont ceux qui ont la garde du petit sceau dont on scelle les actes passés devant notaires et tabellions royaux.

Anciennement c'était le juge qui scellait les contrats de même que les jugements, parce que les contrats sont censés passés sous son autorité, et que les notaires n'étaient considérés que comme les greffiers du juge pour la juridiction volontaire.

Dans la suite les sceaux furent joints au domaine et donnés à ferme ; au moyen de quoi, le scel des contrats aussi-bien que des jugements, fut remis au fermier du sceau, lequel par lui ou son commis, scellait tous les jugements et contrats.

En 1568, Charles IX. créa dans toutes les juridictions royales des gardes des sceaux, tant pour les contrats que pour les sentences.

Ces offices furent supprimés par édit du mois de Novembre 1696, qui créa en même temps des offices de conseillers-garde-scels, pour faire la même fonction.

Mais par une déclaration du 18 Juin 1697, Louis XIV. desunit les offices et droits de gardes-scels des contrats et actes des notaires et tabellions royaux, de ceux des sentences et actes des juridictions royales, pour être vendus séparément.

L'exécution de cette déclaration ayant souffert plusieurs difficultés de la part des notaires et tabellions royaux, il y eut d'abord une déclaration du mois d'Avril 1697, qui desunit l'office de garde-scel aux contrats de celui de garde-scel aux sentences, pour la ville et prevôté de Paris, et créa vingt notaires au châtelet, qui auraient seuls droit de sceller tous les actes ; mais la communauté acheta ces vingt charges : au moyen de quoi tous les notaires de Paris sont garde-scels, et ont droit de sceller eux-mêmes les actes qu'ils reçoivent.

A l'égard des gardes-scels aux contrats pour les autres villes, par une autre déclaration du 17 Septembre 1697, on rétablit tous les offices de garde-scels des contrats des notaires et tabellions, qui avaient été supprimés par l'édit du mois de Novembre précédent ; à l'exception de ceux de la ville de Paris, qui étaient déjà unis au corps des notaires. Ces offices de garde-scels ainsi rétablis, furent aussi unis au corps des notaires ; et dans les lieux où les notaires ne formaient pas de communauté, le droit de garde-scel fut donné à chaque notaire en particulier : et en conséquence de cette union, la déclaration permet à tous notaires, dans les villes où il y a parlement ou autres sièges présidiaux, de prendre le titre de conseiller du roi garde-scel, soit qu'ils aient acheté les offices en commun ou en particulier ; de sorte que dans les lieux où la communauté n'a pas acheté ces offices, il faut envoyer sceller l'acte chez celui qui est garde-scel. (A)

GARDES-SCELS DES JURISDICTIONS ROYALES ET SUBALTERNES, sont ceux qui ont la garde du petit scel dont les expéditions du tribunal doivent être scellées.

Anciennement chaque juge avait son sceau ou cachet particulier, dont il scellait lui-même tous les jugements et autres actes émanés de sa juridiction, et même les contrats et autres actes que l'on voulait mettre à exécution.

Le châtelet de Paris fut le premier siège qui commença à user du scel royal, du temps de S. Louis.

Il y avait dès-lors au châtelet un officier appelé scelleur, dont la fonction était d'apposer le scel aux jugements et mandements émanés du tribunal ; ce qui subsiste encore présentement.

On donna aussi aux autres sièges royaux des sceaux aux armes du roi, pour sceller tous les jugements et autres actes passés dans le détroit de la juridiction. Mais Charles IX. étant informé que dans plusieurs juridictions royales les juges apposaient encore leurs sceaux, marques, cachets, ou signatures, au lieu du scel royal, ou bien les sceaux des villes, et qu'il se commettait encore d'autres abus, créa par édit du mois de Juin 1568, des gardes des sceaux dans toutes les juridictions royales, excepté dans les chancelleries et présidiaux, pour sceller tous les jugements et contrats que l'on veut mettre à exécution.

Cet édit fut interprêté et confirmé par plusieurs autres des 8 Février 1571, Mai et Décembre 1639, Juin 1640, et autres ; en conséquence desquels il fut établi des gardes des sceaux dans la plupart des juridictions royales.

Depuis, par édit du mois de Novembre 1696, Louis XIV. supprima tous ces offices de gardes-scels, soit qu'ils eussent été établis en conséquence des édits de Juin 1568 et autres postérieurs, ou que lesdits offices ou les titres et fonctions d'iceux, eussent été joints et unis à d'autres offices rétablis ou réunis au domaine du roi ; à l'exception néanmoins des offices de gardes-scels créés depuis l'année 1688 : et au lieu de ces offices de gardes-scels simplement, il créa par le même édit dans toutes les juridictions royales un conseiller du roi garde-scel, pour sceller tous les jugements et autres expéditions, contrats et actes des notaires et tabellions royaux, qui furent joints et attribués au garde-scel, avec attribution des mêmes fonctions, autorités, privilèges, droits, rang, séance, voix délibérative, part aux épices et distribution des procès, que les autres conseillers et officiers des juridictions royales.

Par une déclaration du 18 Juin 1697, les offices et droits de garde-scels des contrats et actes des notaires et tabellions royaux, furent desunis de ceux des sentences et actes des juridictions royales, pour être vendus séparément. Voyez GARDE-SCEL AUX CONTRATS.

Enfin par une autre déclaration du 17 Décembre suivant, Louis XIV. rétablit tous les offices de garde-scels qui étaient établis avant l'édit du mois de Novembre 1696, dans les bailliages, sénéchaussées, vicomtés, prevôtés, vigueries, châtellenies, et autres juridictions royales ordinaires, à l'exception de ceux du châtelet et des autres juridictions de la ville de Paris, pour laquelle l'exécution de l'édit de 1696 fut ordonnée.

La même déclaration ordonna que les propriétaires des anciens offices de garde-scels en jouiraient, comme ils faisaient avant l'édit de 1696, sans être tenus d'acquérir ni de se faire pourvoir, si bon ne leur semblait, des offices de conseillers-garde-scels créés par le même édit de 1696 ; desquels offices de conseillers le roi se réserva de disposer comme il jugerait à-propos, avec faculté néanmoins aux propriétaires des anciens offices de garde-scels, aux compagnies, ou autres particuliers, d'acquérir ces offices de conseillers.

A l'égard des juridictions des provinces et généralités, où les offices et droits de garde-scels n'étaient pas rétablis avant l'édit du mois de Novembre 1696, le roi par la déclaration du 17 Septembre 1697, unit aux corps des juridictions lesdits offices de conseillers-gardes-scels créés par édit du mois de Novembre 1696, avec faculté auxdites juridictions de jouir desdits offices en commun, ou de les vendre, même les droits attachés.

Il a été défendu aux gardes-scels des juridictions royales, par plusieurs règlements, et notamment par une déclaration du 16 Mars 1576, de sceller aucun des actes qui sont du fait des chancelleries établies près des cours ou présidiaux. (A)

GARDE DES COFFRES, ou THRESORIER DE L'ÉPARGNE, (Histoire moderne) c'est un des principaux officiers dans la cour du roi d'Angleterre, immédiatement après le contrôleur ; lequel dans la cour du tapis-verd, et quelquefois ailleurs, a la charge ou l'inspection particulière des autres officiers de la maison, afin qu'ils tiennent une bonne conduite, ou qu'ils fassent avec exactitude les fonctions de leurs offices : c'est lui qui paye leurs gages. Chambers.

GARDES DES FOIRES, officiers établis dans les foires pour en conserver les franchises, et juger des contestations en fait de commerce survenues pendant la durée de ces foires ; on les nomme plus ordinairement juges-conservateurs. Voyez JUGES et CONSERVATEURS. Dictionnaire de Commerce.

GARDES DE NUIT, petits officiers de ville à Paris, commis par les prevôt des marchands et échevins, pour veiller la nuit sur les ports à la conservation des marchandises qui y ont été mises à bord, et répondre à leurs frais des dégats ou dommages qui par leur faute ou négligence seraient arrivés à ces marchandises, pourvu que dans les vingt-quatre heures les propriétaires des effets détournés ou gâtés intentent action contre ces gardes : telle est la disposition de l'ordonnance de la ville de 1672, art. 7. ch. IVe Dictionnaire de Commerce.

GARDE NOIRE, (Commerce) on nomme ainsi à Bordeaux une escouade d'archers qui veille pendant la nuit pour empêcher qu'il n'entre dans la ville, ou qu'il n'en sorte aucune marchandise en fraude ; elle est composée d'un capitaine, d'un lieutenant, et de neuf soldats. Dictionnaire de Commerce.

GARDE-VISITEUR, (Commerce) on appelle de la sorte à Bordeaux un commis qui accompagne le visiteur d'entrée de mer, lorsqu'il Ve faire sa visite sur les navires et barques qui arrivent dans le port de cette ville, et dont il est comme le contrôleur.

Les fonctions du garde visiteur sont, 1°. en accompagnant le visiteur, de faire mention sur son portatif du nom des navires et de celui des maîtres, du lieu d'où ils viennent, et du nombre et qualité des marchandises : 2°. de donner chaque jour au receveur de la comptablie, un état des vaisseaux et barques visités : 3°. de fournir un pareil état aux receveur et contrôleur du convoi des barques de sel, de leur nom, de celui de leurs maîtres, de leur port, et de la quantité et qualité des sels dont elles sont chargées : 4°. de transcrire tous les jours les déclarations qui se font au bureau. Dictionnaire de Commerce.

GARDE, s. f. en terme de Commerce, signifie conservation, durée en un même état, comme dans les phrases suivantes.

Les marchandises sujettes à la corruption ne sont pas de garde : on dit d'un vin faible, qu'il n'est pas de garde.

On appelle aussi dans le commerce, garde-boutique, garde-magasin, une étoffe dont la couleur est éteinte, qui est fripée, piquée de vers, tarée ou hors de mode. Dictionnaire de Commerce.

GARDE, (Commerce) Dans les six corps des marchands de Paris, on appelle maîtres et gardes ceux qui sont élus et choisis parmi les maîtres de chaque corps pour tenir la main à l'exécution des statuts et règlements de chaque corps en particulier, et pour en soutenir les privilèges.

Chez les artisans, il n'y a point de maîtres et gardes, mais simplement des jurés. Voyez JURE. Dictionnaire de Commerce.

GARDE-MAGASIN, (Commerce) celui qui a soin des marchandises renfermées ou déposées dans un magasin. Voyez MAGASIN.

GARDE-MAGASIN, (Art militaire) dans l'Artillerie, c'est un préposé par le grand-maître pour veiller au magasin des armes et des munitions des places, et tenir un état de tout ce qui entre et qui en sort. (Q)

GARDE-CHASSE, (Vénerie) celui qui est chargé de la conservation du gibier dans un canton limité.

Un garde-chasse a deux objets sur lesquels il doit particulièrement veiller, les braconniers et les bêtes carnacières : avec de l'attention et quelquefois de la hardiesse, il arrête les entreprises des uns ; il y a un art particulier à se défaire des autres, qui demande de l'adresse, quelques connaissances, et surtout un goût vif pour les occupations de ce genre. Sans ce gout, il ne serait pas possible qu'un garde-chasse soutint les fatigues, les veilles, et la vigilance minutieuse qu'exige la destruction des animaux ennemis du gibier. Voyez PIEGE.

Les gens qui ont des gardes-chasse, ne peuvent prendre trop de précautions pour qu'ils soient sages et d'une probité à toute épreuve. On ne saurait croire combien de détails sourds de tyrannie s'exercent par eux : ils sont armés et crus sur leur parole, cela est nécessaire pour l'exercice de leurs fonctions. Mais s'ils ne portent pas, dans l'usage qu'ils font de ces droits, l'exactitude jusqu'au dernier scrupule, combien ne sont-ils pas à craindre pour le paysan ? Ils deviennent surtout dangereux, s'ils reconnaissent en leur maître un goût vif pour la chasse : alors ils n'épargnent rien pour flatter en lui une passion qui, comme toutes les autres, voit injustement ce qui la favorise ou ce qui la blesse. Article de M. LE ROI, lieutenant des chasses du parc de Versailles.

GARDES-ÉTALON, (Manège) on appelle de ce nom tous particuliers auquel la garde d'un étalon est confiée, ou qui se chargent eux-mêmes de l'achat et de l'entretien d'un cheval propre à servir les juments, d'un arrondissement quelconque : les uns et les autres jouissent de certains privilèges. Voyez HARAS. (e)

GARDE-MEUBLE, (Manège) lieu de dépôt, et où l'on enferme les selles, les harnais, les couvertures, les émouchoirs, les brides, les licols, les caveçons, etc. et tous les divers instruments qui sont propres au manège, à l'écurie, et nécessaires dans un équipage. Lorsqu'on ne perd point de vue l'objet pour lequel on le destine, on le construit de manière qu'il soit à la portée de tous les besoins. Il faut surtout qu'il soit à l'abri de la chaleur excessive, du grand froid, de l'humidité, et de toutes odeurs fétides ; autrement les cuirs et tous les ouvrages en bois, en métaux et en dorures qu'il contiendra, seront bien-tôt desséchés, gersés, pourris, décolorés, rouillés et changés, quelqu'attention que l'on puisse apporter à leur conservation. On y dispose différemment des armoires ; on y pratique divers arrangements tendants à garantir les meubles de la poussière et des injures des rats, ou autres animaux malfaisants, et dans des temps où l'humidité s'étend, se fait jour et perce par-tout ; on en garantit le garde-meuble, à l'aide d'un feu plus ou moins considérable, ou ce qui convient encore mieux, à l'aide d'un poêle médiocrement chauffé. (e)

GARDE-MEUBLE, (Manège) on appelle de ce nom l'officier auquel on confie le soin et la garde de tous les meubles d'une écurie, d'un manège, et d'un équipage.

Son devoir consiste à tenir un compte fidèle de tout ce qui lui est remis, à faire attention à ce qu'il distribue, à conserver l'état dans lequel les choses lui sont rendues, à n'en recevoir aucunes qui n'aient été parfaitement nettoyées, à faire exactement réparer celles qui ont souffert quelqu'atteinte, à être d'une assiduité extrême, et toujours prêt à fournir ce dont on peut avoir besoin ; enfin, à faire soigneusement arranger ce qu'on lui rapporte, selon l'ordre établi dans le garde-meuble, à la propreté duquel il doit constamment et scrupuleusement veiller. (e)

GARDE, s. f. en termes de Fourbisseur, se dit de la partie qui est auprès de la poignée d'une épée, pour empêcher que la main ne soit offensée par l'ennemi. Voyez ÉPEE et POIGNEE.

GARDE-SALE, (Escrime) Voyez PREVOST.

GARDES, (être en) Escrime. C'est être dans une attitude aussi avantageuse pour se défendre que pour attaquer.

Il y a deux façons de se mettre en garde, qui sont la garde ordinaire ou la garde basse, et la garde haute. Elles se pratiquent toutes deux, suivant les différentes occasions.

GARDE-HAUTE, (Escrime) est celle où l'on tient le poignet plus haut que la pointe.

Façon de se mettre en cette garde : 1°. vous placerez le bras gauche, les pieds et le corps, comme il est enseigné dans la garde ordinaire ; 2°. vous leverez le bras droit, et mettrez le poignet à la hauteur du nœud de l'épaule ; 3°. vous pourrez faire descendre la pointe de votre épée jusqu'au niveau de la ceinture, et jamais plus ; mais il est mieux de la tenir entre l'épaule et la ceinture.

GARDE ORDINAIRE ou GARDE-BASSE, (Escrime) est celle où le poignet est plus bas que la pointe.

Façon de se mettre en cette garde : 1°. tournez la tête et le pied droit en face de l'ennemi ; 2°. portez le talon gauche à deux longueurs de pieds de distance du talon droit ; 3°. mettez le pied gauche perpendiculaire au droit ; 4°. alignez les pieds, de sorte que le droit puisse passer derrière le talon gauche, sans laisser d'intervalle ; 5°. alignez les épaules sur le pied droit, ou ce qui est le même, mettez-les perpendiculaires au pied gauche ; 6°. pliez le jarret gauche en avançant le genou, jusqu'à ce qu'il soit sur l'à-plomb du bout de son pied (ceux qui ont le pied petit, peuvent un peu passer cet à-plomb) ; 7°. portez tout le corps sur le jarret gauche, et enfoncez-le dans les hanches ; 8°. étendez le genou droit sans le roidir, au contraire il faut en avoir l'articulation flexible ; 9°. posez le tronc du corps bien à-plomb, et ne tendez ni le ventre ni le derrière ; 10°. levez le bras gauche, et arrondissez-le, en sorte que la naissance de la main soit au niveau et vis-à-vis le nœud de l'épaule, et la distance de la naissance de la main à ce nœud doit être de la longueur de l'humerus ; 11°. levez le coude à la hauteur de l'oeil pour diminuer le poids du bras ; 12°. avancez la main droite jusqu'à ce que le pouce soit sur l'à-plomb du bout de son pied : 13°. tournez la main droite de façon que le plat de la lame fasse un angle de 45 degrés avec l'horizon ; 14°. mettez le pommeau à hauteur de la ceinture ; 15°. tenez la pointe de votre épée à hauteur du nœud de l'épaule, et jamais plus. Nota. Que les jointures de votre bras soient souples sans être trop pliées.

GARDE-CORPS, en Architecture, c'est une balustrade ou un parquet à hauteur d'appui, ordinairement le long d'un quai, d'un fossé, ou aux côtés d'un pont de pierre. C'est aussi un assemblage de charpente aux bords d'un pont de bois, pour empêcher de tomber dans l'eau. Le mot latin par lequel on exprime le garde-corps, est peribolus. Les ouvriers l'appellent garde-fou.

GARDE-MANGER, en latin cella promptuaria, (Architecture) c'est un petit lieu près d'une cuisine, pour serrer les viandes de la desserte de la table, le gibier, la volaille, etc. Il faut que ce lieu soit sec et muni de quelques tables, corps d'armoires, et autres ustensiles à son usage. Voyez le garde-manger, n°. 14. Planc. XI. Architecture qui est échauffé l'hiver par la cheminée de la cuisine, et l'été rafraichi par la croisée qui donne sous le peristîle ; les provisions que ces sortes de pièces contiennent étant sous la garde du chef de cuisine, il leur faut ménager une issue du côté de la cuisine.

GARDE-MEUBLE, (Architecture) c'est dans une maison une grande pièce ou galerie, le plus souvent dans le comble, où l'on serre les meubles d'été pendant l'hiver, et ceux d'hiver pendant l'été. (P)

GARDE, (Commerce) se dit de certaines membrures ou pièces qui font partie de la balance romaine, autrement dite peson ou crochet. Dans la composition de cette balance, il y a trois sortes de gardes, la garde du crochet, la garde forte, et la garde faible. Voyez BALANCE. Dictionnaire de Commerce.

GARDE-CORDE, terme d'Horlogerie. Voyez GUIDE-CHAINE.

GARDE : les Relieurs appellent garde une bande de parchemin de la longueur du livre qu'ils mettent à moitié en-dedans du carton ; l'autre moitié est entaillé par bandes pour passer sur le dos dans les entre-nerfs où on les colle ; on colle la bande du dedans, lorsque le livre est prêt à dorer : il y en a des deux côtés du livre. Quelquefois on se contente de deux ou trois bandes de parchemin qui passent du carton sur le dos, pour le renforcer et mieux assurer le carton. Voyez ENDOSSER.

GARDES, (Rubanier) ce sont deux bandes de fort papier pliées en trois, de la hauteur du peigne, et qui servent à le tenir fixe dans le battant ; d'ailleurs ces gardes servent encore à garnir les vides qui resteraient aux deux côtés du peigne, et au-travers desquels la navette passerait sans cette précaution. Les gardes ont encore une autre utilité, qui est de recevoir la navette quand elle ne travaille pas ; il y a des ouvriers curieux et propres qui font ces gardes de toîle cirée, dont on mot le ciré en-dehors : ces gardes, outre la propreté et la durée, ont encore l'avantage de tenir les doigts de l'ouvrier dans une fraicheur qui lui est nécessaire surtout en été.

GARDES, (Verrerie) on nomme gardes dans l'art de la Verrerie les morceaux de verre que l'on place perpendiculairement dans la poêle, lorsqu'on procede à la calcination du verre. Ces gardes servent à faire connaître quand l'opération est achevée ; car lorsqu'ils commencent à plier et à fondre par la chaleur, il ne faut plus pousser le feu. Voyez VERRE.

GARDES, termes de Tisserand ; les gardes sont deux morceaux de bois placés aux deux bouts des rots ou peignes, qui assujettissent les broches ou dents et les empêchent de s'écarter. Voyez PEIGNE.

GARDE-MALADE, ou simplement GARDE, s. fém. (Médecine) c'est le nom que l'on donne à des femmes, dont la profession est de garder et soigner les malades dans les maisons particulières où elles sont appelées ; il s'en faut beaucoup que cet état obscur soit indifférent pour la société. En effet ces femmes, par leur habitude et leur expérience dans les cas de maladies, sont plus intelligentes, plus adroites, et infiniment plus propres que toutes autres personnes, à prévenir et soulager les besoins des malades qui leur sont confiés ; elles remplissent auprès d'eux les mêmes fonctions que les infirmiers ou infirmières dans les hôpitaux. Voyez INFIRMIER.